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Carte d'orientation. — Extrait de la carte cantonaJ
,Tr Oi^aÂin,>\ yiur-i^iai>Q .Q*'^^^J - \ / :
Ce^A-
^*.»-:i
COtîÛIR lîIOIAl D'ESCOMPTE
DE PARIS
Société Anonyme, Capital 150 millions de francs
entièrement versés
SIÈGE SOCIAL : 14, rue Bergère | SUCCURSALK : 2, place de l'Opéra
Président du Conseil d'Administration: M. MERCET, o. ^
Directeur général, Administrateur: M. Alexis ROSTAND, O.iJ^
OPERATIONS DU COMP TOIR NATIONAL
Escompte
Le Comptoir National escompte le papier de commerce sur
Paris, la Province et l'Etranger.
Le Comptoir Natioî^al est le seul Etablissement français qui
ait des Agences aux Indes Anglaises, en Australie, en Améri({ue,
à Madagascar, et qui puisse délivrer, pour ces contrées, des lettre.-
de crédit ou de recommandation auprès de ses propres Agence.=;.
Il a aussi des Succursales dans les principales villes de France,
ainsi qu'à Londres, Liverpool, Manchester (Voir page 4).
Recouvrements
Le Comptoir National se charge de l'encaissçment des effets
sur Paris, la France, les Colonies et l'Etranger, à des conditions
qui sont déterminées dans un tarif adressé à toute personne qui
en fait la demande.
Dépôts à Vue
Le Comptoir National reçoit en compte de dépôt, des fonds
qui sont constamment à la disposition des déposants. Il leur
en sert un intérêt actuellement fixé à 3>2 %• Un carnet de chèques
est délivré, sur sa demande, à chaque titulaire de compte.
Dépôts à Écliéance fixe
Le Comptoir National reçoit des fonds à échéance fixe. L'intérêt
de ces dépôts est actuellement fixé :
De 6 mois jusqu'à! an, 2 % - 1 De 18 mois jusqu'à 2 ans 3 %
De 1 an jusqu'à 18 mois 21/2 % | A 2 ans et au delà, . 3 1/2 %
Les bons sont à ordre ou au porteur, au choix du Déposant.
Les intérêts sont représentés par des Bons d'intérêts également à
ordre ou au porteur, payables semestriellement ou annuellement,
suivant les convenances du Déposant.
Renseignements sur les Valeurs
Le Comptoir National possède un service d'Etudes financières
chargéspécialement d'étudier toutes les affaires industrielles, com-
merciales et iinancières, françaises et étrangères, cotées et non
cotées, qui peuvent attirer l'attention des clients du Comptoir Na-
tional qui sont ainsi constamment renseignés sur l'origine et la
marche des affaires qui les intéressent.
_ 2 —
Avances sur Titres
Le Comptoir National consent des avances sur les Rentes
Françaises et Etrangères, sur les Obligations de Chemins de fer,
les valeurs émises par l'État, les villes, les départements, etc.
Délivrance de Chèques, Envois de Fonds
Le Comptoir National délivre, contre provision préalable, des
chèques ou des mandats sur la France ou l'Etranger.
Il se charge de transmettre des ordres de paiement par corres-
pondance et par télégraphe.
Prêts Hypothécaires Maritimes
Le Comptoir National a organisé un service spécial pour les
prêts hypothécaires sur navires français ou francisés. Les demandes
de prêt peuvent être adressées indifféremment, au Siège social, ou
à l'une quelconque des Agences du Comptoir National, en France
ou à l'Etranger.
Location de Coffres-Forts
Le Comptoir National met à la disposition du public, pour la
garde des valeurs, papiers, bijoux, etc., des coffres-forts entiers
ou des compartiments de coffres-forts, au Siège social, 14, rue
Dergère, à la Succursale, 2, place de l'Opéra, à l'Agence A^ 147^
boulevard Saint-Germain, et dans les principales Agences.
TARIF DE LOCATION
MODELES
N» 1
N«3
N« 3
N°4 j
iCoffre-fortentier
DlMExNSIONS
Hauteur Largeur Profond.
0-25
0-65
2-25
0-25
0-65
0-65
1-30
0-50
0-50
0"55
0-50
PRIX
Un Mois
Trois
Mois
100
Six Mois Un An
25 »
40 »
50 »
40
60
100
400
Une clef spéciale unique est remise à chaque locataire. — La
combinaison est faite et changée à son gré par le locataire. — Le
locataire peut seul ouvrir son coffre.
Une serre spéciale est affectée aux caisses, malles, etc., pouvant
contenir de l'argenterie, des objets précieux, dentelles, etc.
Villes d'Eaux, Stations Balnéaires
Le Comptoir National a des Agences dans les principales Villes
d'Eaux : Nice, Cannes, Vichy, Dieppe, TrouviUe-Deauville, Dax,
Royat, leMont-Dore, Bagnères-de-Luchon ; de sorte que les Etran-
gers, les Touristes, des Baigneurs peuvent continuer à s'occuper
d'^iiffaires y)endant leur villégiature. ,
Un service d'informations télégraphiques les tient continuellement
aw courant des nouvelles politiques et financières.
— 8 —
Ordres de Bours*
Le Comptoir National se charge d'exécuter gratuitement, c'est-
à-dire sur simple remboursemenl des frais réclamés par les Agents
de change, les ordres de Bourse que ses clients lui adressent et
dont la couverture lui est faite. Il se charge de l'exécution des ordres
d'achats et de ventes sur toutes les autres places en France et à
l'Etranger, moyennant commission et frais ae transport dés titres.
Valeurs de Placement
Le Comptoir National délivre sur simple demande ei sans aucuiis
frais des Obligations des Chemins de fer de Paris-Lyon-Méditer-
ranée, de l'Est, d'Oi-léans, du Midi, aux mêmes cours que ceux
auxquels les délivrent les Compagnies elles-mêmes.
Il délivre immédiatement à ses guichets les Obligations Ville de
Paris, du Crédit Foncier, etc.
Dépôt de Titres
Le Comptoir National reçoit en dépôt les titres de toute nature,
français ou étrangers, nominatifs ou au porteur, contre un très
modique droit de garde. Les Actions et Parts de Fondateur du
Comptoir National sont exemptées du droit de garde.
Les titres déposés au Comptoir National peuvent être retirés
de 2 heures à 4 heures, le jour même de la demande du retrait.
Dépôts de Titres dans les Agences
Le Comptoir National reçoit également en dépôt dans ses
Agences Etrangères, à Londres notamment^ les titres et valeurs
qu'on peut avoir hors de France. — Les Agences, organisées pour
recevoir les dépots de titres, encaissent les coupons, dont le montant
est payé, sur la demande des déposants, dans l'un des sièges du
Comptoir National, en France ou à l'Etranger.
Garanties
contre les Risques de Remboursement des Titres au pair
IjC Comptoir National se charge de garantir contre les risques
de remboursemenl, les titres cotés au-dessus du pair. Une Notice
contenant les différentes natures de valeurs auxquelles le Comptoir
National peut donner cette garantie est envoyée sur demande.
Lettres de Crédit pour Voyages
Le Comptoir National délivre des lettres de crédit sur tous pays,
ainsi que des lettres de crédit circulaires payables dans le monde entier.
Le Comptoir National a organisé à sa Succursale, 2, place de
l'Opéra (rez-de-chaussée), un service spécial pour les Voyageurs
et le paiement des lettres de crédit émises sur ses Caisses (salons
de lecture et de correspondance, service de réception des lettres des
accréd tés, cabine téléphonique, boîte postale, etc.).
SUCCURSALi:, BUREAUX & AGENCES
SUCCURSALE : 2, place de l'Opéra, Paris.
Bureaux de
A - Boulevard St-Germain, 147
B - Rue (le Rivoli, 108
C - Quai (le la Kapée, 2
D - Rue Rambuleau, 11
E - Rueïurbigo, 16
F - Place de la République, 2i
G - Rue de Flandre, 24
H - Rue du 4-SepleQibre, 2.
I - Boulevard Mag^enta, 84
K - Bout. Richard-Lenoir, 2
L - Rue de Clichy, 86
Quartier dans Paris ^
M - Av. Kléber (Passy), 87
N - Ave'.iue Mac-Mahon, :^5
- Boul. Montparnasse, 71
p - Faubourg St-Anloine, 27
R - Boulevard Saint-Michel, 53
S - Rue Pascal, 2
T - Avenue de Villiers, 1
U - Avenue des Champs-Elysées, 40
V - Avenue d'Orléans, 85
X - Rue du Commerce, 69 (Grenelle >
Y - Faubourg Saiot-Honoré, 124
Bureaux de Banlieue
Enghien-les-Bains,47, Grande-Rue 1 Levallois-Perret,3, Place de la République
ASNIÈRES, 8, rue de Paris [ Charenton, 50, rue de Paris
Neuilly-sur-Seine, 92, Avenue de Neuilly.
Agences
en France
Abbeville
Castres
Issoire
Périgueux
Agen
Cavaillon
Jarnac
Perpignan
Aix-en-Provence
Celle
Lézignan
Reims
Alais
Chagny
Libourue
Remiremoiil
Amiens
Chalon-s-Saône
Lille
Roanne
Angoulême
Cliâleaurenard
Limoges
Roubaix
Arles
Clermonl-Ferrand
Lyon
Rouen
Avignon
Cognac
Maoosque
Royat
Bagnères-dc-Liuiion
Condé-s-Nûireau
Mans (lei
Sainl-Cliamoiid
Bagnols-s-Cèze
Dax
Marseille
Saint-Dié
Beau Caire
Dieppe
Mazamel
Saint-Elienne
Beaune
Dijon
Mont-de--Mar>;\n
Salon
Belfort
Dunkerque
Mont-Doie (li't
Toulouse
Bergerac
Elbeuf
Montpellier
Tourcoing
Béziers
Epinal
Nancy
Trouville-Deauville
Bordeaux
Ferlé-Macé (la)
Nantes
Vichy
Bourboule (la»
Firminy
Narbonne
Villefranche-s-Saône
Gaen
Fiers
Nice
Villeneuve-s-Lot
Calais
Fray
Nimes
Vire
Cannes
Havre (le)
Orange
Carcassonne
Hazebrouck
Orléans
Agences à
l'Étranger
Londres
Melbourne
Tunis
Majunga
Liverpool
Sydney
Sousse
Tamatavt
Manchester
Bombay
Calcutta
San-Francisco
New-Orléans
Sfax
Gabès
Tanger
Tananarivi
Diégo-Suarcï
Parla. - Iiop. C LAMY. 4«i. •-' <U U GhapeU*. U113
Ardouin-Dumazet
31«me Série
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LOMAGNE
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dAçenaisS. ckj^" — *^^v^ o '-'~^ ^%#«iiwyi*#
teIjalouK .o •ÙsOQarorui.rirnbaut'^ n ^ P -^ O •-/ ° ^ cT^' ^
./. ^'^ P^mf^^i^^ ^^'"H'^ Lauzertr\'' M^ntpeiat-. ^ S'ktonm
IMeracît^ . ,..'_ H ^''^^:^3/encej^ ,^4^0 Sl^^ Néqrepelisse
"française Q,— i«_CI^^
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Eauze
1 -1 -, •;'■ Mfleurance,'
PARIS
Bei\gei\-Lev^ault & C^\ Éditeurs
Voyage en France
OUVRAGES DU MÊME AUTEUR
L'Europe centrale et ses réseaux d'Etat. — Un volume ia-i2. 3 fr. 50 c.
(Berger-Levraiilt et C'".)
L'Armée et la Flotte en 1895. — Grandes manœuvres des "Vosges. — L'expé-
dition de Madagascar. — Manœuvres navales. — Un volume in-12, avec nombreuses
cartes. 5 fr. (Berger-Levrault et C'".)
L'Armée et la Flotte en 1894. — Manœuvres navales. — Manœuvres de
Heauee. — Manœuvres de forteresse. — Un volume in-12, illustrations de Paul
LÉONNEC, nombreux croquis et cartes. 5 fr. (Berger-Levrault et C'».)
L'Armée navale en 1893. — L'Escadre russe en Provence. — La Défense
de la Corse. — Un volume in-12, avec 27 croquis ou vues et une carte de la
Corse. 5 fr. (Berger-Levrault et C'«.)
Au Régiment — En Escadre. — Préface de M. Mézières, de l'Académie fran-
çaise. 1894. Un volume grand in-8, avec 350 photographies instantanées de M. Paul
Gers. 16 fr. (Berger-Levrault et C'«.)
Le Colonel Bourras. Suivi du Rapport sur les Opérations du
corps franc des Vosges du colonel bourras. 1892. Brochure in-12, avec un
portrait et couvei-ture illustrée. (Berger-Levrault et C'«.) Épuisé.
Le Nord de la France en 1789. — Flandre. — Artois. — Hainaut. — Un
volume in-12. (Maurice Dreyfous.)
La Frontière du Nord et les défenses belges de la Meuse. — Un volume in-8.
(Beaudoin.)
Une Armée dans les neiges, journal d'un volontaire du corps franc des
Vosges. — Un volume in-8 illustré. (Rouam.)
Études algériennes. — Un volume in-8. (Guillaumin et C'«.)
Les Grandes Manœuvres de 1882 à 1892. — Un volume in-12 par année.
(Baudoin et Rouam.)
Voyage en France. Ouvrage couronné par l'Académie française (prix Montyon
et prix Narcisse Michaut en 1901, décerné à l'auteur du meilleur ouvrage de littéra-
ture française), par la Société des gens de lettres, par la Société de géographie de
Paris et par la Société de géographie commerciale. Série d'élégants volumes in-12,
avec cartes et croquis dans le texte, brochés à 3 fr.SOc. et reliés en percaline à 4 fr.
1" SÉRIE : Le Morvan, le Val de Loire
et le Perche.
2" SÉRIE : Des Alpes mancelles à la Loire
maritime.
3« SÉRIE : Les Iles de l'Atlantique :
I. D'Areachon (île aux Oiseaux) à
Belle-Isle.
4" SÉRIE : Les Iles de l'Atlantique :
II. D'Hoëdie à Ouessant.
5« SÉRIE : Les Iles françaises de la
Manche ; Bret:igne péninsulaire.
6' SÉRIE : Normandie (sauf le pays de
Bray et Dieppe).
7» SÉRIE : Région lyonnaise, Lyon, monts
du Lyonnais et du Forez.
8« SÉRIE : Le Rliône du Léman à la mer,
Dombes, Valromey et Bugey, Bas-
Dauphiné, Savoie rhodanienne, La
Camargue.
9" SÉRIE : Bas-Dauphiné : Viennois, Grai-
sivaudan, Oisans, Diois et Valenti-
nois.
10° SÉRIE : Les Alpes du Léman à la Du-
rance. Nos chasseurs alpins.
11" SÉRIE : Forez, Vivarais septentrional,
Tricastin et Comtat-Venaissin.
12» SÉRIE : Alpes de Provence et Alpes
Maritimes.
13" SÉRIE : La Provence maritime.
14" SÉRIE : La Corse.
15" SÉRIE : Les Charentes et la Plaine
poitevine.
16" SÉRIE : De Vendée en Beauce.
17" SÉRIE : Littoral du pays de Caux,
Vexin, Basse-Picardie.
18" SÉRIE : Région du Nord : I. Flandre
et littoral du Nord.
19" SÉRIE : Région du Nord : II. Artois,
Cambrésis et Hainaut.
20" SÉRIE : Haute -Picardie, Champagne
rémoise et Ardennes.
21" SÉRIE : Haute-Champagne, Bassc-Lor-
22" SÉRIE
23" SÉRIE
24" SÉRIE
25" SÉRIE
26" SÉRIE
27" SÉRIE
Plateau lorrain et Vosges.
Plaine comtoise et Jura.
Haute-Boui-gogne.
Basse-Bourgogne et Sénonais.
Berry et Poitou oriental.
Bourbonnais, Haute-Marche.
28" SÉRIE : Limousin.
29" SÉRIE : Bordelais et Périgord.
30" SÉRIE : Gascogne.
31" SÉRIE : Agenais , Lom^gne et Bas-
Quercy.
32" Série: Haut-Quercy, Haute- Auvergne.
33" SÉRIE : Basse-Auvergne.
Sous presse : 34" Série : Velay, Vivarais méridional, Gévaudan. — 35» Série :
Rouergue et Albigeois. — 36" Série : Les Céveunes méridionales. — 37° SÉRIE : Le
golfe du Lion. — 38" Série : Haut-Languedoc.
En préparation : 39" Série : Pyrénées, partie orientale. — 40" Série : Pyrénées,
partie occidentale. — 41" Série et suivantes : Paris et l'Ile-de-France.
Le prospectus détaillé de la collection est envoyé sur demande.
V
ARDOUIN - DUM AZET
Voyage en France
31= SÉRIE
Agenais — Lomagne — Bas=Quercy
AGENAIS LOMAGNE GAURE
FEZENZAGUET FEZENSAC EAUZAN CONDOMOIS
BAS-QUERCY RIVIERE-VERDUN
(Déparlements de Lot-et-Garonne et de Tarn-et-Garonne^
nord du déparlement du Gers, sud du département du Lotj
parties de la Gironde et de la Haute-Garonne.)
Avec 22 cartes ou croquis
BERGER-LEVRAULT & G^ ÉDITEURS
PARIS
O, EUE DES BEAUX-ARTS
NANCY
18, RUE DBS QLAC]
1903
Tous droite réservés
9
CARTE D'ENSEMBLE DE LA 31^ SERIE
Série
Issigeacp
Dura
aRé'ole ^<3i//J/7 ^:. V^/^real J2f
Seyches ,■.,,■■.■' M.onflannuin^ ^ ^
'r\/~T\ "''Casûllônnès
Série
7.0/?f/<î/7ai///iv
^ ^oy .'■■■ o ck \v
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S O "■■
'Prâyssa's^^
^ r^n/i ^ L3I berlue
Houilles ^ ^Lavardac^Œjc-^On--" ■ i < /y.^o.^/ ^^^Ç>fi ^ ^^-.^
refisse
-d miradoux)
Francsscas ^^W(°J^^'
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Nogppof^ . . Vicjezëas'àc-.j- q' ""■
Jegun
Wleurance;
'^ AlGnàli
-•'^•'•OCo/o^.e S^'
30? Série
Jou5 /es croquis sans indications spéciales compris dans ce volume
sont extraits de la carte d'état-major au ilSoooo^.
VOYAGE EN FRANGE
LA PLAIAE DE LA GARONNE
En amont de La Réole. — La plaine de Garonne. — Meilhan. —
Le sorgho à balai. — Les gavaches de Sainte-Bazeille. —
Marmande. — Une affiche électorale. — Le Mas-d'Agenais. —
Tonneins et la culture du tabac. — Comment on prépare le sol .
— Formantes administratives. — La récolte et le manocage.
Marmande. Juin.
La Réole ' est comme une porte barrant ou
assurant le passage entre deux contrées fort dis-
tinctes. Depuis Bordeaux, on a suivi la Garonne
au sein d'une vallée bien dessinée et, tout à coup,
on voit les collines riveraines s'écarter : la vallée
se fait plaine, large, verte, plantureuse ; le fleuve
y déroule en méandres ses ondes rapides et
I. ag» série du Voyage en France, chapitre XIL
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
2 VOYAGE EN FRANGE.
claires. Il est de plus beaux cadres pour un
grand cours d'eau, il n'est guère de campagnes
aussi somptueuses. Jusqu'au delà d'Agen, sur
près de loooob hectares, cette large bande de
fécondes terres alluviales présente un des plus
opulents tableaux rustiques que puisse offrir
notre pays.
La Garonne frôle rarement la base des col-
lines : quand une de ses boucles vient y toucher
elle ne s'attarde pas, aussitôt le large courant
revient au milieu de la plaine. Ainsi le fleuve
vient heurter la côte abrupte qui porte Meilhan,
petite bourgade dominée par des ruines féodales.
Si la colline est peu élevée, la pente est si raide
que le paysage prend de la grandeur. « Qui voit
Meilhan n'est pas dedans », disait un proverbe,
par allusion à la puissance de la forteresse.
Le canal latéral est établi sur la berge même
de la Garonne. Le bourg domine donc à la fois
le cours d'eau déserté par la navigation — sauf à
la descente — et la voie artificielle revenue à la
vie depuis que l'État, en reprenant l'exploita-
tion, a supprimé les taxes de péage. Un brusque
méandre enserre les campagnes du bourg de
Jusix, fameuses pour leur fertiUté dans ce pays
si fertile. Champs de tabac, de maïs, de sorgho
à balais, prairies pacagées par un admirable
LA PLAINE DE LA GARONNE. 3
bétail de race garonnaise sont un perpétuel en-
chantement pour le promeneur épris des choses
rustiques.
Échelle au ijS'iOOOO'
Peu de villages au bord de la Garonne, dont
les fureurs ont trop souvent amené des ruines ;
les habitations sont plus nombreuses sur les hau-
teurs. Là, sans inquiétude, de johs centres con-
4 VOYAGE EN FRANCE.
templent le sinueux ruban des eaux étincelantes
tracé au milieu des vertes campagnes. L'un
d'eux, Marcellus, dont le château a grand carac-
tère, possède une petite industrie inattendue en
un tel milieu : on y fait des boutons de nacre.
Un pont franchit le fleuve au village de Cou-
thures, entouré de champs de sorgho. Les tiges
et les panicules sont utilisés sur place à la fabri-
cation des balais, industrie fort active aux bords
de la Garonne '. La route va rejoindre à Sainte-
Bazeilles les voies maîtresses de la vallée : che-
min de fer de Cette et chaussée de Toulouse.
Le bourg où se fait la jonction est fort heu-
reusement situé, dans la plaine de cultures
coupées de joualles et dominée par des pentes
couvertes de vignes. Une flèche dentelée s'élance
au-dessus du clocher de l'église, charmant édi-
fice de la Renaissance. L'humble ville ne touche
pas à la Garonne, mais un ruisseau la borde,
fait de sources, qui sont peut-être dues à des
infiltrations ; il porte ensuite ses vives eaux à la
petite rivière descendue des collines de Cambes
et de Puisserampion, couvertes de vergers de
pruniers.
Sainte-Bazeille, appelée aussi Sainte-Bazeille-
Voyez pages i8o et suivantes (Grisolles).
LA PLAINE DE LA GARONNE. O
en-Bazadais, appartenait à la région gasconne
de Bazas, Très vieille ville, elle fut ruinée parles
guerres et les épidémies. Dans les premières an-
nées du XVI* siècle, le roi de Navarre, seigneur
d'Albret, la repeupla avec le reste du pays gui
lui appartenait jusgu'au Drot, en faisant appel
à des colons du nord : Saintongeais, Poitevins,
Angevins. Ces nouveaux venus, dont l'allure et
le langage à'oil ressemblaient si peu à ceux des
Gascons plus petits, plus vifs et gais, reçurent
des populations méridionales le nom de gava-
ches. Le nombre en fut considérable, puisgue,
du Drot à la Dordogne, toute une région, dont le
centre paraît être Gastelmoron-sur-Drot, a reçu
le nom fort expressif de Gavacherie. Même au-
jourd'hui, après cing siècles, les gavaches ont
gardé leur accent traînant et une partie des
expressions des pays à'oil. Ils ne se sont pas
mêlés à leurs voisins, on les reconnaît à leur sta-
ture plus forte, leurs traits plus lymphatigues,
leurs cheveux lisses ; les femmes, les jeunes
filles surtout, n'ont plus la joliesse et les yeux
vifs des Gasconnes et des Agenaises.
La ville principale de la vallée, Marmande,
n'a pas été peuplée par cet élément, car elle
n'appartenait pas à l'Albret ; comme le reste de
la Guyenne, elle était à la Couronne depuis l'ex-
6 VOYAGE EN FRANCE.
pulsion des Anglais. Un des rois d'Angleterre,
Richard Cœur de Lion, la fonda sur l'emplace-
ment d'une ville détruite ; c'est une bastide
comme tant d'autres cités de la contrée, mais
elle n'a gardé l'aspect régulier de ces villes
neuves que dans sa partie orientale ; ailleurs, elle
s'est agrandie avec moins de géométrie et a fini
par remplir un demi-cercle dans une ceinture
de remparts aujourd'hui disparus; en i8i4j ces
murs jouèrent un rôle dans la lutte contre l'ar-
mée de Wellington. Huit cents soldats qui
avaient perdu leurs régiments s'y groupèrent et,
malgré la restauration de Louis XVIII, y tinrent
pendant un mois contre une division anglaise.
Les murailles qui permirent cette résistance
héroïque et désespérée sont tombées ; sur leur
emplacement est un large boulevard où les cafés
et les hôtels mettent beaucoup d'animation, aux
abords de la gare surtout. La démolition a
donné de l'air à cette vieille cité, jadis habitée
par une bourgeoisie opulente. Ces promenades
et les deux rues principales, se coupant en croix,
sont plus vivantes qu'on ne le supposerait
d'après le chiffre de la population : 7 000 âmes à
peine dans l'agglomération \ ^^lais les autres voies
I. La commune comprend 9878 habitants.
LA PLAINE DE LA GARONNE. 7
sont étroites et mal alignées, malgré la régula-
rité du plan ; les maisons sont en pauvres maté-
riaux.
L'église, en dépit des mutilations, est un inté-
ressant édifice dont certaines parties remontent
au xn' siècle. Le cloître, de la Renaissance,
doit son charme à sa dégradation même ; ses
arceaux, supportés par des pilastres à chapi-
teaux, ont été envahis par la végétation arbus-
tive. Il ouvre sur une terrasse plantée d'arbres
et dominant la vallée verdoyante. Lorsque Mar-
mande fut rebâtie par les Anglais, la Garonne
baignait le pied de cette terrasse et formait ainsi
le fossé de la place. Le fleuve s'est éloigné dans
la plaine et décrit une grande courbe pour
venir toucher encore un angle de la ville, avant
de reprendre son cours solitaire entre les sau-
laies et les prés : c'est là que le pont suspendu
a été jeté. L'ancien lit du fleuve est oblitéré,
mais un petit affluent, le Trec, s'est tracé un
sillon dans ces terres alluviales et remplace la
Garonne au-dessous de Marmande où il finit.
Cette rivière est fort poissonneuse, à en juger
par le nombre de pêcheurs qui la bordent au-
jourd'hui.
Le pont et l'égHse constituent à peu près toute
la partie monumentale de la ville. La sous-pré-
8 VOYAGE EN FRANCE.
fecture occupe un petit hôtel précédé d\ine cour
plantée de magnolias et voisine d'une chapelle
de la Renaissance.
Marmande est commerçante. Une affiche élec-
torale me donne une idée de son activité écono-
mique. « Citoyens, dit un candidat dont un ad-
versaire a lacéré la signature, vous vendez mal
vos vins, vos prunes, votre blé »
C'est tout ce qui reste, l'auteur de la procla-
mation devait sans doute promettre que les blés
de la plaine, les pruniers des collines, les beaux
vignobles des aimables coteaux de Beaupuy et
de Virazeil connaîtraient une nouvelle ère de
splendeur s'il était élu. Il n'a pas abordé la
question des bouilleurs de cru, sans doute parce
qu'il y a beau temps que l'eau-de-vie de Mar-
mande, jadis réputée et obtenue surtout dans la
vallée du Trec, ne se distille plus ou ne se dis-
tille guère. Le trafic des fruits et primeurs, celui
des prunes d'Agen, ont remplacé cette industrie
rurale.
En amont de Marmande, la plaine est couverte
d'une multitude d'habitations isolées dépendant
de petits centres communaux composés à peine
de l'église et d'une poignée de maisons. Seul
Fauillet a quelque apparence de bourg, mais il
LA PL.AJNE DE LA GARONNE. 9
se dresse sur un léger ressaut de la féconde
plaine dont le ruisseau du Tolzat baigne le pied.
Les groupes d'habitations les plus considérables
sont demeurés sur les collines ; ils étaient à la
fois hors des atteintes du fleuve en furie et un
peu à l'abri des bandes armées. Ces belles hau-
teurs, bien dessinées et découpées sur la rive
droite en falaise régulière, ont offert leurs escar- -
pements comme protection ; les cités riveraines
de la Garonne sont nées plus tard et se sont
accrues à mesure que les guerres devenaient
moins fréquentes. Les Romains choisirent pour
site d'une de leurs villes le plateau étendu entre
l'Avance et la Garonne. Des ruines ont été re-
connues sur de vastes espaces, près desquels
la mignonne bourgade du Mas-d'Agenais occupe
un bien étroit territoire, entre le fleuve et une
forêt de chênes. On ne semble pas avoir iden-
tifié la cité romaine, mais les débris retrouvés et
ceux employés dans la construction de l'église
en disent la splendeur.
De cette terrasse, la vue est superbe sur la
plaine, en ce moment jaunissante, mais que je
vis en mai dans toute sa splendeur. Les mois-
sons sont coupées de joualles de vignes d'un
aspect parfois singulier ; en guise d'échalas, on
se sert de rameaux de saules qui souvent émet-
10 VOYAGE EN FRANCE.
tent des pousses vertes et deviennent un petit
arbre auquel le sarment s'enroule. Le labour est
fait par des bœufs d'un pelage fauve, doux et
brillant ; ces animaux accentuent le caractère
rustique et paisible du tableau.
A rautre extrémité de la plaine, les collines,
plus mouvementées et hautes, sont tapissées de
vignes ; à leur pied, les pruniers forment des
plantations régulières, les cerisiers aussi sont
nombreux; beaucoup de bosquets de petits ar-
bres parsèment ces campagnes heureuses. En
août, les maïs montrent leurs panicules ; le tabac
aux grandes feuilles d'un vert magnifique couvre
de vastes champs, auxquels on ne reproche que
Talignement trop absolu. L'herbe à Nicot, comme
on l'appela jadis, est ici dans son habitat pré-
féré, nulle part en France elle ne montre autant
de puissance de végétation.
Le tabac est cultivé de longue date dans la val-
lée de la Garonne, les premiers essais de planta-
tions en grand ont été faits autour de Tonneins
et de Clairac; aujourd'hui encore ces deux villes,
puis Aiguillon et Port-Sainte-Marie, sont au
centre des principales cultures ; mais on plante
partout le tabac sur les deux rives du fleuve et
du Lot.
Tonneins est le cœur de cette production ; de
LA PLAINE DE LA GARONNE. Il
tous temps, ses tabacs furent célèbres, de bonne
Iieure une manufacture y fut installée ; celle-ci
est aujourd'hui une des plus considérables de
France, sans elle la petite ville retomberait à
l'état de pauvre bourg ; une grande partie de la
population y est employée, des femmes surtout.
La ville n'a guère d'aspect, sauf sur une prome-
nade et au bord du fleuve. Composée jadis de
deux cités jumelles que fît détruire Louis XIII,
elle a ressuscité sur le même plan. Jusqu'aux
premières années du siècle, on la disait com-
posée de deux « bourgs ». Aujourd'hui, la fu-
sion est faite, mais l'aspect général reste celui
d'une médiocre bourgade ^ Sur le fleuve, la
ville couronne des falaises d'un grès grossier,
jaunâtre, veiné de rouge ; de hautes maisons
s'étagent sur ces parois et constituent un en-
semble assez pittoresque.
Le climat est tiède, si doux qu'un jardin de
l'avenue de la gare présente au passant un oli-
vier et un myrte croissant en pleine terre. Ce
quartier n'est pas sans élégance, il possède de
jolies constructions.
Comme tous les centres de cette plaine, Ton-
1. Population totale 68oa habitants, agglomérée 463o ; il y a
décadence, car on compta plus de 8000 âmes à Tonneins.
12 VOYAGE EN FRANCE.
neiiis fait un grand commerce de prunes et de
pruneaux ; elle fabrique des sandales ou espa-
drilles, des machines agricoles, des poids et me-
sures, mais sa principale industrie reste toujours
le tabac. Les produits de sa manufacture ont de
la réputation, au point que la plupart des bu-
reaux de tabac de la ville font des expéditions à
une clientèle du dehors.
Autour de Tonneins, de chaque côté du fleuve,
les champs de tabac couvrent de grands espaces,
ils seraient continus s'il ne fallait assurer l'asso-
lement. Cette plaine alluviale n'est pas seule-
ment favorable au tabac par sa fertilité, elle l'est
aussi parce qu'elle est dans la zone du globe où
la plante se plaît le mieux ; on a remarqué que
l'espace compris entre le [\2^ et le 4^^ degré de
latitude lui est le plus favorable. « Or cette zone,
fait observer M. Heuzé % comprend le Maryland
et la Virginie, le Lot et le Lot-et-Garonne, con-
trées où la chaleur est assez élevée pour que les
plantes puissent mûrir avant les froids d'au-
tomne et fournir des tabacs corsés et ayant une
odeur pénétrante et agréable. » Des deux dé-
partements, le Lot est celui qui donne les feuilles
les plus appréciées ; le Lot-et-Garonne l'emporte
Les plantes indasirielles. (Librairie de la maison rustique.)
LA PLALNE DE LA GARONNE. l3
pour la surface consacrée à la culture. Celle-ci
occupe 3419 hectares, tandis que le Lot en a
2 100 seulement, mais les terrains propices
n'existent dans le haut Quercy que sur le bord
des rivières, les plateaux sont des causses
arides.
Le Lot-et-Garonne, la vallée de la Garonne
surtout, vient en tête des départements pour le
nombre d'hectares en tabac, suivi de près par
la Dordogne avec 3 3oo hectares. Par contre la
valeur moyenne du quintal est de 106 fr. 54 c.
dans le Lot et seulement 99 fr. 70 c. dans le
Lot-et-Garonne ; à ce point de vue, ce départe-
ment est légèrement dépassé par la Côte-d'Or et
le Nord, où le prix du quintal est de 100 fr.
Ces trois départements limitrophes : Dordo-
gne, Lot et Lot-et-Garonne, font plus de tabac
que les vingt autres autorisés à cette culture.
En 1900, ils avaient couvert ensemble 9819 hec-
tares et la France entière 17673 hectares. Si
l'on ajoute à ces chiffres les i 396 hectares de la
Gironde, on voit que la province de Guyenne est
de beaucoup le plus grand pourvoyeur de nos
manufactures nationales.
C'est une véritable source de bien-être pour
les populations du Sud-Ouest. Sans le tabac et
la culture fruitière, la dépopulation, si consi-
l4 VOYAGE EN FRANCE.
dérable déjà, serait autrement navrante. Et
pourtant elle est excessive.
Mais le tabac est d'un excellent et sûr revenu ;
aussi, en dépit des règlements compliqués et sé-
vères dont il est l'objet, le nombre des planteurs
s'accroît-il sans cesse.
Les habitants des contrées où cette culture
est inconnue ne s'imaginent guère une régle-
mentation aussi étroite, avant-goût de ce que
donnerait le communisme s'il était jamais appli-
qué. Il n'est peut-être pas sans intérêt de si-
gnaler à grands traits comment se fait une récolte
entourée de prescriptions si minutieuses.
En dehors des départements autorisés d'une
façon définitive ou à titre d'essai à planter du
tabac, nul ne peut songer utiliser ainsi son
terrain. Encore le cultivateur doit-il être fermier
ou propriétaire dans une des communes dont le
préfet a fait publier la liste.
Ceci n'est que le point de départ :
Chaque planteur ne peut, travailler moins de
vingt ares. 11 est obligé de faire une déclaration
en produisant un certificat de solvabilité ; il ne
cultivera en tabac que les pièces de terre dé-
clarées et en couvrira au moins les quatre cin-
quièmes ; la récolte faite, il livre à la régie tout
LA PLAINE DE LA GARONNE. l5
le tabac recueilli et cela dans un magasin
qui lui est indiqué. Ce n'est pas tout, le plan-
teur doit autoriser l'accès de son habitation :
maison, magasin, séchoir, aux employés do
la régie, depuis le lever jusqu'au coucher du
soleil.
Des pénalités très sévères sont édictées contre
ceux qui auront enfreint ce règlement. La moin-
dre est le retrait du permis de culture. Cette
dernière mesure peut s'appliquer en outre à
tous ceux qui ont été pris en fraude ou en con-
travention, ou qui, pendant trois années, auront
produit des tabacs de qualités inférieures. Par
là, on entend des récoltes dont le prix moyen
serait de lo p. loo au-dessous du prix moyen
général.
Ce n'est pas fini, et même on ne fait que com-
mencer! Dès les ^emis, le cultivateur est sous la
surveillance de la régie : l'exposition des plan-
ches, la façon de les garantir du froid, la quan-
tité de semence, l'assainissement du sol, tout
est soumis à l'inspection.
Enfin, en mai ou en juin, suivant le départe-
ment, on commence à planter, mais à des dates
administrativement fixées selon le climat : dans
le Lot, il faut avoir terminé avant le lo juin,
dans le Lot-et-Garonne avant le 25. Si la saison
l6 VOYAGE EN FRANCE.
a été mauvaise, une autorisation du préfet est
nécessaire pour prolonger le délai.
On ne plante pas la quantité que l'on veut, le
nombre de pieds est rigoureusement fixé, et
cela varie fort. Tandis que le Nord et le Pas-de-
Calais, par exemple, peuvent disposer 4o ooo
plants par hectare, les deux départements du
Ouercy ne peuvent en mettre que loooo. 11 y
a cependant une tolérance permettant un cin-
quième en plus ou un cinquième en moins. Si
la régie n'intervient pas dans la préparation du
sol et dans la répartition de l'engrais, la dispo-
sition même de la plantation est minutieusement
réglée : il faut la faire en quinconce, au cor-
deau, il ne doit y avoir aucune lacune dans les
rangées. Il faut remplacer les pieds mal confor-
més ou qui ont péri au début, mais quand le
premier inventaire des plants a été fait, toute
replantation est interdite. En cas de contraven-
tion, les pieds ajoutés sont détruits par les soins
de la régie.
Quant aux porte-graines, les planteurs ne peu-
vent en avoir plus de 26 par 10 000 pieds de
tabac.
Je passe sur les labours et le buttage, qui se
poursuivent jusqu'au mois de septembre, pour
revenir aux formalités de la régie.
LA PLAINE DE LA GARONNE. I7
La première est l'inventaire ; il a lieu en juillet,
les plantations sont mesurées de façon à con-
naître par une simple opération d'arithmétique
le nombre des pieds contenus sur les surfaces
régulières. Ceux qui sont dans des pointes sont
comptés plant par plant. Au cas où il y aurait
un excédent, soit sur l'étendue de terre décla-
rée, soit sur le nombre de tiges, le planteur est
puni d'une amende de 26 fr. par pied d'excédent.
Voici un moment le cultivateur tranquille,
mais bientôt il lui faut écimer la plante, c'est-
à-dire couper le sommet de la tige. La date
de cette opération est fixée par arrêtés préfec-
toraux. Dans le Quercy, on doit avoir terminé
le i5 août. L'écimage a non seulement pour but
de donner de la vigueur à la plante, mais aussi
de maintenir à celle-ci le nombre de feuilles ré-
glementaires. Dans le Nord, on peut laisser de
six à dix feuilles, dans le Lot et le Lot-et-Ga-
ronne, le maximum est de neuf. Je passe sur
d'autres prescriptions concernant l'enlèvement
des feuilles basses et sur Tébourgeonnement des
jets latéraux que le cultivateur est obligé d'en-
fouir au pied de la plante.
Trois à quatre semaines avant la maturité,
les employés de la régie viennent s'assurer que
ces travaux ont été faits et procèdent au recen-
VOTAGE EN FRANCE. — XXXI.
l8 VOYAGE EN FRANCE.
sèment des feuilles : on tire dans une direction
quelconque du champ une ligne comprenant
100,200 ou 3oo pieds au plus. Sur cette ligne on
compte les feuilles d'un certain nombre de plan-
tes. La moyenne obtenue est multijdiée par le
nombre total des pieds de tabac.
En Quercy, la récolte se fait de bonne heure,
dès le 25 août, trois mois après la plantation,
un mois avant le moment où la récolte se fera
dans le Nord. La cueillette n'a pas lieu en même
temps sur toutes les feuilles d'un pied, elles
sont détachées au fur et à mesure que l'on en
reconnaît la maturité ; dans la Guyenne, celle-ci
est assez régulière pour qu'on puisse couper les
tiges au lieu de cueillir partiellement.
Les feuilles détachées de la plante sont dessé-
chées après avoir été disposées en guirlandes, la
tige étant enfilée par une ficelle à Faide d'une
grosse aiguille. Ces guirlandes sont ensuite
mises à la pente, c'est-à-dire placées dans des
séchoirs ou dans des hangars ; quand il s'agit
de tiges, les pieds sont suspendus, la partie
supérieure en bas, aux chevrons des greniers
ou aux poutres des hangars. La dessiccation de-
mande beaucoup de soins et d'attention. Enfin,
quand le tabac est arrivé au degré de siccité
voulu, on effeuille les tiges et on les dispose,
LA PLAINE DE LA GARONNE. IC)
selon la qualité, la couleur, la grandeur et la lar-
geur, en tas qui sont au nombre de huit : dans
chaque tas, on prend ensuite un nombre de
feuilles déterminé par l'administration et Ton en
forme des })etits paquets ou nianoques. La nia-
noque, en Ouercy, comprend seulement vingt
feuilles. Cela s'appelle le manocage.
Les manoques sont placées en tas et compri-
mées par des planches, de façon à faire subir au
tabac une sorte de fermentation qui lui donne
plus de teinte et de parfum. Il faut un mois ou
six semaines. Pendant tout ce temps, il importe
d'éviter une trop grande chaleur. Le thermo-
mètre permet de ne pas laisser dépasser trente
degrés.
Enfin, le moment est venu où le planteur va
livrer ses manoques. Il les réunit en balles com-
prenant un nombre déterminé de ces petits
paquets : 200 en Périgord, 260 en Ouercy. Un
arrêté du préfet donne la date à laquelle les pro-
ducteurs devront se rendre aux magasins : dans
le Lot et le Lot-et-Garonne, cette date est entre
le I*' et le 3o janvier. Des règlements disent
comment doit être chargé le tabac. Aux maga-
sins a lieu un classement qui permettra d'établir
les prix à allouer ; mais quand cela est fini, le
planteur touche immédiatement son argent. La
20 VOYAGE EN FRANCE.
base est très variable, on la fixe selon que le
tabac est de surchoix, de première, deuxième
ou troisième qualité ou non marchand.
Gomme on le voit, la culture du tabac repré-
sente une sujétion constante pour le planteur,
mais les avantages en sont tels que celui-ci ac-
cepte facilement ce contrôle de Pautorité et
nombre de départements demandent à leur tour
à pouvoir participer à cette culture.
II
LA VALLEE DU DROT
Le vallon du Trec. — Les pruniers et les chenilles fileuses. —
Autour de Seyches. — Lauzun et son duché. — La Sauvetat.
— Eymet. — En Périgord. — Au long du Drot. — Duras. —
Monségur. — En Gavacherie. — Gastelmoron-d'AIbret . — De
Monségur à La Réole.
La Réole. Juin.
La campagne de Marmande est vraiment su-
perbe en ce moment; les moissons n'ayant pas
encore mûri font des nappes de moire verte
entre les vergers, les vignes, les champs de ta-
bac et le maïs. La route qui conduit de la ville
à la vallée du Trec donne une idée de richesse
extrême ; partout, entre les cultures, se mon-
trent des maisons vastes et riantes ; elles s'éta-
gent dans les vignes, entre les arbres fruitiers,
sur les pentes et la crête de collines bien décou-
pées. Il y a déjà des pruniers; Tarbre favori de
TAgenais devient surtout abondant vers Virazeil.
Hélas ! l'aspect de ces pruneraies est navrant
cette année. Une invasion de chenilles fileuses a
2 2 VOYAGE EN FRANCE.
détruit la récolte : feuilles, bourgeons, fruits,
tout a été dévoré par ces insectes répugnants,
qui recouvrent troncs et branches d'un enduit
blanchâtre. Le mal n'était pas inattendu, depuis
trois ans on était prévenu de son apparition, mais,
comme toujours, on ne s'est pas précautionné
contre le fléau. Le remède, d'ailleurs, n'était pas
nettement indiqué ; cette année seulement, une
formule a été trouvée ; je pourrai, me dit-on,
voir le résultat du traitement dans la vallée du
Lot, où parfois l'on a fait montre d'initiative.
Mais ici, sur toute la route que je viens de
parcourir au long du Trec et du Drot, c'est sinis-
tre, cette richesse perdue, non seulement pour
l'année 1902, mais pour l'an qui vient, car les
bourgeons à fruits sont dévorés. Les fiîeuses ne
se sont pas uniquement attaquées aux planta-
tions de pruniers d'ente, tout ce qui est de la fa-
mille prunier a été atteint ; les prunelliers des
haies eux-mêmes sont envahis. Les buissons
qu'ils forment semblent de loin couverts de neige
ou de givre sale. Et cela est lugubre, au milieu
de ce vallon si vert et frais, au sein duqueLse
suivent tant de hameaux heureux.
Près d'un de ces groupes d'habitations, la Ga-
zelle, se dresse une sorte de pignon surmonté
d'un campanile, dernier débris d'une chapelle.
24 VOYAGE EN FRANCE.
Plus loin, le petit bourg de Seyches groupe une
poignée de maisons autour de son église, bâtisse
grise. On est ici en pleines pruneraies : pentes,
petits plateaux, vallons étroits sont couverts de
plantations régulières. Chaque habitation pos-
sède une annexe basse, dont le toit est un pro-
longement du toit principal qu'il semble conduire
presque jusqu'à terre ; là se fait la transforma-
tion de la prune en pruneau. Hélas ! les fours ne
s'allumeront guère cette année.
La moindre commune a ses marchands de
prunes ou tout au moins des acheteurs dans le
village voisin. Seyches en possède, mais cet
humble chef-lieu de canton ne fait pas un com-
merce comparable à celui d'un bourg de ses en-
virons: Saint-Barthélémy, situé au cœur d'une
vaste région agricole.
Plus considérable encore pour les transactions
est Miramont, bastide régulière entourant de son
boulevard, formant caiTé, les îlots de maisons
dessinés 'par six rues qui se coupent à angle
droit. Au cœur de la ville, centre le plus peuplé
de la contrée, s'élancent une haute flèche de
pierre et le grand comble de l'église ; sur une
place est la statue de M. de Martignac, le mi-
nistre de la Restauration. Le commerce est plus
actif dans cette petite cité que dans le bourg de
LA VALLÉE DU DROT. 20
Lauzun, qui doit à son ancienne prééminence
seigneuriale comme capitale du duché-pairie de
Lauzun d'avoir été choisi pour chef- lieu du
canton.
Lauzun n'a pas le plan régulier de Miramont,
c'est une vieille bourgade possédant encore le
château d'où s'élança vers son étrange carrière
le futur époux secret de la grande Mademoiselle :
le comte, puis duc de Lauzun. Les chemins de fer
laissent à l'écart la féodale bourgade, tandis que
Miramont, située près du point de jonction des
lignes de Bordeaux et d'Angoulême, voit encore
accroître son activité. Jadis, quand le Drot était
maintenu en bon état, elle utilisait cette voie de
navigation à laquelle sa petite rivière de Dour-
dène amène des eaux d'un vert laiteux.
La jonction des chemins de fer se fait au con-
fluent, en face d'une bastide, la Sauvetat, qui
n'eut pas la fortune de Miramont ; il y a bien peu
de maisons au long des rues dominées par la
tour carrée d'une vieille église, flanquée de pi-
nacles à chaque angle. Ce n'est qu'un point de
rencontre des voies, la gare où la formation des
trains pour Bordeaux a lieu est au delà, à Eymet,
chef-lieu de canton de la Dordogne, à la tête de
la navigation officielle du Drot.
Encore une bastide, Eymet. On connaît sa date
20 VOYAGE EN FRANCE.
de naissance. En 1271, on traça les deux grandes
rues en croix traversées par des voies plus pe-
tites aboutissant à une enceinte fortifiée. Celle-ci
a disparu pour faire place à des boulevards au-
jourd'hui ombreux. La ville eut le bon goût de
conserver sa place centrale avec ses arcades
irrégulières : les unes ogivales, à grande ouver-
ture, d'autres également gothiques, mais étroites
et hautes ; certaines sont en anse de panier, cer-
taines sont de simples galeries de charpente. Au
milieu, une pompe est fixée sur un puits surmonté
d'une sorte de tour octogonale. Cet ensemble
est d'un effet singulier, archaïque et charmant.
Les ruelles qui aboutissent là et sur les deux
rues sont étroites, leurs maisons sont égayées
par des espaliers couvrant les façades, des ar-
bres débordent sur les murs des jardins.
Plus heureuse que d'autres bastides, Eymet
garde quelques édifices ; le château n'a pas com-
plètement disparu, il en reste un donjon à mâ-
chicoulis revêtu de lierre et un pan de muraille
auquel une tourelle en poivrière s'accote fière-
ment encore. Ces débris ont été aménagés avec
goût, un jardin fleuri de roses et abrité par
un grand laurier précède l'entrée. En face, une
colonne surmontée d'une croix a été érigée en
l'honneur des bienfaiteurs de la ville ; près de là,
LA VALLEE DU DROT. 27
devant une église moderne, un arbre de la liberté
abrite une de ces statues de la République mou-
lées en si grand nombre pour le centenaire de la
Révolution.
Des roses et des vignes à la plupart des fa-
çades, des maisons en charpente à ressaut, le
Drot roulant des eaux glauques au sein de prai-
ries, sous les aulnes au feuillage sombre, com-
plètent ce riant décor urbain.
Eymet est un centre pour le commerce des
prunes, comme me le révèle à Tentrée une en-
seigne : « Plus de chenilles ! » mais elle y joint
celui des comestibles et d^ conserves. C'est le
Périgord ici, dès les premiers pas dans cette
province on trouve les spécialités culinaires qui
ont fait le renom du pays des truffes.
La région du prunier s'étend assez loin encore
vers la Dordogne ; un autre petit centre péri-
gourdin, Issigeac, possède des foires aux prunes.
La limite de la grande culture de cet arbre est
déjà sur le versant qui regarde Bergerac. Les
pruneraies diminuent ou cessent lorsque com-
mence le fameux vignoble de Monbazillac^
Le chemin de fer ne quitte le Drot, au delà
I . Pour la région de Bergerac et les vins de Monbazillac vi
29e série du Voyage en France, chapitre XV.
la 2C
28 VOYAGE EN FRANCE.
d'Eymet, qu'à la station de Falgueyrat, d'où se
détachera un embranchement sur Villeneuve-sur-
Lot, depuis longtemps projeté, continuation de
la ligne actuelle de Bordeaux à Eymet, par la-
quelle l'Entre-deux-Mers et le cœur de l'Agenais
se relient à la métropole du sud-ouest. Elle tra-
verse une région qui dépendait de l'Albret et
dont le repeuplement par des émigrants de pro-
vinces de langue d'oil a fait naître le mot de
« Gavacherie ».
En route pour la Gavacherie. Le chemin de fer
me conduit à Duras d'où j'irai parcourir ce petit
pays. A la Sauvetat, le train s'aiguille sur la voie
de Bordeaux et le voilà descendant au long du
Drot, dans une aimable vallée où les maisons
éparpillées sur les pentes et parmi les cultures
du fond mettent beaucoup de vie et de gaîté.
Peu de villages, et menus, si menus ! C'est que
les habitants ont voulu être au milieu de leur
pruneraie afin de pouvoir plus tôt récolter et
transporter leurs fruits. Moustier n'a même pas
de centre, l'église à haute flèche de pierre se
dresse, isolée, au flanc d'un coteau. Sur l'autre
rive du Drot, Allemans est un joli bourg, bien
groupé entre les prairies, les vignes et les pru-
neraies. Plus loin, sur une sorte de promontoire,
LA VALLÉE DU DROT. 20
l'église de Monteton se dresse au sommet de la
butte.
Le Drot erre dans les prés et reçoit des ruis-
selets affluents ; l'un d'eux naît dans les collines
où se dresse le féodal Puyguilhem, village chef-
lieu de baronnie, dont le futur duc de Lauzun
portait le titre quand il apparut à la cour et, par
sa belle mine, s'attira les faveurs de Louis XIV.
Un autre village au nom sonore, Pardaillan,
borde le ruisseau et s'entoure de pruniers. Tous
ces arbres doivent faire un décor merveilleux
au printemps, quand ils sont couverts de leur
floraison de neige. En ce moment, ils sont
blancs encore, mais de la lépreuse blancheur
due à la soie des chenilles qui ont dévoré leurs
feuilles.
Le Drot est une bien pauvre rivière, sinueuse,
sans mouvement apparent, ses eaux d'un vert
blanchâtre s'en vont entre des berges revêtues
d'arbres et de taillis. Ce paysage serait très pla-
cide sans l'allure belliqueuse de la petite ville
de Duras, assise sur une colline escarpée au
confluent de la Dourdèze. Minuscule, la cité
qui devint le siège du duché de Duras, constitué
en faveur de la famille de Durfort, mais son
château couronné par une tour à galerie, ses
remparts, son église lui donnent une grandeur
3o VOYAGE EN FRANGE.
d'aspect inattendue. Le plan n'a pas la régula-
rité de celui des bastides voisines, mais une
place à arcades révèle une ancienneté aussi
grande, plusieurs maisons intéressantes disent
que Duras eut plus d'importance jadis.
De la ville, on jouit d'une vue étendue et su-
perbe sur la vallée du Drot et les collines qui
s'étendent jusqu'à la Garonne. Les environs ont
des cultures très variées; beaucoup de jardinage,
les prés s'encadrent d'ormes, de chênes et de
peupliers. Les champs sont l'objet de soins assi-
dus, même voici des pruniers sans chenilles et
couverts de beaux fruits.
Le département de Lot-et-Garonne finit ici ;
de l'autre côté du Drot, c'est la Gironde, la
limite est formée plus loin par le ruisseau de
Dousset. Celui-ci atteint le Drot au-dessous d'un
coteau rocheux surmonté par l'église de Dieu-
livol dont la façade est un pignon aigu percé de
trois ouvertures. Sur l'autre rive du Drot, une
bourgade de mine plus belliqueuse encore que
Duras, Monségur, couronne mieux sa colline et
l'église dresse une belle flèche au-dessus des
toits.
La rivière vient lécher la base de cette espèce
de falaise ; elle est navigable ici ; elle l'est même
depuis Eymet, d'une façon purement nominale,
LA VALLÉE DU DROT. 3l
les écluses qui soutenaient le plan d'eau étant
dans un tel état de vétusté que l'on ne peut s'en
servir. A partir de Duras seulement le passage
des bateaux est possible, sinon facile. Toute la
voie, qui fut aménagée par une compagnie, est
dans un médiocre état. Aussi le cours d'eau de
100 kilomètres, dont 64 sont classés comme na-
vigables, ne figure-t-il dans la statistique de
1899 que pour i4 676 tonnes, transportées par
495 bateaux. Malgré ce rôle, c'est une bien pe-
tite rivière.
De sa terrasse Monségur domine le Drot et
découvre de grands horizons sur trois des dé-
partements de l'ancienne Guyenne, les cantons
girondins de Monségur et de Pellegrue surtout,
qui sont la contrée particulièrement appelée
Gavacherie. Dans le petit vallon du Ségur, où
le chemin de fer s'insinue un instant pour aller
traverser l'Entre-deux-Mers', un village, Gastel-
moron-d'Albret, fut presque entièrement peuplé
par les Gavaches. Mais la colonie a dû beaucoup
se disperser, Gastelmoron, qui eut rang de ville
et dont les remparts croulants disent encore
l'importance, conserve une centaine d'habitants
1. Sur l'Entre-deux-Mers voyez le chapitre XII de la 29" série.
32 VOYAGE EN FRANCE.
à peine. Son surnom d'Albret' rappelle que les
princes de cette famille poussaient leurs do-
maines jusqu'au Drot. Le peu de surface de son
territoire, 6 hectares, montre que ce fut une créa-
tion du souverain, puisque les habitants n'ont de
terrains de culture que sur le territoire de leurs
voisins. Le château et l'espace compris entre les
remparts constituèrent la paroisse devenue la
plus petite commune de France, peut-être.
Aujourd'hui, Gastelmoron a perdu toute in-
fluence, Monségur l'a remplacé comme centre
de cette partie du pays. Elle aussi est une bas-
tide, dont l'aspect a été défiguré. Aux arcades de
la place on a substitué une galerie soutenue par
des colonnes, ce qui donne plus d'air et de lu-
mière aux boutiques. Au milieu de l'espace jadis
nu, s'élève une grande halle de fer et de verre,
dénaturant encore le caractère archaïque.
J'ai pris place sur le siège de la diligence de
La Réole. Elle s'en est allée à grand bruit de
grelots sur une route en pente longeant de vieux
remparts qui semblent avoir été entaillés dans le
roc; en quelques secondes nous voici dans la
I. Sur la partie du duché d'Albrct comprise sur la rive gauche
de la Garonne, voyez la So^ série du Voyage en France, cha-
pitre VII.
LA VALLÉE DU DROT. 33
vallée au pied des coteaux. Ici moins de pruniers;
s'il en est encore, c'est en plantations de plus
en plus espacées.
La vallée est bien belle au-dessous de Mon-
ségur. La variété et la richesse des cultures
sont extrêmes; cela me rappelle la Touraine,
avec plus d'opulence peut-être. Au bord de la
rivière qui se tord en courts méandres, la flèche
de Coulures pointe dans les arbres; en face, sur
un coteau dominant le Drot et le ruisseau de
Saint-Sulpice, se dressent les puissantes raines
du château de Roquebrune ou de Gudleragues.
Roquebrune, c'est deux ou trois maisons au-
tour de l'église ; l'une d'elles, vaste, construite
en gros moellons équarris, possède encore des
fenêtres à meneaux.
La route de La Réole quitte la vallée du Drot
et s'élève entre les vignes, sur un plateau cultivé
en céréales. Peu de hameaux, l'un d'eux, Saint-
Hilaire, chef-lieu d'une commune, se compose
d'un château moderne et d'une église à pignon
entourée d'auvents formant galerie. Cet embryon
de village est sur la ligne de faîte entre la Ga-
ronne et le Drot. De ce point, la vue s'étend sur
les deux vallées et, bien par delà, sur un pays
immense. Les landes apparaissent, sombres, se
perdant en des. lointains infinis. La vallée de la
VOYAGE E>- FRANCE. — XXXI. 3
34 VOYAGE EN FRANCE.
Garonne s'entrouvre sous nos pieds, verte, lumi-
neuse, parsemée d'une infinité de maisons blan-
ches, avec son fleuve étincelant dessinant ses
grands contours au milieu de la verdure.
Le tableau s'eiïace, nous descendons dans un
court vallon, la route se fait rue, Téquipage s'ar-
rête sur une vaste place, tranquille aujourd'hui.
C'est La Réole'.
29^ série du Voyage en France, page 18g.
III
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE
La vallée de l'Avance. — Casteljaloux et ses usines. — Les pertes
et les sources de l'Avance. — Dans les pinèdes. — Les Lugues.
— Houeillès. — La foire de Pelbusoc. — La Grande Lande.
— Le val de l'Estampon.
Sos. Mai.
Dans Tespèce de longue et régulière muraille
dessinée par les collines de la rive gauche de
la Garonne, les rivières et ruisseaux de l'inté-
rieur trouvent issue par des sortes de fissures très
étroites, de loin on ne pourrait deviner qu'il y a
là des vallons, tant l'ensemble est massif. Une
seule coupure paraît donner accès vers le sud,
elle s'ouvre en face même de Marmande et livre
passage à l'Avance, petite rivière venue des
landes, dont le cours et le débit sont remarqua-
blement réguliers.
Une grande route et le chemin de fer de Mont-
de-Marsan pénètrent dans ce large pli bordé de
collines aux pentes raides que dominent des
hameaux et des villages. Pas de gros centres, les
36 VOYAGE EN FRANCE.
habitations s'éparpillent sur les hauteurs ; le
seul méritant le titre de bourg, Bouglon, est de
belliqueuse allure sur son promontoire domi-
nant de plus de cent mètres le confluent de l'Ar-
genton et de l'A^'ance, mais à peine groupe-t-il
cent habitants dans ses rues étroites et courtes ^
Des abords de ce minuscule chef-lieu, la vue est
immense et superbe sur la riante vallée et le
plateau boisé du Mas-d'A gênais. Au sud, sur
l'autre rive, une colline plus élevée encore porte
Téghse romane de la bastide de Castel-Amou-
roux. De ce côté, le massif des collines est très
accidenté et atteint près de i8o mètres au-dessus
de la mer. Joli pays, verdoyant et bien cultivé,
qui vient finir sur une ligne étrangement régu-
lière, à la marge des forêts de pins et de chénes-
lièges des landes agenaises.
A l'entrée de cette région si nettement tran-
chée, au point de bifurcation de nombreux che-
mins ou routes, s'étale largement une petite
ville qui sera le dernier centre de plus de i 5oo
âmes jusqu'à l'Adour. C'est l'active Gastelja-
loux-, une des cités principales de l'Albret féo-
dal, qui a dû à l'industrie d'échapper à la déca-
1. 584 liabitanls daiis la commune.
2. 3G22 habilaiils don: 2576 agglomérés.
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. 87
dence des bourgades rurales. Chose curieuse,
cette industrie, se rattachant étroitement à la
chimie, est de celles que l'on ne s'attendrait pas
à trouver dans les landes : la production des
bougies et du savon. Elle est très ancienne d'ail-
leurs, car l'usine remonte à 1829 et n'a pas
cessé de s'accroître; une description du Lot-et-
Garonne publiée en 18 10 mentionne déjà cette
fabrication. Le reboisement des landes % jadis
1, La conquête des landes par le pin maritime a été exposée
avec tant de détails dans la 2<j^ et surtout dans la 3oe série du
38 VOYAGE EN FRANCE.
nues, a fait naître d'autres industries ; le trai-
tement de la résine, sa transformation en es-
sence de térébenthine se font dans plusieurs
usines, la paille de seigle récoltée dans les clai-
rières des landes est transformée en enveloppes
de bouteilles et en nattes pour les châssis et
les serres. Aussi la population a-t-elle doublé
depuis cinquante ans, elle dépasse aujourd'hui
3 600 âmes. Par contre, l'industrie métallurgi-
que, autrefois active sur le territoire, aux forges
de Neuffons, a disparu, emportant sans doute à
jamais l'espoir que l'on avait à Casteljaloux de
faire canaliser jusqu'à la Garonne la petite rivière
de l'Avance.
La ville possède un caractère bien particulier,
grâce aux grands auvents qui projettent parfois
les toits à trois mètres sur la rue. On pourrait se
croire dans une de ces régions des Alpes où les
toitures avancées préservent de la neige amon-
celée en corniche ; mais comme il ne saurait être
question de neige en ce doux pays de Gascogne,
il faut sans doute y voir une précaution contre le
soleil. L'usage s'en perd d'ailleurs, les maisons
nouvelles en pierre blanche ou crépies n'otfrent
Voyage en France, qu'il ne sera question ici que de ce qui a
trait au Lot-et-Garonne. Pour <:'etle élude spéciale, nous renvoyons
le lecteur aux séries précitées.
LES LAiNDES DE LOT-ET-GARONNE. Sg
pas ces grands appendices. Si les demeures mo-
dernes donnent à la ville un caractère prospère,
elles n'ont pas la physionomie pittoresque des
anciennes, accrue par la carcasse de poutrelles
brunies.
Dans les petites rues on trouve davantage de
ces vieilles demeures, quelques-unes, bien que
dégradées et rongées, ont encore la grâce et la
noblesse du xvn^ siècle ; l'une d'elles, ancienne
maison religieuse, possède un cloître, d'un style
simple mais élégant encore. De toutes ces habi-
tations nobles, la plus curieuse, la plus vétusté
aussi est l'ancien hôtel de Xaintrailles. Un af-
faissement l'a déjeté, en disloquant les meneaux
des fenêtres, les intempéries ont rongé les mé-
daillons délicatement sculptés qui ornaient la
façade et dont il reste à peine des linéaments,
charmants encore.
Peu de monuments ; l'église est un édifice
ogival aux puissants contreforts que le goût du
xvni" siècle a fait doter d'une riche façade de
style jésuite.
Du Gasteljaloux féodal — Castel-Gelos, Cas-
tel-Geloux — il reste quelques pauvres débris du
château et des remparts. La partie la plus riante
de la petite cité est un mail ombreux, en ter-
rasse, dominant l'Avance et ayant vue sur de
l\0 VOYAGE EN FRANCE.
belles collines très vertes, un peu embrumées
aujourd'hui par la fumée des usines. Des sour-
ces minérales jaillissent aux abords de la ville,
mais elles n'ont pas fait naître d'établissement.
L'Avance est la gaîté de ces campagnes, il
est peu de petites rivières plus abondantes et
claires. C'est qu'elle vient à peine de naître
ou p^itôt de renaître par d'abondantes fon-
taines. La lande qui recouvre ailleurs des masses
énormes de sable repose ici sur des assises cal-
caires perforées de cavités. Dans cette direction,
toutes les eaux landaises s'infiltrent dans le sable
et vont rejoindre ces rés^rvoir^s mystérieux.
Les sources sont à deux kilomètres en amont
de la ville, dans un beau site forestier de chênes
et de pins. Neuf évents donnent issue aux eaux,
d'où le nom de Neuffons. Les fontaines réunies
faisaient mouvoir les forges, elles actionnent au-
jourd'hui une papeterie et une partie des scie-
ries qui débitent le bois des landes voisines.
Une des sources, sortie d'une excavation appe-
lée la Grotte des Fées, attend encore les explo-
rateurs de naïades'.
I. Depuis ma vssile à Casteljaloux, M. Martel, à qui l'on doit
la découverte de tant de (|rottes et d'abîmes, a tenté de pénétrer
ce mystère. Sur l'invitation de INI Malbec, maire de Monchir-
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. l\l
Neufîons, par son beau réservoir et ses arbres,
est un site charmant. En amont, on retrouve
l'Avance, mais remplie seulement à l'époque
des grandes pluies, sous le nom de Riou Rouge.
La rivière s'était perdue deux kilomètres plus
haut, près de la Taillade. Telle qu'on la voit à
ce hameau avant l'infiltration, elle ne ressemble
guère à la masse d'eau qui arrose Gasteljaloux.
Les fontaines ont d'autres aliments que les flots
disparus ; tous les ruisseaux qui sourdent de
la lande et arrivent à la limite du terrain cal-
caire se perdent ainsi et viennent sourdre à
Neuffons.
Ce point de soudure entre le désert et les ri-
ches campagnes de l'Agenais offre un charmant
paysage forestier. C'est la lande, possédant
même de petites dunes, formées par les vents à
l'époque où, la région n'étant pas boisée, les
bourrasques venues de l'Océan ne trouvaient
aucun obstacle. Le pin n'est pas encore maître
d'Agenais, il est allé avec celui-ci et M. Marboulin à la Tailhade,
où se perd l'Avance, a coloré le ruisseau à la fluorescine et
reconnu par l'examen des eaux de sources que l'on ne s'était pas
trompé quant à leur origine. Il a ensuite visité les neuf résur-
gences et, pénétrant dans la grotte, a pu remonter pendant deux
cents mètres. Cette expédition semble avoir fait reconnaître que
toutes les eaux ne sourdent pas à Neuffons, beaucoup se per-
draient, mais on pourrait les obliger à suivre le courant principal.
42 VOYAGE EN FRANCE.
incontesté du terrain, il est mélangé au chêne
cultivé en taillis. Des ruisseaux clairs, les neuf
fontSj avivent la végétation. Le chêne-taillis,
couvert d'énormes galles, est presque atteint en
hauteur par de vigoureux genêts dont la fleur
d'or est la gaîté de ces solitudes. Çà et là, quel-
ques arbres échappés à la cognée sont devenus
superbes et rappellent la beauté de nos sylves
du nord.
Ainsi que dans les Grandes Landes, le pin est
soumis au résinage. Ces arbres sillonnés de
plaies, les chênes soumis à l'écorçage forment
comme une salle de torture végétale : les chênes
sont écorcés sur pied, ce qui donne aux taillis
un aspect étrange ; dans la pénombre, les bran-
ches semblent saignantes.
Des abords de la route on voit rarement des
habitations ; les demeures des résiniers sont per-
dues dans les bois, et les cultures de seigle sont
en de lointaines clairières ; les plus proches sont
autour du petit village de Pindères, assis à
l'écart sur un des ruisseaux absorbés dans les
sables.
La forêt est belle par les chênes parfois
énormes qui se dressent au milieu des pins.
Dans ce paysage sylvestre est le hameau de Pom-
pogne, tout menu autour de sa vieille église
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. 4 3
romane. On se fait si bien à cette solitude, on
s'attend si peu à trouver un vrai village, que
l'apparition du bourg d'Houeillès est une sur-
prise. C'est une longue rue formée par la grande
route, sur laquelle s'alignent des maisons à
larges toits plats contrastant avec les murs de
poutrelles et de torchis des métairies couvertes
en chaume ; partout, même dans les bois, le
nombre des constructions neuves révèle que le
pin a amené le bien-être. On réserve chaume et
torchis pour les servitudes de l'exploitation ru-
rale.
Ces métairies, au milieu de clairières où on-
dulent les seigles, où les châtaigniers mettent
leurs frondaisons puissantes, sont plus nom-
breuses aux abords d'Houeillès. Le bourg, mal-
gré sa population agglomérée de 35o habitants
seulement, le reste étant réparti sur un vaste
territoire, est animé par le commerce et l'indus-
trie, grâce à la forêt qui alimente des chantiers
de bois et donne un trafic considérable à la gare,
beaucoup de traverses de chêne surtout.
Évidemment, le tableau des landes tracé par
les vieux auteurs était exagéré, le nombre et les
dimensions des chênes prouvent que les bois
étaient déjà étendus avant les plantations de
pins maritimes. Il faut aller au delà d'Houeillès
44 VOYAGE EX FRANCE.
pour trouver le désert. Les communes qui cons-
tituent le canton sont assez peuplées ; elles for-
maient dans l'ancien Albret une subdivision ap-
pelée les Lugues et eurent de bonne heure
quelque importance. L'église du chef-lieu est
un intéressant édifice de la première époque
gothique, méritant une visite par sa porte forti-
fiée, couronnée de mâchicoulis. Dans cette ré-
gion, sorte de marche entre l' Albret, Etat indé-
pendant, et la Guyenne, on trouve plus d'un
exemple d'églises ainsi organisées pour la dé-
fensive : leurs fenêtres, très hautes et étroites,
ne sont guère que des meurtrières. Beaucoup
de ces édifices ont d'heureux détails. Au sein le
plus profond des landes, le village de Durance
possède une chapelle appelée Grange de Du-
rance qui est, dit-on, une merveille ; plus de
600 figures, représentant de pieux personnages
ou des légendes, y sont peintes avec toute la
grâce de l'art ogival.
La lande change peu à peu d'aspect. Au delà
de Houeillès, le chêne-liège, rare encore, se
mêle aux chênes à feuilles caduques dont la
grosseur est faite pour surprendre. Il est de
beaux groupes de ces arbres sur les bords d'un
ruisseau clair, coulant entre les aulnes sur un
LES LAIDES DE LOT-ET-GARONNE. 4^
lit de sable d'or fauve. Gç preste cours d'eau,
c'est le Giron naissant, la future et active rivière
des landes bazadaises^
J'ai dû prendre le train à Houeillès pour vi-
siter le reste des landes de l'Albret jusqu'à
Roquefort. La seule inspection de la carte n'en-
courage guère à circuler pédestrement sur ce
j)lateau de bruyères parsemé de pignadars aux
contours étranges, bandes longues parfois de
deux lieues, alternant avec des massifs troués
de clairières. Le train allant à une modeste al-
lure en cette contrée où les stations desservent
seulement des métairies perdues dans les bois,
on juge suffisamment du paysage par la fenêtre
du wagon.
Donc, en route par les landes. Peu à peu les
chênes disparaissent, ou servent uniquement à
ombrager les abords des métairies auxquels ils
donnent des mails d'une majesté royale. Ainsi,
près de la station de Tour-Neuve, la grande
ferme de Pont-Moyne possède de superbes om-
brages sous lesquels s'étend une pelouse velou-
tée. A côté de la gare, deux ou trois maisons,
une ample bâtisse assez curieuse par son étage
1. Sur le Giron et son ilollage, voyez la 299 série du Voyage
en France, chapitre XIII, cl la So^ série, chapitre I^r.
46 VOYAGE EN FRANCE.
en encorbellement et un château. Une fabrique
d'essence de térébenthine est installée près de
la voie et traite les résines recueillies dans les
vastes pignadars de la commune d'Allans. La
forêt a peu de profondeur; vers le sud, on trouve
encore la lande rase de bruyère. Au milieu de
ce désert surgit une croupe allongée, sans doute
dune continentale, appelée Pelbusoc, sur la-
quelle passe la limite des départements de Lot-
et-Garonne et des Landes. Ce point commande
de vastes horizons ; il devait être le principal
accident du paysage avant la conquête par le
pin, aussi est-il devenu un lieu de rendez-vous.
Chaque année, le i6 juillet, il s'y tient une foire
sur un emplacement signalé par la carte d'Etat-
major, cette réunion est plus active encore au-
jourd'hui, grâce au chemin de fer.
Le tapis de bruyère naine apparaît à chaque
instant, entre les longues et étroites pinèdes. Le
paysage s'entrouvre tout à coup, prodigieuse-
ment, par une des dernières grandes surfaces
dénudées du pays landais. Il y a ici une ligne
d'horizon de près de 12 kilomètres sans un
arbre, sans autre accident de terrain que les
toits rouges et bas des bergeries. Toute cette
zone appartient au département des Landes, la
barre à peine distincte des forêts de pins qui
LES L\>DES DE LOT-ET-GAROX.NE. l\J
bordent ce désert est la limite de la Gironde.
On est donc à la ligne de partage des landes
entre les trois départements.
Le Lot-et-Garonne est le moins doté de ces
terrains jadis stériles ; il n'en possède pas plus de
65 000 à 70000 hectares, chiffre presque insigni-
fiant auprès de ses voisins. Comme ceux-ci, il
s'est efforcé de gagner les landes par des plan-
tations, mais il ne s'est pas borné au pin, il a
accru l'étendue de ses forêts de chênes-lièges,
point de départ de la florissante industrie de
Mézin et de Lavardac dont je parlerai bientôt ^
Le train pénètre dans le département des
Landes, au point où le territoire de Lot-et-Ga-
ronne forme une sorte d'enclave triangulaire.
En vue de la lande qui semble sans fin, d'une
solitude et d'une tristesse infinie, une pignadar
abrite une métairie dotée du nom ironique de
Plaisance ; encore les pins lui cachent-ils le
morne plateau. Mais une gare a été élevée sur la
partie non boisée et l'on se i)rend de compassion
pour les employés exilés ici.
Les bois recommencent bientôt, dans une zone
où le plateau se plisse en de nombreux ravins,
I Chapitre VI.
48 VOYAGE EN FRANCE.
OÙ des ruisseaux clairs se forment dans les sa-
bles. Comme partout où la lande possède des
eaux courantes, la végétation est plus belle, les
chênes, qui paraissent de nouveau, révèlent que
cette contrée est depuis longtemps sylvaine. Ces
arbres entourent des champs de seigle, les mai-
sons moins rares, clairsemées encore, possèdent
des prairies et des vergers. La vie, il est vrai, ne
se montre que sur le bord de ces ruisseaux par-
courant des embryons de vallées ; dès qu'on les
a quittés on retrouve la solitude des pins et des
bruyères.
Sur les bords du ruisseau de Houil, la station
de Bourriat-Bergonce fera sans doute naître un
petit centre ; déjà un grand commerce de bois
s'opère à la gare ; bientôt le chemin de fer de
Bazas y amènera les trains de Bordeaux et l'on
poursuit la Ugne vers Gabarret et Eauze, en
attendant le prolongement sur Auch. Ce croise-
ment de voies ferrées aura pour effet d'amener
une population sur ce point. En attendant, la
gare ne dessert que de pauvres hameaux bâtis
au bord de ruisselets allant accroître la Douze.
Le pays s'ad^aisse de plus en plus : à Houeillès
on était à i46 mètres au-dessus de la mer;
à la gare forestière de Retjons-Lugaut on est
à 85. C'est un confluent de ruisseaux et de ra-
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. ^9
\ iiis profondément creusés dans la lande, quatre
branches s'y réunissent pour grossir l'Estampon.
On ne devine pas le voisinage des habitations.
Lugaut n'est qu'une église ; Retjons est à l'écart
dans les bois.
Le train court encore sous les pins, traverse
des clairières et s'arrête en face d'un site inat-
tendu : une petite ville, Roquefort, assise sur
un roc escarpé, entre l'Estampon abondant, noir
et rapide, et la Douze aux eaux souillées d'ar-
gile, qui impose son nom au cours d'eau ainsi
formé ^
I. Sur Roquefort et la région jusqu'à Mont-de-Marsan, voyez
la 3oe série du Voyage en France, chapitres VIII et IX.
VOYAGE E.\ FRANCE.
IV
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS )>
La vallée de la Baise. — La bastide de Vianne. — Lavardac. —
Navigation de la Baise. — Ateliers de bouchonniers. — Le Pont-
dc-Bordes. — Le moulin de Barbaste. — Barbaste — Nérac
— La promenade de la Garenne.
^ Nérac. Juillet.
A peine a-t-on traversé la Garonne coulant
au milieu de l'opulente plaine de Port-Sainte-
Marie, et voici un paysage inattendu, on pour-
rait se croire à cent lieues de ces campagnes
de cultures. Des arbres au feuillage luisant et
crispé, aux troncs boursouflés, d'une teinte li-
vide, apparaissent au flanc des collines : ce sont
des chenes-lièges. L'effet en est étrange après le
parcours des verg.^rs, des champs de maïs et de
tabac.
Ces végétaux sont en quelque sorte des senti-
nelles, ils ne forment pas encore de nappe con-
tinue, ni même de groupes, la forêt des suriers
est plus loin. La vigne, le maïs, le tabac domi-
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) , 5l
lient toujours dans ce couloir étroit et riant où
la Baïse mène ses eaux peu limpides, retenues
par les barrages écluses. A l'entrée du val est
le village de Feugarolles. Sur les coteaux, deux
châteaux, qui durent avoir de la splendeur, sont
encore entourés des douves défensives. L'un
d'eux porte le nom sonore de Trenqueléon. De
ce côté, la forme des mots eux-mêmes a plus de
couleur : voici, dressé sur une colline. Mont-
gaillard, plus loin, c'est Xaintrailles dont la sei-
gneurie appartint au brave Poton, le dévoué
compagnon de Jeanne d'Arc.
Au fond du val, bordée par la Baïse, la bas-
tide de Vianne a conservé son aspect du passé.
Il y avait là un village, Villelongue, qui fut
remplacé par une ville entourée d'une enceinte
régulière.
Depuis 1284, ces remparts flanqués de tours
sont restés debout ; ce serait une petite Avignon
gasconne, si les murailles n'étaient découronnées,
percées de portes ou de fenêtres closes de volets.
Le mur de ville est devenu partie intégrante
d'habitations. Quatre portes donnent accès dans
cette minuscule cité, le soir elles offrent un cu-
rieux contraste par leur tracé archaïque et les
lampes électriques qui brillent à la voûte. Ce
centre, comme toutes les communes voisines.
02 VOYAGE EX FRANCE.
est en partie peuplé de bouchonniers travaillant
les lièges du pays et d'Afrique.
En amont, la vallée se resserre, devient pres-
que une petite gorge au fond de laquelle la Baïse
coule, sombre, entre des pentes hérissées de
rochers. Un moment ce val s'entrouvre, au con-
fluent de la Gélise, sous une terrasse qui porte
une autre bastide, Lavardac, dégagée de ses
remparts et devenue grandissante grâce à la
plantation des landes, à l'exploitation des bois
et au travail du liège. Les vignobles des envi-
rons donnent un vin transformé en eau-de-vie
d'Armagnac; de nombreuses maisons en font le
commerce.
La ville proprement dite, la bastide, petite,
mais propre et riante, se prolonge par des cons-
tructions neuves formant faubourg. Les rues
étroites sont bordées de maisonnettes aux con-
trevents gris. Au pied d'une haute berge, très
abrupte, la Baïse forme un bassin animé. La-
vardac est le port d'attache et le siège social de
la Société générale des remorqueurs de la Baïse
qui possède une trentaine de bateaux, dont deux
transporteurs à vapeur.
La navigation est active, le port de Lavardac
a constaté en 1900 le débarquement, T'embar-
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS )) . 53
qiKMnent et le passage de près de 5o ooo tonnes
%%\ ^t^/v A-$U
de marchandises ^ Bien des rivières, dotées d'un
I. En 1901, il y eut 45 852 tonnes seulement dont 26 826 à la
remonte et zg 626 à la desrente. Cette diminution est due à Fin-
54 VOYAGE EN FRANGE.
débit autrement puissant que l'indigente Baïse,
peuvent en envier l'animation.
Du haut du pont de trois arches jeté sur la
vallée, on jouit de cette activité du petit port.
Poteaux de mines et madriers apportés des fo-
rêts ou des scieries, fûts de vin et d'eau-de-vie
sont embarqués sur les grands chalands ou les
bateaux à vapeur porteurs. Les ballots de liège et
les sacs de bouchons figurent aussi dans ce fret
que le canal et la Garonne vont répartir dans
tout le Midi, à Bordeaux surtout.
Deux quartiers constituent Lavardac, le plus
actif est la route de Nérac bordée d'habita-
tions et d\isines jusqu'à la Baïse et à Barbaste,
en traversant la G élise. Cette voie a remplacé
l'antique chaussée romaine, appelée laTénarèze,
qui a donné son nom à la région vinicole de
r Armagnac d'Eauzan. Là se trouvent les prin-
cipales manufactures de bouchons, d'autres sont
à Barbaste qui est, en somme, un faubourg de
Lavardac ^ Cette jonction entre les deux com-
munes se nomme le Pont-de-Bordes.
Les grands bâtiments qui s'y échelonnent sont
des manufactures de bouchons, de semelles et
suffisance de la récolte en blé du Condomois et du Fezensac qui
alimentent en partie la grande minoterie de Vianne
1. Population de Lavardac, 2 545 habitants; de Barbaste, 1898.
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS ». 55
d'autres objets en liège. Les fabricants sont une
quinzaine : Barbaste en a quatre ou cinq, il en
est d'autres à Feugarolles, Thouars, Xaintrailles
et Yianne. Xaintrailles joint à cette industrie
celle de la tonnellerie.
Une odeur de liège assez écœurante flotte dans
Fair : parfum de liège bouilli, senteur plus acre
des débris de liège brûlés dans les foyers pour
amollir les plaques à travailler. La rivière est
souvent couverte d'une poussière jaunâtre pro-
venant des résidus de la fabrication dans les
usines hydrauliques.
Cependant Lavardac n'est pas le centre prin-
cipal de la bouchonnerie, les ateliers sont plus
nombreux à Mézin où la variété des articles est
plus grande aussi. C'est là que j'irai étudier
cette intéressante source d'activité, vie d'une
région de France que l'on s'attendrait à trouver
misérable.
Non seulement celle-ci doit au liège une grande
prospérité, mais elle est vraiment charmante.
Tout ce pays de Nérac est d'une grâce exempte
de morbidesse. C'est riant avec une légère allure
beUiqueuse due à la forme des collines et à la
disposition des centres habités. On comprend en
le parcourant la prédilection de Henri IV et des
Albrets et Bourbons, ses ancêtres, pour ce coin
56 VOYAGE EN FRANCE.
de leur Gascogne, où la vie dut être aimable,
joyeuse et facile, comme en témoignent tant de
castels encore debout.
Pont-de-Bordes est une avenue ombreuse,
très fraîche, que l'odeur du liège calciné me
gâte un peu ; cependant les foyers en plein vent
sont amusants, on y brûle des copeaux prove-
nant de la fabrication des bouchons ; devant le
chaud amas de braise on voit les planches de
liège s'amollir; de grands disques ayant 60 cen-
timètres de diamètre sont ainsi dressés : une fois
refroidis sous presse ils conserveront leur recti-
tude. Cet emploi des déchets comme combustible
est fait pour surprendre, car ils trouvent main-
tenant un débouché dans de nombreux usages :
le liège en poudre est la base du linoléum et
d'une sorte de brique très légère. Même on en
peut tirer un gaz d'un pouvoir éclairant plus
considérable que celui du gaz de houille. Pen-
dant quelque temps, la ville de Nérac, située
entre Lavardac et Mézin et elle-même siège de
fabriques, s'éclaira avec le gaz des copeaux de
liège. Elle le ferait encore peut-être s'il n'avait
fallu des emplacements trop vastes pour emma-
gasiner les matières premières.
Je ne reste pas longtemps à contempler ces
LA CAPITALE DU « BEARNAIS ». 5"]
foyers rappelant les ateliers des hommes primi-
tifs, le moulin de Barbaste m'attire davantage;
c'est lui, plus que le liège et les bouchons, que
je suis venu voir. Ce moulin n'est pas sur la
Baïse, mais sur son affluent la Gélise, coulant à
200 mètres à peine de la rivière maîtresse, au
pied de la colline de Barbaste. Je le connais de
réputation depuis bien longtemps, car il se rat-
tache à l'un? des scènes les plus populaires de la
vie du bon roi Henri.
En 1696, ce prince faisait le siège de La Fère ;
il s'était avancé sur la contrescarpe pour exa-
miner les défenses de la place, quand il s'enten-
dit interpeller en pur gascon par un soldat de
service sur le rempart :
— Mo II nié de las tons de Barbaste ^ prends
garde à la gâte que ha gatoua !
Cela voulait dire : « Meunier de la tour de
Barbaste, prends garde à la chatte qui va faire
des petits ! »
Le mot gâte se traduit par chatte, mais gâte
a aussi la signification de mine. Le roi comprit
l'avis et se retira en hâte ; un instant après une
explosion avait lieu à l'endroit même où il se
tenait.
Les tours de Barbaste étaient un des domaines
des ducs d'AIbret, Henri IV aimait à ajouter à
58 VOYAGE EN FRANCE.
ses titres celui de meunier des tours de Barbaste;
on a même des lettres dans lesquelles il signe
de cette qualité plaisante.
Le moulin, le voici : enjambant à demi la
Gélise qui tombe bruyamment de son barrage,
il s'appuie à un corps de logis flanqué de quatre
tours carrées dont une est elle-même accotée
d'une échauguette à mâchicoulis. Devant cette
petite forteresse on a construit une maison à
pavillons, de style vaguement Renaissance ; la
porte à fronton triangulaire est surmontée d'un
buste de Henri IV. Dans une pelouse en pente,
voisine de l'habitation, est un énorme tronc de
chêne, apporté des Landes; il a plusieurs mètres
de circonférence.
Une élégante passerelle suspendue jetée au-
dessus du barrage relie le moulin à une autre
usine mue par la Gélise, c'est une bouchonnerie
mécanique. En aval, un vieux pont ogival,
n'ayant pour parapet qu'une barrière de fer et
sur lequel passa souvent le Béarnais, fait com-
muniquer le moulin avec Barbaste. L'ensemble
du site est très curieux ; les quatre tours si
minces, coiffées de toits aigus, lui donnent
quelque chose de pimpant et de fier.
Barbaste est un joli centre, animé par une
population remarquablement spirituelle et vive
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) . 69
(rallure. Les ouvrières qui sortent des ateliers
de bouchonnerie sont coquettement vêtues. Le
bourg a été transformé par le tracé de la route
nouvelle. Elle traverse la Gélise sur un nouveau
pont, d'où le décor du moulin est superbe. Il y
a là un coin d'un charme indicible, qui semble
condenser les beautés intimes de notre cher
pays de France. La Baïse, franchie parla grande
arche d'un viaduc, forme elle aussi un paysage
riant et doux, s'il a moins de grandeur. La vue
s'étend sur les jolies collines de Xaintrailles et
de Montgaillard. Au sommet de la plus rappro-
chée se montre l'église d'Estussan, dont le cam-
panile triangulaire percé de quatre ouvertures
est d'un singulier effet.
Pendant que je rentre à Lavardac, les ateliers
se vident; c'est l'heure de la sortie, ouvriers
coiffés du béret, ouvrières vêtues de couleurs
fraîches et gaies retournent à la ville ; une fusée
de rires monte sous les grands arbres.
A l'hôtel on me sert à bon compte un dîner
plantureux. Au dessert, l'hôtesse m'apporte de
l'eau-de-vie bizarre et exquise, une bouteille
de vieil Armagnac dans laquelle est une grosse
poire duchesse ! Comment est-elle entrée là-de-
dans? je renonce à comprendre, mais l'on m'ap-
6o VOYAGE EN FRANCE.
prend que le fruit, aussitôt formé et dégagé des
branches adventices, a été mis dans une bou-
teille avec sa tige, tout en restant attaché à
l'arbre : il a grossi de la sorte: à la maturité, on
a coupé la branche, la poire est restée, on a
rempli la bouteille avec de l'eau-de-vie à laquelle
le fruit a donné son parfum. Quand il n'y a plus
d'armagnac on en ajoute d'autre. Cette singu-
lière préparation se fait à Labastide-d' Armagnac,
non seulement avec des poires, mais aussi avec
des pêches et des raisins.
Ayant reçu cette leçon de prestidigitation
horticole, je me suis mis en route pour Nérac.
A la gare j'assistais au chargement d'une quan-
tité de sacs et de paquets de bouchons. La cu-
riosité me prend de lire les étiquettes : les envois
sont pour tous les coins de la France ; ces noms
de petites villes visitées il y a des années parfois
m'emmènent bien loin de Lavardac et de la Gas-
cogne. Voici un sac pour Chaumont-en-Vexin,
et il me semble respirer la saine odeur de fruits
à cidre tombés dans les pommages.
Ce doit être un plaisir d'être homme d'équipe
à Lavardac. Les employés de la gare soulèvent
sans peine d'énormes fardeaux. Quels hercules,
ces petits Gascons ! Mais les ballots ne con-
tiennent que du liège, on peut porter sans trop
LA CAPITALE DU « BÉARNALS )) . 6l
de peine un mètre cube de bouchons, les
brouettes et les « diables » se chargent de véri-
tables pyramides de caissettes. Auguste, l'écuyer
du cirque, pourrait ici prendre les poses de
Samson qui réjouissent tant son public !
Le trajet est court de Lavardac à Nérac,
quelques minutes au long de la vallée de la
Baïse, et voici le hall clair et élégant de la gare
où se bifurquent les lignes de Riscle et de Mont-
de-Marsan.
Un boulevard que ne borde encore aucune
maison conduit à un grand mail planté de beaux
arbres. Au delà, s'étend une seconde ligne de
larges boulevards, appelée les avenues d'Albret.
La route de Mézin y aboutit en face d'une statue
de Henri IV, donnée à la ville par le comte
Dijon.
A noiisté Henri — A notre Henri — dit l'ins-
cription gasconne. Cette familière et tendre ap-
pellation ne semble pas inspirer beaucoup de
respect à la marmaille de l'endroit, les marches
du piédestal sont couvertes de cailloux et de tes-
sons de bouteille. Cette négligence surprend,
car la ville est aimable et bien tenue, les rues
sont propres. Une troisième ligne de boulevards
rappelle le tracé circulaire des fortifications qui
02 VOYAGE EN FRANCE.
enceignaient la capitale favorite des rois de
Navarre. La partie la plus large porte le nom de
cours Victor-Hugo. Une double rangée de bancs
forme des banquettes presque ininterrompues
offrant un asile aux flâneurs.
Sauf dans les rues commerçantes bordées de
boutiques, la plupart des maisons sont envelop-
pées de verdure et de fleurs, roses, vigne ou
jasmin. Les vieux murs sont fleuris de muffliers,
de giroflées et de valériane. Ces plantes amies
des ruines croissent aussi sur les débris de rem-
parts surmontés de. vieilles bâtisses qui dominent
sur la rive droite le chenal étroit de la Baïse. Un
pont dont l'arche centrale est ogivale franchit la
rivière et, par d'étroites rues, entre de vieilles et
curieuses maisons, conduit au cœur du Petit-
Nérac, faubourg qui, mieux que la ville propre,
a gardé la physionomie du passé. Des logis à
galeries, des tanneries, des séchoirs à mottes
font un pittoresque décor de ces bords de rivière
sur laquelle passent de grands chalands. Au
fond, la belle arche en anse de panier du pont
neuf complète le tableau. De la partie haute du
Petit-Nérac, étagée sur les rochers, on a une vue
charmante: la ville en amphithéâtre, les coteaux
aux pentes douces, la Baïse sinueuse et les ponts.
Ce quartier possède une église moderne, heu-
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) . 63
reiix pastiche du xm* siècle, dont l'intérieur har-
monieux inspirerait autant de vénération que les
vieux temples, sans les couleurs trop crues du
chemin de croix.
Combien ce charmant édifice — devant lequel
est le modeste hôtel qu'habitait Sully — est su-
périeur à l'église du Grand-Nérac, lourd édifice
d'un style ultra-classique, dont la nef unique
finit en cul de four ! C'est une inconcevable
erreur de Louit, le grand architecte auquel on
doit le théâtre de Bordeaux.
Nérac possède une chose admirable : sa Ga-
renne, ancien parc du château des rois de Na-
varre. Peu de villes ont une promenade compa-
rable à ces bords de la Baïse couverts de grands
chênes et de vieux ormes, où la roche apparaît
sous un manteau de pervenche et de mousse.
Des sources sourdent, leurs eaux captées emplis-
sent des vasques, alimentent des fontaines gra-
cieusement ornées.
Une de ces fontaines sort d'une grotte et forme
un petit bassin au milieu duquel est un rocher
enveloppé de plantes aquatiques ; sur le marbre
est sculpté le corps d'une jeune fille morte
noyée. C'est la légende de Fleurette, la jolie
jardinière qui se serait suicidée par désespoir
de l'abandon du roi. Nul n'a songé à souiller ou
64 VOYACiE EN FRANCE.
balafrer la nudité marmoréenne de l'imaye, et
c'est à l'honneur de la population.
La Baïse, si dolente en apparence, a ses fu-
reurs ; on a indiqué sur les murs d'un petit édi-
fice la trace des inondations qui élevèrent le
niveau de plusieurs mètres.
Au bord de la grande avenue est une gra-
cieuse fontaine élevée en l'honneur du dauphin.
L'inscription de cet édicule est assez curieuse :
Quatorze sénatevrs du siège de TEdit de Gvienne, sovbz
Tautorité du davphin François, ont fait enclore les très
cliastes ondes de ceste claire fontaine, dans le monument
de ce gentil ovvrage, de pevr qu'alcvn par l'envye des
fontaines voysines ne covpat ses veines, dcstovrnant sa
sovrce, ne trovblat son covrant, ne sovillat sa sitvation et
ses détovrs.
Rvisselez toviours, petites ondelettes, esbattez-vous,
eavx délicates, et administrez droit et ivstice à tovtes les
autres fontaines ! Que vostre flot argentin sorte incessam-
ment! que vostre mobilité crespelée savtelle! que vostre
dovx mvrmvre siffle ! que vostre liqveur vitrée novs adov-
cisse, et sovbz l'ombre de l'enfant héroïque, notre pro-
tecteur, d'un covrs perpétuel avec une récréation arrov-
sante, toviovrs relvisante, éteignez la soif des citoyens de
Nérac.
C'est un peu long et emphatique; cependant,
sous l'ombrage puissant de ces arbres dont l'un,
le plus rapproché, a été planté de la main du
roi Henri, on est ému au lieu de sourire. Comme
LA CAPITALE DU « BEARNAIS ». 65
ces évocations aux pures ondes des fontaines
nous ramènent loin, bien loin dans le passé î
Cette époque du roi Henri avec ses luîtes de re-
ligion et ses tristesses avait au moins des heures
d'apaisement et de poésie. Et ce n'est pas sans
tristesse que l'on songe à nos heures moroses.
D'autres sources, puis, au fond, les belles
ruines féodales du château de Nazareth accrois-
sent l'attrait de celte Garenne où j'ai longtemps
erré, jusqu'au moment où les pi emières lumières
s'allumaient dans la ville, vers les pauvres restes
du château des rois de Navarre dont on devine
à peine la splendeur passée.
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI.
LES BOUGHONNIERS DE MEZIN
L'industrie de Nérac. — Les bouchonniers. — Les forêts de chênes-
lièges ou siiriers. — La culture des suriers. — Le commerce
du liège. — Le pas de Gascogne. — Au bord de la Gélise. —
La forêt. — Mézin et les ateliers de liégeurs. — Sos. —
L'école d'agriculture et de viticulture de Saint-Pau.
Sos. Juillet.
Nérac n'est pas seulement une jolie ville, c'est
encore un centre de commerce fort actif, où les
eaux-de-vie de l'Armagnac viennent en partie
s'entreposer ' ; plusieurs industries se rappor-
tant à la distillerie des vins et à la culture de la
vigne ont installé des ateliers dans cette partie
vivante de l'Albret. La brasserie et la produc-
tion des engrais occupent également beaucoup
de bras. Le commerce agricole a une part im-
portante dans le mouvement des affaires. Gomme
I. Sur la production des eaux-de-vie d'Armagnac, voyez la
3o« série du Voyage en France, notamment le chapitre XX, et,
dans le présent volume, le chapitre Vil.
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 67
toute bonne ville gasconne, Nérac met en œuvre
les volailles engraissées au maïs pour la fabri-
cation de conserves et de pâtés. Les terrines de
Nérac ont la faveur des gastronomes.
La fabrication des bouchons n'a pas pris à
Nérac une importance comparable à celle des
établissements de Lavardac et de Mézin, cepen-
dant on y rencontre quelques ateliers, la cons-
truction et la réparation des machines à tra-
vailler le liège se font surtout dans la ville. Mais
pour les centres bouchonniers, les campagnes
du Condomois ou des Landes, Nérac est le
centre d'attraction. Jadis favorisées par la Baïse
navigable, les affaires ont été accrues depuis la
construction des chemins de fer, la ligne de
Mont-de-Marsan notamment, qui pénètre ou
frôle la grande forêt de chênes-lièges, dont elle
recueille les bois et les écorces.
Ces mots « forêt de chênes-lièges » ne sont
pas d'une exactitude absolue. Il n'y a pas de
futaies exclusivement composées de ces arbres,
ils sont mélangés aux pins maritimes, surtout
dans la zone forestière conquise à la suite des
travaux de M. Chambrelent \ Mais à mesure
que les pins parviennent à l'âge d'être exploités
I. 3o^ série du Voyage en France, chapitres II et III à VII.
68 VOYAGE EN FRANCE.
ils disparaissent et laissent le chêne maître
du sol.
Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit dans
mon précédent volume, relativement à la cul-
ture de cet arbre précieux; il faut cependant rap-
peler que le cliêne-liège des Landes n'est pas
considéré par les botanistes comme le véritable
chêne-liège, ce dernier croît autour de la mer
méridionale, en Provence, en Roussillon, en
Espagne, au Maroc, en Algérie et en Tunisie.
L'autre se plaît sur les rivages plus humides de
l'Océan, on le trouve en abondance en Portugal
et sur les côtes atlantiques du Maroc. Plus rus-
tique que son frère méditerranéen, il en diffère
par son mode de végétation et sa plus grande
résistance au froid. A part cela il faut l'œil du
botaniste pour distinguer un arbre' de l'autre
par l'examen de la cupule du gland.
Quoi qu'il en soit, on a fait du chêne-liège
des Landes une espèce à part. Gomme il se plaît
sur la mer d'Occident, on l'a nommé Quercus
occidentalis . Dans les Landes, les bûcherons et
les liégeurs lui donnent le nom de siirier.
En Lot-et-Garonne, le cadastre évalue à
1 7 846 hectares la surface occupée par les pins
et à 5 598 hectares celle des surèdes, c'est moins
que dans le département des Landes où l'on
Échelle au ijSW 000'.
LE CHÈNE-LIÈGE EX LOT-ET-GARONNE.
Les communes marquées n sont celles où l'on signale le chène-liége. Les
chifli-es indiquent les surfaces constatées par le cadastre (en hectares).
Les parties de la foret grisaillées "^^ sont les principales surèdes ou futaies
de chénes-liéges occidentaux (suriers).
70 VOYAGE EN FRANCE.
compte i3ooo hectares de chênes-lièges, bien
peu de chose auprès des 82 700 hectares du dé-
partement du Var^ Mais pendant longtemps la
forêt de la région de Nérac passa pour la plus
importante de France :
Quelques chênes-lièges, disait Abel Hugo vers i835,
existent épars (sic) dans l'Esterel, en Provence et dans
les Pyrénées-Orientales ; la forêt du Maransin dans les
Landes est formée d'arbres de cette espèce ; mais la forêt
qui fournit la majeure partie du liège nécessaire à la con-
sommation de la France se trouve dans le département
de Lot-et-GaronnC;, sur la rive gauche de la Gélise, où elle
occupe un espace de huit lieues carrées.
A cette époque les statistiques révélaient
à Nérac, Barbaste et Mézin 70 fabriques de
bouchons occupant 700 ouvriers et livrant
i3o 000 quintaux métriques de bouchons et de
liège façonné.
Les richesses de la France étaient donc fort
imparfaitement connues, car la forêt de liège du
pays de Nérac ne pouvait être la plus grande,
mais les forêts des Maures et de l'Esterel
n'avaient pas encore été explorées, elles étaient
inexploitées faute de moyens de transport, tan-
1. Sur l'industrie du liège dans le Var, voyez la iS^ série du
Voyage en France, la Provence maritime.
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 7I
dis que les Landes, voisines de Bordeaux, grand
port et grand centre de consommation^ avaient
pu développer l'exploitation. Dans les Maures,
au contraire, on n'utilisait pas le liège, les ar-
bres servaient à faire du charbon ; leurs pousses,
rongées par les moutons et les chèvres, ne pou-
vaient se développer ; à peine tirait-on un peu
de liège pour les usages de la marine ou pour
tailler des bouchons vendus à la foire de Beau-
caire ; mais quand l'industrie eut pris son essor
et que le liège reçut de si nombreuses applica-
tions, la Provence commença à préserver ses
forêts : depuis i84o, elle- est entrée en lice et
dépasse de beaucoup le Lot-et-Garonne.
Cependant l'emploi du liège s'est répandu si
prodigieusement que le pays de Nérac, loin de
souffrir de la concurrence, a accru ses ateliers ;
ne trouvant pas assez de matières premières
pour ceux-ci, il doit s'adresser au dehors, à
l'Algérie surtout. Qu'est cependant la produc-
tion française auprès de celle des autres pays !
D'après M. Lamey ^ les contrées où l'on récolte
le liège fournissent environ 687 000 quintaux
métriques de liège préparé. Sur cette quantité,
près de la moitié est livrée par le Portugal
I. Le Chène-liège. Paris, Berger-LcATault et C*e.
"72 VOYAGE EN FRANCE.
(275000), l'Espagne vient ensuite avec i4oooo,
la France donne 60 000 quintaux, l'Algérie
88000, la Tunisie 10 000; soit 1 58 000 pour l'en-
semble des pays français. Quant à l'Italie, sa
part de 10 000 quintaux est infime.
En admettant le prix de o fr. 65 c. le kilo-
gramme pour les lièges préparés — non ouvrés
encore — le Portugal fournit au commerce du
monde pour 17875000 fr. de liège, l'Espagne
9100000 fr., la France et ses possessions de
l'Afrique du Nord 10 270 000 fr. L'Italie n'atteint
pas un million.
Nos lièges français sont en grande partie con-
sommés sur place, tandis que le Portugal et
l'Espagne font de l'exportation; ce sont eux
surtout qui alimentent l'Angleterre, l'Amérique,
l'Allemagne et les pays du Nord. Nous semblons
avoir une part dérisoire dans ce commerce ; en
réalité, notre lot est considérable puisque nous
livrons à l'étranger des millions de bouteilles
de vins, de liqueurs et d'eau-de-vie bouchées
avec nos lièges. On a calculé que la Champagne
seule absorbe tous les ans i5ooo quintaux de
bouchons. Étant donnés les déchets, c'est la
dixième partie au moins de ce que le Portugal
peut fournir avec son énorme production de liège
non ouvré.
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 78
Dans le Lot-et-Garonne, la zone des suriers
est toujours sur la rive gauche de la Gélise,
comme le constatait Abel Hugo; elle comprend
toute la grande région boisée qui va finir vers
les landes d'Houeillès, mais le chêne-liège se
fait de moins en moins nombreux à mesure que
l'on s'éloigne de la rivière.
Les chênes-lièges, par les soins dont ils ont
été l'objet, ont fini par constituer des massifs
particuliers au sein de la grande forêt landaise
et le cadastre a pu en constater l'étendue dans
21 communes. C'est à l'aide des chiffres commu-
niqués par l'actif directeur de l'école d'agricul-
ture de Saint-Pau que j'ai pu établir la carte des
surèdes de Lot-et-Garonne en indiquant aussi les
communes dotées de chênes-lièges mais non
recensées par le cadastre.
Ces étendues s'accroîtraient sans doute, n'était
la concurrence d'autres régions liégeiises, mais
celles-ci, qui ne possèdent pas de lièges aussi fins,
d'une teinte aussi régulière, ont remédié à cette
infériorité par des procédés de blanchiment et
de soufrage qui permettent à leurs produits de
lutter contre ceux de la Gélise et amènent la
réduction actuelle dans l'étendue des surèdes à
Barbaste, Lisse, Poudenas, Réaup, Sos, etc.
L'exploitation de ces arbres remontant à une
74 VOYAGE EN FRANCE.
époque assez lointaine, on constate le maintien
de méthodes commerciales peu en rapport avec
les données précises de nos jours, c'est ainsi que
la base des transactions est encore sur bien des
points le pas de Gascogne, mesure variant selon
la qualité. Le meilleur liège marchand est vendu
d'après un cube d'une largeur de o'^'",925 et
une hauteur de 26 planches sur le devant, 28
sur le derrière et les débris intercalés. Pour les
lièges de qualité moindre on met 3o ou 82 plan-
ches devant, 38 derrière.
Déjà gênant par ces mesures arbitraires, le pas
de Gascogne l'est bien davantage par la facilité
offerte à la fraude. Le maître tireur , c'est-à-dire
bûcheron qui détache ou tire le liège, s'entend
souvent avec l'acheteur au détriment du ven-
deur. Le pas qui devrait peser 260 kilogrammes
se trouve alors en avoir 3oo. Aussi s'eff*orce-
t-on de faire adopter la vente au poids. Un des
principaux propriétaires de forêts, M. Cap-
grand-Mothes, directeur de l'école pratique
d'agriculture de Saint-Pau, est parvenu à impo-
ser ce système. L'emploi de plus en plus grand
des lièges d'Algérie, toujours vendus au poids,
amènera sans doute une révolution plus com-
plète. M. de Montesquiou, dans une communi-
cation faite il y a vingt ans au comice agricole
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 76
de Nérac, évaluait à 4o fr. pour uu pas le béné-
fice réalisé par la vente à la pesée.
Ce ne sont pas seulement les procédés de vente
et d'achat qui doivent être transformés, l'exploi-
tation elle-même a besoin d'être conduite dans
un esprit de progrès. Le traitement des arbres
est jusqu'ici assez barbare. Lorsque ceux-ci ont
atteint une dimension permettant de les démas-
clery c'est-à-dire d'enlever la première écorce ou
liège mâle, qui n'a aucune valeur, il faut attendre
plusieurs années, neuf, dix ou douze ans, avant
de pouvoir récolter le liège marchand. Celui-ci
se présente souvent avec une surface boursouflée
ou crevassée qui réduit fort l'épaisseur utile. Il
importe donc d'obliger l'écorce ou siiher à croître
régulièrement, sous une surface lisse. M. Cap-
grand-Mothes a résolu le problème avec élé-
gance. Une fois le démasclage opéré, on replace
sur la plaie le canon de liège mâle enlevé en
fermant hermétiquement les points de suture à
l'aide de carton et on lie le canon au moyen de
fils de fer. Si l'on a bien exactement rappliqué
l'écorce, le liège qui se reforme en dessous est
absolument lisse; au lieu des croûtes, des canne-
lures et des boursouflures on obtient une sorte
de pellicule.
Le succès de l'inventeur dans son domaine de
76 VOYAGE EN FRANCE.
Saint-Pau où il possède 10 000 pieds de suriers
a été grand, mais il n'en a pas été de même
dans les Maures et l'Esterel où le chêne-liège
proprement dit n'a pu supporter le régime dont
se trouvait bien le chêne occidental ou surier.
Nérac est séparée de la forêt par la péninsule
de collines qui s'étend entre la Baïse et la Gélise.
Le chemin de fer et une route y conduisent à
travers une jolie campagne offrant bientôt des
vues sur la vallée de cette dernière rivière ; du
sommet des coteaux on voit très bien la délimi-
tation précise du pays de cultures et de la région
forestière. D'un côté de la Gélise des cultures
fraîches et des vignes, de l'autre la sylve pro-
fonde : pins d'un vert sombre, suriers tout roux
en cette saison par la profusion de pousses nou-
velles qui prolongent chaque rameau.
Dans une clairière, le village de Lisse montre
la belle tour de son château. Un autre castel,
Hordosse, au confluent de la Gélise et de l'Au-
zoue, appartint à du Bartas qui l'habita long-
temps et y écrivit une partie de ses œuvres.
La forêt, de chaque côté de Lisse, aboutit à
la Gélise même, ses arbres se reflètent parfois
dans l'étroit courant. Les pins gemmés, les tail-
lis de chênes écorcés pour la tannerie et les su-
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 77
riers constituent le peuplement. Ces arbres
croissent en plein sol landais, c'est-à-dire dans
le sable reposant sur Talios. Aussitôt la Gélise
franchie on aperçoit la roche perçant sous une
terre fauve et l'on trouve les cultures. Dans cette
zone fertile, le village d'Andiran est en partie
peuplé de liégeiirs; on y fait surtout les encriers
légers en usage dans beaucoup d'écoles.
Aux abords de Mézin, la culture a quelque
peu fait reculer la forêt, la rive gauche de la Gé-
lise offre une large bande de champs, de vignes
et de vergers que la petite ville contemple du
haut de sa colline.
Des remparts enveloppaient jadis Mézin^ ils
ont disparu depuis longtemps, laissant çà et là
quelques débris, et sont remplacés par des bon-
•yS VOYAGE EN FRANCE.
levards dont un, montant de la vallée, est bordé
d'arbres superbes. Dès que l'on pénètre dans
les rues, on est saisi par la senteur spéciale du
liège, exaspérée souvent par l'ébullition ou la
combustion. C'est plus frappant encore qu'à
Pont-de-Bordes, car toutes les maisons sont
des ateliers ou des usines consacrées au travail
du liège. Dans chaque famille, père, mère, en-
fants sont occupés à la fabrication des bou-
chons, des semelles ou d'une foule d'autres
objets. La commune renferme près de 3 ooo ha-
bitants, dont 2 000 environ dans la ville elle-
même, et il y a dans les ateliers urbains ou de
la banlieue i ooo ouvriers qui se livrent à cette
industrie '.
La ville est simple, dans les limites de ses
murailles détruites et qu'elle n'a pas dépassées ;
mais l'enceinte est remplacée par une rangée de
maisons se rattachant aux anciennes portes, dont
il reste les côtés. Sauf la rue principale, de mé-
diocre largeur déjà, il n'y a que des ruelles
étroites, montueuses, pavées d'une façon inégale
à l'aide de grosses pierres. Sur une place dont
un des côtés encore entouré d'arcades révèle que
I. Mézin compte ii usines, 35 fabricants patentés, 7 marchands
de liège et 3 marchands de bouchons en gros.
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 79
Mézin fut une bastide, est l'unique monument
de la ville, l'église, fort bel édifice ; l'abside
romane est une merveille de grâce robuste et
sobre. Les fenêtres entourées d'ornements d'une
grande pureté offrent des arcatures retombant
sur des colonnes aux chapiteaux fleuris. De
chaque côté du chœur s'ouvre une chapelle gra-
cieuse. La nef est ogivale.
A côté de l'église s'étend une terrasse d'où
l'on contemple de vastes horizons : la riante val-
lée de la Gélise, les campagnes bien cultivées
du Gabardan et du Gondomois, et surtout les
espaces infinis des landes plantées de pins et
de chênes-lièges. Sur cette petite place, Mézin a
érigé le buste du général Tartas.
A mon arrivée, Mézin semblait endormie,
aucun bruit ne se faisait entendre. Sans le par-
fum sui generis du liège et les bouchons étalés
sur des claies à côté des portes, rien n'aurait ré-
vélé l'industrie de la petite ville. C'était le repas;
chaque jour, de midi et demi à deux heures,
le calme se fait ainsi. Maintenant les rues se
sont animées, hommes et femmes vont aux ate-
liers où a lieu le travail en commun pendant
que toutes les portes et les fenêtres ouvertes
laissent apercevoir l'atelier familial. Je suis
8o VOYAGE EN FRANCE.
cordialement admis dans les maisons où je de-
mande à assister au travail. A domicile, on ne
fait guère que le bouchon, la machine, si expé-
ditive et simple, a peu à peu supplanté la pro-
duction à la main. Celle-ci est préférée pour les
qualités supérieures, quand Touvrier doit tirer
de son carré de liège un bouchon sans défaut,
n'ayant aucune partie mauvaise. Avec la machine,
le bouchon rigoureusement calibré est fait sans
tenir compte des parties crevassées ou dures.
A la main un bon ouvrier ne fait guère plus
de 800 à I 000 bouchons par jour, tandis que la
machine en livre 4 ooo- On est donc arrivé à
quadrupler la production, même davantage car
certaines machines peuvent faire jusqu'à 7 000
pièces. Cependant la consommation s'accroît si
régulièrement que le nombre des bouchonniers
ne diminue pas; bien au contraire, on n'a jamais
fait autant de bouchons à Mézin.
D'après les ouvriers que j'interroge, le salaire
est d'environ 2 fr. 5o c. à 3 fr. par jour. Les plus
habiles peuvent arriver à gagner de 18 à 20 fr.
par semaine. C'est modeste, comparé aux gains
d'autres industries, mais l'existence est facile
dans ce pays au climat si doux que les jardins
possèdent des oliviers, cultivés comme arbres
d'ornement .
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 8l
On ne fait pas seulement le bouchon ordinaire
à Mézin ; on prépare tous les articles demandés
par certaines industries, la pharmacie, les pro-
duits chimiques, etc. Afin de ne rien perdre de
leur clientèle, certains fabricants ont même créé
la production de bouchons en bois, en verre et
autres matières. On fait les semelles et les talon-
nettes, les rondelles, les viroles, les cubes, les
poignées de bicyclettes, des objets pour la pas-
sementerie, que sais-je encore ; partout dans la
ville et dans les usines hydrauliques, le liège
change de forme.
Aussi n'a-t-on pu suffisamment trouver de
liège dans la forêt. Celle-ci donne à peine la
vingtième partie de la matière première des usi-
nes de Lot-et-Garonne. Mézin est devenu un
important client pour TAlgérie et l'Espagne. On
tire de ces pays, me dit-on, 3 ooo balles par
année. La balle de liège en planches est d'en-
viron 70 à 80 kilogrammes. Ce serait donc près
de 25oooo kilogrammes que Mezin seul irait
chercher au dehors.
La perte au travail est énorme, M. Lamey
l'évalue à 65 p. 100. Aussi cherche-t-on à utiliser
les déchets. On les emploie à la fabrication des
briques de liège en mélangeant des débris gros-
sièrement moulus avec de la chaux. Ces briques
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. G
Ô2 VOYAGE EN FR,\NCE.
ont un débouché assuré dans beaucoup d'indus-
tries, grâce à leur légèreté et à leur incombusti-
bilité. D'autres usines agglomèrent ces résidus
pour de nombreux emplois industriels. Un fabri-
cant produit des bouées de sauvetage. En un
mol, rien n'est perdu de ces détritus jadis en-
combrants.
Plus de trente maisons figurent aux annuaires
pour la seule fabrication des bouchons ; il en est
d'autres dans les villages voisins, notamment à
Poudenas, village bâti à l'issue d'un court val-
lon descendu de la forêt. Le travail industriel
du liège finit là, mais l'exploitation de la forêt se
poursuit plus loin encore, jusqu'à la petite ville
de Sos, le dernier centre un peu considérable
de Lot-et-Garonne dans la direction des Landes.
Sos est dans la région que l'on peut appeler
Armagnac, car elle a beaucoup de vignes et
produit des eaux-de-vie. Une petite industrie
née de la forêt y persiste, la tabletterie. C'est
une ancienne ville, située sur la chaussée ro-
maine dite Ténarèze ; on croit qu'elle aurait
succédé à la capitale de la tribu gauloise des
Sosiates. C'était jadis et c'est encore mainte-
nant le point de ravitaillement pour les habi-
tants des Landes, les premières pinèdes sont de
l'autre côté d'un des vallons entre lesquels la
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 83
ville est bâtie, vallon bien cultivé au fond duquel
le village de Meylan est à demi entouré par la
forêt de pins et de chênes-lièges. Dans une clai-
rière voisine, le château de Saint-Pau a été amé-
nagé par M. Capgrand-Mothes en école pratique
d'agriculture pour le département ; elle offre
cette particularité de posséder une chaire de syl-
viculture où l'on étudie particulièrement la cul-
ture du chêne-liège et du pin. Une partie de la
forêt, autour de l'école, est un admirable champ
d'expérience, conduit depuis bien des années
avec une science remarquable.
VI
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET
Entre Agen et Lectoure. — Le pays de Brulhois. — Layrac. —
Astaffort. — En Lomagne. — Lectoure. — La maison du ma-
réchal Lannes. — Fleurance et le pays de Gaure. — En Fezen-
zaguet : Mauvezin et INIonfort.
Auch. Août.
Pour les divers pays composant l'Armagnac,
Agen est le nœud des communications avec
Paris et le centre de la France. Si Bordeaux et
Toulouse sont les centres d'attraction, où va se
fondre une émigration si active, ils ne détermi-
nent pas le principal courant d'affaires ; encore
le mouvement sur Bordeaux emprunte-t-il tou-
jours l'Agenais, c'est à Agen ou à Port-Sainte-
Marie que se t'ait le transit des marchandises et
des voyageurs. La ligne en construction ou étu-
diée de Bazas à Auch modifiera peu le cou-
rant.
La vallée du Gers, moins importante que
celle de la Baise, moins riche aussi, n'étant pas
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. 85
autant centrale, a cependant bénéficié la pre-
mière des voies ferrées, grâce à l'attraction du
chef-lieu et à la situation d'Agen sur la roule de
Paris, mais les relations du département ont été
sacrifiées, puisque les deux principales villes,
Condom et Auch, ne sont pas unies par des rails.
Les chemins de fer à petit écartement feront
cesser cette situation en complétant les amélio-
rations que doivent réaliser les lignes d'Eauze à
Auch et Lannemezan et de Gastelsarrasin à Gi-
mont^
Cette ligne maîtresse, d'Agen à Auch et à
Tarbes, est jusqu'ici la seule qui desserve la
Lomagne, vaste région étendue depuis la ligne
de faîte entre Baïse et Gers, et la Garonne, vers
Gastelsarrasin et Verdun. Bien que la Lomagne
ait perdu de bonne heure son autonomie en de-
venant simple province de l'Armagnac, son nom
a prévalu pour les petites villes de Lavit-de-Lo-
magne et Beaumont-de-Lomagne, en Tarn-et-
Garonne. Au point de vue agricole et dans le
langage courant, elle a encore une existence
I. Le Conseil rjéiiéral du Gers est saisi d'un projet de chemins
de fer secondaires comprenant un premier réseau de 288 kilomè-
tres, lignes de : Gazaubon à Estang et Nogaro ; Thermes d'Ar-
magnac à Marciac, Plaisance et Mirande ; Condom à Mirande ;
Valence à Castéra-Verduzan ; Auch à Tournecoupes, Sérempuy à
Mauvezin, Cologne et Cadours, Gimont à Saramon et Lombez.
86 VOYAGE EN FRANGE.
propre, on dit la Lomagne comme on dit l'Ar-
magnac ^
La Lomagne commence sur la rive gauche de
la Garonne, après le massif qui constitue le
canton de Laplume. Celui-ci était bien de l'Ar-
magnac cependant, dont il constituait une divi-
sion sous le nom de Brulhois. Par ce dernier
l'Armagnac confinait au grand fleuve du Sud-
Ouest qui le séparait de la Guyenne. Le Gers et
TAuvignon formaient les autres limites.
Donc c'est en Brulhois que me conduisait le
train par lequel j'ai gagné la petite ville de Lay-
rac, à travers cette riante et plantureuse cam-
pagne garonnaise qui fit l'admiration d'Arthur
Young. Layrac est une mignonne ville qui a
perdu son titre plutôt honorifique de capitale
du pays, un instant porté par elle, alors que sa
rivale, bourg moins populeux, Laplume, deve-
nait chef-lieu d'un canton. Une belle église ro-
mane domine par sa tour octogonale l'amphi-
théâtre des toits bruns. Au pied coule le Gers ;
l'administration a fait à la pauvre rivière la flat-
terie de la considérer comme navigable pendant
la demi-lieue qui la sépare encore de la Ga-
I. Pour la portion de ce petit pays dévolue au Tarn-et-Garonne,
voyez le chapitre XIV.
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. 87
ronne, mais on y chercherait vainement un ba-
teau de transport.
Layrac est dans une situation charmante, des
abords on jouit d'une vue étendue sur la vaHée
de la Garonne et les collines de TAgenais, si
nettement et bizarrement découpées. Mais, en
amont, la vallée se ferme et devient le large cou-
loir qu'elle sera jusqu'au pied de la terrasse de
Lannemezan. Les collines basses, admirable-
ment cultivées, sont encore en partie couvertes
de vignes dont beaucoup issues de plantations
récentes. Les céréales sont superbes ; comme
sur l'autre versant de la Garonne, la culture de
l'oignon couvre de grands espaces.
Au sommet d'une colline. Fais se signale par
une pittoresque église ayant pour façade un pi-
gnon triangulaire ; le clocher est un simple pan
de mur très élevé, percé de niches où sont les
cloches. De ce coteau, la vue s'étend sur la
vallée, belle surtout par l'inexprimable richesse
de ses campagnes, car les formes sont trop
molles pour donner du caractère au paysage.
Du côté opposé, le pays — le Brulhois — dé-
coupé par de nombreux vallons, n'est pas moins
heureux d'aspect, mais les villages sont rares
et menus. Beaucoup ne groupent pas cent habi-
tants autour de l'église, Marmont-Pachas en a
05 VOYAGE EN FRANCE.
seulement i4 au centre sur les 189 de la com-
mune et le bourg principal, Laplume, chef-lieu
du canton, en renferme 4iO) un peu plus du
quart de sa population totale. Aussi n'y a-t-il
guère de commerce dans cette zone, sinon celui
des produits agricoles. Tous les cours d'eau qui
y naissent ont une origine commune sur les
lianes d'une haute colline se terminant par une
cime escarpée d'où l'on commande d'immenses
horizons. Là, très lier d'aspect, est Laplume ;
ce fut sans doute la forteresse qui maîtrisait ce
pays si profondément découpé.
Le Brulhois finit au Gers, au-dessous d'Astaf-
fort, bourg de Lomagne dont l'aspect contraste
avec l'opulence des campagnes voisines ; la pau-
vreté des matériaux de construction explique
l'aspect assez triste de ce centre, point d'attrac-
tion pour une partie de la Lomagne, vers Mira-
doux, pauvre petite bastide, jadis forteresse
importante.
Astaffort marque la limite de Lot-et-Garonne ;
à moins d'une lieue on est dans le département
du Gers. La rivière qui donne son nom à ce der-
nier ne s'est pas accrue depuis Auch, elle n'est
guère plus large et abondante que la Bièvre en
amont de Paris et cependant elle a déjà parcouru
167 kilomètres! Sur ses rives la vie est active
LOMAGNE DU GKRS, GAURE ET FEZENZAGUET. 89
en ce moment, on procède au battage et à
l'éclaircissage du maïs. Derrière les bœufs qui
conduisent lentement la houe, des femmes achè-
vent le travail.
Raides sur la rive droite, les pentes sont
douces du côté de l'occident ; cependant un
mamelon surgit, haut, de belle forme, couronné
par le village de Lagarde-Finarçon entourant
une mince flèche d'église. En face, sur un ro-
cher à pic de la rive droite, Gastex-Lectourois
semble s'affaisser, tant ses maisons sont basses.
Le fond de la vallée s'est évasé, le Gers se traîne,
sinueux, entre des prés encadrés d'aulnes, de
peupliers et d'ormes. Des bœufs mènent les ma-
chines faucheuses, spectacle qui surprendrait
bien nos cultivateurs du Nord, habitués au tra-
vail rapide de leurs chevaux.
Sur une colline une ville apparaît, très fière
dans sa ceinture de remparts dominant de haut
des pentes raides, elle dresse la masse puissante
d'une cathédrale aux tours rongées par les ans.
Ce fut un évêché, en effet, jusqu'à la Révolution,
cette Lectoure, capitale de la Lomagne ; son
évêque partageait avec le roi le titre de seigneur
de la ville. Longtemps aussi, elle a été la capi-
tale de l'Armagnac et sa forteresse la plus puis-
sante. La prise de la ville par l'armée de Louis XI
90
VOYAGE EN FRANCE.
fut en quelque sorte le glas de la féodalité. De-
puis ce grand drame historique, Lectoure a peu
à peu perdu toute importance, la suppression de
son évéché activa la décadence que le phylloxéra
a encore accrue. La dépopulation est plus active
que dans les autres villes du Gers. Il y eut près
de 7 000 habitants au commencement du siècle,
on n'en comptait plus que 6 ooo avant la guerre
et le dernier recensement n'en signale pas 4 ooo ' !
r/est donc une commune en décadence.
Lectoure a conservé belliqueuse mine. Si les
rues sont d'un calme profond, la principale,
large, bordée de belles maisons, garde l'aspect
des petites métropoles d'autrefois. La cathédrale,
les édifices et les promenades qui l'avoisinent
I. Exactement 4 49o, dont 2 Sgi agglomérés.
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. QI
ibrment un ensemble charmant. Cette église,
œuvre de l'époque ogivale, est belle, par le chœur
surtout dont la voûte élancée est soutenue par
des colonnes engagées, ornées de chapiteaux
sobrement fouillés. Autour, rayonnent neuf cha-
pelles, charmantes par leurs nervures et leurs
clés de voûte. L'une d'elles renferme la sépul-
ture d'un Narbonne Pelet, évêque de Lectoure.
L'évêché avoisine l'église. Acquis par le maré-
chal Lannes, le plus illustre des Lectourois, il a
été donné à la ville par la maréchale. Ce palais
est devenu l'hôtel de ville et la sous-préfecture,
il renferme aussi un musée dont la curiosité
principale est une galerie de portraits de géné-
raux de la Révolution et de l'Empire, nés dans
cette petite contrée de Lomagne.
Au chevet de la cathédrale, une partie des an-
ciennes fortifications a été plantée d'arbres; c'est
le Bastion. Un kiosque pour la musique, des
pelouses, la statue de Lannes ornent cette en-
trée de la ville. Le futur maréchal et duc de
Montebello, dont l'origine était des plus humbles,
travailla moyennant six sous par jour au com-
blement des fossés et à la plantation de ce mail
que son effigie orne maintenant.
Lannes est né dans une étroite voie, la rue
Montebello, reliant la grande rue au rempart.
92 VOYAGE EN FRANCE.
La maison, que ne signale aucune inscription,
est une pauvre bâtisse de poutrelles, aujour-
d'hui occupée par un menuisier; elle a perdu
son aspect d'autrefois : on y a percé une fenêtre
et placardé une devanture de boutique. Le père
de Lannes était garçon d'écurie.
Près de là, quelques vieilles maisons bordent
des ruelles aboutissant au rempart qui domine
la vallée ; deux chapelles attirent l'attention par
leurs porches sculptés.
Du Bastion la vue est fort étendue, merveil-
leuse même lorsque le temps clair permet de
contempler la chaîne des Pyrénées dessinant
ses monts bleuâtres, couronnés de^ neige. Au
premier plan, sur une colline, se profde Ter-
raube; dans la vallée les toits de Fleurance cou-
vrent un grand espace ; plus loin Auch se révèle
par les hautes tours de sa cathédrale. Le pays
semble un sinueux et verdoyant plateau, tant
sont uniformes par l'altitude les sommets des
rides parallèles entre lesquelles se creusent les
vallées nombreuses. Peu de villages, à peine çà
et là un clocher se dressant au sein des damiers
réguliers de culture. Les métairies elles-mêmes
sont rares et se confondent par leurs toits rou-
ges avec le sol rougeâtre de la Lomagne. Mais
tout ce pays est riche. On attribue la fertilité
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. qS
du sol à sa nature calcaire, contrastant avec les
argiles ou boulbènes de l'Armagnac.
Cette fertilité n'a pourtant pas empêché le
pays d'être déserté et, partant, de s'appauvrir.
Toutes les campagnes jusqu'à Saint-Clar, une
des dernières bastides que l'on ait édifiées, sont
en voie de décroissance. Lectoure a fort souffert
de cette émigration, cependant elle distille en-
core un peu d'eau-de-vie et fait un grand com-
merce de volailles, ressource suprême de l'agri-
culture en Armagnac.
Si belle est la vallée dans ces campagnes
fraîches, que j'ai voulu la voir dans son inti-
mité en faisant à pied la route de Lectoure à
Fleurance, superbe chaussée due à M. d'Etigny.
Ce chemin descend par une grande courbe jus-
qu'au Gers, en offrant de belles échappées sur
cette rivière et l'étroit vallon où s'écoule le flot
indigent de la Lauze. Cela me rappelle Angou-
lème % avec moins de majesté toutefois, car bien
petite est la ville qui se dresse là-haut sur
l'abrupte colline. Pour rejoindre la chaussée j'ai
suivi une rue passant devant la fontaine de Fon-
télie qui sourd au pied des anciens remparts,
I. \b^ série du Voyage en France.
94 VOYAGE EN FRANCE.
SOUS une voûte qu'éclairent deux grandes ogives
portées par une colonne basse à chapiteaux.
Une grille de fer sépare le bassin alimenté par
trois sources de l'espèce de préau très profond
où sont les robinets. Le futur maréchal Lannes
vint souvent jouer dans cette sorte de fosse et
boire à la fontaine.
Au bas de la côte, l'antique chapelle de Saint-
Gény attire l'attention, son élégant pignon a été
bizarrement flanqué de deux tourelles coiffées
d'ardoises, comme les imaginerait quelque bour-
geois parisien, rêvant d'une villa à Asnières.
Près de là, jolie chute du Gers sur un barrage,
ses eaux louches refluent sous les arbres et don-
nent la vie à un moulin. Sur la rive gauche, les
pentes, très douces, semblent une plaine ; sur
l'autre les coteaux montrent un front de ces ro-
chers calcaires dont la présence dans le sol a valu
aux terres arables le nom de peyriisquets. Les
maisons qui les couvrent ont des toits bas et
plats. En dehors de ces métairies isolées ou des
demeures des brassiers — travailleurs ruraux —
pas un hameau.. Aucun village ne borde la route
de 1 1 kilomètres formant une avenue superbe
mais solitaire. Pendant 6 kilomètres le couvert
est formé d'ormes de belle venue, plus loin ce
sont des peupliers pyramidaux. Quelques mé-
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. qS
tairies, très espacées, montrent, à l'écart de la
route, leur façade de pisé ou de terre^crue. Fière-
ment campée sur une colline, apparaît la flèche
grêle de Castelnau-d'Arbieu. Sur l'autre versant,
ce village domine la vallée de l'Auroue. Un
hameau voisin, Urdens, couvre un promontoire.
Cette région, non moins fraîche que la Loma-
gne, est encore un petit pays : le Gaure. De
bonne heure, il se donna à la couronne de
France ; un des comtes d'Albret à qui il avait
été cédé ne put en devenir maître qu'en prenant
et saccageant la capitale, Fleurance, qui voulait
seulement dépendre du roi.
Dans le Gaure, s'étendent de belles cultures.
Du hameau d'Aurrenque à Castelnau, de jolis
coteaux, bien dessinés, sont surtout couverts de
froment. Les vignes sont rares, il y a peu de
maïs, quelques champs de fèves rompent l'uni-
formité.
Sur la route je rencontre un troupeau de ces
chèvres des Pyrénées que nous voyons dans les
villes. Le chèvrier me raconte qu'il est descendu
des monts, il y a bien des années, avec son
père, s'est plu dans le pays et y est resté. Il
voulut aller à Paris, lui aussi, moduler sur son
instrument en menant des chèvres de porte en
porte, mais la nostalgie de Fleurance le prit, il
gÔ VOYAGE EN FRANCE.
y revint ; il fait pacager ses bêtes, vend ses fro-
mages et s'estime heureux.
Près d'un beau parc entourant la vaste de-
meure d'Olympe, un vignoble reconstitué, dont
les sarments sont d'une belle venue, montre ce
que pourra donner la vigne traitée d'après les mé-
thodes modernes. La campagne est plus riante,
les habitations rurales sont charmantes parfois,
on devine l'approche d'une ville. Les prés en-
tourés d'arbres, la route, qui retrouve la bor-
dure de grands ormeaux, forment une sorte de
Bocage si touffu que l'église de Fleurance,
nettement aperçue de Lectoure, est maintenant
masquée, la ville semble bien lointaine. Enfin,
à un coude de la route, l'avenue offre en
perspective un mur blanc, c'est la première mai-
son de Fleurance.
A Feutrée de la ville une croix se dresse sur
un piédestal entouré d'une barrière, monument
commémorât if dû à la ferveur cathohque d'une
dame Colomez ; elle la fit ériger en 1898, pour
rappeler que le 22 novembre 1086 « les fleuran-
tins ont défait les huguenots de toute la contrée
alliés contre leur ville ».
Fleurance est une des plus grandes parmi les
bastides du Gers. Mais elle a gardé peu de logis
remontant à sa création ; le grand désastre de
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. 97
i465, quand la ville fut mise à sac par Jean d'AI-
bret, a dû détruire beaucoup de constructions du
Moyen Acje. Les rues sont larges, les maisons,
en majeure partie construites en torchis ou en
adobes, c'est-à-dire en briques crues, sont plates
et sans caractère. La grande place, entourée d'ar-
cades, a été occupée au centre par des halles sur
voûte. Tout autour, beaucoup de cafés, l'un d'eux
est une « réunion Ôl aficionados y) . La passion des
courses de taureaux s'étend jusqu'ici.
L'église est un remarquable mais lourd édi-
fice du xiv^ siècle. Dans l'énorme façade ogivale
sont creusées de belles niches sculptées. Pour y
pénétrer il faut descendre au parvis par des de-
grés ; par des degrés encore on accède dans la
nef; la voûte, d'un aspect mystérieux et sombre,
est soutenue par de puissantes colonnes d'où les
nervures s'épanouissent comme les branches
d'un palmier.
Près de la gare, aux abords d'un petit jardin
anglais finissant à un abreuvoir orné d'une île
de rocaille, un grand champ de foire révèle le
rôle économique de Fleurance. La ville est un
centre commercial autrement actif que Lectoure,
son chef-lieu d'arrondissement ; si la popula-
tion de la commune est moins élevée que dans
celui-ci, le nombre des habitants agglomérés
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
gS VOYAGE EN FRANCE.
est plus considérable ^ De très nombreux ma-
gasins et des fabriques de chaussures donnent
de l'activité.
Fleurance est encore le rendez-vous de tout
ce pays de Gaure dont elle fut la capitale. Une
longue et belle route s'en va par les pentes
douces de la commune de Sainte -Radegonde
dans la partie du canton de Valence qui dé-
pendait du comté. Les deux plus gros centres,
dans cette direction, sont de fort petits bourgs
entourés de riches campagnes, la Sauvetat et
Saint-Puy. Ce dernier n'a pas 35o habitants
agglomérés et c'est encore le plus peuplé dans
I . Population totale 4 102 habitants, municipale agglomérée 3 243.
Il y a cependant décroissance là aussi, Fleurance a compté 4 5oo
habitants.
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. QQ
cette vaste zone d'entre Gers et Baïse ; or, la
commune a près de i 200 âmes, c'est dire com-
bien les habitations sont disséminées.
Du côté opposé, Fleurance est le débouché
pour le canton de Mauvezin et une partie de
celui de Cologne ; ce dernier bourg, capitale du
petit pays de Gimoës, est une bastide, comme
l'indique son nom emprunté à l'iVllemagne. La
région de Mauvezin a également un nom parti-
culier, c'est le Fezenzaguet, dont l'Arrats est la
rivière centrale. La vallée étroite est bordée de
collines bien découpées donnant parfois beau-
coup de grandeur au paysage. Mauvezin, centre
administratif et commercial, fut la capitale, il
s'étend au fond du val. Plus pittoresque est la
bastide de Monfort qui vit naître du Bartas et
couvre un promontoire abrupt au-dessus du val-
lon de l'Orbe. Un village moins peuplé. Tourne-
coupe, garde avec autant de fierté les confins du
Fezenzaguet et de la Lomagne. Mais Mauvezin
était mieux située pour avoir l'influence militaire
et économique. Les quartiers hauts de cette
bourgade dominent à la fois l'Arrats et la Gi-
mone. Les deux longs cours d'eau semblent
vouloir se réunir ici, mais, en butant contre la
colline de Mauvezin, ils sont comme touchés par
une force répulsive. Ils étaient à moins de deux
100 VOYAGE EN FRANCE.
kilomètres l'un de l'autre, leurs embouchures
dans la Garonne seront séparées par six lieues.
Après l'achèvement des chemins de fer à voie
étroite, c'est vers Auch que le Fezenzaguet diri-
gera surtout ses relations, au détriment de Fleu-
rance, gare la plus rapprochée dans la direction
de Paris.
De Fleurance à Auch on continue à remonter
la vallée du Gers, offrant toujours le même spec-
tacle de richesse agricole. Beaucoup de toits
rouges dans les campagnes. Quelques clochers se
montrent : Céran, et, au fond d'un vallon, Goutz.
La bastide avortée de Pis mêle son nom venu de
la Pise italienne à ceux très français, fleurant le
Moyen Age, de Miramont, Puységur, Roquefort,
Mirepoix, Puycasquier. Ces noms indiquent bien
des points culminants. Puységur couronne une
butte. Roquefort a conservé un donjon flanqué
d'une tourelle, Arcamont est dominé par une
vieille tour à rouge toiture. Sur un mamelon
isolé, le donjon, l'église et le village de Roque-
laure complètent le décor des abords d'Auch'.
Le tableau était plus pittoresque encore lorsque
des moulins à vent occupaient toutes les croupes.
1. Sur Auch, voyez la So^ série du Voyage en France, cha-
pitre XVIII.
VII
L'Adour et l'Arros. — Thermes-d'Armagnac. — Aignan. — No-
garo et le bas Armagnac. — La Douze et le Midour. — Eauze.
— La bourse aux eaux-de-vie. — Les distillateurs d'Armagnac.
— Lannepax. — En Fezensac. — Vic-Fezensac.
Monlréal-du-Gers. Août.
Les bords de TAdour, dans la plaine de Bi-
gorre, ne montrent guère de détails heureux,
leurs villages de torchis, d'adobes et de cailloux
jurent avec la richesse végétale qui les entoure.
Cependant, tout à l'heure, au passage, Tarsac
m'a montré une tour carrée, en pierre fauve,
couronnée par un hourd en bois et donnant un
peu de caractère à cette rive du fleuve.
L'Adour vient de se doubler par l'appoint de
l'Arros, mais il n'a fait que récupérer en partie
les eaux qu'il donna par le canal d'Alaric. La
jonction a lieu au sein de prairies encadrées de
grands arbres. Sur une colline, dominant à dis-
tance le confluent, se dresse le château de Ther-
102 VOYAGE EN FRANGE.
mes-d' Armagnac, entouré de débris de murailles;
au-dessus d'un corps de logis flanqué d'une tou-
relle se dresse la haute masse du donjon.
Thermes gardait un des chemins allant de
l'Adour à l'intérieur de l'Armagnac ; la forteresse
n'est plus aujourd'hui qu'une beauté du paysage,
elle est comme enveloppée dans les vignes qui
couvrent la côte. Partout, on replante; quand
on a franchi l'étroite colline et atteint la longue
vallée où le Mi don, qui s'appelle ici Midour,
traîne ses naissantes eaux, on est en plein vi-
gnoble. Ces plantations, faites avec beaucoup
de soins, entourent le village de Fustérouau et
s'étendent non seulement sur les pentes, mais
aussi dans le fond du val. Les anciennes vignes
sont tenues basses sans échalas, les nouvelles
sont disposées sur des lignes de fil de fer. Mal-
gré ces efforts, l'étendue du vignoble est bien
faible en comparaison d'autrefois.
Pour ces campagnes, le centre est le bourg
d'Aignan, groupé à une croisée de chemins do-
minant la Ribérette ; ce ruisseau, particulière-
ment pauvre dans ce pays de rivières indigentes,
est appelé parfois Midou du Nord, c'est une des
deux branches de la rivière. Aignan commande
de loin le pays, sa tour ruinée en fait un des
points saillants de l'horizon, dernier vestige du
LE FEZENSAG ET l'eaUZAN. Io3
primitif château des comtes d'Armagnac dont
Aignan fut la capitale au début de leur autorité.
Ces débris remontent au x* siècle, bien anté-
rieurs par conséquent à l'église, bel édifice ogi-
val du XIV* siècle.
Aignan joue un rôle modeste dans l'activité
de ce pays voué à la viticulture et à la produc-
tion des eaux-de-vie. Sa part est à peu près
réduite à la transformation des lies de vin en
cristaux de tartre, industrie fort répandue dans
cette contrée du bas armagnac. Le bourg est
humble, mais peuplé, en comparaison des vil-
lages parfois constitués seulement par l'église.
Dans ce pays de viticulture, le vigneron tenait
à habiter au milieu de ses vignes, aussi chaque
centre communal n'a-t-il qu'une poignée de
maisons.
Cependant, au cœur de cette région aux habi-
tations éparpillées, plus de 2 000 habitants se
groupent à Nogaro, ville régulière, fondée à la
fm du XI* siècle et qui n'avait pas cessé de se
développer jusqu'à l'invasion du phylloxéra. En-
core celui-ci n'ayant pas eu autant d'influence
que sur la région d'Auch et de Lectoure, la dé-
population a été faible. Cela tient à la fertilité
extrême du sol et au peu de prise offerte au fléau.
Mais si la culture est patiente, si le métayer s'ef-
I04 VOYAGE EN FRANCE. '
force de tirer parti du sol, c'est selon de vieilles
méthodes ; avec un peu d'esprit de progrès on
ferait ici un des plus merveilleux terroirs de la
France entière. Cependant la toiiya, c'est-à-dire
la lande pâture, est encore considérée comme
devant être le pivot d'une exploitation rurale
bien conduite.
La culture de la vigne échappe à ces reproches,
elle est poussée avec beaucoup d'attention. On
le doit aux qualités particulières des eaux-de-vie
obtenues dans les cantons de Nogaro et de Cazau-
bon, où les crus sont les plus réputés de l'Ar-
magnac. Ce bas Armagnac a dû le grand élan
vers la distillation à la guerre de l'indépendance
américaine, pendant laquelle le commerce des
liqueurs fortes se développa beaucoup. Aujour-
d'hui encore, Nogaro est un centre considérable
pour les eaux-de-vie, plusieurs maisons se sont
installées afin de recueillir la production du vi-
gnoble, étalé en nappe continue autour de la
ville.
Les vignes atteignent le bord du Midou qui
vient d'arroser de belles prairies, si l'on peut
employer ce mot arroser pour le passage d'un
ruisseau aussi indigent et louche. Plus nom-
breuses encore sont les vignes sur les coteaux de
Sainte-Christie-d'Armagnac et dont la Douze
io5
ou Doulouze occupe l'autre versant. Mais bien
souvent il y a des pans de landes dans les par-
ties élevées de ces rides entre les rivières. Si
l'on ne connaissait la coutume des touyas, on ne
s'expliquerait pas de tels terrains perdus à côté
de riches cultures.
La saison est pluvieuse, et pourtant la Douze
est en ce moment sans eau, bien qu'elle soit
luxueusement franchie par deux ponts sous le
bourg amphithéâtral de Manciet, entouré de jar-
dins et de vignes et auquel donnent accès des
routes plantées de grands ormes. Manciet, qui fut
une ville importante, est sur le bord d'un plateau
' presque désert s'étendant jusqu'à la GéHse et que
des landes couvrent çà et là. Un étang miroite,
reflétant la ramure des châtaigniers. En appro-
chant de la vallée de la GéHse, on retrouve des
cultures plus nombreuses, des métairies et une
petite ville apparaît : Eauze, la plus vénérable
des cités de l'Armagnac. C'était la capitale de
la Novempopulanie et, avant Auch, le siège de
l'évcché. Les invasions barbares en avaient fait
un amas de ruines près desquelles une ville se
reforma lentement, mais combien petite auprès
de l'antique Elusa des Ibères et des Romains !
Elusa était entre le site actuel d'Eauze et la
Gélise, à peu près sur l'emplacement de la voie
I06 VOYAGE EN FRANCE.
ferrée et de la gare. Le quartier se nomme encore
Cieutat ou la Cité. 11 ne reste rien d'apparent
des monuments qui en faisaient une des villes
riches des Gaules. Par les objets découverts et
l'étendue de la zone où ils ont été recueillis, on
peut cependant reconnaître la grande surface de
cette capitale. Il fallut la création d'une abbaye,
cinq siècles après la ruine, pour qu'Eauze na-
quît, reprenant à peu près le nom de sa devan-
cière.
Mais combien exiguë ! La ligne d'un boule-
vard presque circulaire indiquant l'emplacement
des murailles du Moyen Age donne à peine 5oo
mètres de diamètre à la ville. Celle-ci est groupée
autour d'une église gothique dont la voûte est
d'une belle envolée. Des maisons à galeries de
charpentes ou à arcades entourent l'édifice, l'une
d'elles est charmante par ses poutres en bois
sculpté : un hôtel particulier est à demi masqué
par une grille couverte de roses ; beaucoup de
fleurs, beaucoup de plantes vertes devant les
habitations et sur l'appui des fenêtres des vieilles
maisons à ressaut qui bordent les ruelles. Au
long du boulevard de ceinture de beaux jardins
apportent la gaîté. Là sont les arènes pour les
courses de taureaux.
Eauze a donné son nom à l'un des petits pays
LE FEZENSAC ET L EAUZAN. IO7
de TArmagnac, TEauzan^ qui comprend son can-
ton et une partie de celui de Montréal, mais un
autre nom a prévalu, au moins pour la désigna-
tion du cru des eaux-de-vie : la Tënarèze. Cette
région viticole, sans donner des produits aussi
fins que ceux du bas armagnac, est supérieure
au haut armagnac ou pays de Gondom. La si-
tuation intermédiaire avait fait d'Eauze le prin-
cipal marché des eaux-de-vie d'Armagnac. Au-
jourd'hui encore, une véritable bourse se tient
le jeudi autour de l'église, chaque distillateur ou
bouilleur de cru apporte ses échantillons que
viennent déguster les négociants ou commission-
naires de Nérac, Condom, Agen, Auch, Vic-
Fezensac, etc. Un moment, quand le vignoble
de Cognac fut dévasté, les commerçants charen-
tais étaient nombreux au marché d'Eauze. Ils
viennent moins aujourd'hui. On attribue leur
abstention aux nouveaux droits sur les eaux-de-
vie ; peut-être y faut-il voir plutôt les effets de la
reconstitution du vignoble à Cognac et dans sa
région ^
Quelles que soient les causes du malaise, il est
1. On dit Eauze en parlant de la ville et le pays se nomme
Auzan, d'oii Castelnau-d'Auzan.
2. Sur Cognac voyez une étude complète dans la iS*^ série du
Voyage en France.
I08 VOYAGE EN FRANCE.
grand dans la Ténarèze aussi, de là cet abandon
des campagnes, la ruine des propriétaires qui
n'ont pu faire face aux charges des emprunts et
le découragement des métayers. Les systèmes
défectueux de culture ne permettent pas d'ob-
tenir de rendements suffisants, même ces rende-
ments diminuent. Dans la monographie des
Landes agricoles que j'ai souvent citée % M. Duf-
fourc-Bazin évaluait le prix de travail à la char-
rue à 170 fr. l'hectare; le revenu brut atteignait
38o litres d'eau-de-vie à 62 degrés, valant 38o fr.
En déduisant l'impôt et l'intérêt du capital fon-
cier, on obtenait net 170 fr. ; mais la production
est tombée, le revenu net n'a pas même atteint
160 fr. ; à ce taux le vigneron propriétaire ne
peut vivre. La situation, disait M. Duffourc-
Bazin en 1892, est plus grave encore dans les
départements voisins — dont le Gers — que
dans les Landes.
La distillation des vins a lieu surtout pour les
cépages àt folle-blanche ^ les vins àe piquepouls
étant vendus au commerce pour le coupage ou
dans les Charcutes pour remédier à l'insuffisance
de la récolte locale, en vue de la transformation
en cognac. Les principales exploitations ont des
I. Dans la 3o^ série du Voyage en France.
LE FEZENSAG ET L EAUZAN. I OQ
appareils fixes, mais ce matériel coûteux est de
plus en plus remplacé par des alambics ambu-
lants conduits par deux hommes exerçant unique-
ment la profession de distillateurs, auxquels le
vigneron ou un brassier vient en aide. Ces alam-
bics nécessitent un certain capital, car ils coûtent
de 6000 à 7000 fr. Dans quelques domaines il y
a des alambics moins puissants, fabriqués dans
le pays, notamment à Eauze et à Vic-Fezensac.
Jadis la campagne de distillation était régu-
lière, elle commençait vers le i*^'' novembre et se
terminait du i*' au i5 février, mais depuis que
les eaux-de-vie artificielles ont pris une partie du
marché et que la facilité des transports permet
d'expédier les vins en nature, on distille surtout
lorsque ces derniers n'ont pu trouver acquéreurs.
A Texposition de 1889, l'armagnac fut très
remarqué, le rapporteur du jury établissait ainsi
la répartition des crus :
Le bas armagnac qui donne les produits su-
périeurs comprend dans le Gers les cantons de
Cazaubon et Nogaro, dans les Landes une partie
de celui de Gabarret; ses eaux-de-vie ont une
saveur agréable et subtile, avec de la finesse et
du moelleux.
Celles de la Ténarèze « sont encore fines de
goût », mais avec un peu moins de délicatesse,
IIO VOYAGE EN FRANCE.
leur zone comprend le canton d'Eauze, la partie
ouest du canton de Montréal et la partie de Lot-
et-Garonne s'étendant des limites du Gers à Sos.
Dans le haut armagnac, « les eaux-de-vie par-
ticipent des mêmes qualités, mais à un degré
inférieur; elles ont moins de sève et moins de
corps ». On les récolte dans la partie est du can-
ton de Montréal et dans l'ensemble des cantons
de Condom, Valence, Vic-Fezensac, Jegun et
partie de ceux de Montesquiou et d'Aignan.
Ces eaux-de-vie d'Armagnac ont un bouquet
particulier, mais ne possèdent pas « le fondu, le
parfum et la distinction » des produit charentais.
Les vins d'Armagnac envoyés dans les Charentes
pour la distillation ne donnent du cognac que
par les soins apportés et grâce à un mélange de
vieilles *eaux-de-vie du cru.
Le haut armagnac commence assez loin
d'Eauze vers l'est, avec le canton de Vic-Fezen-
sac qui conserve le nom de l'ancien pays dont
Vie fut la cité maîtresse. Ce Fezensac compre-
nait au début de la féodalité tout ce que nous
appelons aujourd'hui Armagnac, l'Armagnac pro-
pre n'en est qu'un démembrement. De lambeaux
en lambeaux, formant d'autres petits Etats féo-
daux, le Fezensac en est arrivé à comprendre
seulement les cantons de Vie et de Montes-
III
quiou. En 1777, l'illustre famille qui porte ce der-
nier nom obtint d'y ajouter celui du petit pays.
Aucun chemin de fer ne traverse encore le
Fezensac, mais on doit commencer, en igoS, la
construction de la ligne d'Eauze à Auch, dont la
station principale sera Vie. Actuellement, cette
active petite ville en est encore aux diligences
qui la relient à Eauze, Auch, Condom, Nogaro
et Mouchan, station la plus proche.
D'Eauze, la route du Fezensac suit à distance
la Gélise, à travers une contrée où les villages
sont rares, mais qu'animent de nombreuses mai-
sons de vignerons. Chacune d'entre elles est une
petite usine à distiller les vins. Noulens fait un
commerce d'eau-de-vie, Ramouzens attend le
chemin de fer pour développer l'établissement
thermal de la source du Moura. Plus loin, sur un
petit plateau étalé entre l'Izaute et l'Auzoue —
ou la Lauzoue — une bastide restée embryon-
naire rappelle à la fois l'ancien état du pays et
sa vieille histoire : Lannepax, la Lande de la
Paix ; ce nom serait dû à une paix conclue dans
la lande entre les Elusates et le général romain
Crassus.
D'Eauze à Vic-Fezensac, sur 22 kilomètres
d'une route sinueuse, on parcourt ou longe
quatre vallées; la dernière est celle de la Losse,
112 VOYAGE EN FRANCE.
très longue rivière — 1 26 kilomètres — mais fort
indigente, car elle ne reçoit pas une goutte d'eau
de la Neste, malgré les instantes demandes des
riverains. Dans ce couloir étroit, fond de prai-
ries aux pentes tapissées de vignes, est Vic-
Fezensac, un des principaux centres de popula-
tion pour ce département où les villes sont
petites ^
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Celle-ci n'a pas le tracé régulier des bastides,
ses rues sont rarement alignées, mais les cons-
tructions révèlent l'aisance. Vie est un marché
très actif où viennent s'emmagasiner une grande
partie des vins et eaux-de-vie de l'Armagnac.
La fabrication des alambics, la production des
I. Sur 8280 habitants de la commune il en est près de 2 5oo
dans la cité elle-même.
LE FEZENSAC ET L EAUZAN. Il3
cendres gravelées et des cristaux de tartre se
rattachent intimement à cette industrie de la
distillation, de même que le travail des vis de
pressoirs et des machines agricoles.
A ces industries Vie a ajouté depuis quelques
années la confection des chaussures et la fabri-
cation des formes nécessaires à cette dernière.
Les commerçants centralisent les plumes, les
duvets, la laine, les tartres recueillis dans le
Fezensac et jusque dans le canton de Jegun,
dont le chef-lieu, bastide placée sur un mon-
ticule, est un centre rural, aux foires très sui-
vies. La Baïse, ayant Saint-Jean-Poutge comme
port supérieur, supplée pour les gros transports
à l'absence de voies ferrées.
Le Fezensac n'offre pas de paysages plus va-
riés que les autres petits pays qui Tavoisinent,
mais quelques belles ruines relèvent parfois la
monotonie de ces paysages. La plus remarquable,
Lavardens, dont on voit de loin la silhouette,
n'est plus en Fezensac, elle appartient à l'Arma-
gnac propre.
Retour à Eauze, le soir. Du sommet des rides
parallèles, la vue est merveilleuse sur les Pyré-
nées lointaines.
Au matin le ciel est si pur, la lumière si douce
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. 8
Il4 VOYAGE EN FRANGE.
que je renonce à prendre le chemin de fer et
gagne à pied Montréal. D'Eauze la route des-
cend dans le vallon verdoyant de la Gélise, rem-
pli de beaux jardins. La rivière, qui deviendra
vivante dans le pays de Nérac, est encore fossé
sinueux dont les eaux immobiles sont fleuries
de nénuphars. Au-dessus, le plateau est couvert
de cultures entremêlées de vignes. Les fondateurs
de bastides avaient essayé d'y créer une ville ;
elle n'a pu prospérer et, au lieu d'être la rivale
d'Eauze, est restée un petit village, mais Bre-
tagne-d* Armagnac a conservé sa place centrale
avec des maisons à galerie. L'église est un char-
mant édifice à une seule nef; sur les colonnes
engagées, ornées de chapiteaux, viennent se
poser de fines nervures supportant la voûte en
berceau. Plusieurs rues de Bretagne sont de-
meurées à l'état de large chemin, telles que les
tracèrent les géomètres du Moyen Age.
Le site fut choisi avec goût, sous la ville avortée
se creuse le joli val de rizaute, dominé par l'égHse
moderne de Gazeneuve. Les vignes tapissent les
pentes, la petite vallée off're de profondes pers-
pectives.
Après la Gélise, autre plateau étendu jusqu'à
l'Auzoue, d'où l'on a une vue charmante sur
Bretagne, bien assis sur sa colline. A l'écart du
LE FEZENSAC ET l'eaUZAN. Ii5
chemin sont les belles ruines du château de La-
mothe-Gondrin capricieusement tapissées de
lierre. Des abords on jouit d'une vue immense
sur de belles campagnes, on lit comme sur une
carte en relief la configuration en vallées paral-
lèles. Peu de villages, le groupe de population
le plus important est Gondrin, dont les toits
rouges surgissent de la verdure au sommet d'un
coteau.
Enfin voici, là-bas, loin encore, Montréal, bas-
tide formée d'une rangée de maisons aux toits de
teinte ardente étalée sur l'arête d'un coteau et
dominée par une vaste église à contreforts. Le
site est un promontoire rocheux au pied duquel
l'Auzoue semble endormie sous les nymphéas.
La crête est si étroite que l'église et quelques
maisons ont dû s'installer sur de hauts murs en
terrasses ; Montréal, très petit bourg % doit à
cette situation un caractère de grandeur accrue
par la haute masse de l'église, percée de fenêtres
ogivales et dont le (Cocher, tour carrée, rappelle
ceux des églises espagnoles.
Montréal, mont royal, fut créé en I255, mais
il ne s'est pas développé. Son industrie est nulle
et son importance commerciale plus faible que
[. 555 habitants, la commune entière en a 2 062.
Il6 VOYAGE EN FRANCE.
celle d'une commune de son canton, Gastelnau-
d'Auzan, centre pour les eaux-de-vie.
Montréal, si abandonné soit-il, si morose
quand on parcourt ses longues rues parallèles,
n'en est pas moins un des grands paysages de
l'Armagnac, lorsqu'on le voit du fond de sa
vallée ou des collines voisines.
VIII
LE GONDOMOIS
Gondrin. — Laressingle. — La vallée de la Losse. — Gondom.
— Le commerce des eaux-de-vie. — La na\'igation de la Baise.
— Valence et Beaiicaire, — En descendant la Baise. — Mon-
crabeau, pays des hâbleurs.
Nérac. Août.
Profondément découpé, le pays, à partir de
la vallée de la Lauzoue, offre des sites plus fiers
pour l'assiette des bourgades. Gondrin a non
moins grand aspect que Montréal, sur ses hautes
collines aux pentes couvertes de vignes. Enve-
loppé de grands arbres, dominé par une grosse
tour d'église flanquée d'une tourelle à flèche
aiguë, le bourg donne beaucoup d'allure au
paysage. La vue s'étend sur d'immenses hori-
zons, jusqu'aux Pyrénées et aux Landes. Les
campagnes voisines avaient jadis beaucoup de
vignes, elles ont disparu en grande partie, rem-
placées par les céréales ou laissées en friches.
C'est pitié de traverser ce pays ravagé.
Il8 VOYAGE EN FRANGE.
La route de Condom le parcourt, par des pen-
tes douces elle descend vers la Losse, bien peu
accrue depuis Miélan et Vic-Fezensac ! Aucune
source ne lui a apporté un tribut; cependant,
aux temps géologiques, elle a fermement modelé
sa rive droite. Les coteaux de Laressingle dont
elle frange la base sont abrupts et formaient une
situation militaire très forte ; les évêques de
Condom, plus soldats que prélats, avaient cons-
truit là une puissante forteresse, assez vaste
pour contenir un village. Elle est ruinée, mais,
hautaine encore; les habitants, trop à l'étroit,
ont appuyé des maisons contre le rempart, où
ils ont percé des fenêtres. Au milieu de l'en-
ceinte se dresse le château ; la chapelle, de-
meurée intacte, sert d'église à cette petite pa-
roisse.
Des collines avoisinantes on découvre de
grands espaces : d'un côté la vallée de la Losse
se creuse profonde, de l'autre les pentes fuient
doucement jusqu'à la Baïse, dont Condom oc-
cupe la rive droite escarpée. La vallée est très
large, verte, lumineuse entre des coteaux de mé-
diocre élévation. Peu de villages, mais beau-
coup de maisons isolées. Condom est le centre
et la beauté du paysage ; au-dessus de la ville
se dresse la cathédrale, sa tour carrée et la flè-
LE CONDOMOIS. IIQ
che d'une autre église semblent surgir des toits
d'un rouge ardent.
Condom a ce qui manque aux villes du Gers,
une rivière ou plutôt l'apparence d'une rivière,
car la Baïse ne serait rien sans l'apport des
eaux de la Neste amenées par le canal % et
même semblerait un ruisseau si elle n'était rete-
nue par les barrages écluses. En la transformant
en voie de navigation on lui a donné la profon-
deur d'eau qui fait illusion sur la masse réelle du
flot. A Condom, le lit a été assez élargi pour
qu'un port ait été établi en amont d'un déversoir
qu'alimente le bief d'un moulin. A peine un ou
deux bateaux aujourd'hui, cependant la naviga-
tion est plus active qu'on ne pourrait le supposer
en un pays de médiocre industrie. Faible en
amont de la ville où la rivière ne dessert aucun
centre populeux et n'aurait même aucun trafic
sans Vic-Fezensac, voisin de Saint-Jean-Poutge,
elle prend de l'essor en aval. Une compagnie de
transports créée pour effectuer un service régu-
lier avec Bordeaux possède une flotte de 22 em-
barcations ayant un tonnage total de 2 182 tonnes;
dans ce nombre sont deux vapeurs, l'un, à hélice
I. Sur le canal de la Neste et l'alimentation des rivières des-
cendues du plateau de Lannemezan, voyez dans la ^o^ série le
chapitre XVI.
120 VOYAGE EN FRANCE.
à 100 chevaux de force, l'autre, à roues à Tar-
rière, à 26 chevaux. En dépit des chemins de
fer, cette navigation persiste, même elle accroît
encore '. Dans Tensemble la rivière a un mou-
vement moyen, né sur la voie, de plus de
6000 tonnes.
La ville s'élève sur une sorte de terrasse do-
minant la Baïse, d'étroites petites rues, une
enveloppe de beaux boulevards, quelques mo-
numents intéressants, telle est cette ville- qui
eut quelque temps Bossuet pour évêque. Des
1. Mouvement en aval de Gondom, du port aux limites de Lot-
et-Garonne, i44oo tonnes en 1900 et 17181 en 1901. En amont,
de Saint-Jean-Poutge à Gondom, G 908 tonnes en 1900 et 7999
en 1901.
2. 6678 liabitanls, dont 4^*50 de population municipale agglo-
mérée.
LE CONDOMOIS. 121
édifices intéressants y retiennent un instant le
visiteur. L'ancienne cathédrale, de proportions
moyennes, est charmante, sa nef en berceau aux
multiples nervures, aux clés de votjte sculptées
ou dorées, ses élégantes chapelles latérales, ses
grandes fenêtres en ogive, est une belle œuvre
de la Renaissance. De nos jours on a entouré le
chœur d'une galerie ajourée, en terre cuite, de
style flamboyant, ornée de nombreuses statues
de saints ; elle rapetisse peut-être légèrement
l'édifice mais sans nuire à l'elîet imposant de
cette belle nef. Sur un des côtés une porte laté-
rale, admirablement fouillée, s'ouvre entre des
maisons.
L'hôtel de ville est installé dans un cloître
ogival, où les nervures semblent supporter la
floraison des clés de voûte délicatement ouvra-
gées. De belles portes sculptées donnent accès
dans l'édifice. En parcourant la ville on rencontre
quelques nobles maisons ou hôtels. Un de ces
logis remonte à l'époque romane. Les boule-
vards, dans la partie où ne s'est point portée la
vie bourgeoise, ont conservé des pans de rem-
parts dans lesquels des habitations ont établi
leur façade. L'ancien évêché est devenu le Palais
de Justice.
Au long du cours Scipion-Dupleix, ainsi
122 VOYAGE EN FRANCE.
nommé d'un historien local, sont de jolies habi-
tations entourées de jardins dont la végétation
presque méridionale dit la douceur du climat.
Ce cours aboutit à une terrasse ombragée d'où
l'on découvre la sinueuse et étroite Baïse et le
faubourg de la gare renfermant les magasins et
les chais à eau-de-vie. De cette promenade, j'ai
eu, ce matin, la vue des Pyrénées, se détachant
très nettement sur le ciel. La chaîne donne une
grande splendeur à l'Armagnac en formant toile
de fond à ce décor un peu monotone des longues
croupes parallèles. Au centre du panorama,
un grand massif neigeux, celui de Gavarnie,
sans doute, se dresse avec une incomparable
splendeur.
Bien que Condom possède peu de vignobles
aujourd'hui, ce n'en est pas moins le centre
principal pour le commerce des eaux-de-vie,
nombreux sont les commerçants et les commis-
sionnaires. La navigation de la Baïse en fait éga-
lement un entrepôt pour les transactions en blés
et farines. La rivière lui apporte les produits des
cantons de Vie et de Valence.
A défaut de chemin de fer, cette dernière ville
communique par voie d'eau pour ses gros trans-
ports avec la vallée de la Garonne. Commerce
assez faible d'ailleurs, car Valence est sans in-
LE CONDOMOIS. 123
dustrie et la commune entière ne possède pas
I 4oo âmes. La minuscule cité produit grand
effet cependant, par sa situation au sommet
d'une colline à demi entourée par l'Auloue et la
Baïse qui s'unissent à ses pieds. Des murs crou-
lants révèlent le passé guerrier de cette place
dont le rôle militaire a pris fin avec Richelieu,
grand destructeur de castels et de bicoques for-
tifiées. Du haut de son coteau. Valence contem-
ple de johes campagnes entourées de châteaux
anciens. Sur la Baïse est la petite bastide de
Beaucaire, sur l'Auloue sont les thermes de Cas-
tera-Verduzan auxquels il manque un chemin de
fer pour se développer.
En aval de Condom, la Baïse erre dans un
pays plus accidenté, les bords de la rivière rap-
pellent par la grâce et l'heureuse disposition des
cultures et des bois certains vallons de Touraine.
La vigne y reparaît, timidement encore, mais
ces plantations nouvelles sont bien tenues, des
pépinières de plants américains témoignent que
l'élan est donné. Le maïs n'a plus le rôle pré-
pondérant qu'il jouait au sud et que l'on re-
trouve dans le val de la Garonne. Les blés,
les avoines, les plantes sarclées couvrent pen-
tes et plateaux. Dans ce verdoyant terroir, de
124 VOYAGE EN FRANCE.
belles maisons aux allures de château animent
le paysage.
Les villages sont très espacés. En descendant
la rivière on fait 1 1 kilomètres avant de rencon-
trer un groupe d'habitations. Là est le bourg de
Moncrabeau, il appartient au département du
Lot-et-Garonne, mais fît partie du Gondomois
comme Nérac et sa région ; les cantons de Nérac
et de Francescas sont un démembrement de l'an-
cien petit pays \
Moncrabeau couvre une colline légèrement ar-
rondie, projetée en promontoire. Le clocher est
un singulier triangle de maçonnerie donnant
vaguement l'idée de quelque amer pour la navi-
gation maritime. Dans ce mur les baies où les
cloches sont suspendues semblent des orbites.
Moncrabeau, dont le nom sonne si bien la
Gascogne, serait le village où la hâblerie gas-
conne l'emporte sur les autres centres de la pro-
vince. 11 y eut là une sorte d'Académie de hâ-
bleurs dont les recueils d'anas ont conservé le
souvenir. Nous nous délectons moins que nos
pères à ces plaisanteries, aussi Moncrabeau est-
il oublié, cependant les vieux auteurs attribuent
I. Le Gondomois comprenait les cantons actuels de Condom
et Valence (Gers), de Nérac et Francescas (Lot-et-Garonne).
LE CONDOMOIS. 120
à Moncrabeau une célébrité européenne ! Abel
Hugo a raconté ainsi, dans sa France pittores-
que, les origines de cette réputation.
Au commencement du siècle dernier, quelques anciens
militaires, quelques propriétaires, se réunissaient sous la
halle pour y parler des affaires du temps. Là comme dans
toutes les réunions de gens oisifs, celui qui apportait les
nouvelles les plus extraordinaires et qui les débitait avec
le plus d'assurance était toujours le mieux accueilli. Un
des habitués avait surtout acquis une grande réputation.
Mais un homme d'esprit, qui n'était pas sa dupe, imagina
de donner à Moncrabeau le titre de c: chef-lieu de la diète
« générale de tous les menteurs, hâbleurs, craqueurs, nou-
« vellistes, gens désœuvrés et bourgeois sans occupa-
« tion ». — Pour inaugurer cette institution, il rédigea
des lettres patentes dans lesquelles on accorde à tous les
agrégés « le droit de mentir en tous lieux sans porter
préjudice à autre qu'à la vérité dont tous les membres de
la respectable diète font la profession d'être ennemis ju-
rés, etc., etc. ». L'imprimerie répandit partout ces brevets.
On en adressa à toutes les personnes qu'on jugea dignes
de figurer à la diète. C'est ainsi que depuis plus d'un
siècle le nom de Moncrabeau rappelle l'idée de l'exagé-
ration et du mensonge, quoique ce défaut ne soit pas plus
commun sur les rives de la Baïse que sur celles de la
Garonne ou de tout autre fleuve de la France.
Au reste, les habitants de Moncrabeau se prêtent gaie-
ment à la plaisanterie. Quand un étranger vient les» visiter,
ils le conduisent sous la halle, le font asseoir avec céré-
monie sur la pierre dite de la vérité et lui délivrent solen-
nellement des lettres patentes de bourgeois de Moncrabeau.
En face de Moncrabeau, le château de Charrin
126 VOYAGE EN FRANCE.
donne de la grandeur au paysage, grâce à ses
hautes toitures, à ses murs fauves, à ses fenêtres
à croisillons. Maintenant, sur les deux rives de la
rivière, jusqu'à Nérac, les belles demeures se
pressent, moins opulentes que les châteaux de
la Loire, mais aimables pourtant et ayant noble
apparence. Quand on connaît l'histoire de ce
coin de France et le rôle de Nérac comme capi-
tale des roitelets de Navarre, il semble que ces
gentilshommières étaient un diminutif des palais
de Touraine et de l'Orléanais, comme le royaume
des sires d'Albret était un diminutif du royaume
de France.
Une belle végétation entoure ces nobles logis;
beaucoup de vignes bien soignées tapissent les
pentes. Cela est de plus en plus riant à mesure
que l'on approche de la petite ville. Voici les
ruines du château de Nazareth, l'ombreuse Ga-
renne, orgueil de Nérac, puis enfin l'aimable ville
dont le futur Henri IV avait fait sa joyeuse rési-
dence.
IX
LE PAYS DES PRUNES
Clairac et ses marchés. — Au long du Lot. — La Parade. —
Castelmoron. — L'orme tortillard. — Monclar et Sainte-Li-
vrade. — La culture du prunier. — Robe de sergent et prune
d'ente. — Le commerce des pruneaux. — La cueillette et la
cuisson. — Villeneuve-sur-Lot : la ville.
Villeneuve-sur-Lot. Mai.
En quittant Tonneins pour la vallée du Lot,
j'ai remonté un vallon très frais, admirablement
cultivé jusqu'au sommet de collines bien décou-
pées, aux formes nettes. De la crête une vue
merveilleuse m'attendait. Certes la vallée de la
Garonne est riche, pourtant il me semble qu'en
voici une plus opulente encore. Entre les belles
collines s'étale un large plan de cultures, ou
plutôt de vergers, coupés d'étroites lignes de
céréales et de rangées de vignes; au milieu,
étincelant et calme, le Lot déroule de grands
replis, allant frôler les hauteurs sur lesquelles
bourgs et villages sont crânement campés. Au-
128 VOYAGE EN FRANGE.
dessous de la colline qui me permet de découvrir
ces immenses et superbes horizons, une petite
ville aux toits plats, de tuile brune, semble
sourire entre les pruniers et les figuiers, se mire
dans la grande rivière et se prolonge sur l'autre
rive par un faubourg. Cette mignonne cité se
nomme Glairac, c'est un des centres les plus
vivants de la riche vallée, à laquelle la culture
du prunier et celle des petits pois ont restitué la
richesse détruite par le phylloxéra.
Avant le fléau, Clairac possédait sur ses col-
lines un beau vignoble dont les raisins, traités
comme ceux de Sauternes et de Monbazillac %
c'est-à-dire récoltés lorsqu'ils étaient recouverts
d'une pourriture spéciale, produisaient un vin
liquoreux réputé, ou vin pourri. Il en reste peu
aujourd'hui. De même la préparation de la figue
séchée, « supérieure à celle de Marseille », d'a-
près les vieux auteurs, n'est plus qu'un souvenir.
Le petit pois, dont je décrirai la culture et le
commerce en parlant de Villeneuve, a pris la
place de ces productions; chaque mardi, pen-
dant la saison, il se tient à Glairac, dans l'après-
midi, un marché important pour ce légume,
expédié à Paris et à Bordeaux. Puis on fait un
âge série du Voyage en France, chapitres II, XIII et XV.
LE PAYS DES PRUNES. I29
peu d'eau-de-vie et surtout on cultive le prunier
d'ente. Ce serait même ici que la culture de la
prune et sa transformation en pruneau auraient
commencé, au milieu du siècle dernier, sous
rinitiative des moines d'une abbaye voisine.
Ces produits agricoles plus que les ateliers de
chapeaux de paille et de feutre, restes d'une in-
dustrie jadis florissante, font le bien-être de la
petite ville assise au pied des coteaux qui vont
rejoindre le confluent du Lot et de la Garonne
vers Nicole et Aiguillon, hauteurs ttès raides,
bien exposées au soleil, couvertes de pruniers
réguUèrement plantés dans les vignobles et les
champs de céréales.
Un chemin longe le Lot, large et vert, parfois
bordé de grands roseaux ou cannes de Provence.
Les maisons des champs possèdent presque
toutes un figuier à la grande ramure couvrant
la cour ou ombrageant la façade. On va ainsi
dans une campagne splendide, jusqu'à un pro-
montoire au sommet duquel le bourg de Lapa-
rade, belliqueusement campé comme il convient
à un tel nom, domine des horizons immenses.
Malgré sa situation, ses allures de forteresse,
son tracé rappelant les bastides, il semble que
Laparade n'ait point d'histoire. Le village com-
mande un des plus beaux panoramas de France.
VOYAGE EN FRANCE.
l3o VOYAGE EN FRANCE.
Il était trop haut perché et trop strictement
guerrier pour avoir une influence administrative,
celle-ci a été dévolue à la petite ville de Castel-
moron, mieux placée pour le commerce à un
coude du Lot, au pied d'une crête abrupte et
étroite, reste d'un plateau érodé par les cata-
clysmes géologiques et qui a laissé çà et là des
collines en forme de table portée par la roche
dressée en falaises. Ces hauteurs décrivent un
petit bassin à l'entrée duquel s'étend Castelmo-
ron, dans une véritable foret de pruniers. Plaine,
bords du Lot, cirque entre les collines, pentes,
tables suprêmes tout est enveloppé par ces
arbres, il y en a tant que la culture proprement
dite semble l'accessoire dans cette région de
pruniculture. Entre les vergers le Lot, large et
tranquille, décrit majestueusement des sinuosi-
tés parfois brusques. La rivière accroît la beauté
du paysage et lui donne un caractère roman-
tique par les moulins monumentaux appuyés
aux barrages écluses.
Castelmoron a des allures de petite ville,
c'est un centre commerçant où les négociants en
prunes sont nombreux. Une source minérale
abondante, appelée Fonfrède, est exploitée. Les
villages voisins sont également de grands pro-
ducteurs de prunes; quelques-uns, comme le
LE PAYS DES PRUiNES. l3l
Temple et Fongrave, conservent une petite in-
dustrie curieuse, celle des ormes nommés tor-
tillards à cause de leurs loupes qui les rendent
difformes et dues à une maladie appelée brous-
sin. Ces bois ont une valeur marchande consi-
dérable, ils sont précieux pour tous les emplois
nécessitant une grande résistance; ainsi la vieille
artillerie les employait pour ses affûts. La zone
de répartition de cet arbre s'étend bien au delà
de Gastelmoron vers Monbahus, près de Mira-
mont ; le hameau de Verdégas, dans la commune
de Brugnac, était jadis le principal centre de
commerce pour les tortillards. Si l'artillerie n'u-
tilise plus guère ces loupes, le charronnage con-
tinue à en employer de grandes quantités.
Les ormes, encore nombreux, disparaissent
en quelque sorte dans la nappe continue des
pruniers: on fait des lieues et des lieues, on peut
aller jusqu'au delà du Drot sans cesser de ren-
contrer ces arbres qui semblent la seule produc-
tion des parties hautes de l'Agenais. Ils enve-
loppent complètement le joli bourg de Monclar-
d'Agenais dont les coteaux et les petits vallons
sont parsemés d'une multitude de maisons où
se fait la préparation de la prune. Cependant il
y a du bétail : on me signale à Monclar une
industrie bien inattendue, celle du lait stérilisé.
l32 VOYAGE EN FRANCE.
Monclar couvre le sommet d'un beau massif
de hauteurs, d'où la vue est belle ; plus fier encore
d'aspect est Montastruc , petit village campé ,
tel un manoir féodal, sur un piton dressé entre
deux vallées.
Toute cette région accidentée est riante et
fertile, mais elle n'a pas l'incomparable opu-
lence de la plaine du Lot, dont on découvre une
vaste étendue du haut des coteaux de Monclar.
La route qui unit ce bourg à la petite ville de
Sainte-Livrade est un éblouissement par sa ri-
chesse agricole. Si le prunier domine toujours,
les intervalles entre ses rangées sont l'objet d'une
culture intensive : joualles de vignes, céréales,
fèves, petits pois, pommes de terre, même encore
un peu de chanvre rappelant l'époque où Agen
et Tonneins avaient une florissante industrie tex-
tile ^ Au milieu de cette splendeur, presque au
bord du Lot, est ce que l'on pourrait appeler la
capitale de la pruniculture, la vieille petite cité
de Sainte-Livrade. Si Villeneuve-sur-Lot est le
centre principal pour ce commerce, Sainte-Li-
vrade est comme le cœur du pays de production.
I. Le Lot-et-Garonne a encore consacré loi hectares à la cul-
ture du chanvre en 1900.
l34 VOYAGE EN FRANCE.
La bourgade qui a gardé la forme circulaire, due
à son enceinte fortifiée aujourd'hui disparue, se
groupe autour d'une église que surmonte une
tour haute et singulière. Nombreux sont les ma-
gasins où les paysans apportent les pruneaux.
Un autre centre, Casseneuil, situé en amont sur
la rive droite du Lot, est également un grand
rendez-vous d'affaires pour les producteurs. Une
des maisons, signalée par M. Baltet, le savant
horticulteur de Troyes, achèterait chaque année
pour quatre millions de francs de prunes. Ces
fruits confits sont une des marchandises qui
maintiennent un peu de navigation sur le Lot;
on les embarque à destination de Bordeaux %
grand entrepôt et centre de répartition pour la
prune d'ente.
Ghasseneuil, où l'on a fait naître Louis le Dé-
bonnaire, qui serait né en réalité à Ghasseneuil
de la Charente, ou peut-être à Chassenon, autre
bourg charcutais possédant des ruines gallo-ro-
maines, est donc un centre florissant. Il se groupe
autour d'une belle église du xiii® siècle, au pied
de collines revêtues de pruniers, comme la large
plaine du Lot. Jusqu'à Sainte-Livrade d'un côté.
I. En ïQOO, Bordeaux avait exporlé 189 855 quintaux de prunes
sèches. L'année suivante il n'y en eut que 87 625, mais cela tint
au faible rendement de la récolte.
LE PAYS DES PRUNES. l35
jusqu'à Villeneuve de l'autre, on est sans cesse
à l'ombre de ces petits arbres, nappe de neige
au printemps, vergers couverts de fruits rosés
dès les premiers jours d'août.
En dépit du nom de prunes d'Agen donné
aux fruits récoltés dans l'Agenais, la prune n'est
point produite autour du chef-lieu de Lot-et-
Garonne , ou du moins c'est à l'état d'excep-
tion; le véritable habitat de ces fruits, dont les
qualités supérieures sont un aliment de grand
luxe, est sur les bords du Lot et du Drot et dans
le pavs accidenté qui sépare les deux vallées.
La variété servant à préparer le pruneau est
surtout la prune robe de sergent ou prune
(fente, qui a fait disparaître les autres espèces,
notamment la prune de roi. La prune d'ente a
été décrite bien souvent, la définition la plus pré-
cise est celle de M. le docteur Auricoste, deLau-
zun: « Ce fruit oblong, renflé vers le milieu,
violet-rouge d'un côté, violet-rose de l'autre, est
couvert d'une peau parsemée de très petits points,
tantôt blancs, tantôt noirs. La chair est jaune,
éminemment sucrée, d'un parfum relevé, que la
dessiccation développe d'une manière évidente.
Le noyau ovale, aplati, obtus est adhérent à la
chair par quelques points latéraux. »
l36 VOYAGE EN FRANCE.
Tel est le fruit qui alimente à peu près exclu-
sivement cette branche de commerce en Age-
nais, trafic considérable car on l'évalue en
moyenne à 5oo ooo ou 600 000 quintaux, valant
de 18 à 20 millions ^ En i8i5 on estimait la
production à i million et demi. C'est dire quel
a été le progrès.
La plantation du prunier est faite à l'aide de
rejetons pris au pied des arbres en plein rap-
port; les jeunes plants sont tous greffés. A par-
tir de six ans le prunier commence à produire,
mais il n'est en pleine valeur que vers la dix-hui-
tième ou la vingtième année. Alors chaque arbre
donne en moyenne 6 kilogrammes de prunes,
on en a vu livrer jusqu'à 5o kilogrammes à
l'heureux pruniculteur. Pour établir la produc-
tion moyenne de l'hectare, on a trouvé des règles
qui fixent, au minimum, le nombre de quintaux
au vingtième du nombre des arbres. D'après Le
Prunier, de M. Bruguière, on obtient à l'hec-
tare 864 kilogrammes valant 6x8 fr. 4o c, si l'on
espace les arbres de huit en huit mètres; quand
I. La statistique de 1900, époque de faible rendement, donne
876677 quintaux métriques, valant 11 676 871 fr. A cela il con-
viendrait d'ajouter plus de 100 000 quintaux produits par les
départements limitrophes : Gironde, Tarn-et-Garonne et Dor-
dogne.
LE PAYS DES PRUNES. 187
récartement est porté à dix mètres, le rende-
ment n'est plus que de 36o fr.
La cueillette est entourée de soins minutieux.
Si la prune tombe sur un sol trop dur elle se fen-
dra et la qualité du pruneau sera bien amoindrie,
aussi a-t-on soin d'ameublir la terre au moment
de la maturité, ou de répandre une couche de
paille sous chaque arbre. On attend que la prune
tombe d'elle-même, l'arbre n'est secoué « comme
un prunier » que dans les derniers jours, on
ramasse tout d'un coup les fruits restants.
Les prunes sont déposées aussitôt sur des
claies et exposées pendant deux jours au soleil,
pour subir leflétrissage, qui les prive d'une par-
tie de leur eau et leur permet de mieux résister
au « saisissement » que leur procurera la mise
au four ou à l'étuve. Pour activer ce flétrissage
beaucoup de propriétaires mettent les claies au
four le soir, afin de profiter de la chaleur qui
reste dans l'appareil.
Vient alors la cuisson. C'est une opération
délicate ; il ne faut pas moins de trois exposi-
tions au four, à des températures de plus en
plus élevées. Les deux premières ont pour but
de faire évaporer l'eau. Le fruit subit d'abord
une chaleur de 45 à 5o degrés, puis, après six
heures de séjour, il est exposé à l'air; on se garde
l38 VOYAGE EN FRANCE.
bien d'y toucher tant qu'il est chaud, cette faute
compromettrait tout, la prune deviendrait gluti-
neiise et resterait molle. Mais une fois le refroi-
dissement opéré, on retourne les fruits. Alors a
lieu la seconde cuisson, à 70 degrés au plus et,
de nouveau, un refroidissement.
Voici la prune en état de subir les hautes
températures : 80, 90, 100 degrés, un peu plus
parfois. C'est maintenant qu'il faut veiller, éviter
l'excès de chaleur ! Mais si l'on a bien opéré,
on obtient le pruneau de choix, noir et brillant.
« Ce degré de préparation est parfait, dit M. Bru-
guière, lorsque le fruit présente une peau ferme
et luisante, lorsqu'il laisse sentir sous la pression
du doigt une chair tout à fait malléable et élas-
tique, lorsque enfin l'amande enfermée dans le
noyau est suffisamment cuite. »
Ce procédé, l'ancien, est encore en usage dans
la plupart des exploitations rurales, mais pour
éviter une partie de ces manipulations longues
et coûteuses et épargner le combustible, on a
imaginé des étuves où la chaleur est plus scien-
tifiquement répartie, où l'on peut manipuler les
claies et, par suite, réduire considérablement le
prix de revient. Les années de grande abondance
surtout, Tétuve rend d'énormes services, aussi
son emploi est-il de plus en plus répandu.
LE PAYS DES PRUNES. iSq
Il faut alors procéder au triage par grosseur,
opération plutôt faite par les commerçants qui
centralisent les fruits apportés sur les marchés
ou dans les « foires aux prunes ». Le mouve-
ment de ces réunions est colossal. A Villeneuve-
sur-Lot on a vu jusqu'à 5oo ooo kilogrammes de
pruneaux apportés. en un seul jour. Les autres
marchés principaux sont : Sainte-Livrade, Gan-
con, Castillonnès, Villeréal, Miramont, Eymet,
Duras, Castelmoron-sur-Lot et Issigeac.
Dans ces villes, la prune qui avait déjà subi
un choix chez le producteur pour atteindre un
prix plus élevé, est encore manipulée, des ma-
chines ingénieuses répartissent chaque grosseur.
Jadis il y avait dix qualités, depuis \e fretin dont
il fallait plus de 126 pour faire une livre, jusqu'à
V impériale-jleiir dont l\o à 45 pesaient les 5oo
grammes, en passant par une série de « rames »,
de choix et de surchoix. Aujourd'hui on se con-
tente de neuf grosseurs désignées par un numéro :
la plus petite, n° i, compte de 90 à 96 pruneaux
à la livre, la plus grosse, n° 9, en a 38 à 4o.
Maintenant, comment arrive- t-on à donner
aux prunes cet aplatissement artistique qui nous
émerveille dans les caisses, incitant à la gour-
mandise, chez les épiciers? Il y a un petit coup
de main : on les fait passer entre deux cylindres
l40 VOYAGE EN FRANCE.
de caoutchouc qui les aplatissent, on les dispose
ensuite dans les caisses où une machine appelée
paqueuse les presse et donne la forme absolu-
ment plate à la rangée supérieure. Quand on n'a
pas de paqueuse, on presse le couvercle sous les
pieds. Enfin, pour les envois lointains, le procédé
Appert permet de conserver longtemps les pru-
neaux dans des récipients en métal hermétique-
ment clos^
Ces opérations ont lieu en grand à Villeneuve-
sur-Lot, ville maîtresse pour le commerce de la
région, devenue de nos jours un des plus grands
marchés agricoles de France, située à un coude
du Lot et reliée à Sainte-Livrade par une route
absolument droite et par le chemin de fer, non
moins rigidement tracé. Il y a là dix kilomètres
à travers une des plus somptueuses campagnes
de France.
Non seulement marché agricole, mais aussi
ville rurale, cette commune de près de i4ooo
habitants ^ n'en compte que 7 000 dans ce qui
1. L'époque à laquelle j'ai visité l'Agenais n'était pas celle des
prunes ; je me suis fait expliquer ces opérations et, surtout, ai
suivi Le Prunier, intéressant volume de M. Bruguière (Paris,
chez Masson).
2. Exactement 18594.
LE PAYS DES PRUNES. l4l
fut l'enceinte et les faubourgs d'une des plus
grandes bastides du Sud-Ouest. Le reste est dis-
séminé sur un vaste territoire de 9 3i2 hectares,
où la population vit par la culture du sol. Ville-
neuve ressemble à Libourne% mais elle est plus
animée, en cette saison du moins où le commerce
des petits pois attire des centaines de paysans.
Elle a aussi gardé son aspect du moyen âge. A
en juger par l'exiguïté de la place centrale, les
fondateurs ne comptaient pas faire naître une
ville bien populeuse, mais la bastide eut au con-
traire de belles destinées. Cette place est d'un
caractère délicieusement archaïque par les « cou-
verts » qui l'entourent. Des rues animées y abou-
tissent, sur lesquelles s'ouvrent des ruelles
étroites, semblables à celles d'Eymet^ avec leurs
petites maisons construites en carcasses de pou-
trelles ou de briques plates, mal cuites, que les
vents ont rongées en y creusant de véritables
sillons. L'irrégularité de ces constructions, les
surplombs, les vignes qui tapissent les façades,
tout cela donne à Villeneuve un cachet parti-
culier que viennent accroître des portes de ville
percées sous de hautes tours.
1. 29e série du Voyage en France, chapitre I^r.
2. Pages 25 et suivantes.
ll^2 VOYAGE EN FRANCE.
Dans ces rues passe une foule active, de phy-
sionomie avenante et fine ; les femmes ont une
grâce et une souplesse remarquables. Même dans
ce pays d'Agenais où l'élément féminin offre un
type séduisant, la ville est réputée pour l'art
avec lequel ses femmes arrangent le mouchoir
qui leur sert de coiffure.
De larges boulevards plantés de platanes ont
remplacé les remparts ; ils viennent aboutir au
Lot en deux lignes à demi circulaires, envelop-
pant chacune une des rives; la belle rivière par-
tage la cité en deux quartiers inégaux, un pont
très élevé la franchit sur une grande arche
appuyée à des arcs plus étroits. Ce pont, les
portes de ville, l'éghse, le monumental hospice
Saint-Cyr donnent à Villeneuve un caractère
pittoresque. Le Lot, avec son vaste moulin et ses
hautes berges où des eaux calcaires ont modelé
des draperies, est la partie principale du décor
citadin.
Du haut du pont la vue est charmante, la ri-
vière écume sur un barrage, une colline régu-
lière forme fond de tableau, tapissée de cultures
sur lesquelles tranchent les lignes des prune-
raies.
Sur l'un des boulevards est la statue de Ber-
nard-Palissy. Le grand artiste est né dans l'ar-
LE PAYS DES PRUNES. ' l43
rondissement, à la Gapelle-Biron. Devant l'hôtel
de ville on a placé le buste d'Armand Daubasse,
poète quercinois né à Moissac et mort à Ville-
neuve, dont les poésies ont été recueillies. Ce
brave « peignier » en cornes ne savait cependant
ni lire ni écrire.
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE
A travers Villeneuvc-sur-Lot . — Les peigniers en corne. — L'em-
ballage des petits pois. — Au marché. — Les fabriques de con-
serves. — La culture des pois. — Machines à écosser. — Les
pruneaux. — Autour de Villeneuve.
Castelnaud. Mai.
Peignier en corne Ce métier d'Armand
Daubasse existe encore à Villeneuve. Le travail
de la corne s'y est maintenu et a sans doute
fait naître la production des boutons de nacre \
Les deux industries occupent une demi-douzaine
d'ateliers, mais leur chiffre d'affaires est bien
peu de chose auprès de celui représenté par le
commerce des pruneaux et des primeurs, notam-
ment des petits pois.
A l'heure où j'arrivai hier dans la ville, la
I. Je ne reviendrai pas ici siu* la fabrication du peigne. J'ai lon-
guement parlé de cette industrie, à propos d'Oyonnax (Ain), dans la
8^ série du Voyage en France, et d'Ézy, Bois-le-Roi et Le Lhabit
(Eure), dans la 6^ série. Je la signale encore à la Bastide-sur-
l'Hers et Rivel (Ariège et Aude), 38^ série
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. l45
rue principale, sur la rive gauche, montrait beau-
coup d'activité. Des femmes installées sur les
trottoirs cousaient des sacs que l'on pesait près
d'elles sur une bascule. Je m'étais approché et
avais constaté que l'on emballait des petits pois.
En me voyant intéressé par ce travail, une des
ouvrières m'avait dit :
— Ça vous amuse de voir tant de petits pois;
si vous étiez matinal, vous en verriez bien plus
encore, quand on les apporte aux fabriques de
conserves.
Gela me remit en mémoire le propos d'un ami
occupant une grande situation dans l'adminis-
tration des postes. Je lui faisais part de mon
regret de ne pouvoir parcourir l'Agenais à la
saison des prunes, et il me répondait :
— Des prunes ! moins curieux que les petits
pois. Tous les ans nos bureaux de Bordeaux
doivent envoyer des télégraphistes de renfort
à Villeneuve-sur-Lot. Tenez, ils y sont encore,
ils resteront tant qu^il y aura des pois nécessi-
tant des dépêches avec les commissionnaires de
Paris.
Au point du jour, ce matin, j'étais dans la
longue avenue formée par la route de Monflan-
quin, où sont les principales fabriques de con-
serves. Dès 4 heures je voyais affluer les voi-
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. 10
l4G VOYAGE EN FRANCE.
tures, chars à bancs conduits par des chevaux
rapides ou des ânes galopant avec entrain; ces
véhicules, très légers, sont chargés de sacs, ils
portent de loo à 3oo kilogrammes. De petits
propriétaires ayant une faible récolte et de-
meurant à proximité apportent leur sac sur
une brouette. Chaque usine possède un grand
hall dans lequel les pois sont amenés et pesés,
d'autres bascules fonctionnent sur le trottoir.
Lorsque la fabrique a reçu tout ce qu'elle peut
traiter dans la journée, elle ferme ses portes, les
retardataires vont alors rejoindre les autres pro-
ducteurs au marché.
Celui-ci se tient sur le boulevard, entre la
statue de Bernard Palissy et l'hospice. Sans cesse
arrivent les voitures avec leur chargement. Les
animaux sont dételés et emmenés à l'écurie.
Vers 6 heures s'ouvre le marché. Les ache-
teurs sont tous des commissionnaires pour Pa-
ris et les grandes villes de l'intérieur ou les
agents des principales maisons parisiennes. Les
affaires se traitent vite, car il y a un cours éta-
bli chaque jour, selon l'abondance de la récolte.
Aujourd'hui, me dit-on, il y a peu de mar-
chands, un violent orage a éclaté la veille et
empêché la cueillette ; aussi la foule, qui me
semble grande pourtant, est-elle peu de chose
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. \[\']
auprès de celle des autres jours : alors, le bou-
levard, jusqu'au Lot, est rempli de voitures.
J'ai voulu avoir des renseignements et tout
naturellement stiis allé dans une usine, la plus
considérable. J'avais eu jadis des rapports avec
les chefs de la maison et je crus pouvoir m'en
targuer. Cela ne me servit de rien, j'eus un ac-
cueil plutôt froid, même bourru de la part du
directeur. Je n'aurais pas supposé que le paci-
fique petit pois pût rendre les gens aussi disgra-
cieux !
Heureusement, il est d'autres usines à Ville-
neuve ; quelqu'un à qui je contais ma déconvenue
me conseilla d'aller voir M. LafTargue, président
du tribunal de commerce, fabricant de conserves,
commerçant en prune d'ente. J'eus vite oublié
l'accueil discourtois que je venais d'éprouver.
Non seulement M. LafTargue me montra ses ate-
liers, mais il a bien voulu me documenter sur
cette industrie nouvelle qui ramène la fortune
dans l'Agenais.
Tout cela est récent : depuis vingt ou vingt-
cinq ans seulement la culture des petits pois a
pris de l'importance ; l'industrie des conserves
est bien moins ancienne encore.
On a d'abord voulu utiliser les terrains d'où la
vigne avait disparu, en faisant le pois de primeur,
l48 VOYAGE EN FRANGE.
il s'est trouvé que le sol et le climat lui conve-
naient à merveille. Les commissionnaires de
Paris n'ont pas tardé à connaître le chemin de
Villeneuve ; ils ont acheté avec tant d'entrain
que toute la campagne s'est mise à planter des
pois pour satisfaire aux demandes. Aujourd'hui,
pendant la saison, chaque jour voit arriver
70000 à 80000 kilogrammes. En 1898, la gare
de Villeneuve expédia jusqu'à cinquante wagons
de pois par jour; ce chiffre a encore été dé-
passé'.
Encore faudrait-il ajouter à la vente sur le
marché les achats directs faits par les expédi-
teurs ayant boutique et possédant leurs fournis-
seurs attitrés. Ceux-là envoient directement les
pois à leurs correspondants par toute la France.
Comme la courte saison du petit pois ne saurait
suffire pour couvrir leurs frais généraux et don-
ner un bénéfice, ils ont demandé d'autres pro-
duits aux paysans ; sous leur impulsion sont nées
les cultures d'asperges, de tomates et de hari-
I. La Statistique agricole de la France pour igoi évalue à
/jSiio quintaux métriques, valant looSiio fr., la production du
Lot-et-Garonne en pois, le prix moyen étant de 21 fr. 90 c. On
avait consacré 2 690 hectares à cette culture, le rendement moyen
étant de 17 quintaux 86 à l'hectare. A ce point de vue, le départe-
ment venait, pour la valeiu", après Se;ne-et-Oise (1389710 fr.) et
le Nord (i3i475o fr.).
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. 1 49
cols verts, la plantation en grand des pêchers,
celle des amandiers dont on cueille le fruit encore
frais. Toutes ces cultures ont fait tache d'huile
et s'étendent loin, même Monflanquin envoie
des pois à Villeneuve. Sainte-Livrade est devenu
un centre secondaire et a ses fabriques de con-
serves. Clairac, trop loin de Villeneuve, possède
un marché spécial chaque après-midi.
— Les affaires sont tellement actives que notre
bureau de télégraphe reçoit du renfort de Bor-
deaux, du i^^ mai au 6 juin, époque la plus fé-
brile.
— C'est ce qtie l'on m'a dit à Bordeaux.
— Mais on ne vous a pas dit que ces employés
reviendront en août, à Tépoque des haricots verts
et des prunes ! 11 y a donc une recrudescence
d'activité qui se prolonge longtemps.
Revenons aux petits pois. La gare de Ville-
neuve n'en expédie pas moins de vingt-cinq
wagons par jour à l'époque où les envois n'ont
pas encore toute leur importance ; en pleine sai-
son on atteint aujourd'hui soixante. La culture
qui alimente le marché a lieu dans un rayon de
4o kilomètres, ou, encore, dans un carré de 5o
à 60 kilomètres de côté. La ville est devenue en
quelque sorte le régulateur des prix pour cette
denrée, car toutes les usines à conserves de
l50 VOYAGE EN FRANCE.
France sont solidaires pour les cours. Celte si-
tuation s'affirme chaque jour davantage, le pois
de Villeneuve passe pour plus sucré et meilleur
que celui de l'Ouest. Peut-être a-t-on gâché les
prix, on a été jusqu'à payer 22 tr. les 100 kilo-
grammes. La moyenne pour les conserves oscille
entre i4 à 20 fr.
Aussi le cultivateur connaît-il une ère de pros-
périté qu'il ne pouvait espérer. Tel qui acheta
un terrain de i 000 fr. y récolte de 3 000 à
4 000 fr. de pois par saison. Mais on a utilisé
tous les moyens d'accroître le rendement, le sol
est absolument jardiné, les engrais chimiques,
superphosphates surtout, sont régulièrement
employés. C'est ainsi que les revenus bruts de
2 000, 2 5oo, même 3 000 fr. par hectare ont pu
être atteints.
La cueillette nécessite beaucoup de bras, une
femme ne pouvant guère ramasser plus de 5o ki-
logrammes par jour.
La fabrication des conserves ne commence à
fonctionner que lorsque Paris, ayant les pois de
sa banlieue, n'a plus à s'adresser au dehors. Les
prix baissent alors et l'industrie peut être ali-
mentée. Actuellement, Villeneuve possède sept
usines ; elles emploient peu d'ouvrières, quatre
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. l5l
cents personnes au plus. Mais cela lient aux ma-
chines qui ont permis d'écosser avec une rapi-
dité prodigieuse. Chez M. LafTargue, la machine
à écosser que je vois fonctionner rend loooo ki-
logrammes de pois par jour; pour obtenir un
tel travail à la main, il faudrait bien des dou-
zaines d'ouvrières.
Le reste de l'opération n'est pas moins sim-
ple, c'est la conserve par le procédé Appert : le
pois, mis en boîte que l'on soude, est soumis à
l'ébullilion. La fabrication des boîtes de fer-
blanc est une industrie importante. Une maison
parisienne, qui a des ateliers dans toutes les
villes où l'on produit des conserves, occupe cin-
quante ouvriers dans sa succursale de Ville-
neuve. La fabrication des caisses n'est pas moins
active ; bois de peuplier du pays et bois de pin
tiré des Landes sont mis en œuvre pour les
emballages.
La même activité se présente au moment où
les haricots verts peuvent être mis en boîte. Mais
on n'a pas de machine, l'homme ingénieux qui
enlèvera mécaniquement le fil de ce légume ne
s'est pas révélé encore.
L'industrie française des conserves a sur ses
concurrentes de l'étranger l'avantage du climat,
qui permet de livrer de bonne heure, mais nos
7v > '.-' 'F
v-^^
L'AGENAiS
(Département de Lot-et-Garonne)
D iprei, la carte d I tnt majoi
11000000'.
rmTTTTTTr^rTr
l54 VOYAGE EN FRANCE.
rivaux s'outillent. En Belgique, une maison de
Malines possède dix machines à écosser.
La prune reste cependant la base du commerce
(le Villeneuve-sur-Lot, centre le plus considé-
rable d'achats, de préparation et d'expédition.
Elle y entretient toute une série d'industries
annexes et de commerces : caisses, tonneaux,
papier, boîtes de fer-blanc, bocaux. On aura une
idée de l'activité de Villeneuve par le chiffre des
expéditions : elles atteignent, pour le chemin de
fer seulement, dix wagons par jour pendant trois
mois. Le Lot participe pour une grande part aux
transports, par cette voie les caisses de prunes
sont dirigées sur Bordeaux, port d'embarque-
ment de ces produits. L'époque de grande acti-
vité va du i5 septembre au mois d'avril, elle
atteint son maximum en octobre et novembre.
Cette production, qui répand les millions dans
une partie de l'Agenais en somme peu étendue,
est menacée par les ravages des chenilles et con-
currencée par l'étranger. Les principaux pays pro-
ducteurs sont, en Europe, la Bosnie et la Serbie,
en Amérique la Californie. La réputation de la
prune d'Agen est telle que les concurrents s'abri-
tent derrière ce nom pour écouler leurs produits.
Les Américains vendent les leurs comme prunes
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. l5.)
françaises, les Serbes, plus audacieux, les livrent
comme prunes d'Acjen, ils en envoient sous ce nom
en France même ^ Jusqu'à présent le danger
n'est pas grand, mais il peut le devenir. La Ser-
bie expédierait chaque année 226 millions de ki-
logrammes, d'après un journal d'agriculture, mais
les chiffres officiels de 1887 donnent pour la
Serbie 4i 296 700 kilogrammes ; la Bosnie expor-
terait 4o millions. Leurs prunes, de plus en plus
soignées, arrivent à lutter avec les nôtres, qui
gardent cependant encore la supériorité de goût.
Ces deux pays ont l'avantage de posséder à leurs
portes, par le Danube, les immenses marchés
d'Autriche-Hongrie, d'Allemagne et de Russie.
La concurrence de l'Amérique n'est pas moins
menaçante, elle est plus scientifique surtout: les
Américains sont venus chez nous chercher nos
arbres, copier nos emballages, nos machines à
trier et emballer, ils vendent meilleur marché.
Plus grand pour la France est le danger des
chenilles. J'ai dit comment les plantations ont été
I. En 1901, la France a importé 499099 kilogrammes de pru-
naux valant 299417 fr. Sur ce chiffre l'Autriche-Honçirie, dont
les ports et les douanes terrestres servent à la Serbie, figure pour
394602 kilogrammes et les États-Unis pour 67180 kilogrammes.
Cette importation est peu de chose auprès de nos exportations qui
ont atteint g 565 84o kilogrammes et une valeur de 7652672 fr.
l56 VOYAGE EN FRANGE.
atteintes cette année ^ (1902); l'an prochain en-
core la récolte sera compromise. Ôr, ce fléau
revient tous les dix ans et ses effets se font sen-
tir pendant quatre années ! On est enfin en pos-
session d'un remède dû au très habile professeur
d'agriculture, M. de l'Ecluse ; c'est un mélange
de nicotine, d'alcool dénaturé et de carbonate
de soude. Le prix du traitement ne dépasse pas
par prunier sept centimes. On vaporise le li-
quide sur l'arbre dans les premiers jours de
mai; les feuilles ne sont plus mangeables et la
chenille qui vient d'éclore meurt d'inanition.
Ce remède, radical contre la chenille fileuse,
doit l'être aussi contre la chenille verte : s'il
est appliqué par tous on peut arriver à détruire
complètement cette malfaisante engeance qui
fait perdre vingt millions par an au Lot-et-Ga-
ronne pendant la durée de l'invasion. Le prix
de l'application, déjà faible, est encore abaissé
de 5o p. 100 : l'on remplace la nicotine par
l'aloès.
Villeneuve-sur-Lot est le centre du mouvement
contre ce fléau ; en effet, la ville, par son genre
d'affaires, doit chercher à empêcher les éclosions
1. Voyez pages 21 et suiAanles
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. 167
de chenilles. Chaque retour de ces bestioles
cause à son commerce des pertes énormes. Ce
trafic est considérable, les recettes de la gare de
Villeneuve-sur-Lot se sont élevées en igoi à
565 000 fr., bien qu'aucun embranchement ne
se détache de la ligne. Le Lot prend part au
mouvement dans une proportion assez considé-
rable. Une compagnie locale fait un service sur
Bordeaux avec une flotte de cinq bateaux, dont
un à vapeur.
L'activité économique explique l'animation de
Villeneuve. Une course dans ses campagnes fait
mieux comprendre encore la prospérité de cette
jolie ville qui a su garder l'aspect du passé, tout
en se transformant, autour de la cité primitive,
au point d'avoir Tallure d'un grand centre. Lors-
qu'on va par ces champs sur la colline escarpée
où se dresse le petit village de Pujols, fier encore
dans l'enceinte de murailles d'une cité désertée,
on a un des plus beaux spectacles de richesse
rurale que puisse offrir notre pays. En ce mo-
ment c'est superbe, toute la plaine et les pentes
d'harmonieuses collines montrent les vergers
de pruniers et d'amandiers montant jusqu'aux
crêtes encore couvertes d'un manteau de bois.
Les pois commencent à jaunir, mais la verdure
tendre des haricots naissants dessine des da-
l58 VOYAGE EN FRANCE.
miers. Là-bas, vers Penne, le paysage s'embellit
encore; des collines bien taillées ont des allures
de camp romain, aucun pays ne devait mieux
solliciter les fondateurs de forteresses.
Cette richesse se montre partout. L'ancienne
abbaye d'Eysses, devenue maison centrale et en-
tourée d'une haute muraille, est enveloppée de
belles cultures. Un pan de donjon est tout ce
qui reste de la maison primitive.
La route de Monflanquin passe devant la pri-
son et traverse longtemps le territoire de Ville-
neuve, au milieu des pruneraies, des luzernes,
des petits pois et des céréales. Les maisons ru-
rales, très nombreuses, sont entourées d'un jar-
din planté de figuiers, de lauriers et de pêchers.
On commence à arracher les petits pois en cette
fin de mai ; le sol ne reposera plus, aussitôt
retourné à la bêche il sera replanté en haricots.
Le pays s'élève peu à peu, bientôt la vue est
très étendue sur la vallée du Lot, profonde, en-
cadrée de collines admirablement verdoyantes,
couvertes de vergers réguliers de pruniers. A
un tournant de la route, la vue devient immense
sur un pays plat en apparence mais creusé de
vallons. Au premier plan, la butte colossale qui
porte Monflanquin semble commander à toute
la contrée. Au fond sont deux monticules, l'un
LES PETITS POIS UE VILLENEUVE. ibç)
butte déserte, l'autre portant les constructions
superbes de Biron, berceau de la famille ducale
de ce nom.
Au pied d'une côte la flèche de pierre de
Sainte-Radegonde, aiguille blanche, semble sur-
gir de la verdure. Sainte-Radegonde n'est point
un village, mais une paroisse groupant la multi-
tude de maisons isolées appartenant à la vaste
commune de Villeneuve-sur-Lot. Plus loin, sur
une colline, apparaît Castelnaud, village d'une
éclatante blancheur.
XI
LE HAUT AGENAIS
Au bord de la Lède. — La culture des fèves — Monflanquin. —
ViUeréal. — Les campagnes du haut Agenais. — Monsempron
et Libos. — Fumel et ses forges. — Les carrières de i'Alle-
mance.
Fumel. Juii
La région de FAgenais, dans laquelle on pé-
nètre après avoir traversé la petite rivière de
Lède, n'offre pas des collines aussi nettement
découpées que la vallée inférieure du Lot, mais
le massif n'en est pas moins très élevé, s'il est
plus confus. Une infinité de vallons le partagent
et le plissent. Les villages et les bourgs sont
bâtis sur les points culminants et conservent
Tuie allure guerrière et fière qui ne laisserait pas
supposer leur faible population. Ce sont pour
la plupart d'anciennes bastides. Castelnaud-de-
(irattecombe couvre une croupe où l'on extrait
de la pierre meulière. Un autre village, Saint-
Pastour, qui possède une belle église, est plus
fièrement campé encore. Le bourg le plus popn-
LE HAUT AGENAIS. l6l
leux, Gancoii, est lui-même situé au point culmi-
nant d'un massif strié d'une multitude de ravins
et de combes qui deviendront des affluents du
Lot, du Drot et de la Lède.
Cette dernière rivière est un faible cours d'eau,
mais elle constitue par la longueur de sa vallée
une région bien à part, dont la ville de Monflan-
quin est le cœur. Elle semble immobile tant
sont lentes ses eaux glauques sous le coteau de
la Sauvetat. Le versant sud est raide, en partie
boisé, l'autre est un verger de pruniers. Beau-
coup de petits pois dans les champs, mais plus
encore de fèves. Ces légumineuses sont la base
de la nourriture en cette saison; il n'est guère de
repas sans soupe aux fèves, même dans les meil-
leurs hôtels des villes ; assaisonnée avec la
graisse d'oie et de canard, c'est la garbure de
Gascogne.
Si les villages, ou plutôt les centres commu-
naux, sont peu nombreux, les hameaux de quel-
ques maisons parsèment les collines, beaucoup
ont des églises, petites et simples comme celle
très ancienne de Gorconat dont le pignon trian-
gulaire apparaît sur un éperon de roche calcaire
appartenant à la formation géologique du Péri-
gord voisin. Des abords de l'humble temple, on
découvre un vaste plateau couvert de pruniers,
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. Il
102 VOYAGE EN FRANCE.
sur lequel se dressent des coteaux isolés en
forme de dômes ou de tables. D'ici le paysage
de Monflanquin se précise, le mamelon couvert
de toits rouges n'est pas sans grandeur, mais il
manque au sommet la tour féodale ou la flèche
d'église qui ferait un beau site. Sur les rives de
la Lède, la campagne est encore d'une grande
richesse. Le prunier n'est plus Farbre dominant,
des haies de grands chênes enclosent les champs
et les prés. Beaucoup de belles maisons bour-
geoises, quelques châteaux sur le flanc des col-
lines ; le fond, sous le coteau qui porte Calvi-
niac, est une fraîche solitude.
La route traverse la riviérette et s'élève par
des pentes douces au sein des pruneraies rede-
venues nombreuses; en joualles sont des vignes,
d'étroites bandes de blé et de maïs. Jusqu'à
Lacaussade c'est comme une forêt de pruniers, à
peine trouée par quelques toits de métairies. Les
horizons grandissent à mesure que l'on s'élève,
mais les campagnes restent solitaires : peu de
hameaux; à peine, très loin, quelques groupes de
maisons laissant deviner un village. Seul Gancon
apparaît, sur sa petite montagne. Monflanquin
est bien la dominatrice de ce pays.
Voici l'antique bastide, de belle mine vrai-
ment, ainsi juchée sur des murailles qui furent
LE HAUT AGENAIS. 1 63
sans doute des remparts et dont les parois
abritent des jardins plantés de grenadiers et de
figuiers ; ces arbres s'accrochent aux pierres et
forment une tapisserie belle de forme, de des-
sins et de teintes. A l'entrée de ces jardins
s'étend un mail. Un des arbres a cette inscrip-
tion : Défense de peser la prune sur la rouie.
Les jours de marché, l'abondance des fruits
est telle que vendeurs et acheteurs, débordant
de la promenade, envahissaient la chaussée et
empêchaient la circulation des voitures.
Les hôtels et les auberges principales sont
ici, sur la grande route longeant la base de l'en-
ceinte, car la ville est peu accessible, sa pi-inci-
palevoie est montueuse et les petites rues trans-
versales sont trop étroites. Le site choisi par
Alphonse de Poitiers, pour sa ville neuve, milieu
du xm^ siècle, était excellent pour une forte-
resse, mais il se prête assez mal aux exigences de
la vie moderne, c'est pourquoi celle-ci se porte
aux abords. Aussi la cité a-t-elle gardé sa physio-
nomie, elle possède encore sa place à galeries
de formes variées : plein cintre, ogive, charpente
sur colonnes. A l'un des angles un pavillon est
supporté par une voûte gothique dont les ner-
vures s'unissent par une clé de voûte sculptée.
L'église a plutôt l'air d'une fortification, on
l64 VOYAGE EN FRANCE.
n'en devine le caractère religieux que par le
portail, sobre mais beau, grâce à son faisceau
de colonnetles. Une tour carrée qui ne dépasse
pas les combles de la nef flanque Fédifice. A
l'intérieur, de minces colonnes s'élancent en
gerbes de nervures donnant beaucoup d'élé-
gance à la voûte de briques.
Cette église est au point culminant de la col-
line, sur une plate-forme où l'on a également
construit l'école et d'où se découvrent des vues
immenses sur un paysage d'une grandeur pleine
de majesté, s'il est simple de lignes. Au fond, le
château de Biron, groupant ses tours et ses rem-
parts massifs sur sa butte, est comme un édifice
de rêve, un Mont Saint-Michel terrestre émer-
geant des plateaux boisés du Périgord.
Du côté du nord, où le souffle des vents âpres
a empêché les habitants de se porter, la butte
de Monflanquin a gardé son aspect primitif. Des
pruniers revêtent la pente raide, sous le boule-
vard ou plutôt la terrasse circulaire qui a rem-
placé les remparts plantés d'ormes centenaires.
La vallée de la Lède apparaît toute moirée de
moissons ondulantes dans lesquelles s'alignent
les pruniers; vus de si haut, comme d'un à-pic,
on dirait des arbres sortis de la main d'un tour-
neur de la Forêt Noire.
LE HAUT AGENAIS. l65
Le coteau est un rocher calcaire facile à cou-
per; aussi le chemin de ronde fut-il entaillé dans
la pierre. Il offre sans cesse de nouvelles vues.
Du côté de Cancon, la campagne est parsemée
de belles demeures d'autrefois ou de villas mo-
dernes. Tous les coteaux sont d'un vert doux
relevé par des rangées de pruniers dont les
quinconces s'étendent à l'infini. Vers le sud et
le sud-est se prolongent encore les campagnes
mouchetées de petits arbres; au fond, des col-
lines plus hautes doivent beaucoup de majesté
à leurs formes nettes et à leur isolement.
Dans la ville, où je pénètre de nouveau, il y a
encore des maisons à ressaut, donnant l'idée de
ce que dut être la bastide à son origine ; deux
ou trois tronçons de rues voûtées complètent
l'illusion.
Depuis un instant le ciel s'est obscurci, un
vent violent accourt, chasse les nuées, siffle dans
les arbres de la terrasse, le panorama soudain
s'efface. Par ce triste temps remplaçant la lu-
mière éclatante de tout à l'heure il me faut gagner
Villeréal. J'avais retenu ma place en diligence
sur le siège à côté du cocher, mais devant cette
bourrasque je dois m'enfermer dans la voiture.
l66 VOYAGE EN FRANCE.
les vitres sont violemment secouées par la tem-
pête et cinglées par la pluie. Combien m'a paru
longue cette course sur un plateau ondulé, où
je devinais à peine la silhouette des pruniers
inflexiblement alignés dans les champs !
A Villeréal, les petites rues sont changées en
lorrents. J'erre avec mélancolie par ces voies cou-
pées au cordeau ; la place centrale avec ses ar-
cades offre un abri. Que de générations ont passé
sous ces voûtes, depuis le lointain xni^ siècle
qui vit naître Villeréal — ville royale !
C'est une des plus régulières parmi les bas-
tides de l'Agenais ; dans son enceinte presque
circulaire, elle ne s'est pas modifiée depuis ses
origines ; l'église naquit avec la cité elle-même.
Toujours la pluie, faisant abandonner mon
projet de gagner Castillonnès, autre bastide de
plus fière allure, car elle commande la vallée
du Drot du haut de sa colline.
Jusqu'à Monflanquin, et fort au delà sur la
route de Fumel, encore la bourrasque. Cepen-
dant l'averse est moins dense, on peut distinguer
une campagne bien cultivée où la roche perce
sur nombre de points. La pierre exploitée en car-
rière a permis de donner aux constructions une
beauté robuste qui s'harmonise avec les lignes
LE HAUT AGENAIS. 167
du paysage. Les centres de population sont de
minces hameaux, malgré leur rang de com-
munes. Les habitations isolées sont nombreuses;
chacune a son figuier, cet arbre semble le génie
domestique du foyer; le jardinet est clos de
haies de lauriers-tins et de rosiers du Bengale.
Cela est charmant, d'autant plus que le ciel,
jusqu'alors maussade, s'éclaire enfin, voici une
trouée dans les nuages, un pan bleu de firma-
ment et, soudain, le rideau sombre se déchire,
le grand soleil apparaît. Je n'ai fait qu'un bond
pour aller retrouver le cocher sur son siège. La
voiture court en ce moment entre les pruniers,
très vigoureux, formant coi^me un verger inin-
terrompu divisé par des joualles et de petits
champs de blé.
En regardant la carte, je suis surpris de tou-
jours monter et je croyais suivre la vallée de
la Lède. On m'avait dit pourtant que la voi-
ture passait par Montagnac et Salles, d'où je
pourrais gagner en peu de temps La Gapelle-
Biron et Biron, tout en visitant les gorges de
Gavaudun. Le cocher devine la cause de ma
surprise :
— Ah ! vous vouliez peut-être aller à Gavau-
dun ! Un curieux pays où l'on vient beaucoup :
de Villeneuve, d'Agen, de Montauban. G'est
l68 VOYAGE EN FRANCE.
qu'il y en a des rochers, des gorges, des ca-
vernes, et un château en ruines ! Maintenant je
n'y passe qu'un jour sur deux. Les gens de La-
caussade ont voulu avoir leur part de la voiture,
on a divisé la poire avec Montagnac !
— Alors nous allons à Lacaussade ?
— Oui, si vous voulez ensuite gagner Gavau-
dun, ça vous allonge de plus de deux lieues et
vous ne serez pas à La Gapelle-Biron avant la
nuit, à Biron avant demain.
Je m'étais bien promis cependant de voir La
Gapelle où naquit Bernard Palissy et Biron qui
conserve si fi ère tournure féodale. Hélas ! c'est
près d'un jour perdu et j'ai rendez-vous à Agen
demain matin.
Il faut faire contre fortune bon cœur. Allons
donc par Lacaussade. Voici le bois de ce nom,
belle chênaie croissant sur le rocher et envelop-
pant le château, puis le village, tout menu, avec
son église très humble, n'ayant qu'une cloche à
son pignon. Maintenant s'étendent des champs
de céréales coupés de pruniers et entremêlés de
petits carrés de gesse, de vignes en joualles^ de
fèves. Le sol est de peu d'épaisseur, la roche
perce souvent, on se croirait sur un causse. De
là, sans doute, vient ce nom de Lacaussade? Des
petits bois de chênes apparaissent, où déjà l'on
LE HAUT AGENAIS. 169
récolte des truffes, si abondantes dans le Péri-
gprd tout proche.
Une colline rappelant par sa forme la mon-
tagne de Laon surgit au-dessus du plateau. Un
moulin à vent la couronne, mais aucune autre
construction ne s'y montre; pourtant un village,
Monségur, s'abrite sur l'autre versant. Les pentes
étaient jadis couvertes de vignes, le phylloxéra
les a détruites, un gazon ras et des genévriers
se sont emparés du terrain. L'aspect est misé-
rable, les pruniers eux-mêmes paraissent rabou-
gris. Les maisons isolées sont petites, sans dé-
pendances, car, le bétail étant rare, il n'est pas
besoin d'étables. Gela contraste avec la pureté
des lignes du paysage ; l'hémicycle décrit par la
colline a de l'allure. Dans les parties où la terre
est plus épaisse il y a pourtant quelques belles
fermes.
Le chemin atteint une sorte de col d'où l'on
jouit d'une vue superbe sur ce confm de trois
provinces : Périgord, Agenais et Quercy; on do-
mine de haut la vallée du Lot, bordée par une
rangée de collines de forme trapézoïdale. Le ha-
meau de Monségur, maintenant visible, con-
temple ces admirables horizons. Il est blotti au
pied d'une petite falaise de roches blanches
portant les ruines d'un château. Au fond du
lyO VOYAGE EN FRANCE.
paysacje montent les fnmées noires des forges de
Funiel.
La roule descend. Sur ce versant abrité des
vents du nord, la végétation a changé. Le gené-
vrier est remplacé par un arbuste à feuilles lui-
santes, aux jeunes pousses d'un vert tendre,
aux élégantes grappes de baies rouges. C'est le
sumac, si commun dans tout le bas Ouercy et
l'Albigeois, bien que l'emploi de cette plante in-
digène par les corroyeurs ait beaucoup diminué
depuis que l'on tire le sumac des bords de la
Méditerranée, de Sicile surtout. Il forme des
touffes buissonnantes sur ces terroirs calcaires
où la terre arable est de faible épaisseur. C'est
le seul végétal de taille un peu élevée, autour du
village de Condezaygues. Certains mamelons
sont absolument nus, mais les plis sont frais,
des vignes et des pruniers enveloppent le vil-
lage : une poignée de maisons. A mesure que
l'on descend, la richesse renaît, la végétation
est belle en cette terre rouge. Sur un ressaut
voici Monsempron, petit groupe d'habitations de
coquette allure, une d'elles flanquée d'une tou-
relle. L'église romane est un bel édifice, inté-
ressant dans beaucoup de ses parties.
Monsempron a donné son nom à la gare de
jonction établie au confluent de l'AUemance et
LE HAUT AGENAIS. I7I
du Lot, en y ajoutant celui de son hameau,
Libos. C'est bien long à dire, Monsempron-Libos,
et l'usage a prévalu de dire Libos tout court ;
d'ailleurs le hameau seul a profité de cette excel-
lente situation ; le chemin de fer le fait accroître
et Monsempron reste dédaigné sur sa colline.
Peut-être eût-il mieux valu donner à la station
d'embranchement le nom de la ville voisine,
Fumel, située à 2 000 mètres de là et consti-
tuant, grâce à ses forges, un petit groupe fort
vivant.
Un charmant chemin privé, gracieusement
ouvert au public, va de la gare de Libos à Fu-
mel en évitant la traversée du village. Il des-
cend dans le vallon très vert où l'Allemance
grossie par la pluie violente de la nuit et du
matin roule des eaux rougies par le sol ocreux
et ferrugineux qu'elle a traversé. Toute cette
vallée est un gisement de fer, et le pays avoisi-
nant aussi. La Capelle-Biron, Gavaudun et Salles
dans la vallée de la Lède, Blanquefort dans un
vallon aboutissant à l'Allemance, Saint-Front et
Cuzorn au bord de cette dernière rivière, puis
Fumel possèdent des minières. L'exploitation
est morcelée; chacune de ces carrières de fer
à ciel ouvert occupe un nombre restreint d'où-
172 VOYAGE EN FRANCE.
vriers; il y a 66 minières et elles ont occupé
seulement 162 hommes en 1901. Encore le tra-
vail a-t-il été temporaire et intermittent'. En
gare de Cuzorn, où Ton vient charger le minerai
sur wagons, celui-ci vaut environ 5 fr. la tonne.
Les propriétaires eux-mêmes ou des tâcherons
extraient ce minerai au moyen de tranchées plus
ou moins profondes, « très irrégulières dit Tin-
génieur des mines dans son rapport au conseil
général ; le minerai forme des lentilles verti-
cales le plus souvent peu étendues, dans une
argile presque toujours compacte. Ces lentilles,
en général d'un volume restreint, ne sont guère
exploitées que sur leurs affleurements, et les
travaux sont arrêtés dès qu'ils atteignent une
faible profondeur, de sorte que les exploitations
se déplacent fréquemment. )>
On est arrivé aujourd'hui à travailler d'une
façon moins barbare, le développement de la
production ayant amené à conduire les re-
cherches dans des conditions rationnelles.
Ce n'est pas la seule richesse minérale de
cette vallée de FAllemance, elle fournit encore
à Fumel la castine nécessaire aux hauts four-
I. La production s'accroît cependant grâce au voisinage des
usines de Fumel. Elle a atteint 46606 tonnes en 1901, et n'était
que de 89881 en igoo.
LE HAUT AGENAIS. I']3
neaux, on l'extrait à côté même des usines !
Dans le haut du vallon, Sauveterre a de belles
carrières de calcaire transformé en chaux hy-
draulique et ciment dans plusieurs usines ; le
même village possède des carrières de sable pour
moulage et une usine de produits chimiques.
Fumel fabrique aussi des chaux et des ciments ^
L'AUemance est donc une rivière active.
Avant d'atteindre le Lot, ses eaux rouges font
mouvoir la roue moussue d'un moulin enveloppé
dans une exubérante végétation. Le chemin ac-
cède ensuite au fond du val, d'où Monsempron
apparaît dans toute sa beauté, la haute abside
ogivale de l'église, la tour carrée, très élevée, cou-
verte d'un toit bas, forment un charmant décor.
Au pied d'un coteau, au bord du Lot, sont les
usines de Fumel, précédant la ville. Hauts four-
neaux et cheminées fumantes sont une note bien
inattendue dans ce paysage tranquille, en une
contrée d'où la métallurgie, si active jadis, a dis-
paru. Fumel non seulement n'a pas périclité,
mais il prospère chaque jour. L'usine avait été
créée par la Compagnie des chemins de 1er d'Or-
I. Production des carrières en igoi : 24187 mètres cubes de
castine; 7887 mètres cubes de calcaire pour chaux, hydraulique;
6008 mètres cubes de calcaire à ciment; 120 mètres cubes de
terre pour ocres.
174 VOYAGE EN FRANCE.
léans qui l'a rétrocédée à une compagnie en 1874,
comme elle rétrocéda Decazeville. En 1897 ^^^^
produisait seulement 19089 tonnes de fonte en
première fusion, d'année en année la quantité
a doublé; en 1901 on obtint 3o444 tonnes de
fonte en première fusion et 9646 de fonte moulée
en deuxième fusion. Les hauts fourneaux avaient
employé 4^ 270 tonnes de minerai de l'Allemance
sur une quantité totale de 46 606. La production
augmente encore, car ce petit centre ne se ressent
nullement de la crise métallurgique. L'établisse-
ment a pour objet la fabrication des coussinets,
plaques tournantes pour chemins de fer et tram-
ways, des tuyaux et grosses pièces de fonderie.
Fumel est bien placé d'ailleurs, non seule-
ment le minerai et la castine sont à proximité
mais le Lot est navigable jusqu'à l'entrée du
bassin houiller de Decazeville et un chemin de
fer le relie aux charbonnages par Cahors et Gap-
denac.
L'usine borde la rivière, la ville est plus loin,
sur une colline que surmonte l'église gothique
non encore achevée ; la tour attend son cou-
ronnement et sa flèche, les hautes fenêtres ogi-
vales, d'un bel élancement, sont masquées par
des briques.
Le vieux bourg est à l'écart, sur la pente, re-
LE HAUT AGENAIS. lyB
<jardant la rivière. Les rues y sont étroites, bor-
dées de maisons de poutrelles en encorbelle-
ment. Ce sont de tristes logis aux murs lépreux,
que masque mal un espalier de vignes, le sol est
de terre battue; la ville moderne est formée par
la grande route bordée de belles maisons, de
cafés et d'hôtels. Fumel eut un rang important
dans la province et, de bonne heure, fut dotée
d'une charte ; ses coutumes étaient souvent
citées dans la jurisprudence.
La commune de Fumel a acquis une des plus
belles et puissantes ruines féodales de France :
le château de Bonaguil, d'une allure massive ; il
passe pour la première forteresse construite en
vue de résister à l'artillerie. Bonaguil est trop loin
pour que je puisse le visiter ce soir : deux lieues.
La nuit vient, le soleil est déjà masqué par
les collines. D'une terrasse avoisinant l'église,
le paysage est d'une beauté captivante. On
domine la large et profonde vallée ; au milieu
erre le Lot, entre les berges rocheuses qu'il
érode. Le barrage écluse établi devant l'usine
fait refluer les eaux. Un pont suspendu d'une
seule travée tend son tablier léger sur la nappe
tranquille. Au delà, une route blanche s'en va à
travers la plaine complantée de pruniers.
XII
AGEN ET SES CAMPAGNES
Les vieilles forteresses. — Tournon-d'Agenais et Penne-d'Age-
nais. — Le vallon de la Marse. — • Agen. — Le poète Jas-
min. — Le commerce d'Agen. — Richesses agricoles. — Au
long de la Garonne. — Port-Saint-Marie. — Aiguillon. —
Nicole et ses abricotiers.
Nicole. Juin.
Si l'Agenais est un pays de collines modestes
par l'altitude, bien des contrées où les accidents
du sol sont déjà des monts peuvent envier la
fière allure de ces coteaux, leurs pentes raides,
leurs cimes nettement découpées, les tables ré-
gulières qu'elles forment et d'où l'on découvre
des horizons si merveilleux par leur profondeur,
leur transparence et leur splendeur rustique.
L'homme a accru cette beauté en campant ses
bourgades sur les sommets, bastides féodales qui
semblent encore appeler au combat les croisés
de Montfort, les conquérants anglais ou la che-
valerie de la France du Nord, travaillant à son
insu à l'unité de la patrie.
AGEN ET SES CAMPAGNES. I77
Et cependant quels pauvres bourgs on trouve
en atteignant ces altières silhouettes de cités !
Tournon-d'Agenais groupe à peine 35o habitants
sur sa colline surgissant au-dessus du val étroit
où colile le Boudouyssou et semble plus citadine
que bien des villes populeuses, lorsqu'on l'aper-
çoit des campagnes lointaines. Et Penne, hardie
et glorieuse? étagée à la pointe d'une longue et
étroite crête dominant de 170 mètres le Lot qui,
brusquement, tourne vers Villeneuve pour aller
gagner la Garonne, elle est superbe la lillipu-
tienne bourgade; pourtant il lui reste peu de
chose du château que les armées se disputèrent
pendant quatre cents ans. Le territoire est très
étendu, 4 670 hectares ; ses hameaux sont par-
fois plus populeux que des communes, ainsi
Port-de-Penne assis au pied du coteau, sur le
bord de la rivière et qui fut pour la forteresse
une tête de pont non moins bien défendue. De la
ville aujourd'hui si chétive, après avoir été puis-
sante, on découvre un panorama immense sur la
vallée du Lot et les campagnes lointaines du
Quercy. La colline est tapissée de pruniers et
de vignes, partout on voit des vergers. Au prin-
temps, quand tous ces arbres fleuris semblent
couvrir l'Agenais de leur neige, le spectacle est
inoubliable.
VOYAGE EX FRANCE. — XXXI. 12
l'jS VOYAGE EN FRANCE.
Ce matin, j'ai demandé à déjeuner dans une
auberge au pied de la ville : il n'y avait qu'une
soupe aux fèves. On m'en a servi une énorme
terrine. Cela était parfumé et onctueux; ce
potage cuit avec des abatis d'oie en confit expli-
quait la faveur dont la garbure jouit dans tout
If Midi. J'avais pour compagnons de table des
ouvriers terrassiers ; quand ils ont eu fini, ils
ont versé dans l'assiette un grand verre de vin et
ont bu à même avec un air de satisfaction béate.
Je me suis borné à tremper les lèvres dans le
verre ; la mine de ces braves gens m'a révélé
que je commettais une infraction au code de ci-
vilité. Pendant ce temps l'hôte déjeunait d'une
goiissée^, c'est-à-dire d'un morceau de pain frotté
d'ail. Pour ce solide lest du matin on m'a de-
mandé quatre sous.
De Port-de-Penne à Agen, c'est une succes-
sion d'heureux tableaux; les maisons isolées ta-
pissent le flanc des collines et le fond du val.
Une multitude de plis sillonnent les pentes,
s'ouvrant parfois assez pour montrer quelque
hameau assis au pied de ces tables régulières ou
petits plateaux qui semblent les vestiges d'une
plaine érodée par les eaux. Ainsi se blottit Aura-
dou dont pointe l'humble flèche ; ainsi Haute-
AGEN ET SES CAMPAGNES. I79
fage, grand site, grâce à sa puissante tour flan-
quée d'une tourelle, et arc-boutée de puissants
contreforts, gracieuse par les détails fleuris de la
Renaissance. Ce débris d'un château des évêques
d'Agen est aujourd'hui le clocher de l'humble
église. De ce donjon on domine la conque très
verte d'un vallon creusé dans le coteau capri-
cieusement entaillé dont la table est un puissant
promontoire .projeté par le plateau de Laroque-
Timbaut.
Le chemin suit cette étroite arête pour gagner
Laroque. Sans cesse on a vue sur ce pays extra-
ordinairement découpé et vallonné, où les cata-
clysmes géologiques ont multiplié les ravins,
tandis que les parties non é vidées forment en
perspective une plaine d'une horizontalité pres-
que absolue. Sur une des parties intactes les
plus vastes, Laroque-Timbaut commande l'ou-
verture de deux combes. Le petit bourg fut aussi
une forteresse, il eut un rôle militaire. De vagues
linéaments de murailles rappellent ce passé. Par-
tout, on trouve d'anciennes cités fortes. Quand,
parvenu à l'extrémité orientale du plateau de
Laroque, on voit se creuser la vallée de la Petite
Séoune, un autre village, Beauville, se montre
à la pointe d'un coteau, belliqueux d'allure
par ses débris de murailles. Ce fut encore une
l8o VOYAGE EN FRANCE.
bastide, dont le plan est trop vaste pour la
population actuelle de ce mince chef-lieu de
canton.
Toutes les pentes vont désormais à la Garonne ;
routes et chemins de fer se dirigent vers la vieille
cité d'Agen. On atteint la ville en suivant les
vallons étroits où coulent de claires eaux; l'un
d'eux, qui suit la voie ferrée, va s'ouvrir sur la
plaine de la Garonne, à Agen même, entre les
collines raides aux pentes entaillées par des
combes, et finissant à pic au-dessus de la capi-
tale de la contrée.
Agen occupe un beau site, au bord de la Ga-
ronne ; le fleuve vient frôler le pied de ces hau-
teurs allongées en nombreux vallons découpés
dans le plateau avec une régularité plus frap-
pante encore que sur les bords du Lot. Ces pa-
rois géométriques portèrent la cité primitive qui,
dès les premiers temps historiques, descendit vers
le rivage. La plus rapprochée de la ville, le co-
teau de l'Ermitage, offre une vue curieuse sur
cette masse de toits de tuiles d'un rouge éteint,
trouée par quelques artères neuves ou des ave-
nues plantées d'arbres. La Garonne, franchie par
le canal latéral sur un pont-aqueduc superbe,
les voies ferrées, les grandes routes qui s'élan-
AGEN ET SES CAMPAGNES.
l8l
cent à travers la merveilleuse plaine, composent
un tableau captivant.
L'intérieur de la ville ne répond pas à cet as-
pect. En dépit des percées modernes, c'est un
dédale de petites rues étroites pavées de cailloux
aigus, aux maisons sans caractère. Aux abords
mêmes de la gare, on entre dans les quartiers
anciens, auxquels la vénérable cathédrale Saint-
Caprais, dont Tabside romane est de lignes si
pures, enlève de leur vulgarité. Devant l'église
se tient en plein vent un marché de primeurs.
Les rues environnantes ont beaucoup de maga-
sins ; quelques-uns se livrent exclusivement au
l82 VOYAGE EN FRANCE.
commerce des pruneaux. Si Agen n'est pas pour
ce produit un centre comparable à Villeneuve
et à Sainte-Livrade, il n'en a pas moins imposé
son nom à la « prune d'Agen ». Aussi a-t-on créé
l'expédition des pruneaux en caisses. Aux villes
de production le commerce en gros, à Agen l'en-
voi au dehors par colis postaux.
Quelques maisons à arcades donnent un peu
de pittoresque au large boyau appelé place du
marché ; sous ces galeries sont des boutiques et
des magasins fort achalandés encore, malgré la
concurrence des installations plus modernes et
luxueuses du boulevard de la République, artère
neuve aux constructions de pierre blanche qui
coupe la ville perpendiculairement à la Garonne.
Un autre boulevard, récemment ouvert dans l'axe
de la gare, achève de transformer Agen en appor-
tant l'air et la lumière dans ces ruelles irré-
gulières. Déjà un quartier plus riant avait été
fondé près de la Garonne, aux abords d'une
promenade fameuse dans le Midi, le Gravier^
mail de grands arbres et de petits parterres sur
lequel se tient une foire attirant la foule de toute
la région. Le boulevard de la République abou-
tit à l'entrée de ces allées touffues, sur un carre-
four orné de la statue de Jasmin. Le poète age-
nais que l'on s'attendrait à trouver en costume
AGEN ET SES CAMPAGNES. l83
de coifïeur, se montre sous les espèces d'un
monsieur très bien ; il a l'habit à la française
avec la croix de la Légion d'honneur et des
favoris de magistrat. C'est le Jasmin des der-
nières années, quand la célébrité fut devenue
éclatante grâce à Charles Nodier, à Lamartine
et à Sainte-Beuve. L'inscription française dit:
AU GRAND POÈTE JASMIN
L'épithète n'est pas excessive; cet enfant du
peuple sut retrouver la source pure de l'éternelle
poésie. On a bien fait cependant de lui donner
son effigie de bonne heure, aujourd'hui on ne
songerait guère à un tel hommage. Jasmin est
devenu un classique de langue morte ; même à
Agen on ne le lit guère, on ne le chante plus.
Le papier imprimé, journal à un sou, écrit en
français, a plus de lecteurs et de fidèles, car il
répond aux préoccupations presque exclusives
de nos jours : la politique et les querelles loca-
les. Oui donc s'intéresse maintenant aux per-
sonnages d'idylle et d'élégie qu'anima Jasmin et
qui émurent les pays de langue d'oc ? Déjà, en
pleine gloire vivante de Jasmin, on avait dit de
son idiome, traité de patois : « Le patois est une
langue qui a eu des malheurs. » Et le patois âge-
l84 VOYAGE EN FRANCE.
nais rénové, remis au rang des langues par le
perruquier-poète, a le malheur très grand de ne
pas servir pour satisfaire à la fringale de nou-
velles politiques dont sont agités les bords de la
Garonne, plus encore que le reste de la France.
La statue du poète est voisine de la boutique
où Jasmin habita et qu'un autre coiffeur occupe
encore, sur le cours Voltaire planté de grands
arbres. Tout près, les superbes platanes du Gra-
vier répandent leur ombre fraîche. Une passe-
relle franchit la Garonne. Du tablier on a de
belles vues sur le fleuve traversé en amont par
un pont de pierre aux grandes ouvertures, en
aval par le pont-canal dont les sept arches se
poursuivent au-dessus des prairies par d'autres
arceaux. Ouvrage grandiose, ses belles lignes
rappellent les œuvres les plus magistrales de
l'art romain. Le fleuve est désert; sauf les
barques qui vont s'approvisionner de sables et
de graviers versés par de grandes dragues, il
n'y a guère de bateaux. Depuis que l'État a
repris possession du canal, la Garonne est de
plus en plus abandonnée par la navigation.
A la fin de l'ancien régime, Agen avait déjà
tenté de se transformer. Les évêques élevèrent
un joli palais devenu aujourd'hui la préfecture,
ce devait être le noyau d'un quartier neuf. On
AGEN ET SES CAMPAGNES. 1 85
a achevé le plan en construisant un palais de
Justice rompant un peu avec la banalité habi-
tuelle à ce genre d'édifices. Un square sur le-
quel se dresse le monument élevé aux morts
de l'année terrible, un cours planté de beaux
arbres, donnent à cette partie d'Agen un peu
de grandeur. En pénétrant dans l'intérieur de
la ville on retrouve les rues étroites et banales.
Peu d'édifices à signaler dans cette cité irré-
gulière mais vivante. Agen, malgré sa popula-
tion relativement faible % est un des centres de
commerce les plus considérables du Midi. On
pourrait dire qu'elle vit par les transactions,
rindustrie est de médiocre importance depuis
que sa manufacture de toile à voile a disparu
comme ont disparu les corderies de la vallée.
Cette usine alimentait la vieille marine, on y
comptait trois cents métiers et six cents ou-
vriers ; les corderies, jusqu'à Tonneins, occu-
paient huit cents personnes. Aujourd'hui le rôle
industriel d'Agen se borne à la fabrication des
balais de sorgho, des colles et des engrais chi-
miques produits dans les usines du Passage.
C'est un grand marché agricole, pour la vente
I. 22482 habitants en 1901 ; près de 26000 avec Le Passage,
sur la rive gauche.
l86 VOYAGE EN FRANCE.
des oies et autres volailles, pour Pognon abon-
damment cultivé aux environs. Malgré le voi-
sinage de Toulouse et de Bordeaux, Agen a su
se faire une large place dans les affaires de
gros. Ses maisons de denrées coloniales, de tis-
sus, de drogueries, de quincaillerie, etc., rayon-
nent sur toute une vaste région à l'aide d'une
petite armée de voyageurs de commerce. Aussi
la place a-t-elle un bon rang dans la liste des
succursales de la Banque de France, elle est
dans la première moitié, avant sa voisine Péri-
gueux pourtant plus populeuse, avant Montau-
ban, Cahors et d'autres cités plus industrielles
ou considérables : Montluçon, Poitiers, Avignon
et Versailles ^
Le commerce est donc le principal élément
de vie d'x\gen, ses représentants constituent au-
jourd'hui la véritable aristocratie de la ville, dé-
daignant tout ce qui n'est pas les affaires. Un
grand agriculteur de la région m'en témoignait
quelque dépit :
« L'agriculture, me disait-il, est non seule-
ment la richesse du sol, mais aussi la richesse
I. La succursale d'Agen, dont dépend le bureau auxiliaire de
Villeneuve, était au 58^ rang sur 126 en 1901 pour le chiffre des
opérations s'élevant à 3o 194 100 fr. Elle est descendue au 69^ en
1902, année où les prunes manquèrent.
AGEN ET SES CAMPAGNES. 187
de la ville, intermédiaire pour la vente de toutes
ces denrées que donne abondamment l'Agenais :
prunes, primeurs en légumes, pêches, abricots,
tomates, ognons, sorgho à balais, etc. Cepen-
dant le commerce croirait déroger en s'intéres-
sant à nos efforts. Et que serait-il, le négoce
d'Agen, si le revenu superbe de la terre ne per-
mettait au ])aysan de dépenser sans compter ! »
Les chemins de fer ont beaucoup d'activité.
De même la navigation à Taide du canal latéral.
Le port d'Agen et celui du Passage, qui est en
somme une annexe, eurent, en 190 1, un mouve-
ment de 40000 tonnes, chargées ou débarquées.
Une course à travers les campagnes de l'Age-
nais explique cette prospérité. Le tableau que
j'ai déjà tracé de la plaine de la Garonne vers
Marmande et Tonneins se retrouve partout, plus
saisissant encore peut-être entre Agen et l'em-
bouchure du Lot. De toutes les grandes vallées
françaises, celle-ci, après le Graisivaudan toute-
fois, réunit le mieux la beauté des lignes à la
splendeur de la végétation. On ne saurait trou-
ver pentes plus luxuriantes que celles des ro-
cheuses collines qui dominent la ville et se pro-
longent jusqu'à Nicole, incessamment coupées
par des vallons non moins riches d'aspect. Les
arbres fruitiers, les champs d'artichauts, les
lOb VOYAGE EN FRANGE.
champs cFognons d'une verdure bleutée envelop-
pant les villages : Golayrac et Saint-Hilaire dans
la plaine, Lusirjnan juché sur ses rochers. Ces
hauteurs aux pentes raides sont de véritables
espaliers exposés au soleil du Midi et protégeant
eux-mêmes la plaine verte sillonnée de joualles.
La vigne domine dans ces fonds et va jusqu'à la
Garonne, coulant entre les saules d'un gris
azuré.
L'homme a accru la grandeur du paysage par
les efforts pour préserver ses pénates des gens de
guerre. Clermont-Dessous en est une des beau-
tés; des débris de tours et de remparts, l'église
elle-même semblable à une forteresse, l'enceinte
devenue soutènement pour les jardins en ter-
rasse, commandent la Garonne et le ruisseau
descendu par un beau val des campagnes de
Prayssas. Dans tous ces vallons, sur toutes ces
collines sont des pruniers, chaque village est
un centre pour l'achat des prunes.
La reine du paysage est la petite ville de
Port-Sainte-Marie, un des joyaux de la Garonne
quand on la voit au passage ou lorsqu'on la do-
mine du haut de son abrupte colline. Ce n'est
guère qu'une rue coupée de ruelles étroites et
resserrée entre le fleuve et le rocher, mais les
antiques maisons de poutrelles et de briques
AGEN ET SES CAMPAGNES. I Of)
projetées en ressaut, les églises, dont une est en
ruine, composent un de ces tableaux auxquels
on a coutume de donner le nom de décor d'opéra-
comique. Jamais décor n'approcha de ceci par
la couleur et le caprice. Ces bâtisses de poutres
brunes et de briques de teinte ardente, les vignes
qui grimpent aux façades, les fenêtres de l'étage
si rapprochées de son vis-à-vis que l'on peut
se donner la main de l'un à l'autre, ont de la
vie, grâce au ciel doux et à cette population
enjouée.
Gomme ses voisines, Port-Sainte-Marie doit
sa vitalité, contrastant si fort avec le site ar-
chaïque, à l'exploitation des vergers. Pendant la
saison on ne fait qu'emballer des fruits, clouer
des caisses, expédier des paniers. Des magasins
sont exclusivement consacrés à la vente des em-
ballages, des ficelles, des papiers à jour pou:
garnir les caissettes.
Plus actifs encore, peut-être, sont, à l'embou-
chure du Lot, Aiguillon et Nicole. Aiguillon,
vieille ville bâtie sur des assises romaines et
conservant autour d'elle des édifices, intéres-
sants encore, d'un lointain passé. Sauf le site
et quelques pans de muraille, il ne reste rien de
la forteresse qui joua un si grand rôle, et peu de
chose du luxueux château que fît construire le
190 VOYAGE EN FRANCE.
duc d'Aiguillon à la veille de la Révolution et
dont s'émerveilla Arthur Young.
A l'époque où celui-ci la visita, Aiguillon était
au cœur d'une grande culture de chanvre. Cette
plante couvre bien peu d'espace aujourd'hui !
Le sol divisé en domaines exigus, appelés carte-
rées, fournit surtout des tomates expédiées en
primeurs.
Le Lot borde la petite ville et, presque aussi-
tôt, va atteindre la Garonne après avoir décrit
une boucle harmonieuse devant la colline au
pied de laquelle Nicole s'étend en une rue for-
mant arc de cercle. Les campagnes sont parmi
les plus riches du somptueux pays; Nicole est le
centre de production pour l'abricot et le raisin
de chasselas. La colline, franchement tournée
vers le sud et très raide, reçoit et garde long-
temps les rayons du soleil, ce qui lui permet de
voir mûrir les fruits de bonne heure et de pren-
dre part à l'alimentation de Paris et de Bordeaux
en succulentes primeurs.
Ici les vergers. Sur l'autre rive de la Garonne,
le maïs, le sorgho, le tabac surtout enveloppent
la riante villette de Damazan assise sur une ter-
rasse que longe le canal. Damazan est une bas-
tide, demeurée intacte avec sa place centrale
entourée d'arcades et son plan, carré parfait. Si
AGEN ET SES CAMPAGNES. IQI
elle a perdu son enceinte flanquée de tours,
elle est pittoresque encore ; en dépit des siècles
c'est une des petites cités de l'A gênais qui
rappellent le mieux l'époque où seigneurs et
abbaves faisaient surgir des villes et. y réunis-
saient les populations jusqu'alors éparpillées
dans d'infimes hameaux ou dispersées par les
longues guerres.
XIII
LE BAS OUERGY
L'Aveugle de Castelcaiier. — Le canal latéral. — La Séoune. —
Puymirol. — En Tarn-et-Garonne. — Valence-d'Agenais. —
Auvillars. — Saint-Nicolas-de-la-Grave. — Moissac. — Du bas
Ouercv au Ouercv-Blanc.
Moissac. Juin.
Si Villeneuve-sur-Lot a ses petits pois, Ageii
possède Tognon. Toute sa campagne est con-
sacrée à ce légume dont les champs de teinte
bleuâtre alternent avec les céréales d'un Acrt
doux. En amont d'Agen ces cultures couvrent
une belle plaine, entre la Garonne et les collines
étrangement découpées de Bon- Encontre qui
présentent une suite de fronts escarpés sembla-
bles à des murailles. Un de ces promontoires
porte une statue de la Vierge. Sur un autre,
massif isolé semblable à un oppidum antique,
est un hameau, popularisé par le poème de
Jasmin : l'Aveugle de Castelcaiier.
« Du pied de cette haute montagne, où se
LE BAS QUERCY. igS
dresse Castelculier, dans la saison où le pom-
mier, le prunier et l'amandier blanchissaient
dans les campagnes, voici le chant qu'on en-
tendit un mercredi matin, veille de Saint- Jo-
seph :
Les chemins devraient fleurir,
Tant belle épousée va sortir ;
Devraient fleurir, devraient gréner.
Tant belle épousée va passer. »
Ce nom sonore de Castelculier évoque donc
surtout la poésie populaire. De village il n'en
est pas : c'est trois ou quatre maisons blotties
sous des ruines féodales. La population de la
commune se presse plus bas, près de la Séoune
et du canal latéral, au bourg de Grandfonds
étalé au milieu de cultures plus riches encore.
C'est comme du jardinage : les blés couvrent
des bandes exiguës et étroites, on devine qu'ils
sont là pour l'assolement et seront remplacés
bientôt par les melons, les ognons, les carottes
et autres plantes potagères.
Le canal coule à travers cette plaine. Le mot
est juste, car la rivière artificielle est si bien ali-
mentée que le courant est sensible. Les berges
sont plantées de mûriers dont la vigueur prouve
que le ver à soie pourrait être élevé ici, comme
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. 13
194 VOYAGE EN FRANCE.
il Test en Tarn-et-Garoiine ^ Sur le flot tranquille
que le remblai tient au-dessus de la plaine,
passent les lourdes gabares dont le nombre s'est
fort accru depuis le i^"" juillet 1898, date de la
reprise par l'Etat du canal concédé à la compa-
gnie du Midi. En 1897, le trafic était seulement
de 171 779 tonnes. Il s'élevait jusqu'à 817 61 5 en
1900 pour descendre à 271 565 en 1901, par suite
de la crise viticole. Mais l'ascension reprend.
De nombreux types d'embarcations : barques,
coutrillons, sapines, postes, bateaux, vapeurs
circulent désormais sur la voie navigable ; 2 277
franchirent en 1900 l'écluse d'Agen, près de
2 800 furent enregistrés à Moissac. Et cette
bande d'eau est redevenue une des gaîtés du
paysage, grâce à l'animation qu'elle répand.
Elle a été établie avec quelque souci du pitto-
resque, les ponts qui la franchissent sont le
plus souvent des tabliers suspendus rattachés
à des culées en forme de bornes et bordés de
parapets peints en vert.
Au pied de Gastelculier le canal traverse la
I. Le Lot-et-Garonne figure cependant parmi les 27 départe-
ments séricicoles en 1900, mais il n'a que deux sériciculteurs
sur les 186214 de la France entière. Ces éleveurs ont obtenu
43 kilogrammes de cocons. Seul l'Indre-et-Loire est inférieur, avec
un sériciculteur ayant produit 21 kilogrammes.
LE BAS OUERGY. IQt)
Séoune sur un pont-aqueduc, de lignes sobres
et décoratives. La petite rivière descend des
parties hautes du Ouercy-Blanc et s'accroît peu
à peu d'autres sources et ruisselets venus par
de nombreux vallons creusés dans le plateau qui
porte Bourq-de-Visa. Peu d'eau, malgré la lon-
gueur du cours, mais une vallée aimable par la
forme des collines, sans cesse coupées d'ouver-
tures de vaux, de combes et de ravins. On trouve
moins de ces bastides si communes en Agenais ;
Bourg-de-Visa, la principale agglomération dans
le haut de la vallée, est un petit bourg encore
entouré de débris de remparts. Au bord* même
de ce long sillon, Castel-Sagrat et Montjoy ont
aussi fière mine; plus bas, Puymirol, grand site
commandant le confluent de plusieurs branches,
est une bastide édifiée en 1246, sur une colline
isolée, forteresse naturelle aux puissants escar-
pements. Dans la vallée de la Petite Séoune,
qui aboutit dans le beau bassin de Puymirol,
une autre bastide, la Sauvetat-de-Savères, borde
le ruisseau ; elle est restée infime.
Ces petits centres n'ont pas l'aspect riant des
bourgs de la grande vallée garonnaise, parcou-
rue paresseusement par son fleuve rapide, rou-
lant entre les saules nains d'un gris bleu. Les
cultures finissent à cette bordure, égayées au-
igÔ VOYAGE EN FRANCE.
tour des villages par les arbres fruitiers : pru-
niers, pommiers, abricotiers et amandiers. Le
sorgho à balais est la plante dominante.
Après Lafox les collines se rapprochent de la
Garonne, laissant à peine une étroite bordure
pour la route, la voie ferrée et le canal, qui s'en
vont côte à côte au long du grand cours d'eau.
Sur chaque rive les habitations se pressent, là-
bas celles de Sauveterre, Saint-Nicolas-de-la-Ba-
lerme et Saint-Sixte, ici Saint- Jean-de-Thurac.
A Saint-Nicolas, un élégant pont suspendu tra-
verse le courant où le village mire ses jolies
maison*. En face une falaise de roches jaunâtres
couronne de raides pentes. De là-haut la vue est
bien belle sur l'immense plaine garonnaise et,
vers le sud, les collines de Lomagne découpées
par les vallées descendues de Lannemezan. Les
jours clairs on voit les Pyrénées neigeuses se
profiler sur le ciel.
Plus loin les collines s'écartent, mais elles
sont raides encore, l'une d'elles porte le village
de Clermont-Dessus, tout pimpant avec ses toits
rouges, ses terrasses grises, une grande maison
à allure de château et le pignon triangulaire de
l'église. Il domine la plaine où se balancent les
grands panicules de sorgho, et le gros bourg de
la Magistère allongé au Ijord du fleuve. Cler-
LE BAS QUERCY. IQy
iiiont est encore de Lot-et-Garonne, mais son
actif voisin appartient à Tarn-et-Garonne.
Au cœur de la plaine est la première ville de
ce nouvel organisme administratif, Valence-
d'Agen, une bastide populeuse, régulièrement
étalée sur la grande route et aujourd'hui agran-
die en prolongement des voies du Moyen Age ;
celles-ci, bordées de maisons blanches, attei-
gnent la voie ferrée. Une église neuve dresse
sa flèche au-dessus de la ville et complète le dé-
cor, avec le château de Gastels assis sur une
colline dominant la Bargelonne.
Valence est un rendez-vous pour les cultiva-
teurs de la Lomagne, de l'Agenais et du bas
Ouercy, les marchés sont animés par un bétail
nombreux, embarqué à la gare. Le commerce de
la volaille, celui des plumes et duvets y sont fort
actifs. Avant le triomphe des plumes en fer,
c'était un des points où la plume d'oie était
transformée à l'usage des scribes. Cette indus-
trie n'a pas complètement disparu, mais les
appréteurs ont dû ajouter d'autres branches à
leur fabrication, ils préparent les plumes pour
la parure féminine.
Les fondateurs de Valence avaient tracé leur
bastide loin de la Garonne ; de nos jours on a
compensé ce désavantage par le canal latéral, il
igS VOYAGE EN FRANCE.
longe la ville et forme un port actif. Canal et
chemin de fer enserrent ainsi Valence dont ils
ont accru le rôle de débouché pour la longue
vallée de la Bargelonne.
De hautes collines forment promontoire au
confluent. A la pointe, Goudourville se groupe
autour de la masse grise d'un château dont le
pavillon principal est couronné de mâchicoulis.
Les pentes étaient jadis tapissées de vignes dans
lesquelles les bourgeois de Valence avaient cons-
truit des vide-bouteilles. Le phylloxéra est venu,
bien peu de ceps ont résisté, et les petits ré-
duits de vignerons font un étrange effet au mi-
lieu des blés et des luzernes qui ont remplacé
les pampres. Dans la plaine où Pommevic dresse
sa lourde tour, on retrouve encore l'opulence
agreste de l'Agenais ; jusqu'à la Garonne les cé-
réales, le maïs, le sorgho couvrent les alluvions
fertiles.
Sur le fleuve, le village d'Espalais fait face à
une mignonne ville amphithéâtrale regardant les
belles campagnes de Valence. C'est Auvillar,
une des bastides de la Lomagne. Les ruines
de ses fortifications, une ample église et, vers
le bord du fleuve, une élégante chapelle font
de cette antique bourgade un des beaux décors
du fleuve, ici rejeté vers les collines de Gas-
LE BAS QUERCY. IQC)
cogne, après avoir quitté celles du Quercy à
Malause.
La Garonne est large parfois, mais à demi
sauvage. Des bancs de gravier encombrent son
lit, des fourrés et des bois d'arbres aquatiques
la bordent. Au milieu de grandes plantations
de peupliers, elle reçoit le Tarn, en apparence
aussi puissant, mais roulant moins d'eau dans
un cours plus calme.
En aval du confluent, où les collines querci-
noises baigneraient leur base dans la Garonne si
canal et chemin de fer n'avaient entaillé ces co-
teaux pour se frayer passage, un pont suspendu
d'une extrême légèreté franchit route, rails, canal
et fleuve en jetant en trois travées son tablier
oscillant. Il se prolonge par une route tracée
droite à travers la plaine jusqu'à une bastide
construite au sein de luxuriantes cultures : Saint-
Nicolas -de -la -Grave , grosse commune mais
humble ville ^; elle a gardé son plan régulier, dé-
bordé par des faubourgs bâtis au long des routes
et des chemins ruraux. Au cœur est l'église ro-
mane. Il ne reste des défenses que les débris du
château construit par Richard Cœur de Lion.
De plus fière mine sont d'autres bourgs bâtis
I. Population totale, 2^42 ; agglomérée, i 19g.
200 VOYAGE E\ FRANCE.
à l'extrémité de la plaine, sur Ja terrasse formée
par les hauteurs de Lomagne ; Caumout, Cas-
telmayran durent être aussi fondées d'un seul
jet, celle-ci sur l'emplacement d\m oppidum
gaulois. Des pentes qu'elles occupent, on jouit
d'une vue très ample sur la plaine verdoyante
au cœur de laquelle est Saint-Nicolas, sur la
Garonne errant solitaire et les deux villes de
Moissac et Castelsarrazin, si voisines et toutes
les deux chefs-lieux d'un arrondissement. Castel-
sarrazin est une bastide régulière à l'écart des
deux fleuves, Moissac une vieille cité allongée
entre le Tarn et les collines.
Le Tarn, cependant, n'est pas la vie pour
Moissac, la ville semble bouder sa belle rivière;
les eaux qui l'animent sont celles du canal,
étroit ruban contenu entre des quais de pierre.
Cité calme, presque morose, en partie construite
en briques et, par cet aspect, sorte de vestibule
du pays toulousain, Moissac serait insignifiante
sans le merveilleux ensemble monumental cons-
titué par son église et son cloître. Encore l'église
n'a-t-elle guère à présenter que son porche, la
nef offrant surtout de l'intérêt aux architectes et
aux archéologues par les caractères particuliers
de sa construction.
LE BAS OUERCY. 201
Le porche est une pure merveille à laquelle
des monographies nombreuses ont été consa-
crées. 11 serait difficile de le décrire en quelques
lignes. Rarement l'art roman a déployé autant
de souplesse, de variété et de richesse d'orne-
mentation. Le linteau, qui repose sur deux pié-
droits et un trumeau, est décoré de rosaces rap-
pelant les plus beaux morceaux de la sculpture
antique. Au-dessus le tympan, entouré d'un arc
à cintre brisé, est peuplé de personnages.
Quant au cloître, c'est un des plus beaux que
nous possédions ; peut-être est-il comparable à
Saint-Trophime, la merveille d'Arles. Il est d'une
conservation bien rare. Les arcades en ogive
reposent alternativement sur une colonnettc
202 VOYAGE EN FRANCE.
isolée et sur deux colonnettes accouplées, sur-
montées de chapiteaux admirablement fouillés.
Aux angles et au milieu de chaque galerie, un
pilier carré offrant sur une face une figure
d'apôlre, rompt l'uniformité de la colonnade.
Entre les arcades, une ouverture en forme de
losange donne de la lumière et accroît la légè-
reté de la muraille qui supporte le toit de tuiles
moussues projeté en auvent. La cour intérieure
est plantée d'arbres entourés de parterres fleu-
ris; cette verdure et ces fleurs augmentent l'im-
pression de paix que fait éprouver l'admirable
retraite monastique. La haute tour de l'église
ferme un des côtés de l'horizon, tandis que, de
l'autre, le ciel bleu du Midi accentue la splen-
deur idéale du cloître.
Sauf cela, que voir à Moissac? Le sous-préfet
habite un charmant hôtel du siècle dernier, le
théâtre est entouré d'arcades de briques, hautes
et claires, formant halle. Çà et là quelque belle
demeure d'autrefois; puis une très vieille église
Saint-Martin, qui aurait été construite bien
avant l'an mil.
La colline qui domine la petite ville est cou-
verte de pavillons coquets, maisons de repos
dans les vignes avant que le phylloxéra ait ra-
vagé la contrée.
LE BAS OUERCY. 203
Pas d'industrie spéciale, mais un commerce
assez considérable de produits agricoles. Les
campagnes récoltent beaucoup de prunes, sé-
chées comme dans la région du Lot. Même la
prune de Moissac est une marque réputée. Les
vergers fournissent aussi à l'exportation des abri-
cots, des cerises, des pommes, recherchés sur les
marchés de Paris. Toutes les collines exposées
au midi sont couvertes d'arbres fruitiers. Les
maisons d'expédition recueillent également les
œufs et les volailles, produits en abondance dans
cette région du maïs.
L'arrondissement de Moissac, pour la plus
grande part, c'est le bas Ouercy, région de val-
lées parallèles descendues des abords des caus-
ses de Gahors et de Limogne et qui viennent
aboutir, avec une sorte de rythme, à la plaine de
la Garonne entre Moissac et Valence. Cela rap-
pellerait un peu, en sens inverse et en petit,
l'éventail des rivières descendues du plateau de
Lannemezan, mais ici les sources des ruisseaux
s'écartent et les embouchures se rapprochent.
Cette succession de vallons, offrant d'incessantes
montées et descentes, n'a pas permis de doter le
pays de voie ferrée ; il est donc peu accessible,
d'autant plus que la contrée, malgré son éten-
2 04 VOYAGE EN FRANCE.
due, n'a aucun bourg dont la population agglo-
mérée atteigne i ooo habitants. Lauzerte etMon-
taigut-de-Ouercy, chefs-lieux de canton, sont de
petits bourgs devant uniquement rang de ville à
leur ancienne situation de places fortes et au
rôle administratif qu'elles eurent sous l'ancien
régime. 11 en est de même dans la partie supé-
rieure des vallées, à laquelle on a donné le nom
de Ouercy-Blanc à cause de la nature de ses
roches, délitées en poussière couvrant le pay-
sage à l'époque des sécheresses. Gastelnau-de-
Montratier et Montcuq, malgré leur fier aspect,
sont aussi de médiocres bourgades.
C'est pourquoi les projets de chemin de fer
pour relier Cahors à Moissac ne se sont pas réa-
lisés jusqu'ici ; les études se poursuivent, rame-
nant les plans primitifs à la construction d'une
ligne à voie étroite. Celle-ci desservira un terri-
toire qui fut un des grands domaines seigneu-
riaux du Midi, aux temps féodaux, le pays de
Durfort, berceau de Tillustre famille de Durfort
de Duras. Il existe encore une commune de ce
nom, mais il n'y a ni bourg, ni village, ni ha-
meau; la commune de Durfort, malgré sa popu-
lation de I 120 habitants, ne possède nulle part
une agglomération.
Il en est de même pour toute la contrée, sauf
LE BAS QUERCY. 200
Cazes-Moiidenard qui groupe près de 5oo âmes,
les communes, dans la vallée de la Grande Bar-
(juelonne, ne sont que le groupement admi-
nistratif d'une multitude d'habitations rurales
éparpillées. Par contre la vallée de la Petite
Barguelonne, parcourue de bonne heure par une
route reliant Cahors à la vallée de la Garonne
vers Valence, a été jalonnée de petites for-
teresses dont Lauzerte fut la plus importante.
Cette minuscule ville occupe le sommet d'une
colline isolée entre le Lendou et la Petite Bar-
guelonne. Elle a crâne allure encore; ses restes
de fortifications, son isolement, son élévation
à 80 mètres au-dessus du fond des vallées, l'es-
carpement de sa colline en font un beau site
dont on est très fier dans le >Ioissagais.
Les hauteurs, bien découpées, avaient sur
leurs pointes avancées des châteaux ou des bas-
tides ; celles-ci, n'ayant pas eu la bonne fortune
de se développer, sont demeurées de pauvres
villages. Mais comme les noms sont sonores !
C'est Montagudet couvrant un promontoire ;
Monbarla, deux ou trois maisons sur une aire
aplanie au sommet d'un coteau ; Miramont, vrai
village dont le nom dit assez le site dominant et
les vues grandioses offertes sur les campagnes.
Plus hàu{, dans le Ouercy-BIanc, près de la
206 VOYAGE EN FRANCE.
bordure du causse où naissent les indigents
ruisseaux qui forment les pauvres riviérettes de
Barguelonne et de Séoune, les bourgades n'ont
pas un aspect moins guerrier. Montcuq couvre
une colline dominant de loo mètres la Petite
Braguelonne et se serre étroitement autour du
donjon de son ancien château. Ici le pays est
extraordinairement plissé ; de longs vallons, très
rapprochés l'un de l'autre, partent du causse,
leurs côtés se frangent par une multitude de
ravins. Le causse lui-même n'offre pas la table
régulière qu'il présente du côté de Limogne. A
ces approches de Gahors, il est fragmenté par
des sillons sans nombre, couloirs secs érodés
dans la roche blanche.
XIV
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN
Le vignoble de Tarn-et-Garonne. — Castelsarrazin. — Noms de
rues. — En Lomagne. — Lavit-de-Lomagne. — Beaumont-de-
Lomagne. — L'élevage des chevaux. — Montech. — Le ma
réchal Pérignon. — ■ Verdun. — ■ La Rivière Verdun. — Gri-
solles. — Culture du sorgho. — La fabrication des balais.
Grisolles. Juin.
La plaine de la Garonne, si vaste déjà dans
l'Agenais, devient immense dans cette région du
Ouercy à travers laquelle erre le Tarn que vient
grossir 1 Aveyron. Pays aux lignes fuyantes,
où les vieilles provinces ne purent se tracer
de limites précises, le Languedoc y pénétrait
comme un coin entre le Ouercy, subdivision de
la Guyenne, et la Lomagne, pays gascon. Le
département de Tarn-et-Garonne, région artifi-
cielle si mal équilibrée, établi par la volonté de
Napoléon à l'aide de lambeaux pris aux voisins,
ne fit en somme que perpétuer l'ancien état de
choses. Les chemins de fer donnent désormais
208 VOYAGE EN FRANCE.
une unité réelle à cet organisme factice, depuis
que Montauban est devenu un des grands points
de jonction du réseau. Cette situation est due
à l'ouverture de la ligne nouvelle de Limoges à
Gahors et Montauban, qui se poursuit jusqu'à
Toulouse par les rails de la Compagnie du Midi,
et relie directement Paris à la Garonne.
Cette plaine, devenue un des points de ren-
contre des grandes voies de communication, n'est
guère moins riche que celle de l'Agenais, mais
son opulence n'apparaît pas aussi bien aux yeux.
Il n'y a pas les bordures de collines, les vergers
et l'extrême variété des cultures. Maïs, blés,
vignes, sorgho couvrent à l'infini l'immense ter-
roir. Depuis le confluent de l'Aveyron et du
Tarn jusqu'à Castelsarrazin, c'est une nappe de
vignes presque ininterrompue autour de Laville-
dieu. Le phylloxéra est passé là, mais on re-
plante avec ardeur, les jeunes vignes sont pleines
de promesses. Le Tarn-et-Garonne est un des
départements où la reconstitution a été poussée
avec le plus d'activité. On peut dire que le vi-
gnoble de Lavilledieu, principalement, est en
entier rétabli. Les vins rouges de cette zone sont
excellents. « Ils ont une belle couleur, du spiri-
tueux et un bon goût. »
Les pampres s'étendent jusqu'aux abords de
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI
2 10 VOYAGE EN FRANCE.
Caslelsarrazin, bastide languedocienne établie
ass«z loin de la Garonne, mais devenue port de
navigation intérieure grâce au canal latéral qui
la longe. Le chemin de fer la dessert aussi par
le grand détour capricieux qu'a fait naître le
désir de relier ensemble les trois villes princi-
pales de Tarn-et-Garonne : Moissac, Castelsar-
razin et Montauban.
Le canal, à défaut du fleuve, est la gaieté de
la petite ville autour de laquelle errent de pau-
vres ruisseaux indigents dont un, l'Azine, aurait
fait naître le nom de Castel-sur-Azine. Les habi-
tants préfèrent une origine moins prosaïque, ils
se croient sur l'emplacement d'un camp arabe :
Castelsarrazin. En réalité, ce nom apparaît seu-
lement au xm'' siècle, il supplantait Villelongue,
un village sans doute, remplacé par la régulière
bastide actuelle.
Entre des allées de tilleuls, en ce moment fleu-
ris, s'étend un grand bassin où les bateaux sont
peu nombreux désormais ; l'activité de la navi-
(jation pour la ville est faible, ce n'est qu'un lieu
de passage.
D'autres avenues enveloppent Castelsarrazin,
couvrant Je site des remparts et des fossés au-
jourd'hui disparus. Une partie de ces allées
établies sur la terrasse regardant la Garonne
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2 11
possède des arbres superbes. C'est la prome-
nade du Château. Un de ces végétaux, entouré
d'une grille, est vénéré comme arbre de la Li-
berté. Les noms de voies publiques indiquent
le civisme des habitants : il y a le boulevard
du Dix-Août, le boulevard du Vingt-deux-Sep-
tembre et la rue de la Raison. Si l'on pénètre
dans l'intérieur par les petites voies tracées au
cordeau, on trouve d'autres vocables inattendus.
J'ai relevé les rues du Devoir, de la Tempérance,
de l'Union, de la Justice et de la Fraternité ; la
place de la Réunion, les rues de l'Avenir, de la
Discrétion et de la Vertu, la place du Progrès et
le boulevard du Ouatre-Septembre. C'est à croire
que les âmes d'Honoré d'Urfé et de M. de Robes-
pierre planaient au-dessus du conseil municipal
lorsque l'on baptisa les voies pubhques. Il reste
encore une rue Neuve-des-Capucins, sans doute
parce qu'il ne restait plus de vertus à honorer.
L'avenue de la gare porte un nom de circons-
tance, c'est le faubourg du Progrès.
Peu de monuments dans la ville, dont la po-
pulation est d'ailleurs en majorité rurale, c'est-
à-dire répandue sur le territoire environnante
Sur la promenade du Château est la lourde
I. Population totale, 7808; agglomérée au chef- lieu, 3 SgA*
212 VOYAGE EN FRANCE.
église Saint- Jean riche en stalles sculptées;
l'église Saint-Sauveur, qui marque la fin de la
période romane, possède une tour octogonale en
briques. L'église ruinée des Carmes, devenue la
prison, garde une tour rouge aux gargouilles
de pierre et, parmi les bâtiments conservés, le
tombeau de Lamothe Canilhac, gouverneur de
la Louisiane, qui fonda la ville américaine de
Détroit, bastide elle aussi, mais autrement flo-
rissante que Castelsarrazin'.
Cependant cette dernière s'est accrue. La
Compagnie française des métaux y exploite une
de ses usines pour le laminage du cuivre, la
})roduction du maillechort et du laiton, la fabri-
cation du papier d'étain. Les établissements
sont hors de la ville, assez loin pour que Castel-
sarrazin n'ait pas perdu son aspect de calme, ils
bordent le canal par lequel lui viennent les char-
bons et une partie des matières premières.
A cela se borne l'activité manufacturière de
Castelsarrazin, grand marché agricole dont les
foires sont très fréquentées. Le dernier jeudi de
juillet il s'y tient une foire aux chiens. Cette
contrée est une de celles où l'on chasse le plus;
la ville compte plusieurs expéditeurs de gibier.
I. Détroit comptait 286704 habitants en 1900.
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN.
2î3
Une industrie assez répandue est celle des oise-
leurs qui font des hécatombes d'oiseaux de pas-
sage et dont Emile Pouvillon a dit l'existence
ôntech
Échelle au ij 3-20 000:
de bohème dans son Jean de Jeanne , roman qui
rend si bien la vie monotone de ces plaines
quercinoises, sans autre beauté que leur courte
splendeur printanière.
L'élevage et l'engraissement des oies et des
2l4 VOYAGE EN FRANCE.
canards, qui tient ici une si grande place dans
l'industrie rurale, sont pour Castelsarrazin une
autre source de profit, toutes les contrées voi-
sines y amènent leurs produits de basse-cour.
Quand le chemin de fer de Beaumont sera
achevé et poursuivi jusqu'à Gimont, la partie la
plus riche de la Lomagne trouvera son débouché
naturel dans la ville languedocienne.
Le territoire de la commune est énorme, il ne
couvre pas moins de 7 602 hectares et s'étend
jusqu'au confluent du Tarn et de la Garonne.
Aussi les hameaux sont-ils nombreux sur ce
vaste espace. L'un d'eux, Gandalou, qui com-
prend trois ou quatre maisons, une église et une
école, occupe le site d'un ancien camp dont
Torigine remonterait aux Vandales dit-on, mais
qui est vraisemblablement gaulois. Des talus de
quatre à huit mètres de hauteur, entourés de
fossés encore apparents sur un point, suppor-
taient la plate-forme servant aujourd'hui d'as-
siette au hameau. Un chemin à travers les vignes
conduit au château de Leriet bâti sur une haute
butte, sans doute artificielle elle aussi. De là on
découvre tout le grand vignoble vers Labastide-
(lu-Temple, Albefeuille et Lavilledieu.
La commune s'étend jusqu'à la Garonne qui
LOM.VGNE ET RIVIERE VERDUN. 2 10
sépare cette presqu'île languedocienne d'entre le
Tarn et le fleuve, du vert pays de Loinagne dont
une partie a été arrachée au Gers pour contri-
buer à donner rang de chef-lieu à Montauban.
Deux des rivières du plateau de Lannemezan
drainent leurs eaux en Lomagne : l'Arrats et la
Gimone. Entre elles, d'autres ruisseaux ont
creusé leurs vallons dans cette base du grand
cône de déjections pyrénéennes ^ : ruisseau Pro-
fond d'Auvillar, Cameson, ruisseau d'Ayroux,
Sère ; puis en amont de la Gimone la Tessonno
et le Lambon. Le terrain délimité par le faîte où
prennent naissance ces ruisseaux constitue la
Lomagne de Tarn-et-Garonne. Le bord du fleuve,
de chaque côté de Verdun, a pris le nom de
Rivière comme tant de rivages fluviaux dans le
Midi : c'est la Rivière Verdun.
La Lomagne est un pays purement agricole,
produisant d'excellents vins autour d'Auvillar
et davantage livrée à la grande culture dans l'in-
térieur. Les communes y sont plus nombreuses
que dans la plaine garonnaise, les habitants se
groupent volontiers autour de l'église et de la
mairie. Tous ces petits centres de population
I. Sur le plateau de Lannemezan, les rivières qui y naissent
et leur alimentation par la Neste, voyez la 3o^ série du Voynge
en France, chapitre XVI.
2l6 VOYAGE EN FRANCE.
sont au sommet des collines, sauf sur la Gimone
dont la vallée, plus large, parcourue par une
grande route, est bordée de villages.
Peu de prairies, les cours d'eau étant trop
faibles pour l'irrigation et souvent à sec pendant
l'été. liCs principaux n'auraient même qu'un
fond vaseux, si on ne leur amenait une part du
débit recueilli dans la Neste par le canal d'ali-
mentation des rivières du Gers.
Le plus long de ces fossés, la Sère, n'a presque
pas d'habitations sur ses bords, depuis Gastel-
mayran dont il longe la terrasse, jusqu'au pied
de la haute croupe qui porte Lavit-de-Lomagne.
Ge fut ici la capitale de la Lomagne, à l'origine
de l'époque féodale, avant que Lectoure fut deve-
nue la forteresse et la ville maîtresse de la con-
trée ^ Lavit est encore un centre assez populeux
mais dont toute l'importance est due à son rang
de chef-lieu de canton, à ses marchés et à ses
foires. La ville principale de cette région est
Beaumont-de-Lomagne, plus au sud, dans la
vallée de la Gimone.
Grosse agglomération pour le pays : près de
3 ooo âmes sur une population de 3 782, c'est-à-
I. Sur Lectoure et la partie de la Lomagne appartenant au
département du Gers, voyez le chapitre VI, page 85.
L03IAGNE Eï RIVIERE VERDUN. 217
dire de peu inférieure au centre urbain de Cas-
telsarrazin, Beaumont est une baslide fort régu-
lière, mais seules les rues allant de l'est à Fouest
sont rectilignes, les autres suivent la légère in-
flexion courbe donnée par le rempart qui flan-
qua la nouvelle cité. Le fondateur, Eustache de
Beaumarchès, qui agissait pour le compte du
roi, avait conçu un plan encore plus régulier
par le nombre des parcelles que par le tracé.
Il voulut mille maisons avec mille jardins d'un
arpent chacun. Mille arpents devaient être con-
sacrés à la vigne. A cette date de 1279, on rêvait
donc d'une grande ville. Les espérances ne se
réalisèrent point, mais Beaumont n'en est pas
moins une des bastides qui ont le mieux pros-
péré. Cependant la population a décru, il y
avait jadis plus de 4 5oo âmes. La perte du
vignoble a été cause de cette déchéance ; au-
jourd'hui la replantation fait des progrès et les
belles campagnes de la Gimone reprennent leur
aspect de prospérité.
La place centrale de Beaumont a partiellement
conservé son aspect d'autrefois, elle garde quel-
ques-unes des arcades qui l'encadraient. Au
centre est une vaste halle où se font d'actifs
échanges. L'église est un bel édifice des xiv^ et
XV* siècles.
2l8 VOYAGE EN FRANCE.
Centre de commerce que le chemin de fer de
Castelsarrazin développera encore, Beaumont-
de-Lomaçjne a peu d'industries, pourtant un ate-
lier y produit des fouets et des cravaches. Les
plus importantes affaires ont pour objet la vente
du gibier et surtout des volailles qui abondent
dans toute la Lomagne. La campagne voisine est
un pays d'élevage de chevaux excellents, dont
un officier des haras a dit, dans un rapport au
préfet : « Le cheval de Beaumont est le meilleur
des chevaux de cavalerie, il est en général
étoffé, près de terre ; il accuse du sang et s'il a
la force qui lui permet de porter du poids, il a
la trempe et la vigueur qui en font un remar-
quable cheval de service sur route. » Aussi les
remontes font-elles tous leurs efforts pour con-
server cette variété précieuse, et empêcher les
éleveurs d'en altérer la pureté en allant chercher
des pouliches dans les Pyrénées : « La produc-
tion de leur pays vaut cependant mieux que celle
qu'ils vont chercher au loin à grands frais. »
La ville de Beaumont s'efforce de développer
l'élevage, elle possède une société de courses et
a créé ime foire spéciale pour la vente des pou-
lains et des mulets.
La route nationale d'Auch à Montauban relie
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2I9
Beaumont au chef-lieu. Après avoir suivi la vallée
de la Gimoiie, elle quitte la rivière pour s'élever
sur les hauteurs qui bordent la Garonne et dont
les pentes forment le pays de Rivière Verdun.
Du point culminant, au-dessus de Bourret, la
vue est immense sur la plaine que parcourent
Garonne, Tarn et Aveyron. Au pied de la côte,
le fleuve se tord entre des prés et des planta-
tions réguhères de peupliers.
C'est un cours d'eau sauvage, la navigation v
devient de plus en plus rare depuis que le canal
latéral est exonéré des droits prélevés autrefois
par la compagnie fermière. Aussi la vie s'est-elle
portée au cœur de la plaine, où la rivière artiii-
cielle amène non seulement l'animation de la
batellerie, mais encore la force motrice. Grâce
à l'alimentation abondante due à la Garonne qui
lui verse 6887 litres par seconde, à Toulouse,
le canal peut en outre fournir des eaux d'irriga-
tion.. Dans la plaine du Tarn-et-Garonne, 36 pri-
ses d'eau donnent à l'agriculture i3o litres 5 par
seconde ^ Les usagers paient une redevance de
trente francs par litre et par an.
La force motrice est d'un revenu plus consi-
I. Haute-Garonne : 87 prises, 887 litres 5; Lot-et-Garonne :
7 prises, 18 litres i ; Gironde : 3 prises, 46 litres.
2 20 VOYAGE EN FRANCE.
dérable pour l'Etat. Sur toute l'étendue du
canal il y a vingt usines dont les redevances attei-
gnent ensemble 80612 ir. Le Tarn-et-Garonne,
à lui seul, en compte cinq pour lesquelles les
usiniers versent en chiffre rond 3oooo fr. Mais
on pourrait utiliser autrement la force hydrau-
lique ! Le mouvement se fait, d'ailleurs ; il y a
de nombreuses demandes. Le canal qui donne
déjà la force pour élever les eaux d'alimenta-
tion d'Agen ne sert qu'à deux usines d'électri-
cité; il pourrait éclairer toute la vallée.
La plus considérable des usines du canal est
la grande papeterie de Montech, près de la
petite ville régulière de ce nom qui dresse une
belle flèche d'église au milieu de la plaine
monotone en partie occupée par une forêt de
I 327 hectares. Cette manufacture a donné un
grand développement à la navigation. Grâce à
elle le port de Montech est, après Agen, le plus
important du canal; il a un mouvement total dé-
passant 20 000 tonnes. Les houilles, les bois, les
pâtes à papier nécessaires à l'usine comptent dans
ce chiffre pour près de i5 000 tonnes. En dehors
de cette industrie, Montech renferme plusieurs
fabriques de sandales, c'est-à-dire d'espadrilles,
et se livre à la curieuse production des boutons et
des fleurs d'orangers pour ornements de mariage.
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 22 1
Dans cette partie de la plaine, il y a peu de
hameaux ou d'habitations isolées. Contrairement
à l'usage des populations vers Castelsarrazin, les
habitants se groupent plutôt en gros bourgs ;
ainsi Escatalens, un des centres de l'élevage des
chevaux dans la plaine, et Finhan, qui possède le
château de Pérignon appartenant encore à la
famille du glorieux vainqueur de Peyrestortes
et de Figuères, le futur maréchal d'Empire,
devenu marquis à la Restauration. Pérignon est
né près d'ici, dans la bastide haute-garonnaise
de Grenade.
Sur l'autre rive de la Garonne, coulant soli-
taire entre les grandes plantations de peupliers,
le bourg de Mas-Grenier, construit sur un plan
de bastide, est une ancienne ville monacale, le
Mas-Grenier ou Mas-Garnier, qui posséda jus-
qu'à la Révolution une abbaye de bénédictins.
Il n'en reste que de pauvres débris ; l'église a
disparu, celle du bourg est un remarquable édi-
fice moderne.
Ici les collines de Lomagne, qui bordaient le
fleuve depuis l'embouchure de laSère, s'écartent
peu à peu. La Garonne, au lieu de frôler le pied
de hauteurs, erre à travers la plaine, au milieu
de cultures superbes dans lesquelles domine le
sorgho. Sur la rive gauche, la plaine se nomme
222 VOYAGE EN FRANCE.
pays de Rivière Verdun, du nom d'une petite
ville bâtie sur une sorte de terrasse qu'une levée
protèije contre les fureurs du fleuve. La Garonne
qui baignait jadis la ville coule maintenant un
peu au delà, l'ancien thalweg a été planté d'ar-
bres comme toutes les laisses de la Garonne
dans cette partie de son cours.
Verdun, une des plus banalement régulières
des bastides de la contrée, est formée de deux
longues rues parallèles coupées en croix par la
route de Dieupentale, mais de nouveaux quar-
tiers ont débordé de ce plan bien aligné et mon-
trent quelque caprice à suivre des routes et des
chemins plus sinueux. Verdun, qui fut une cité
forte, a encore une ancienne porte de ville.
Aucune industrie, la Rivière Verdun est un
pays purement agricole. Son chef-lieu n'a même
pas, comme Grisolles, petite ville qui, de l'autre
côté, borde le canal, la mise en œuvre des pani-
cules de sorgho à balais dont les champs couvrent
partout de si grandes étendues. Elle est trop à
l'écart de la grande circulation représentée par
le chemin de fer et le canal. Ses relations avec
le reste du département ont lieu par Dieupen-
tale qui possède la gare et un port très animé '.
I. Mouvement (en 1901), 6809 tonnes.
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2 23
D'ailleurs, toute cette région est déjà dans la
sphère d'attraction de Toulouse. Elle regarde
vers la grande cité garonnaise plus que vers
Montauban.
De Verdun à Grisolles, un chemin court à tra-
vers les champs de sorgho et de maïs. On est ici
dans le principal habitat de ces cultures qui
restent prépondérantes jusqu'aux premiers vi-
gnobles de l'Aude. Le département de Tarn-et-
Garonne ne participe à la production du sorgho
que dans cette plaine, et l'étendue totale est
faible, mais nulle part les champs ne sont plus
rapprochés.
Le produit principal est la sommité, c'est-à-
dire le panicule porte-graines qui sert à faire
les balais lorsque la graine a été recueillie. La
semence sert à l'engraissement des volailles, les
tiges sont employées comme litière et comme
combustible. Semé en mai, le sorgho se récolte
en septembre, les sommités sont mises à sécher
dans un grenier ou sous un hangar pendant
quinze jours avant de procéder à l'égrenage ;
celui-ci doit être fait avec beaucoup de soin pour
ne pas endommager les pédicelles. Les ouvriers
l'effectuent en raclant le panicule avec un couteau
en bois. Il ne faudrait pas moins de 260 veillées
à un homme pour égrener la récolte d'un hectare.
2 24 VOYAGE EN FRANGE.
Au bord de la Garonne, cette plante donne
45 à 5o hectolitres de graines pesant 64 kilo-
f [ranimes à l'hectolitre et valant six à sept francs.
Les panicules donnent en poids de i 000 à i 5oo
kilogrammes et sont vendues de vingt à trente
francs les cent kilogrammes ^
Les panicules égrenées et bien sèches sont
mises en bottes et portées aux fabriques de Gri-
solles qui ont peu à peu remplacé la production
à domicile. Grisolles faisait autrefois de la cou-
tellerie, elle possède encore un atelier pour
cette fabrication. Ce grand bourg, aux maisons
soigneusement blanchies, n'a guère d'autre édi-
fice qu'une vaste église moderne et des halles
en fer. Les environs se livrent à l'élevage du
cheval; chaque année, des courses ont lieu sur
un hippodrome très fréquenté.
Dans la plupart des habitations on travaille
aux balais, mais les femmes préfèrent l'emploi
à l'atelier, aussi se dispute-t-on les places dans
les huit ou dix manufactures de Grisolles. A
certaines heures, le passage des ouvrières qui
apportent les balais finis ou vont rendre les ma-
tières premières donne beaucoup d'animation.
I. Cette culture est confondue dans les statistiques décennales
avec le millet. Dans les départements garonnais elle couvre : Haute-
Garonne, ^78 hectares ; Lot-et-Garonne, 421 ; Tarn-et-Garonne, 347-
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 220
L'usine livre le sorgho simplement fixé autour
du manche par des fils de fer disposés à l'aide
d'une machine. L'ouvrière achève à domicile.
Elle place le balai ébauché dans une sorte de
mâchoire en fer qui maintient les brins dans la
forme voulue, l'objet est aplati à l'aide d'un
martinet de bois dont le mouvement est donné
par le pied.
Ensuite, avec une forte aiguille et de la ficelle
de couleur, l'ouvrière, armée d'un fort bracelet
de cuir se prolongeant jusqu'à la main, procède
à la couture. Cela ne va pas sans effort ; il faut
trois ligatures pour faire un balai.
L'objet n'est pas à point, il doit être ébarbé
par une section nette, c'est encore l'œuvre de
l'usine, où la machine procède avec rapidité. Il
y a six principaux établissements à Grisolles, le
plus grand occupe quatre-vingts personnes pour
la préparation et le finissage. Les manches em-
ployés sont tirés des landes ou des bords mêmes
de la Garonne, dont les peupliers servent à cet
usage.
VOYAGE E>- FKANCE. XXXI. 15
XV
LA RIVIERE MONT ALBANAISE
Le pays de la brique. — Montauban. — Industrie de la soie. —
Lafrançaise. — La Rivière du Tarn. — Villebrumier. — Entrée
en Haute-Garonne. — Villemur et ses usines. — Le vignoble
de Villaudric et de Fronton. — Pompignan et son château.
Montauban. Juillet.
Depuis que Montauban est le point de pas-
sage pour les voyageurs allant de Paris aux
Pyrénées par Toulouse, c'est la porte d'entrée
du pays de la brique, autrefois ouverte dans
l'Albigeois. Le voyageur a traversé des villes
de pierre blanche dans le Berri, puis les cités de
robuste granit du Limousin et, de nouveau, les
calcaires vers la Dordogne et le Lot. Soudain,
lorsqu'on a franchi l'Aveyron, c'est un autre
inonde par la culture, les habitations, l'aspect
général de toutes choses. En dépit de l'his-
toire qui fit de Montauban une ville du Ouercy,
c'est bien ici la région toulousaine, le pays de
« terrefort » où le sol est d'argile et de marne
LA RIVIERE MONTALBANAISE. 227
mêlées aux cailloux roulés par le fleuve de
Garonne.
Montauban elle-même est par excellence la
cité de la brique, une brique d'un ton rosé, lisse,
de peu d'épaisseur, se prêtant à merveille à l'ar-
chitecture, autrement noble et gaie à l'œil que
la brique informe et rugueuse des villes du
Nord comme Roubaix et Lille. Puis, sous ce ciel
heureux, loin des brumes et des fumées, elle
garde un ton délicatement chaud. Aussi les édi-
fices ne prennent-ils pas l'aspect sévère qu'ils
ont déjà, par exemple, vers Albi. Le pont de
Montauban a été construit de i3o3 à i3i6, et
228 VOYAGE EN FRANCE.
pourtant les six siècles ne lui ont laissé aucune
empreinte, sinon celle qu'il doit à son style ar-
chaïque, à ses arches en ogive et à ses avant-
becs.
Du parapet, la ville a de l'allure ; de grands
édifices de brique, un amphithéâtre de toits en
pente douce, les berges très hautes du Tarn, les
maisons de la rive gauche ou Ville -Bourbon
dressées sur ces falaises ou descendant jusqu'au
flot, composent un site dont on se souvient. A
l'entrée de la vieille cité, le débouché du pont est
encadré par la Bourse et l'Hôtel de Ville où sont
les musées. Ces édifices n'ont pas de grandes
prétentions architecturales, mais la brique lisse,
les lignes sévères , les sobres ornements leur
donnent quelque beauté. Et, se souvenant qu'In-
gres est de Montauban, on se prend à penser que
cette netteté des formes architecturales, frappant
ses yeux dès l'enfance, est peut-être pour quelque
chose dans la précision du dessin chez le grand
peintre montalbanais.
Dans l'axe du pont, un monument aux morts
pour la patrie précède un square exigu, bordé
de belles maisons modernes en brique avec des
cordons de pierre blanche ; au fond est l'église
Saint- Jacques, montrant au visiteur venu du
Nord le premier spécimen de ces beaux clo-
LA RIVIERE MONT ALBANAISE. 229
chers octogones, marque du pays toulousain ;
une haute flèche couronne la tour.
Derrière cette éghse s'étend la place Natio-
nale, principale curiosité de Montauban. Elle
est sur le plan de tant de places centrales dans
les bastides de la région, mais elle a été bâtie au
XVII* siècle et garde la marque de cette époque ;
les maisons, hautes de trois étages et d'aspect
monumental, sont portées sur des arcades. Aux
quatre angles aboutissent des rues dont l'entrée
est signalée par des porches formant arcs de
triomphe. L'ensemble est majestueux mais sé-
vère, à cause de la teinte de la brique et de l'uni-
formité de l'architecture.
Autour de Ja place, les rues sont étroites
comme dans la plupart des villes du Midi, mais
propres et animées. Peu de monuments, à peine
faut-il citer le beffroi appelé la Grande Horloge.
En dehors de ces vieilles artères une courte
rue neuve longe l'insignifiante cathédrale, d'un
lourd style classique, bâtie en pierre, dont la
sacristie renferme une des œuvres capitales d'In-
gres : le Vœii de Louis XIII.
L'ancien Montauban finissait là, des boule-
vards et des allées marquent l'emplacement des
remparts contre lesquels vint se briser l'armée
royale commandée par Louis XIII en personne.
23o VOYAGE EN FRANCE.
Au delà s'étend fort loin, jusqu'au chemin de fer
de Lexos qui si longtemps relia Montauban à
Paris, un immense quartier neuf aux longues
voies régulières dont les principales aboutissent
à un rond-point voisin de la gare. Celle-ci a pris
le nom de « Ville Nouvelle ». C'est une station
de médiocre activité, la gare principale est de
l'autre côté du Tarn, au faubourg de Ville-Bour-
bon.
Derrière la cathédrale, la préfecture, précédée
d'un square, est le point le plus vivant de la
ville ; sur cette petite place et les allées de Mor-
tarieu qui l'avoisinent sont les cafés élégants, le
kiosque à musique, la promenade où il est de
bon ton de se rendre. Dès neuf heures du soir,
le reste de la ville est endormi, ici il y a foule.
Les allées de Mortarieu se prolongeaient par
les allées des Carmes sur la haute terrasse au-
dessous de laquelle coule la petite rivière du
Tescou. On a voulu élargir la promenade, en la
faisant porter sur un grand mur de brique qui
aurait dominé un joli jardin public planté d'ar-
bres méridionaux — il y a un olivier — mais le
mur s'est écroulé, entraînant l'esplanade. Et il
reste un désert de gravats au milieu duquel fait
triste figure le monument d'Ingres par Etex.
Il reproduit en bronze la fameuse Apothéose
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 23 I
d'Homère dont tous les personnages se mon-
trent en demi-relief. Au centre de cet hémicycle
est la statue du peintre. Le tout, entouré d'im-
mondices et de débris. L'abandon est provisoire,
me dit-on, on nettoiera quand on aura établi la
terrasse.
Malgré les persécutions qui suivirent la ré-
vocation de l'édit de Nantes, Montauban est
restée une sorte de petite Genève. Les protes-
tants y sont nombreux et influents, une des
deux facultés de théologie de la religion ré-
formée y est installée. Un séminaire pour
les futurs pasteurs y complète un petit foyer
d'études.
La ville doit à Ingres le développement de son
musée qui serait bien pauvre sans les dons du
peintre. La bibliothèque est riche. Il y a là un
certain réveil de vie intellectuelle, plusieurs litté-
rateurs du Quercy sont parvenus à la notoriété
en restant fidèles à la province et à sa petite
capitale, sans aller vivre à Paris.
Mais l'industrie est languissante, Montauban
n'a pas profité de sa situation aux bords du
Tarn navigable, de l'Aveyron qui l'est un peu et
de la Garonne dont le canal latéral décuple la va-
leur. On lui a donné un embranchement pour fa
232 VOYAGE EN FRANCE.
relier à ce canal, mais son port vient bien après
celni de Montech, nn peu avant Dieapentale et
Moissac'.
L'activité commerciale est due aujourd'hui
aux produits du sol. Montauban est devenue un
grand expéditeur de primeurs et de fruits, de
raisins chasselas et de pêches surtout, elle envoie
en quantité les gibiers et la volaille. Ses rivières
font mouvoir les roues de grandes minoteries.
Jadis elle était au rang des producteurs de soie,
pour les bas notamment; il ne lui est resté que
l'industrie , considérable encore , des tamis à
bluter les farines. Plusieurs filatures y moulinent
les soies provenant de cocons récoltés dans la
région et trois usines utilisent ces fils pour tisser
la gaze à bluter.
On fait encore un peu de sériciculture en Tarn-
et-Garonne, sur les bords de l'Aveyron et du
Tarn et dans le département voisin, le Tarn, où
la vallée de l'Agout, vers Lavaur, possède d'assez
nombreux mûriers. Le nombre d'éleveurs en
1900 fut de 289, peu de chose évidemment auprès
des 186914 de la France, mais ils ont fourni à
la consommation 7 SgS kilogrammes de cocons
frais. Les deux cantons de Montauban sont ceux
I. En 1901 le mouvemenl a été de 8860 tonnes.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 2 33
qui se livrent le plus à cet élevage ; d'après une
enquête de i884, le poids de cocons par hectare
était de o,45, tandis que ses voisins étaient bien
au-dessous *. Il est certain que ces pauvres ré-
coltes ne peuvent suffire aux besoins de Tindus-
trie locale ; Montauban doit s'adresser aux Cé-
vennes et à rExtrême-Orient.
D'autres petites industries existent dans la
ville : comme toute la région elle fait des san-
dales ; la fabrication du peigne paraît avoir
essaimé de Villeneuve-sur-Lot, celle des cha-
peaux de paille est venue de Caussade, mais
sans posséder l'importance qu'elle a atteinte
dans cette dernière ville. Jadis Montauban fai-
sait un commerce considérable de sumac, il
reste une seule maison pour la vente de cette
plante à tannin.
En somme, l'importance de Montauban pour
le mouvement des affaires est moins grand qu'à
Agen, malgré une population plus nombreuse^.
Aussi la succursale de la Banque de France
ne vient-elle qu'au quatre-vingt-onzième rang
1. Caussade, o,oog ; Villebrumier, 0,08; Villemiir (Haute-Ga-
ronne) ; 0,01 ; Toulouse, 0,08.
2. Population totale, 3o5o6; garnison, écoles, séminaires, etc.,
5527. Il reste, de population municipale agglomérée, 17201. Plus
de 7 000 habitants sont donc répartis dans les campagnes.
2 34 VOYAGE EN FRANCE.
pour le chiffre des affaires', après Le Puv, après
nombre de villes bien moins populeuses, no-
tamment, dans la région, Narbonne, Mazamet
et Mont-de-Marsan.
Peu de villes, peu de gros bourgs dans les
campagnes voisines. En aval, quand le Tarn a
reçu l'Aveyron, le plus gros centre avant Mois-
sac, Lafrançaise, est une commune de plus de
3 000 âmes, mais celles-ci réparties dans les ha-
meaux et les bordes ou métairies ; il n'y en a
pas mille dans le bourg, très vivant par le com-
merce, grâce à sa situation à Tissue de la plaine,
sur les premières pentes du Ouercy accidenté.
La petite ville occupe une terrasse abrupte domi-
nant le Tarn à plus de cent mètres, en vue de
l'immensité de la plaine, des campagnes de la
Lomagne, des Pyrénées et de la grande perspec-
tive ouverte sur Toulouse par la Garonne. Cette
bastide, construite vers 1270, n'a pas débordé
son plan régulier. C'est le lieu de rendez-vous
pour une grande partie du Ouercy par ses mar-
chés et foires. Une de celles-ci, tenue le 29 sep-
tembre, jour de Saint-Michel, est consacrée à la
vente des chiens ; le 19 octobre a lieu une foire
I. 18662.300 fr. en igoi.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 2.35
aux chevaux. La coquette industrie des fleurs
artificielles s'est implantée à Lafrançaise.
Cette partie des environs de Montauban est
peu accessible pour le visiteur, il n'y a guère
d'autres moyens de communication que des
voitures postales circulant surtout la nuit. Par
contre, la vallée du Tarn, en amont, est desservie
par une ligne de fer importante se dirigeant sur
Castres, Mazamet et Bédarieux, et longeant la
grande rivière jusqu'au confluent de l'Agout,
qu'elle remonte ensuite.
La vallée du Tarn est plus belle que la plaine
de Garonne, grâce aux collines qui viennent
tomber à pic au bord du flot. A l'endroit où
l'embranchement du canal latéral atteint le
Tarn, les barrages qui soutiennent le plan d'eau
donnent à la rivière la majesté d'un fleuve. Les
deux rives sont couvertes d'arbres fruitiers, les
mûriers, en très grand nombre, sont d'une belle
vigueur; les pruniers, cerisiers, pêchers abon-
dent, on cultive beaucoup le noisetier. Souvent
quelque grand pin parasol ombrage une mé-
tairie et donne de la majesté à ce paysage un
peu monotone.
Cultures extrêmement variées. Blés et maïs
d'abord, haricots, fèves, petits pois, beaucoup
236 VOYAGE EN FRANCE.
de vignes, surtout sur les coteaux de la rive
droite. Chaque ferme a son pigeonnier, dont la
l'orme particulière est la caractéristique du pays
montalbanais. Ce sont de hautes tours carrées,
construites en briques crues, enduites de chaux;
le bas sert de magasin, la partie supérieure
offre un toit en crémaillère, c'est-à-dire un toit
inférieur occupant la moitié de la largeur, un
autre plus élevé couvrant l'autre moitié. Entre
les deux est le gîte des pigeons, où les oiseaux
ont accès par de nombreux trous régulièrement
disposés. Ces pittoresques constructions dépas-
sent en hauteur les autres parties de la ferme.
Celle-ci est généralement construite soit en pisé,
soit en briques crues, la brique cuite est réser-
vée pour l'encadrement des portes et des fenê-
tres. Un enduit de teinte claire masque ces pau-
vres matériaux, mais il s'écaille souvent et cela
donnerait une allure lépreuse si le soleil, la lu-
mière, l'opulence des cultures, quelques espa-
liers vigoureux n'imprimaient au contraire de la
beauté et de la couleur à toutes choses.
La coquetterie est réservée pour le colombier,
souvent peint de couleur tendre, soigneusement
crépi et badigeonné quand la demeure familiale
reste nue sous son grand toit plat.
Tel est ce pays de la Rivière, comme on appelle
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 287
les rives du Tarn et de rAveyron, tandis que le
massif de collines entre les deux cours d'eau
se nomme le Ramier. Cette Rivière redevient
pays vignoble ; vers Rressols et Gorbarieu on a
beaucoup replanté. Les villages des ribiérencs se
suivent au long du Tarn. Labastide-Saint-Pierre
V mire une jolie église moderne; avec les pins
parasols de la campagne, elle donne de Tallure
au paysage. Reyniès est bâti à un passage de la
rivière, Orgueil s'éparpille à l'écart. Tous ces
villages fournissent des ouvrières à la grande
fabrique de pâtes alimentaires de Villemur. Un
train de marchandises partant le matin de Mon-
tauban possède quelques wagons de troisième
classe qui recueillent femmes et jeunes filles. Je
Fai pris jusqu'à Nohic, pour gagner Villebrumier.
Nohic est un vieux village, dont l'église, bâtie
à l'écart, est à la fois sinistre et charmante, sui-
vant l'heure; toute menue, très vétusté, elle
dresse un haut pignon de briques que les siècles
ont décoloré. Le Tarn coule à une demi-lieue de
là, au pied d'une terrasse qui porte cette partie du
Ramier derrière laquelle le Tescou s'est creusé
une vallée régulière et profonde.
Au bord même de la rivière, la bastide de
Villebrumier, toute petite, mais d'une parfaite
régularité, s'abrite dans une sorte de pli formé
238 VOYAGE EN FRANCE.
par la côte régulière. Ce n'est guère qu'un vil-
lage, le dernier du Tarn-et-Garonne en remon-
tant le Tarn ; à i 800 mètres à peine commence
la Haute-Garonne.
Un chemin rural longe le Tarn, apaisé sous
les barrages de navigation retenant ses eaux
d'un vert sombre, que la moindre pluie tombée
dans le Rouergue changera en flots rouges.
Il aboutit à Villemur^ une bastide encore, mais
mieux développée que Villebrumier, grâce à
l'industrie et à sa position à un important pas-
sage de la rivière.
Cette petite ville eut jadis une population de
plus de 5 000 âmes, descendue à 4 000 aujour-
d'hui ; la dépopulation a surtout frappé la partie
rurale. Elle offre sur le Tarn un pittoresque
décor, par ses hautes maisons de briques rouges
portées sur des voûtes ou des terrasses, leurs
galeries en surplomb, les balcons, les toits irré-
guliers. La rivière, retenue par un barrage, fait
mouvoir une grande usine sur la rive gauche ;
de l'autre côté elle actionne un curieux moulin
en forme d'abside, revêtu d'une haute toiture.
La grande usine est une des plus puissantes
fabriques de pâtes alimentaires de France, elle
occupe six cents ouvrières venant pour la plu-
part des campagnes voisines. Des fabriques de
LA RIVIÈRE MONT ALBANAISE. 289
gluten, des papeteries, une fabrique de carton-
iiarjes, une autre pour la confection des mesures
en bois et une soufflerie de poils complètent
l'ensemble de manufactures qui a fait accroître
Villemur.
L'intérieur de la ville est de médiocre intérêt,
les rues étroites n'ofl'rent pas de constructions
ayant quelque apparence, l'église est son unique
monument. Le Tarn seul lui donne quelque
attrait, il est la vie par ses grandes usines, la
lumière électrique qu'il fournit et la navigation.
Un joli quai ombragé le borde en amont.
Rien, cependant, ne retient longtemps ici, je
m'en vais donc à Grisolles, à travers la plaine
qui donnait les vins jadis célèbres de Fronton et
de Villaudric que l'on commence à produire de
nouveau.
Aussitôt le Tarn franchi et le petit quartier
ouvrier de la gare traversé , on est en pleines
cultures, le hameau de Magnanac est entouré de
moissons blondes ; peu à peu elles semblent sub-
mergées dans le vignoble de plus en plus étendu.
Vignes basses à ceps noueux, divisées en larges
rangées à travers lesquelles les bœufs au pelage
d'un roux tendre conduisent la charrue ; les
animaux sont accouplés par un joug très long.
2 4o VOYAGE EN FRANCE.
permettant de passer au-dessus des ceps sans
les effleurer.
Villaudric apparaît, sa flèche blanche pointant
très haut ; plus loin, Vacquiers dresse une autre
flèche très effdée au-dessus d'un mamelon su-
perbe.
Le chemin, par ses fossés et son étroit trottoir,
sert de pacage aux oisons que des vieilles femmes
ou des fillettes conduisent ; ces bestioles au duvet
jaune sont en nombre invraisemblable. A chaque
instant on en voit sortir des fermes aux grandes
arcades, aux hangars dont les toits plats sont
soutenus par des piliers, aux grands pigeonniers
isolés. Cet ensemble évoque l'idée de la plaine
lombarde.
Les fermes sont aussi des celliers, car la vigne
est souvent maîtresse absolue du sol. Tous les
vieux plants ne sont pas morts. Le produit est
assez abondant pour qu'un seul acquéreur de
Paris ait pu dernièrement faire un marché de
plusieurs milliers d'hectolitres. Toute cette par-
tie de la plaine est une argile grise très com-
pacte que recouvre la nappe de ceps. Il n'y a de
grande végétation qu'aux abords des hameaux
et des fermes où les arbres fruitiers sont nom-
breux et variés : pruniers, pêchers, coignassiers
et noisetiers.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 24 1
Sur le bord d'une terrasse ravinée est bâti
Villaudric ; dans les constructions neuves les
briques crues font place aux briques cuites alter-
nant par assises avec les cailloux roulés. Dans
son ensemble, ce pauvre bourg terreux est d'as-
pect vétusté, on ne sait pas ici faire des murs
de pisé comme autour de Lyon où l'on édifie
avec la terre des bâtiments de plusieurs étages
laissant une impression de force.
Beaucoup de maisons sont abandonnées, le
phylloxéra ayant sévi. Cependant Villaudric reste
fameux par ses vins. A Toulouse et dans tout le
Lauraguais, le villaudric est la bouteille fine que
l'on sert le plus volontiers. Ce cru et celui de
Fronton son voisin sont les meilleurs de la Haute-
Garonne; ils ont « plus de finesse, de délicatesse
et de bouquet )> que les excellents vins de Tarn-
et-Garonne.
Lorsque M. Rendu publiait son Ampélographie
française. Fronton avait 1 827 hectares de vignes,
Villaudric 525. Peut-être l'étendue est-elle en-
core égale, car on a beaucoup reconstitué et le
vignoble dépasse fort la surface en céréales. De
Villaudric à Fronton on est sans cesse au milieu
de ces rangées de ceps.
Fronton est un grand bourg construit en bri-
ques crues, partie au long d'une grande route,
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. 16
242 VOYAGE EN FRANCE.
partie autour d'une église dont le clocher est
une haute tour carrée sans caractère. Les enca-
drements de briques rouges des ouvertures, le
badigeon, les grands auvents donnent un peu
de pittoresque. Le commerce est assez actif,
grâce à la vigne. De nombreux commission-
naires en vins y ont leurs bureaux.
De la vigne, toujours de la vigne. La campagne
en est monotone car on ne trouve plus ici les
grandes fermes flanquées de leurs pigeonniers.
Au bord du talus de la route croissent des cistes,
que je ne m'attendais guère à trouver sur ce
plateau si éloigné de la Méditerranée. Il faut
atteindre le versant de la Garonne pour revoir
les céréales.
De cette terrasse la vue est immense : d'un
côté sur le versant du Tarn que je viens de par-
courir, de l'autre sur la Rivière garonnaise semée
de fermes et de hameaux ; le lleuve se devine à
une large zone d'arbres qui en dessine les sinuo-
sités. Au delà, Grenade montre son damier ré-
gulier de maisons ; vers le sud, Toulouse dresse
ses tours et ses flèches émergeant d'une brume
légère '. Au pied de la côte s'étend Grisolles ; la
I. Sur Toulouse et Grenade, voyez la 38" série du Voyage en
France.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 243
flèche élégante et svelte de son église surgit
au-dessus des fauves toits plats. Dans un groupe
d'arbres, le château de Fontanas apparaît, flan-
qué d'une mince tourelle. A la sortie de la petite
ville, le canal trace un étincelant sillon dans la
plaine.
Un sentier entre les moissons conduit à Pom-
pignan, de là on a sans cesse sous les yeux la
plaine immense et les pentes molles entre les-
quelles s'ouvrent, très évasés, la vallée de la
Save et des vallons latéraux. De grands fenouils
et des genêts en fleurs mêlent leurs odeurs péné-
trantes. Voici Pompignan, village modeste qui
semble écrasé sous la masse de son château,
édifice de brique conçu dans le style classique.
Cette belle demeure fut celle de Lefranc de
Pompignan, qui dut une célébrité durable à son
ode à J.-B. Rousseau. Ce magistrat, qui avait
titre de marquis, fit reconstruire l'église, il vou-
lut y être inhumé : c'est un temple assez simple,
dressant au pied de la colline une tour carrée,
en brique, couronnée de balustres.
Le village est entouré de champs de céréales
d'une extrême vigueur. Arthur Young, en 1787,
s'émerveillait de cette richesse agricole de « Pom-
pinion » où il dîna au « Grand-Soleil, auberge
excellente )>. La Beauce n'offre pas de blés et
2 44 VOYAGE EN FRANCE.
d'avoines comparables à ceux-ci. Mais les do-
maines sont de peu d'étendue, pans de verdure
aux teintes variées sur lesquels tranchent des
guérets rougeâtres.
Tout à l'heure couvert, le temps s'est éclairci,
le paysage s'agrandit, on voit peu à peu se
dessiner le rideau merveilleux des Pyrénées
bleuâtres, festonnées de neige.
A l'entrée du village un bruit gai de battoirs
et d'eau jaillissante. Une fontaine tombe dans
un bassin abrité par un toit de charpente. A côté
sont les communs du château, drapés de lierre,
encadrant une grille qui permet d'apercevoir des
pelouses, de grands arbres, des corbeilles de
roses. Gela semble un rêve, après les mono-
tones étendues des vignes de Fronton. Le châ-
teau couvre une haute terrasse de brique om-
bragée de tilleuls et domine le village aux toits
de tuiles projetés en auvents. Bien des maisons
abandonnées, ruines navrantes car la brique
crue s'est délitée sous la pluie. Pompignan, jadis
animé par le roulage, a bien perdu avec le canal
et le chemin de fer qui passent à ses pieds sans
lui laisser voyageur ou trafic.
Près de l'église la mairie-école est précédée
d'une allée fleurie de roses ; un vieux pigeon-
nier, qui fut peut-être le colombier féodal du
LA. RIVIÈRE MONTALBANAISE. 245
marquis de Pompigiian, complète le site tran-
quille.
Au long du canal bordé d'ormes et de frênes,
coulant à la marge de la plaine couverte de maïs
et de sorgho, le chemin de halage conduit à Gri-
solles. Le sorgho est en champs réguliers ou en
lignes encadrant le maïs. Celui-ci montre déjà
ses panicules et ses épis ; le sorgho, plus haut
et mince, n'a encore qu'une tige garnie d'un
feuillage rubané et flottant.
XVI
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU OUERCY
Au bord de l'Aveyron. — Les pèches de l'Honor de Gos — Une
ville gauloise disparue. — Real ville et le vallon de la Lère. —
La fabrication des chapeaux de paille, son origine, ses dévelop-
pements. — Les usines de Gaussade. — Quelques mots sur la
production des tresses. — La ville de Gaussade. — Sur le causse.
— Septfonds.
Septfonds. Juillet.
Ce n'est pas seulement la Garonne et le Tarn
qui parcourent l'immense plaine montalbanaise,
r.Vveyron la borne vers le nord et ses rives ne
sont pas la partie la moins riche et la moins fertile
du superbe terroir. L'abri du massif quercinois
crée une zone privilégiée par la douceur du cli-
mat; le sol, meilleur, se prête mieux aux cultures
maraîchères; là s'alimente le commerce de pri-
meurs de Montauban, en voie de progression
constante. La course à travers cette partie de la
plaine, par la route de Cahors, offre plus de
gaîté, grâce aux arbres et aux belles maisons
rurales ayant toutes le classique pigeonnier.
Sous l'écran des collines, véritable espalier
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 47
au soleil du midi, les pentes de rAveyron sont
plus belles encore. On y récolte la superbe pêche
à noyau non adhérent, appelée l'Honor de Cos
et plus connue dans le commerce comme pêche
de Montauban. Le fruit est gros, dur, à chair
jaune. Son nom singulier d'Honor de Cos est
celui d'une commune couvrant le sommet des
collines et les pentes de riants vallons où sont
disséminées les habitations rurales, car il n'y a
pas de village, malgré la population de plus de
I 200 âmes. Quant à Cos, c'est un hameau occu-
pant une abrupte terrasse des bords de TAvey-
ron, il a succédé à la cité gauloise de Cosa,
longtemps florissante par le commerce et dé-
truite sans doute par les barbares. Une autre
commune, Picquecos, en garde également le sou-
venir. Cos n'est pas même une commune, il
dépend de Lamothe-Capdeville.
Si les hauteurs et leurs vallons bien exposés
au soleil sont le domaine des arbres fruitiers, les
bords de la rivière offrent d'admirables cultures
de blé, de maïs, de luzerne, de pommes de terre.
Vers Albias les deux rives sont d'une extrême
opulence. Elle a frappé des Anglais, fabricants de
conserves en quête de matières premières pour
leurs chers pickles ; ils ont proposé aux habitants
de Cayrac de se livrer à la culture des cornichons.
248 VOYAGE EN FRANCE.
jusqu'alors confinée autour de Toulouse. Les
Gayracois ont accepté, les essais se font avec
assez de succès jusqu'à présent, peut-être va-t-il
se créer là une de ces spécialités de cultures de
plus en plus nombreuses dans notre pays.
Le choix de Gayrac s'explique : la fertilité du
sol est extrême, les collines abritent des vents
du nord, la Lère et TAveyron arrosent ce terroir.
Il est peu de coins plus favorisés en France que
les bords inférieurs de la belle rivière venue des
causses et où les poissons se jouent en foule.
A l'entrée de la petite vallée de la Lère, la
bastide de Réalville s'étend au pied d'un coteau
planté d'arbres fruitiers. Au-dessous, la rivié-
rette coule entre les prés et les cultures. Le
site était admirablement choisi pour une ville,
mais le centre d'attractions reste à Gaussade et
s'y maintient d'autant plus que celle-ci est deve-
nue une cité industrielle très vivante, dont le
nombre d'habitants, après avoir fléchi, s'est re-
levé à mesure que la population ouvrière était
davantage attirée. Gas bien rare dans ce pays
purement agricole où chaque dénombrement
constate une navrante décroissance ^
I. De 3747 habitants le nombre s'est élevé en moins de dix
ans à 4 5o8, dont 8017 de population agglomérée.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 249
Cette activité est due à la confection des cha-
peaux de paille, née dans une petite ville du
voisinage, Septfonds, où elle se maintient encore,
très vivante. On a pu en retrouver l'origine.
D'après un article d'un journal de Montauban',
elle remonterait à 1798; les premiers essais
seraient dus à une bergère nommée Pétronille
Cantecor, qui imagina de tresser de la paille de
seigle ou des brins de jonc, puis de coudre les
tresses pour en faire des chapeaux. Elle réussit,
créa un petit commerce et fut bientôt obligée
de former des élèves. De Septfonds, on alla ven-
dre à Gaussadcj puis à Montauban et jusqu'à
Toulouse. Les rustiques coiffures confectionnées
dans les veillées de Septfonds se répandaient
peu à peu ; après les champs de foire du Quercy,
du Rouergue et du Languedoc, elles allèrent
plus loin encore. Les fabricants de chapeaux de
Lyon et du Dauphiné eurent vent de cette con-
currence, mais, bien avisés, ils profitèrent de
cette main-d'œuvre à bon marché pour s'appro-
visionner à Septfonds des tresses nécessaires à
leur industrie.
Déjà la petite ville isolée sur le premier gra-
I. Résumé par M. Gébelin dans le Bulletin de la Société de
géographie de Bordeaux.
2 Do VOYAGE EN FRANCE.
din des causses commençait à livrer des pro-
duits moins rudimentaires. Pélronille Cantecor
dirigeait toujours sa maison, devenue impor-
tante à partir de i83o; à côté, d'autres étaient
nées. On ne se borna pas à produire la tresse :
puisque le Dauphiné faisait des chapeaux de
meilleur goût, plus élégant, on irait chercher
des ouvriers là-bas. Ainsi fut fait. En pleine crise
politique, en 1849, on voyait enfin Septfonds
entrer en lice pour les articles de choix.
Quelques années encore furent nécessaires
pour passer du petit atelier à l'usine, il fallut
l'époque de prospérité dont les deux termes
furent la guerre de Grimée et la guerre du
Mexique pour faire pénétrer l'usage du chapeau
de paille, objet de faible durée, parmi les gens
habitués de tous temps au chapeau de feutre,
presque inusable. Le règne des machines com-
mençait, machines à coudre les tresses, machines
pour la mise en forme, etc. L'ouvrière la plus ac-
tive pouvait à peine faire dix chapeaux par jour,
la machine à coudre permit d'en faire quatre à
ciiu{ fois plus. La machine elle-même se perfec-
tionne sans cesse^ d'abord mue par le pied de
l'ouvrière, elle a reçu le concours de la vapeur; à
son tour l'électricité pénètre dans la fabrication.
Il vint un moment où, malgré ses accroisse-
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 25 1
ments successifs', Septfonds ne put suffire aux
demandes. Alors l'industrie se porta à Caussade.
Elle eut des capitaux et put faire grand. L'impor-
tateur de la fabrication, M. Rey, est aujourd'hui à
la tête de la production, il est maire de la ville et
a reçu la croix de la Légion d'honneur des mains
de M. le président Carnot pour le développement
qu'il a su donner à ce groupe de fabriques.
Cet exode n'a pas suffi, pour trouver la main-
d'œuvre, d'autres maisons sont allées s'installer
à Montauban, à Réalville, à Servanac, à Saint-
Antonin.
Mais quel changement ! La bonne vieille
tresse de paille de seigle, faite à la veillée dans
les métairies du causse, n'est plus ! Du moins,
on en fait si peu que cela est à peine à signaler.
Pour leurs matières premières, Caussade et Sept-
fonds ont surtout recours à la Chine et au Japon,
à l'Italie, la Suisse et la Belgique. La Chine
fournit la tresse usuelle, celle dont l'emploi est
classique ; le Japon envoie des pailles mieux
travaillées, destinées au bel article de fantaisie ;
l'Italie fournit les tresses les plus fines, la Bel-
I. Septfonds n'avait pas plus de 800 habitants quand l'industrie
y naquit; en 1861, au début de l'emploi des machines, le nombre
s'élevait à 1 2o3 ; vingt ans après, à i 869 ; au dernier recense-
ment, 1901, il est de 2 871.
2 52 VOYAGE EN FRANCE.
gique produit entre Liège et Maëstricht une
tresse légère destinée à former le dessous de
bord des chapeaux. Enfin la tresse du pays,
dite de Toulouse, produite dans le Lot-et-Ga-
ronne, le Tarn-et-Garonne et le Lot, entre pour
une faible part dans la confection des chapeaux,
elle est très ordinaire et « moins avantageuse »
que celle de l'extrême Orient.
Il y a quelques années encore, nous étions tri-
butaires de l'Angleterre pour l'approvisionnement
en tresses de Chine et du Japon ; celles-ci allaient
s'entreposer, se faire teindre et blanchir dans la
ville de Luton qui est le Gaussade anglais, d'où
elles revenaient en France grevées des droits et
bénéfices des intermédiaires. Les commerçants
du groupe lyonnais ont fait des efforts pour atti-
rer directement ces produits. Aujourd'hui la
France reçoit par Marseille une quantité de tresses
de Chine supérieure à celle que nous fournit l'An-
gleterre. Il est hors de doute que nous arriverons
à nous débarrasser du tribut en créant des ate-
liers de blanchissage, de teinture et d'apprêt ^
Les deux petites villes du Ouercy n'ont pas
I. Voici, d'après la statistique de igoi, la quantité de tresses
de paille tirées de l'étranqer par la France : Chine, 669 680 kilo-
grammes ; Angleterre, 675 885 ; Italie, 343 662 ; Suisse, 255 643 ;
Japon, g5 i33 ; Belgique, 64 334; Allemagne, 19962.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 53
encore d'agents en Chine, elles font leurs achats
par l'intermédiaire de commissionnaires, cepen-
dant l'importance de leur production permettrait
des relations directes avec ces pays lointains
dont elles tirent leurs « cantons », du nom du port
principal de provenance. La valeur des affaires
atteint, dans le groupe, de cinq à six millions de
francs. On compte une quarantaine de fabriques.
Septfonds seul en a vingt-deux, dont quatre très
importantes. Caussade n'en compte que quatre,
mais égales à Septfonds tout entier pour la quan-
tité de produits. On fait dans les deux villes de
4 000 à 5 000 chapeaux par jour ; la gare de
Caussade, qui sert en même temps à Septfonds,
envoie i5oooo caisses dans l'année pour toutes
les directions, France, colonies et étranger.
Je visite Caussade pendant la morte saison.
M. Rey fds, qui a bien voulu se faire mon
guide, me dit que le travail s'est ralenti depuis
le commencement de juillet et cessera bientôt
pour reprendre seulement en septembre et oc-
tobre. Tous les commerçants en chapeaux de
paille sont approvisionnés maintenant, et la mode
pour l'an prochain n'est pas encore dessinée. On
profite de ce chômage pour préparer les modes
nouvelles et faire les collections de voyage qui
ne comprennent pas moins de 200 types en
2 54 VOYAGE EN FRANCE.
moyenne. Avec les débouchés sans cesse ouverts
dans les pays ensoleillés, le chômage diminue
peu à peu ; déjà certaines années laissent à peine
le mois d'août pour fermer les ateliers et pro-
céder aux réparations. Si je n'assiste pas à la
grande fièvre du travail, les ateliers de MM. Rey
ont encore beaucoup d'ouvrières; entre leurs
mains se déroulent les blanches tresses qui
prennent rapidement la forme plus ou moins
précise d'un chapeau. Ce rudiment sorti de la
machine se nomme cloche.
Gaussade et Septfonds possèdent 2 000 ma-
chines de divers systèmes pour la couture.
En quittant les ateliers de couture, les cloches
vont auxatehers de dressage. Jadis le travail de
mise en forme, qui donne au chapeau son aspect
définitif et sa rigidité, se faisait à la main, il était
très pénible. Depuis 1866, époque 011 la machine
à coudre fit également son apparition, le dres-
sage est fait par des presses hydrauliques; les
deux centres en comptent 200. Le chapeau est
disposé sur un moule en métal chaufTé au gaz,
sur lequel la presse vient appuyer. Chaque fabri-
que produit elle-même son gaz.
Les machines sont très ingénieuses ; parmi les
plus récentes il en est qui font des coutures invi-
sibles et donnent aux chapeaux ainsi préparés
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 55
l'aspect des chapeaux tressés de toutes pièces
dans rAmérique centrale, ou des chapeaux rem-
maillés fournis par la Toscane.
Tout en ayant sa forme et sa rigidité, le cha-
peau n'est pas achevé; il faut mettre la coiffe qui
est tissée et préparée au Put, la garniture de
cuir, le ruban, le galon de bordure s'il y a lieu.
Tout cela nécessite encore beaucoup de femmes
aux ateliers ou à domicile, les hommes sont uni-
quement occupés au dressage.
Pendant que je note ces particularités, mon
aimable guide me montre une multitude de cha-
peaux dont la commande est récente et qu'il
faut envoyer en hâte : ils sont destinés aux em-
ployés d'octroi de Paris, à qui l'on veut adoucir
les rigueurs de cet été caniculaire. Dans un autre
atelier, j'assiste au travail délicat du dressage
des chapeaux de rotin. Les cloches de cet ar-
ticle de luxe arrivent àCaussade dans les caisses
qui ont transporté à Java des allumettes de
Suède.
A Caussade la main-d'œuvre est payée à façon
ou à la journée. Les salaires varient de 2fr. 5oc.
à 4fr- pour les hommes, de i fr. 5oc. à 3 fr. pour
les femmes. Ce sont des chiffres modestes, mais
dans ce doux pays où la vie est facile, ils repré-
sentent une somme bien plus élevée qu'ils ne le
2 56 VOYAGE EN FRANXE.
feraient dans le Nord. Sauf le chômage annuel
régulier, de plus en plus restreint, survenant
d'ailleurs à une époque de l'année où il y a moins
de privations, le travail est constant, grâce à
l'intelligence des industriels qui ont su ouvrir
des débouchés et sont parvenus à chasser les
concurrents étrangers du marché français. De
ces rivaux, les plus dangereux étaient les An-
glais, qui ont dans leur ville de Luton, en Bed-
fordshire, la manufacture la plus considérable du
monde pour la fabrication du chapeau de paille
el surtout pour la préparation, le blanchissage et
la teinture des tresses. Cette ville de 35ooo âmes
possède plus de loo usines ou grands ateliers.
Un tel centre est assuré d'énormes débouchés
par l'étendue du domaine colonial britannique.
En Suisse, la petite cité argovienne de Wohlen
est le cœur de la production, nous lui achetons
des tresses pour une somme considérable; la
Toscane, où l'on fait directement la tresse avec la
paille du pays, est moins une concurrente pour
nous qu'une des sources d'alimentation pour les
produits de quaUté supérieure'. L'Allemagne, qui
I. J'ai déjà parlé de la fabrication des chapeaux de paille dans
diverses séries du Voyage en France : 'j^ (Saint-Symphorien-siu"-
Coise), chap. IX; cf (Saint-Georges-d'Esperanche), chap. II;
22^ (Nancy), chap. VII.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2D7
possède ses principaux établissements à Lin-
denberg en Bavière et à Dresde, et la Belgique
ne sont plus considérées par nous comme des
rivaux dangereux.
En France deux autres groupes de chapellerie
de paille : Nancy et la région lyonnaise avec ses
ateliers de Lyon, Saint-Symphorien-sur-Coise,
Saint-Georges-d'Espéranche et Grenoble, cons-
tituent les grands points de fabrication, ils ont
ce qui manque à la contrée de Caussade : les
usines de teinture et de blanchiment.
Cette intéressante industrie a été favorisée
par notre régime douanier qui, considérant la
tresse comme une matière première indispen-
sable, ne la frappe pas, et, par contre, impose
des droits élevés aux produits fabriqués. Cette
législation favorable a fait cesser l'invasion du
marché français par les chapeaux anglais et alle-
mands.
La ville de Caussade est avenante, grâce aux
boulevards ombreux qui l'enveloppent, à son
jardin public, aux belles constructions de cette
ceinture gagnée sur l'emplacement des fortifica-
tions. A l'intérieur, c'est une vieille cité aux rues
sinueuses, bordées de hautes et sévères cons-
tructions de brique. Au cœur, l'église recons-
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. 17
2 58 VOYAGE EN FRANCE.
truite a gardé de l'édifice primitif une belle tour
octogonale de style toulousain. D'une construc-
tion massive entourée de créneaux s'élance cette
tour à trois étages, de hautes fenêtres jume-
lées se répètent sur chacun des huit pans. Au-
dessus se dresse une belle flèche à crochets. Il
n'y a pas d'autre monument, à moins de donner
ce nom à l'ample maison bourgeoise qu'habita
M. de Maleville.
Gaussade est un petit centre agricole assez
vivant, grâce à de riches campagnes qui élèvent
beaucoup de volailles dont la qualité est renom-
mée. Bâtie au pied du causse, dont elle a pris
le nom et qui, appelé causse de Saint-Antonin
ou de Gaylus, est l'extrémité du causse de Li-
niogne, elle doit à ce sol calcaire d'être déjà un
producteur de truffes.
La rivière de Lère forme pour ainsi dire la
bordure du causse et le sépare du pays strié
de vallées appelé le Ouercy-Blanc en laissant à
l'écart sur le plateau la petite ville de Septfonds
encore plus exclusivement vouée que Gaussade
à la fabrication du chapeau de paille. Une route
absolument droite réunit les deux villes, sépa-
rées par 7 kilomètres; elle s'élève insensiblement
depuis Gaussade, située à iio mètres, jusque
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERGY. 269
sur le causse, à 198, d'où elle descend dans le
bassin de Septfonds.
De grands platanes font de cette large voie une
majestueuse avenue. De chaque côté le sol,
d'une terre rouge, offre le même aspect de ri-
chesse agricole que les plaines du Tarn et de
l'Avejron, cependant les maisons rurales sont
moins vastes; à peine çà et là quelques grandes
fermes flanquées du haut pigeonnier sur lequel
les oiseaux roucoulent.
Les habitations font partie de la commune de
Monteils, qui ne possède aucun village et dont
le territoire forme comme le perron, aux pentes
douces, du causse. Les vues deviennent gran-
dioses, on voit surgir des collines portant à leur
26o VOYAGE EN FRANCE.
sommet d'antiques bourgades féodales conser-
vant un I)e]li({ueux aspect. Montalzat, bastide
du xm* siècle, coiffe une de ces collines, à 3oo
mètres d'altitude, et commande d'immenses ho-
rizons sur le bas Ouercy, le Ouercy-Blanc et
l'.Vgenais. Ces bourgs ainsi juchés sur des som-
mets semblent encore en sentinelles, bien que
depuis des siècles la paix se soit faite dans ce
pays que tant de sang arrosa. Leurs noms ré-
vèlent ce caractère dominateur : Montpezat,
Montalzat, Mirabel...
Le causse devient rocheux à mesure qu'on y
accède, des blocs ou des dalles calcaires servent
de limites aux champs. Si l'on construit encore
un peu en briques crues, comme dans la plaine,
la plupart des maisons sont en gros moellons et
les hangars sont soutenus par des piliers de
pierre brute. Sur la dalle rocheuse, la terre est
assez épaisse, les bœufs retournent cette glèbe
rougeâtre. Les espèces ici se mêlent : la race
garonnaise montre encore ses attelages d'ani-
maux à la robe claire, d'autres . attelages sont
composés de bœufs de Salers à la puissante
ossature, au pelage sombre. Dans les enclos
beaucoup de poulains et de jeunes mulets, dont
on fait l'élevage.
Le hameau de Dardenne borde la route, un
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 26 1
pigeonnier surmonté d'une flèche d'ardoises sem-
blable à celle d'une église se dresse au bord de
la route dont c'est ici le point culminant. Une
grande cuvette se creuse, sorte d'affaissement du
causse; au fond apparaît Septfonds, derrière
laquelle le terrain se relève en une pente ver-
doyante rayée par le ruban blanc des routes.
Le causse s'étend à l'est, plateau ondulé jus-
qu'aux petits monts qui bordent l'Aveyron vers
Saint-Antonin ; du côté opposé Puylaroque,
Montalzat et Montpezat semblent avoir grandi.
Voici Septfonds, grand damier de rues régu-
lières étalées dans le verdoyant bassin. C'est une
bastide, œuvre de ce grand bâtisseur de villes
qui avait nom Alphonse de Poitiers. Le plan gé-
néral est celui d'un triangle dont un des côtés
limite la ville. Le fondateur avait choisi le site
occupé par une abbaye dont l'église est devenue
celle de la cité nouvelle.
Septfonds conserve sa régularité et ses rues
tracées au cordeau. Les vieilles habitations de
poutrelles et de torchis se profilant en ressaut,
ont presque toutes disparu. Le bien-être amené
par l'industrie a fait construire des demeures de
pierre, , plus confortables, mais aux façades
plates et monotones. Des fils électriques vont
partout, apportant la lumière et la force. Le
262 VOYAGE EN FRANCE.
courant, produit par une chute de la Lère, est
conduit jusqu'à Caussade.
Sur les portes quelques vieilles femmes font
encore la paillole, tresse de paille fine et flexible
du causse ; c'est avec la production de Puy-
laroque, de Lalbenque et de Cayliis le vestige
d'un travail jadis général dans la contrée.
De grandes bâtisses abritent les ateliers, les
fenêtres ouvertes laissent apercevoir les ou-
vrières, femmes et jeunes filles, qui cousent la
tresse, placent les rubans et les coiffes aux cha-
peaux. Quelques-uns de ces établissements sont
vastes, mais la plupart, de modestes dimen-
sions, donnent peu l'aspect industriel. Les cons-
tructions nouvelles répondent mieux aux besoins
d'hygiène, les ouvertures sont de grandes baies
par lesquelles pénètrent à flots l'air et la lumière.
Jusque dans la campagne, au long des chemins
et des routes, entre les prés et les vignes, on
rencontre ces ateliers et l'on aperçoit les ouvriers
travaillant au dressage des chapeaux.
XVII
LES GORGES DE l'aVEYRON
La gare de Lexos. — Au long de l'Aveyron. — Les rochers du
causse . — Saint-Antonin. — Le plus vieil hôtel de ville de
France. — La vallée de la Bonnette. — Les phosphates du
Tarn-et-Garonne. — Gouffre de la Goule. — Caylus. — Sur le
causse. — En descendant l'AvejTon. — Penne et Bruniquel. —
Montricoux et Négrepelisse.
Montauban. Juillet.
On sait combien certaines gares de la Com-
pagnie d'Orléans sont amples et coquettes. Par
un souci bien rare chez les ingénieurs, ceux-ci
ont pensé que les chemins de fer, pour être mo-
dernes et utilitaires, pouvaient cependant avoir
un caractère architectural. De même que les
ingénieurs militaires d'autrefois, les d'Argen-
court et les Vauban, ne dédaignaient pas d'ap-
porter des préoccupations d'art dans leur plan,
de même quelques-uns des constructeurs de ce
réseau ont su créer des œuvres charmantes. La
ligne de Vendôme est à ce point de vue une
264 VOYAGE EN FRANCE.
chose unique. Mais çà et là, sur le réseau, d'au-
tres jolies stations ont été édifiées.
Celle de Lexos est un petit bijou, d'autant
plus surprenant qu'il se trouve en pleine soli-
tude. Il n'y a pas de commune de Lexos, mais
un hameau de quelques feux dépendant de la
commune de Varen en Tarn-et-Garonne et bâti
au bord de l'Aveyron, dont la rive gauche est
dans le département du Tarn. Le chemin de fer
de Paris à Toulouse par Gapdenac abandonne la
rivière pour aller dans le sud, laissant à l'écart
la ville de Montauban. Afin de relier celle-ci à
Paris, on a construit un embranchement au long
de l'Aveyron. Longtemps importante, cette ligne
est fort secondaire depuis qu'une voie moins
accidentée et plus directe conduit de Limoges à
Cahors et à Montauban.
Quand fut construite cette ligne de l'Aveyron,
on ne prévoyait guère la création d'une rivale
outillée pour les grands trains, et Lexos sem-
blait destinée à rester une des importantes bifur-
cations du réseau, c'est pourquoi la gare fut non
seulement ample, mais monumentale aussi par
la beauté des proportions et des lignes et l'heu-
reux mélange de la pierre et de la brique.
Maintenant l'aimable édifice est endormi ;
voici plusieurs fois que le hasard de mes courses
LES GORGES DE l'aVEYRON. 265
m'amène à Lexos et je suis toujours seul au
buffet devenu hôtel. Peut-être, quand cette su-
perbe région du Quercy, de la Marche du
Rouergue et du haut Albigeois sera mieux con-
nue, Lexos deviendra-t-il centre pour le tou-
risme. Le chemin de fer, entre Lexos et Montri-
coux, vaut à lui seul une visite.
Plusieurs vallées s'ouvrent sur ce point, tou-
tes belles, mais diversement. La plus longue,
celle du Gérou, apporte à l'Aveyron les eaux
nées autour de la noire Carmaux et qui ont
coulé au pied de l'amphithéâtrale Cordes ' ; en
amont la Baye, un peu plus bas la Seye, descen-
dues au fond de couloirs creusés dans le causse
de Limogne. Mais le vrai joyau du pays, une
des merveilles du Midi, c'est la vallée de l'Avey-
ron elle-même, dans cette courte partie de son
cours où la rivière sépare le Quercy de l'Albi-
geois.
Combien cette contrée diffère de la plaine
montalbanaise, pourtant si proche ! Les collines,
très hautes, rapprochées, sont en partie cou-
vertes de châtaigniers, ces arbres alternent avec
les cultures et les prairies. Peu à peu ces pe-
tits monts s'escarpent encore, le rocher appa-
I. 35e série du Voyage en France.
206 VOYAGE EN FRANCE.
raît près de Fenavrols, hameau commandé par
les restes d'une forteresse : tour et corniche de
mâchicoulis. Au bord de l'Aveyron, une cons-
truction vitrée porte une inscription : Fenayrols-
les-Bains. Il y a ici quatre sources d'eaux froides,
sulfatées calciques mises récemment en exploi-
tation : Bombouzole n°^ i et 2, l'Église et Ville-
neuve.
Dans cette gorge où les beaux matériaux
abondent, les constructions ont de l'élégance et
de la couleur; près de Teussac un colombier de
belle allure se mire dans la rivière, lente et pro-
fonde, assombrie par les hautes roches de la rive
gauche. Sur la rive droite, jusqu'à Saint-Anto-
nin, il y a beaucoup de vignes, bien tenues, sur-
tout dans la partie reconstituée.
Les rochers rappellent les murailles des grands
causses ; par leurs formes et leur hardiesse ils
ont fait naître la légende. L'un d'eux, le roc
Dansaïre, passait autrefois pour le rendez-vous
des sorcières qui venaient y danser au clair de
la lune. Plus loin ces parois s'escarpent encore,
les plus belles se nomment les rochers d'An-
glars, leur crête domine de 260 mètres les
bords de la rivière et la petite ville de Saint- An-
tonin, assise au confluent de la Bonnette et de
TAvevron.
LES GORGES DE l'aVEYRON. 267
Un pont du xni^ siècle, qui a perdu une grande
partie de son caractère par suite de son élar-
gissement, franchit rAveyron et conduit dans
cette ancienne petite ville, si curieuse et pitto-
resque, qu'il faudrait préserver avec soin de
toute transformation. Sauf les moulins à phos-
phate installés sur la rivière, rien n'est venu en-
core en troubler l'aspect archaïque. Saint-An-
tonin n'eût-elle que ses maisons gothiques ou
romanes, ses portes sculptées, ses ruelles aux
perspectives imprévues qu'elle serait chère aux
Français épris des vieilles choses de la patrie.
Mais elle a mieux encore : la doyenne de nos
maisons communes, une habitation noble cons-
truite vers iioo et aménagée en 1269 pour ser-
vir d'hôtel de ville. Depuis lors, elle n'a pas
cessé d'être le lieu de réunion pour les élus de
la cité. Dans le cours de tant de siècles elle
avait subi bien des outrages, mais elle restait
robuste avec ses arcades où l'arc brisé s'es-
seyait, ses fenêtres romanes divisées par d'élé-
gantes colonnettes aux chapiteaux révélant la
verve et l'énergie d'une belle époque d'art. Au
premier étage, une rangée de colonnettes est
disposée en claire-voie séparée en trois parties
par deux piliers. La grande salle est éclairée par
les fenêtres qui, dans chaque travée, occupent
268 VOYAGE EN FRANCE.
les intervalles entre les colonnettes. Un beffroi
carré flanque le vénérable édifice auquel Viollet-
le-Duc, grand restaurateur s'il en fut, a rendu
son caractère : plus peut-être qu'il eût convenu,
disent certains archéologues.
Ce joyau semble insuffisamment respecté, des
affiches souillent les murs et les frêles colonne?
sont reliées par des fils de fer destinés à supporter
des lampions aux jours de réjouissance publique.
La partie de la ville située aux abords de la
rivière abonde en vieilles maisons de briques
enchâssées dans la carcasse de charpente ; sou-
vent les portes ogivales sont timbrées d'écus-
sons disant que Saint-Antonin fut un séjour de
gentilshommes. Dans des ruelles étroites, pau-
vrement habitées aujourd'hui, on trouve aussi
des vestiges d'un passé plus opulent; de grandes
fenêtres à meneaux ont été murées par économie
de vitres, on n'y a gardé qu'un jour rare.
11 manque à ce tableau une église d'autrefois;
celle qui dresse aujourd'hui une belle flèche est
un diminutif de cathédrale gothique à trois nefs ;
si l'œuvre est intéressante , il lui manque ce
parfum du passé dont le reste de la cité est im-
prégné.
Non seulement Saint-Antonin a conservé l'as-
pect du vieux temps, mais elle a même des in-
LES GORGES DE l'aVEYRON. 269
dustries dont le nom est toute une évocation
d'antiques coutumes. On y fait des serges, des
cadis et des bourrats.
Pour préparer ces tissus servant encore à
habiller les habitants des causses et de l'Albi-
geois voisins, Saint-Antonin a ses fdatures, ses
marchands de laine et des teintureries. La con-
fection des sangles et des surfaix qui occupe
tant de bras à Penne s'y est également implan-
tée. Enfin, pendant quelque temps, on put croire
qu'un vent de fortune soufflait sur le pays avec
la découverte des phosphates sur le causse. Ces
roches étaient broyées dans les usines échelon-
nées sur la Bonnette et l'Aveyron. On en extrait
encore, mais bien des poches sont épuisées.
Même en 1901 la production fut nulle. « La
seule carrière exploitée l'année précédente a été
abandonnée à la suite de travaux de prospection
n'ayant donné aucun résultat » dit l'ingénieur
des mines dans son rapport au conseil général.
Peut-être les recherches seraient-elles plus ac-
tives sans la concurrence des phosphates d'Al-
gérie et de Tunisie.
Les poches qui contenaient la phospliorite se
trouvent au nord-ouest de Saint-Antonin, sur la
partie du causse étendue entre Septfonds et
Caylus. Bien que les exploitations soient mortes
270 VOYAGE EN FRANCE.
OU plutôt endormies j'ai voulu mettre le pied
sur le causse, déjà parcouru jusqu'à Septfonds.
On peut l'atteindre directement en suivant la
route qui, dès Saint-Antonin, s'élève sur les
hautes parois de cette sorte de canon au fond
duquel se tord l'Aveyron, mais j'ai préféré
remonter jusqu'à Gaylus par la vallée de la Bon-
nette.
La route forme autour de Saint-Antonin un
large boulevard planté d'ormes puissants et
touffus et se prolonge sous les platanes au long
de la riviérette aux eaux vives, à chaque instant
retenues par des barrages destinés à faire mou-
voir les moulins à phosphate qui s'échelonnent
jusqu'à Gaylus. Il y en a six sur ce parcours
de 12 kilomètres, trois autres fonctionnaient à
Saint-Antonin même et l'on en comptait trois
sur l'Aveyron, un en amont, deux en aval. En
ce moment ces usines n'ont plus à broyer les
phosphates rougeâtres dont la poussière a ma-
culé les murs.
Les retenues de la Bonnette animent le pay-
sage par leurs petites cascades. La vallée est
profonde, bien encadrée ; parfois les pentes se
dressent en fauves falaises. La vigne couvre de
nouveau les coteaux ; tout cela est très méri-
dional d'aspect. Dans une sorte de cirque, le
LES GORGES DE L AVEYRON. 27 1
vieux petit château de Monge, très défiguré,
conserve deux tourelles carrées.
Par un vallon tortueux et encaissé, une autre
rivière atteiut la Bonnette et vient faire mouvoir
les roues d'une scierie et d'une tannerie qui
forment le hameau du Martinet. Ce petit cours
d'eau sort d'une abondante source appelée la
Goule, issue d'un des mystérieux abîmes qui
criblent le causse. L'eau est d'une admirable
transparence ; à certaines époques, le gouffre
dégurgite des flots troubles, sans doute après
quelque violent orage autour de Septfonds.
En amont, la vallée devient fort belle. Sur
la rive gauche, elle se plisse en d'admirables
combes séparées par des collines bien décou-
pées projetées en promontoires; au sommet et
sur les pentes sont des maisons blanches et le
vieux château de Malterre aménagé pour l'exis-
tence moderne; au fond se suivent les moulins
à phosphate, sous leur couche de poussière
ocreuse. Tout cela large, riant, lumineux, en-
touré d'une intense verdure. Des hameaux se ju-
chent très haut, ainsi celui de Joanny qui couvre
un rocher à 875 mètres d'altitude, dominé lui-
même par le signal de Saint-Rome qui en a Sgi.
Sur l'arête du causse il y a beaucoup de mai-
sons, cette vallée est couTcrte de constructions.
272 VOYAGE EN FRANCE.
dont beaucoup fort anciennes. Ainsi, sur la rive
gauche, le vieux caslel de Gos, fort rébarbatif
avec ses murailles et ses tours noirâtres avoi-
sinant une chapelle.
Soudain apparaît Caylus, dominé par un pan
fauve de donjon ruiné, dressé sur un rocher
isolé, et un château neuf ou trop restauré. La
ville occupe le fond d'un cirque encadré par les
parois du causse ; les toits bruns s'éparpillent
en amphithéâtre. Au milieu s'élance la flèche de
l'église.
La bourgade est exiguë et simple. La vie est
toute sur la route de Septfonds qui décrit une
grande boucle pour s'élever sur le causse, là
sont les auberges et nombre de boutiques. L'in-
térieur est plus curieux, l'église possède un joli
chœur et de hautes verrières ; en face est une
maison gothique ornée de médaillons sculptés.
Sur la place, dont un des côtés a une galerie
d'arcades ogivales, de vieilles halles en lourdes
et massives charpentes reposent sur des piliers
de pierre. Près de là, une maison gothique con-
serve une jolie porte.
Une boutique annonce par une pancarte de
la bijouterie de Livron. J'entre pour faire quel-
que acquisition d'objets que je suppose avoir un
cachet local. On m'offre des médailles, des croix,
LES GORGES DE l'aVEYRON. 278
des chapelets, souvenirs d'un pèlerinage àNotre-
])ame-de-Livron, chapelle construite en i3o2 et,
depuis lors, lieu de réunion des fidèles. Le petit
édifice a été construit près d'une des abon-
dantes sources issues d'un abîme au pied du
causse, non loin du vieux village de la Capelle-
Livron, intéressant par ses ruines féodales et
son église romane. Toute cette vallée supé-
rieure de la Bonnette abonde en sites singuliers ;
un habitant de Gaylus m'en parle avec enthou-
siasme ; il voudrait me conduire à Saint-Projet
où la petite rivière, un moment perdue dans les
profondeurs du causse, au sein d'un cirque su-
perbe, reparaît par une abondante source jail-
lissant du rocher. Près de là est une grotte pro-
fonde où l'on pénètre en barque.
Mais il faudrait des mois pour voir toutes ces
merveilles naturelles dont le causse de Limogne
est couvert ; innombrables sont les abîmes, les
avens, les igues où se perdent les eaux. Je pré-
fère gravir les pentes du causse par la route de
Gaussade tracée en corniche au flanc du vaste
cirque qui encadre Caylus : rochers percés de
grottes, empanachés de figuiers noueux, tapissés
de buis, parfumés par le chèvrefeuille dérou-
lant ses lianes fleuries.
En montant on a sans cesse la petite ville
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
274 VOYAGE EN FRANCE.
SOUS les yeux, on devine comment elle s'est for-
mée autour de cette roche isolée qui porta la
forteresse des comtes de Gaylus et que l'on dé-
figure aujourd'hui en l'entaillant à la mine. Le
fond du cirque, d'un dessin géométrique, doit
beaucoup de gaîté aux vignes peuplées de pa-
villons de forme souvent pittoresque. Les ter-
rasses cultivées et les assises rocheuses font
comme une succession de gradins.
Voici le causse. La vue est bornée, car des
bois masquent Septfonds. Il y a de belles cultures
entre ces taillis, riches en truffes. Le causse de
Limogne, ici du moins, ne répond pas à la des-
cription classique. Il y a une couche profonde
d'un sol fertile où les céréales viennent bien.
Ils ne sont pas rares, assure-t-on, les paysans
dont la propriété rapporte soixante sacs de blé.
Beaucoup d'avoine, quelques vignes, des prés
naturels ou artificiels. « On voit des gens, me
dit un brave homme avec qui je redescends à
Gaylus, qui font 100, 200 quintaux de foin,
même 5oo. » Cela n'empêche pas l'habitant du
causse de parler avec un peu d'envie des ré-
coltes en vin des bourgeois de Saint-Antonin.
Ceux-ci ont beaucoup replanté, le succès est
venu : en 1901 on a obtenu autour de la ville
3 000 barriques de 220 litres.
LES GORGES DE L AVEYRON. 27O
« Si seulement on retrouvait des phospha-
tes ! » Mais la « prospection », comme l'on dit
maintenant, est peu fructueuse, les poches si-
tuées à Albertas, près d'Audubert, ont bien été
vidées.
Retour à Saint-Antonin, arrêt avant d'entrer
en ville pour contempler un cirque de roches en
avant duquel se dresse une immense pyramide
rougeâtre. Il y a bien des choses à voir encore
ici : la grotte du Capucin, les ruines du château
de la Valette où naquit le grand-maître de Malte
qui fonda la ville de la Valette, et de grands
rochers, et des igues et des dolmens... !
Plus intéressante est la vallée que je des-
cends en chemin de fer jusqu'à Penne. La ligne,
tantôt longeant l'Aveyron, tantôt coupant les
boucles par des tunnels, longe ou troue les
immenses rochers de ce couloir du causse. Ceux
de la rive droite sont fantastiques, tant ils sont
dentelés et colorés. Parfois le défdé est si étroit,
que la rivière a trois ou quatre mètres à peine
de largeur : ici elle se précipite entre des ro-
ches, là elle sommeille, puis les parois s'écartent
un instant, dessinant le joli bassin de Gazais :
un pont, un banc de sable bordé de laveuses
qui rient au passage du train. De nouveau les
276 VOYAGE EN FRANCE.
parois se rapprochent, moins farouches toute-
fois. L'Aveyron s'est foré un lit dans la roche
et continue son œuvre ; pendant les crues il va
laver les bords de sa vallée où il a mis à nu la
pierre lisse et blanche.
Les à-pic recommencent, percés de cavernes ;
le chemin de fer les longe en suivant toutes les
boucles de la rivière. Un immense rocher sur-
plombe le chemin de fer ; le voici dépassé et
l'on voit s'entr'ouvrir un bassin verdoyant com-
mandé par les étranges ruines du château de
Penne, murailles rouges dressées sur un rocher
de même teinte semblable à une lame de cou-
teau. Au-dessous, à mi-hauteur, s'allonge le
bourg de Penne. Son clocher est une tour à
mâchicoulis.
Le site est plus saisissant d'en bas, vu au pas-
sage. J'ai une déception en montant à ce village
de si grandiose allure ; il est d'une absolue placi-
dité, la population se voue à la fabrication des
sangles. Cependant on est frappé par la situa-
tion formidable de la forteresse, encore belli-
queuse malgré son état de ruine ; le château
était comme suspendu sur la vallée et par delà
l'Aveyron semblait menacer le causse aux pa-
rois percées de grottes.
La vallée est moins grandiose, au lieu des ro-
2'
ches à pic ce sont, jusqu'à Bruniquel, de raides
pentes revêtues de broussailles. Jadis il y avait
beaucoup de vie ; des forges et des fonderies
exploitaient le minerai du pays, longtemps elles
furent actives, on faisait des rails et des pièces
de wagon. Les usines n'ont pu résister à la con-
currence des établissements placés à proximité
de la houille et de minerais plus riches.
Le village de Bruniquel, qui avait donné son
nom aux forges, constitue un des grands sites
de la vallée. Sur de hautes roches fauves dres-
sées entre l'Aveyron et la Vère débouchant
d'une gorge profonde et verte, apparaît un vieux
château semblable à quelque palais de légende
par ses terrasses, ses viaducs, ses galeries, sa
tourelle aiguë. Le château a deux faces, l'une
farouche, l'autre riante. Le village, très ancien
lui aussi, possède de vieilles maisons intéres-
santes et offre des vues superbes sur les deux
vallées. Le site est plus aimable que Penne,
mais la forteresse n'a pas une assiette si puis-
sante, aussi les seigneurs de Bruniquel qui au-
raient voulu posséder leur voisine avaient-ils
pris pour devise :
RIEN SANS PEINE (Pcnnc).
Désormais la vallée de l'Aveyron perd de sa
278 VOYAGK EN FRANCE.
sauvagerie, les pentes s'abaissent et s'émoussenl,
le roc disparaît souvent sous de maigres taillis.
Voici Montricoux, sentinelle placée à l'issue du
cours héroïque de la rivière. Le bourg possède
un de ces clochers octogones caractéristiques
du pays toulousain, un reste de donjon, une
tour, des débris de remparts. Jadis il farllait for-
cer ce passage pour pénétrer dans la vallée.
Et maintenant c'est la plaine, il n'y a plus sur
le chemin de Montauban que la minuscule ville
deNégrepelisse, reste d'une bastide souvent sac-
cagée et brûlée. Ses maisons, très basses, s'ali-
gnent autour d'une église à flèche dentelée. Sur
la plaine les collines viennent mourir en pentes
douces mêlant leurs vergers à ceux des terres
basses coupées de joualles de vignes et de ran-
gées de figuiers et de pruniers. Les grands
pigeonniers se dressent de nouveau près des mai-
sons. Là-bas on aperçoit les édifices de Mon-
tauban.
XVIII
LES CINGLES DU LOT
De Fumel à Cahors. — Les cinqles. — Ruines d'Orgueil. — Du-
ravel et ses mines. — Puy-l'Évèque. — La patrie du maréchal
Bessières. — Castelfranc. — Luzech. — Le tabac dans le Lof.
— Mercuès et son château. — Cahors. — La vieille ville. —
Les monuments.
Cahors. Juin.
Si la vallée du Lot, au lieu de servir à des
relations locales, avait la bonne fortune de relier
de grandes cités et d'être parcourue par la foule
des voyageurs, elle serait célèbre entre toutes.
Elle renferme de grands paysages et possède la
grâce, dans sa partie inférieure, à travers le
Quercv, comme elle est superbement farouche
dans Fabîme creusé au sein du Rouergue. Même
pour le touriste qui répugne aux grandes mar-
ches, le passage au long de cette vallée creusée
en pleine table des causses et emplie d'une végé-
tation luxuriante, laisse le plus éblouissant sou-
venir. Placez ces paysages à l'étranger, ils seront
célèbres, chez nous on les ignore.
2 8o VOYAGE EN FRANCE.
Cette partie du cours de la grande rivière
entre Capdenac et Fumel n'est pas moins riche
que celle de TAgenais ; étroite, elle offre sans
cesse de nouveaux tableaux. Le Lot a une direc-
tion bien régulière de l'orient à l'occident, mais
il poursuit son cours avec lenteur et caprice,
dessinant des boucles d'une harmonie singulière,
méandres auxquels les riverains de la Dordogne
ont donné le nom de cingles, expression qui ne
s'applique pas moins bien au beau cours d'eau
de Gahors, ville emprisonnée dans un de ces
plis. Il y a un moulin du Cingle à Puy-l'Evêque.
Cette région finit à Fumel ', où l'embouchure
de la petite rivière de Thèze, descendue du beau
val que domine l'antique bastide de Montcabrier,
marque l'entrée de l'Agenais.
Dans ce grandiose couloir du Lot, la rivière
va capricieusement de l'une à l'autre pente,t ici
serrée de près par la montagne, de l'autre bordée
par une petite plaine aux riches cultures. A Fu-
mel elle rasait le pied du rocher qui porte la
ville ; aussitôt qu'on a franchi la Thèze on pé-
nètre au sein d'une étroite et belle plaine, tandis
que la rive opposée, jusqu'alors basse, se hérisse
en raides parois.
I. Sur Fumel, voyez page 171,
LES CINGLES DU LOT. 28 1
Dans la partie plane, des champs de tabac,
du maïs, des vignes qui prolongent leurs nappes
jusque sur les pentes douces égayées de hameaux
et de bordesj c'est-à-dire de maisons rurales iso-
lées. Quelques châtaigniers dressent leur tronc
puissant, couronné d'une vaste ramnre ; beau-
coup de cultures de primeurs autour des habi-
tations.
Sur la rive gauche, au-dessus de la falaise,
se montrent des substrnctions occupant le fond
d'une grande boucle du Lot. Ruines de la ville
d'Orgueil, dit la carte d'Etat-major qui donne à
cette sorte de plate-forme le plan régulier d'une
bastide exiguë. Les livres que j'ai feuilletés en
route ne disent rien sur cette cité disparue dont
la situation était superbe. Deux villages, Sotu-
rac etTouzac, ont hérité d'Orgueil. Près du pont
qui franchit le Lot est un hameau dont l'église
romane, moderne, est simple et charmante avec
son élégant pignon-campanile. De l'autre côté
du Lot, Touzac se groupe autour d'un clocher
lourdement coiffé d'un dôme. Les eaux du Lot,
transparentes et vertes, plongent du sommet
d'un barrage concave ; la rivière achève de dé-
crire un de ses cingles les plus réguliers autour
de la péninsule de Touzac, petite plaine d'une
fertilité extrême, divisée en champs étroits où
282 VOYAGE EN FRANCE.
croissent les blés, les maïs et les harieols, sépa-
rés par des cordons ou joiialles de vigne.
Plus loin c'est la boucle rythmique dessinée
autour du bourg de Duravel assis dans une si-
tuation charmante, au creux d'un beau cirque
de verdure. Ce fut une ville forte, héritière d'une
cité romaine et dont l'église romane est une des
plus anciennes du Quercy. Un château flanqué
de tours accroît la beauté de ce paysage.
Duravel redevient le centre d'une importante
exploitation de minerai de fer. Jadis traité sur
place, en des hauts fourneaux aujourd'hui dis-
paruSj ce minerai « liydroxydé oolithique » est
maintenant un des éléments de prospérité de
Fumel dont il partage le développement. Depuis
cinq ans la production ne cesse de s'accroître.
En 1897, l'extraction atteignait 6600 tonnes;
en 1901 elle en fournissait 21 774, toutes diri-
gées sur Fumel, sauf 891 tonnes expédiées aux
usines du Saut-du-Tarn, à Saint-Juéry. En outre
on a eu l'idée d'exploiter les scories des an-
ciennes forges, qui traitaient le minerai d'une
façon si barbare que l'on peut de nouveau en-
voyer ces résidus aux hauts fourneaux et en reti-
rer du métal en quantité fort appréciable; Fumel
en a reçu 3 799 tonnes en 1901. Les minières ne
sont pas de grandes exploitations, chaque gise-
LES CINGLES DU LOT. 283
ment est mis en valeur par un bien petit nombre
d'ouvriers puisqu'il y a 42 de ces exploitations
et 123 travailleurs seulement. Ces gîtes sont ré-
partis sur toutes les hauteurs de la rive droite
jusqu'aux abords de Puy-l'Evêque, dont la gare
expédie une grande partie de la production.
A mesure que l'on avance dans la vallée, les
sites deviennent plus grandioses, ce n'est plus
seulement la richesse des cultures qui attire l'at-
tention, mais l'allure des collines, leur élévation,
les villages bien campés sur ces hauteurs, une
fière tour carrée. Plus loin apparaît la bour-
gade de Puy-l'Evêque assise sur l'isthme d'un
grand cingle dont la longueur est de six kilo-
mètres et demi alors que l'intervalle à Puy-l'Evê-
que est de sept cents mètres à peine. C'était
une excellente situation pour une ville forte ;
aussi, de bonne heure, y eut-il des défenses; les
évêques de Cahors, grands seigneurs ecclésias-
tiques, puissants comme des barons , y possé-
daient un château auquel ils donnèrent leur nom.
Il en subsiste encore le donjon carré, appuyé sur
des contreforts. Le tableau est superbe, les mai-
sons grises collées au flanc du roc, le donjon, de
hauts pavillons, des tourelles donnent une appa-
rence guerrière à cette cité désormais humble et
pacifique. Il est peu de paysage citadin plus sai-
284 VOYAGE EN FRANCE.
sissant que celui de la bourgade élarjée, dorée
par le soleil et frôlée par le Lot que franchissent
un pont du chemin de fer et un pont suspendu.
Ce méandre est d'autant plus singulier que la
péninsule tient à peine aux collines, un ruisseau
le coupe comme un fossé et fait mouvoir une
usine qui a pris le nom du contour : le moulin
du Cingle.
C'est maintenant la partie la plus curieuse de
cette rivière aux sinuosités presque géométri-
ques. La route côtoie le Lot en face du grand
cingle de la Gardelle occupé à la pointe par le
village de Pescadoire, c'est-à-dire de \di pêcherie;
elle coupe ensuite une autre boucle en traver-
sant le riche village de Prayssac qui semble sur-
gir des prairies et des cultures et s'étale large-
ment autour d'une église à haute flèche. Sur la
place de ce petit bourg se dresse la statue de Bes-
sières : le futur duc d'Istries naquit à Prayssac.
L'intérieur de ce cingle est couvert de mai-
sons isolées, construites au milieu de cultures
ombragées de noyers; il est étroit et allongé;
son voisin, occupé par la commune d'Anglars,
a une courbure d'une circonférence presque par-
faite, comme tracée au compas. En face d'An-
glars, au débouché du vallon du Vert, Castel-
franc offre le plan des bastides, c'est une
LES CINGLES DU LOT. 285
ancienne cité qui dépendit des évêqiies de Ca-
hors. Elle étale ses ruelles dans le vallon étroit
où le Vert tombe d'un barrage. Sur l'autre rive
du Lot, Anglars n'est pas moins pittoresque,
grâce à son château couronné de mâchicoulis.
Du côté de Castelfranc, ce sont des pentes
raides, revêtues de chênes, en face la plaine
s'élève légèrement, tapissée de vignes que des
plantations nouvelles accroissent.
La vallée, tout à l'heure illuminée par un ar-
dent soleil, s'est soudain obscurcie, de lourds
nuages masquent l'arête du causse, des éclairs
les sillonnent, une pluie diluvienne s'abat. En
quelques minutes tous les plis deviennent des
torrents apportant au Lot des flots troubles, à
peine ai-je eu le temps de me réfugier dans une
maison de Mirandol. Mais l'ouragan s'en va
aussi rapidement qu'il est venu. Pendant que je
poursuis la route tracée au-dessus du chemin de
fer dominant lui-même le Lot, j'ai le merveilleux
spectacle d'un immense arc-en-ciel appuyé sur
les deux rebords de la vallée et dessiné sur le
fond des nuées, d'un noir d'encre, qui portent
maintenant l'averse sur Gahors.
Sous un ciel radieux, par un vivifiant soleil
j'atteins Luzech, petite ville assise sur le plus
rétréci des isthmes du Lot. Il y a juste place
286 VOYAGE EN FRANCE.
pour celte bourgade de sept cents âmes à peine
dans la langue de roc, large de cent quatre-vingts
mètres, que la rivière n'a pu percer; du point où
elle atteint la ville pour revenir sur l'autre face
elle décrit un ovale allongé de cinq kilomètres.
Pour éviter ce long détour aux bateaux, les ingé-
nieurs ont coupé l'obstacle et transformé en île
l'intérieur du cingle; la dérivation partage Lu-
zech en deux parties.
Luzech fut de bonne heure une situation mili-
taire; sur la colline à laquelle se rattache l'isthme
sont des retranchements d'origine gauloise, bien
distincts encore, où quelques archéologues ont
voulu placer la fameuse Uxellodunum que l'on
croit avoir occupé le sommet du puy d'Issolu'.
Ce réduit antique serait l'oppidum de Vlmpernal.
Plus tard une ville se forma sur l'isthme même,
sous la protection d'un château dont le donjon
est encore debout avec des portions de remparts.
La presqu'île et les coteaux qui l'entourent
sont plantés de vignes et ombragés de noyers.
Noix et vins sont désormais les principaux objets
de commerce. Le plus important vignoble est
sur la rive gauche, il entoure Saint-Vincent-rive-
d'Olt, rappelant la forme Oit au lieu de Lot, en
I. Voyez 32^ série du Voyage en France, chapitre IV.
LES CINGLES DU LOT. 287
usage dans la partie supérieure du bassin et qui
semble bien être le nom de la rivière.
En amont, les collines, plus abruptes, portent
d'un côté le causse de Gahors et, vers le nord,
un autre petit causse étrangement criblé de dé-
pressions. Ces parois sont très raides à l'endroit
où elles dominent le cingle de Parnac, sans
végétation sinon de maigres broussailles; les
sentiers qui les gravissent ressemblent par leur
pente et leur tracé à ceux des hautes mon-
tagnes. L'intérieur des cingles contraste par leur
opulence végétale et l'état luxuriant du vignoble
avec ces côtes stériles. Les rangées de ceps tran-
chent sur le sol rougeâtre. Beaucoup de tabac
aussi, la vallée du Lot est un des plus grands
producteurs de France pour cette culture ; le
département vient aussitôt après ses voisins du
Lot-et-Garonne et de la Dordogne pour l'éten-
due occupée, mais les dépasse pour la valeur
des feuilles. Le tabac du Lot est le meilleur de
France ; en 1900 la Régie le payait 106 fr. 54 c.
le quintal, alors que le prix moyen était de
99 fr. 70 c. dans le Lot-et-Garonne et de 80 fr.
dans I9. Dordogne \
I. En 1901 le prix moyen, pour le Lot, était de io6 fr. 3o c.
(Sur la culture du tabac, voyez chapitre 1^^.^
288
VOYAGE EN FRANCE.
La course a été longue depuis Fumel ; je n'ai
pas le courage de l'achever jusqu'à Cahors, tant
l'orage a rendu boueux les chemins; j'ai ter-
miné l'étape en chemin de fer depuis l'arrêt de
Parnac. Le paysage s'aperçoit bien par les
portières du wagon. Voici, en face d'un cin-
gle très brusque et court, Douelle qui groupe
ses maisons blanches autour de l'église; il
occupe une terrasse rocheuse dont le bord porte
un petit château à haut pavillon; un ruisseau
traverse le village, grossi par la pluie, il tombe
en cascatelles. Le chemin de fer franchit le Lot
sur un beau viaduc de brique rouge , court
au sein de vignobles en vue de châteaux cam-
pés sur des croupes ou des arêtes. Au loin,
une falaise du Lot est couronnée par un autre
château, celui de Mercuès, très vaste, bientôt
masqué à la vue et que l'on revoit enfin, fort
beau malgré les traces trop apparentes d'une
restauration. Elle a grand air, cette résidence des
anciens évêques de Gahors, redevenue maison
épiscopale. Le site est un des plus intéressants
de la vallée ; en face de Mercuès, dans un cingle,
le village de Pradines couvre un rocher, les ruines
d'un château ont été occupées par des habita-
tions qui s'y sont comme incrustées. Au-dessus
du chemin de fer de la vallée, la grande ligne
LES CINGLES DU LOT. 289
de Paris court sur de hautes arcades. Tout cela
constitue une de ces « fabriques » chères aux
peintres d'autrefois. Les deux voies ferrées su-
perposées suivent un moment le Lot, puis leurs
rails s'unissent pour aller trouer l'enceinte gallo-
JaCé
romaine de Gahors et pénétrer sous le hall de la
gare.
Gahors n'occupe pas seulement l'isthme d'un
cingle comme les petites villes de sa vallée, elle
remplit une de ces péninsules du Lot et se
trouve ainsi entourée d'eau sur presque toutes
ses faces. La ligne intérieure des quais, d'une
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. 19
290 VOYAGE EN FRANCE.
extrémité à l'autre du rempart antique, a près
de cinq kilomètres, la plupart de nos grandes
villes n'ont pas un tel développement au long
de leur rivière. Le site est comparable à celui de
Besançon, mais les hauteurs qui l'enferment ne
sont pas des montagnes et la cité est infiniment
moins populeuse, il y a i4ooo âmes seulement
dans la commune de Gahors, aussi l'intérieur de
la presqu'île n'est-il pas entièrement rempli par
les habitations, celles-ci se pressent seulement à
l'est où les vieux quartiers sont formés de rues
étroites et sombres. Dans l'autre partie, séparée
de la première par le large boulevard Gambetta,
les habitations s'espacent sur des rues neuves
encore imparfaitement bâties ; même elles ne
vont pas jusqu'au Lot, ces bords de la rivière
restent déserts.
Gahors est une des plus antiques cités des
Gaules, elle en fut aussi une des plus florissantes
et sa prospérité s'est prolongée jusqu'au milieu
du xviii* siècle, époque où son Université fut
supprimée. Déjà elle avait subi un grave désastre
quand elle perdit l'espèce de monopole qu'elle
exerçait pour le commerce des vins dont elle fut
l'entrepôt obligé jusqu'à l'avènement de Henri IV.
Le bon roi lui fit payer cher son attachement à
la Ligue.
LES CINGLES DU LOT. 29 1
Le phylloxéra, en ruinant son riche et célèbre
vignoble de « vins noirs », l'a empêchée de re-
prendre l'importance que semblerait aujourd'hui
lui assurer sa situation à un important croise-
ment de voies ferrées. Cependant elle n'a guère
l'aspect d'une ville déchue ; comme pour la plu-
part des villes du Midi où la population vit vo-
lontiers au dehors il suffît d'un large cours bien
ombragé pour que toute la vie se porte là et
donne l'illusion d'une grande cité.. A Cahors
cette voie maîtresse parcourt entièrement la
ville, passe au front des promenades et des
principaux édifices. C'est le boulevard Gam-
betta, sur lequel se dresse le monument du
grand tribun, fils de Cahors. Pour lui faire place
on a relégué dans les cours de la préfecture les
effigies de deux autres quercinois illustres, qui
méritaient mieux pourtant : Murât et Bessières.
Le contraste est grand de ce boulevard large,
ombreux, vivant et de la vieille ville qu'il borde.
Là sont des ruelles sans lumière, souvent voû-
tées. La rue de l'Université qui conserve le sou-
venir d'una institution glorieuse, florissante pen-
dant plus de quatre siècles, est une suite de
porches obscurs, la rue des Boulevards est une
ruelle sordide ! Si l'on ne répugne pas à s'aven-
turer dans ces corridors puants, on est surpris
292 VOYAGE EN FRANCE.
de découvrir des hôtels d'une architecture par-
fois exquise^ des fenêtres ouvragées comme des
châsses. Voici une porte en bois sculpté, don-
nant accès dans une cour au fond de laquelle se
dresse une tour éclairée par quatre étages de
fenêtres à meneaux.
La plus large de ces artères du vieux Cahors,
bien étroite encore, la rue Nationale, possède
elle aussi d'anciens logis percés de belles fenê-
tres. Les voies qui y aboutissent ont si peu de
largeur que l'on peut atteindre les murs de cha-
que côté en étendant les bras. Ces venelles sont
moins tristes vers le Lot, autour de la char-
mante et vénérable église Saint-Urcisse qu'avoi-
sinent de très vieilles bâtisses de brique et de
torchis.
Au cœur de l'antique cité est la cathédrale,
plus semblable à une forteresse qu'à une église,
mais dont certaines parties, la porte du Nord
surtout, sont de pures merveilles. L'intérieur
produit un effet étrange par la largeur et la nu-
dité de sa nef blanchie à la chaux et recouverte
de vastes coupoles. Le chœur est aussi orné et
peint que la nef est nue.
En montant au point culminant de la ville, on
trouve encore de nombreux édifices publics ou
particuliers révélant un passé de splendeur. Sur
LES CINGLES DU LOT. agS
la place des Petites-Boucheries est une inté-
ressante maison de 1642; une immonde impasse
conduit à l'hôtel Pelegri dont la tour est un
joyau de la Renaissance — navrant d'abandon.
De ce côté, le quai du Lot s'étend au pied d'un
rocher couronné par la tour sévère dite le Palais
du Roi, édifice défiguré pour servir de prison.
Un vieux pont franchit la rivière, on l'appelle le
pont Neuf depuis sa construction au xiv' siècle !
Par son tablier étroit, sa forme en dos d'âne et
ses arches ogivales, il complète ce décor du
moyen âge, accru par l'aspect gothique des mai-
sons.
Au sommet du coteau, où le boulevard abou-
tit d'un côté à la place Thiers, de l'autre à la
place Lafayette, reste debout le palais féodal
construit par le pape Jean XXII, né à Cahors;
seule la tour carrée encore couronnée de cré-
neaux a gardé quelque caractère.
La place Lafayette est au point culminant de
la ville. Un monument élevé aux enfants du Lot
morts pour la patrie en occupe le centre ; il fut
inauguré par un discours de Gambetta qui fit
passer un frémissement dans la foule accourue.
J'étais des auditeurs; aujourd'hui, sur cette es-
planade solitaire où l'on n'entend d'autre bruit
que le son du clairon s'élevant de la caserne voi-
2 94 VOYAGE EN FRANGE.
sine, je retrouve en moi l'impression profonde
laissée par la parole ardente de l'homme en qui
la patrie un moment s'incarna.
Quel contraste entre ces souvenirs et le calme
paysage contemplé de cette terrasse dominant
le Lot, vert et indolent î La rivière coule au pied
de collines raides, aux formes nettes, cassure du
causse; l'ourlet des prairies l'encadre, semé de
maisons blanches. Un château féodal domine un
hameau. Ces coteaux sont blancs et âpres depuis
que le phylloxéra a détruit la vigne qui les recou-
vrait. Sur ce sol, qui est à peine une pellicule
de calcaire décomposé, sous laquelle on trouve
aussitôt la roche vive, on n'a pu replanter encore.
Le vignoble de Cahors renaît seulement dans les
terres profondes. Mais il est loin d'avoir recon-
quis tout l'espace perdu. Jadis il couvrait 24 000
hectares sur les deux rives du Lot, de Duravel
à Gajarc. Qu'en reste-t-il aujourd'hui? Au temps
(le la grande prospérité, la production principale
était celle des vins noirs destinés surtout au cou-
page des vins par le commerce de Bordeaux.
Ces vins jouissaient d'une grande réputation, ils
sont de ceux dont Henri IV parlait volontiers.
Non loin de la place Lafayette, les faubourgs
s'annoncent par un charmant pavillon, ancien
I.ES CINGLES DU LOT. 29;)
corps de garde, appelé la Barbacane. Plus loin
on rencontre le rempart qui fermait la boucle
du Lot et délimitait avec la rivière le vaste espace
occupé par la ville. Ces fortifications, œuvre du
XIV* siècle, ont encore grande mine.
Ce n'est pas le seul édifice militaire du moyen
âge que conserve la capitale du Ouercy; un des
ponts du Lot, dit de Valentré, est un des plus
curieux édifices de ce genre que le moyen âge
nous ait laissés. Avec ses avant-becs, les hautes
portes ouvertes dans les tours qui enjambent le
tablier, et que couronnent des guettes à mâchi-
coulis, le pont est une évocation saisissante du
passé. Il conduit au pied du causse, près du
gouffre d'où jaillit la fontaine abondante de Di-
vonne dont le nom fut longtemps porté par la
cité des Cadurques. La source a perdu sa beauté,
une usine la masque, elle emploie les eaux à
faire mouvoir ses roues.
Cette manufacture est un des très rares éta-
blissements industriels de Cahors, la cité vit
surtout par son rang de chef-lieu de départe-
ment et son rôle de marché pour la vallée du
Lot et le causse. Elle fait l'expédition des fruits
et des primeurs, fabrique des pâtés de foie gras,
centralise une partie de la production en noix et
en truffes de sa région. Tout cela ne détermine
296 VOYAGE EN FRANCE.
pas un grand mouvement d'affaires. La succur-
sale de la Banque de France est au 122* rang
sur 126; des chefs-lieux bien moins peuplés:
Foix, Vesoul, Digne et Privas, viennent avant
Gahors ^
La seule usine considérable est la manufac-
ture nationale où sont transformés les meilleurs
tabacs de France.
[. Montant des opérations en 1902 : 4 578 900 fr.
XIX
LE GAUSSE DE LIMOGNE
En Quercy-Blanc. — Montpezat, INIolières, Gastelnau-Montratier et
Monteux. — Sur le causse de Limogne. — Les phosphates et
les truffes. — Lalbenque. — Bach. — Limogne. — Les marchés
de Concots. — Aspects du causse. — Descente à Cahors.
Gahors. Juillet.
Quand on a traversé le causse, de Saint-An-
tonin ou de Caylus à Caussade, le pays entre
cette ville et Montcuq frappe par sa variété d'as-
pect et de production. Autant le causse était plat
et monotone, autant cette zone du Ouercy-Blanc
est accidentée. Là naissent une foule de ruis-
seaux qui se creusent de longues vallées paral-
lèles entre de belles collines, striées elles-mêmes
d'innombrables ravins et de courts vallons.
Si l'abondance des sources répondait à la multi-
tude des ruisseaux tracés sur les cartes, il n'y
aurait pas en France de pays plus frais et mer-
veilleusement arrosé. Malheureusement, tous
ces suintements réunis au fond d'une vallée par-
298 VOYAGE EN FRANCE.
fois très longue ne font guère qu'un ruisseau in-
digent et languissant.
Mais le sol est fertile ; malgré la rareté des
eaux courantes, il se couvre d'une végétation
vigoureuse. Entre Caussade et Montpezat on
traverse beaucoup de prairies encadrées d'ar-
bres ; les pentes sont couvertes de vignes, de
fèves, de champs d'ails. Le prunier d'ente repa-
raît et forme de beaux vergers. Par l'ouver-
ture des vallons ou du sommet des côtes, sem-
blent surgir les féodales bourgades : ici près de
la route la fière Montalzat ; là-bas Puylaroque
plus hardi encore. Un des massifs les plus ca-
ractéristiques porte la vieille bastide de Mont-
pezat trônant au-dessus de vallons dont le plus
important voit former le ruisseau de Lembous.
Les pentes sont couvertes de champs de fèves et
de vignes, leur vin est réputé dans le Quercy.
Si Montpezat est de bien médiocre étendue,
ses débris de défenses et une belle église du
XIV* siècle renfermant beaucoup de richesses
artistiques la rendent attrayante. H y a notam-
ment de curieuses tapisseries.
La route se tient presque sans cesse sur les
crêtes entre le Lemboul et le Lemboulas, jalon-
nés par les églises de la Salvetat et d'Espanel,
pour aller traverser le bourg de Molières, autre
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 299
bastide, moins hardiment campée, mais com-
mandant encore de beaux horizons. Ces longues
et étroites vallées que Ton domine sont terres
de cultures et de vergers ; vers leur naissance
l'aspect caussenard du pays s'affirme peu à peu.
Les bois de chênes où l'on récolte la truffe sont
de plus en plus nombreux. Causse fertile, celui-
ci, ne rappelant guère les rocailleuses surfaces
du Sauveterre et du Méjean \
Les chênaies sont entourées de cultures de cé-
réales et les habitations sont nombreuses, grises
et tristes sous le grand soleil, malgré les véran-
das et les perrons décelant quelque souci de
confort.
Le chemin de fer s'élève sur le causse par de
grandes courbes, la route monte plus droit,
touchant à la têle d'une partie des vallons qui
viennent se creuser dans ce vaste plateau. Peu
de villages, les chefs-lieux de communes sont
des hameaux d'une dizaine de feux à peine ;
pour trouver des agglomérations de quelques
centaines d'âmes il faut aller loin dans ces vallées.
Là, au-dessus de la Lutte , Castelnau-de-Mon-
tratier est encore pimpante dans les débris de
son corselet de pierre qui couvrait une pointe de
I. 34^ série du Voyage en France.
3 00 VOYAGE EN FRANCE.
colline escarpée, au-dessus de la petite Bargue-
lonne, aux pentes couvertes de pruniers d'ente.
Montcuq n'est pas moins belliqueuse d'aspect;
cette ancienne cité batailleuse a conservé le don-
jon de son château.
Ces petites forteresses contre lesquelles vin-
rent se buter les armées jusqu'à la dernière
grande lutte intérieure, quand Richelieu et
Louis XIII cherchèrent à écraser le protestan-
tisme guerrier, ne sont point du causse. Celui-ci
ne possède aucun centre méritant le nom de
ville. La plus grande agglomération, Lalbenque,
est un bourg très étalé, entre les bois de chênes
mis en exploitation réglée pour la récolte des
truffes. Ces chênaies l'emportent en étendue sur
le sol arable : bien traitées, elles assurent un
revenu supérieur à celui des céréales.
Ces bois ne donnent pas beaucoup de beauté
au paysage. Ils encadrent les champs pierreux
entourant les grises métairies ou bordes. Des
affaissements où s'infiltrent les eaux de pluie,
des cloups où se perdent de courts ruisseaux,
des mares que l'on a baptisées lacs, telle est la
campagne entre Lalbenque et Bach.
Bach, au sein d'une vaste clairière, plateau
percé de cloups, fut le grand marché de truffes
du Lot avant que la plantation de chênes truf-
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 3oi
fiers autour de Martel eût donné la prépondé-
rance à cette ville. Aujourd'hui encore, on ré-
colte en quantité ce succulent cryptogame dans
toutes les communes des cantons de Limogne
et de Lalbenque.
Le pays avait une autre source de fortune :
les phosphates, signalés sur tant de points et en
telle abondance apparente que l'on put croire
les dépôts inépuisables ^ Ce précieux minéral
remplit des poches à la surface même du causse
où leur recherche a développé chez les carriers
un flair tout particulier. Les gisements sont le
plus souvent décelés par un affaissement du sol,
mais parfois on les devine à des indices dont la
constatation rappelle la fameuse perspicacité
des Apaches. La terre remuée par les taupes,
la fouille des chiens et des truies à la découverte
des truffes révèlent la richesse cachée sous le
gazon.
La découverte des phosphates du Quercy re-
monte à i865, elle est due à M. Poumarède,
mais l'exploitation ne s'est développée que de
I. Le phosphate de chaux a été reconnu dans le Lot à Arcam-
bal (traces), Bach, Beaiu-egard, Bouziès, Cabrerets (traces). Con-
çois, Crégols, Escanips, Esclauzels, Gréalous, Larnagol, Limogne,
Lugagnac, Marcilhac-sur-Célé, Puyjourdes, Saillac, Saint-Cirq-la-
Popie (traces), Saint-Jean-de-Laur, Saint-Martin-Labouval, Va-
raire et Vaylats.
302 VOYAGE EN FRANCE.
nos jours. Cette matière se présentait sous forme
de concrétions. « Souvent, dit M. Risler, le phos-
phate a une structure rubanée qui rappelle la
calcédoine, quelquefois la marne est composée
de boules arrondies ou de morceaux cylindri-
ques qui se séparent facilement en couches con-
centriques. Sa cassure fraîche a Téclat de la
porcelaine ou de Tivoire. La couleur est blanche,
jaune-rougeàtre ou brune, quelquefois bleuâtre
ou noire. »
Parfois, au milieu des matières associées au
phosphate, on trouvait des ossements de mam-
mifères, si nombreux que l'on a doiné à ces
couches le nom de nougat d'os. Mais cela est un
souvenir, tous les gîtes connus sont épuisés, sauf
c:ux de Larnagol et de Cajarc.
La route de Montauban à Figeac parcourt
cette curieuse et morose région où l'homme
parut de bonne heure, à en juger par le nombre
considérable de dolmens et de tombelles qui
parsèment le causse. Elle traverse les maisons
très éparpillées de Varaire et, s'élevant sans
cesse, atteint le bourg de Limogne, qui a donné
son nom au plateau. Cet important carrefour de
routes aurait fait naître un centre plus vivant si
le causse n'avait été aussi peu peuplé. Mais
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 3o3
l'espace est mesuré aux cultures, parmi toutes
ces chênaies et ces cloups sans nombre qui per-
forent le causse. La récolte des truffes, si elle
répand le bien-être, nécessite de grands terrains
et ne demande pas de très nombreux travail-
leurs. Pendant l'hiver, depuis la dernière se-
maine de novembre jusqu'en mars, il y a beau-
coup d'activité pour ce commerce spécial, les
foires et les marchés voient accourir les négo-
ciants en truffes.
Il y a d'ailleurs une tendance marquée au
progrès, l'élevage du mouton, jadis empirique,
a beaucoup été modifié. Suivant l'exemple des
éleveurs du causse de Gramat% les propriétaires
et les fermiers procèdent à une sélection atten-
tive de leurs troupeaux. Des reproducteurs tirés
de la contrée de Gramat ont amené un sang
nouveau, les bêtes se prêtent mieux à l'engrais-
sement, donnent une laine plus abondante et
iine. Une grande part de ce changement est due
au comice agricole de Concots qui, sous le nom
de Comice des bas plateaux du Quercy, encou-
rage l'élevage par de nombreux prix annuels ^
« L'émulation est féconde, dit un rapport au con-
seil général. Grâce à des encouragements, il y a
I 32^ série du Voyaffe en France, chapitre V.
So/j. VOYAGE EN FRANCE.
des progrès sensibles. L'élan est donné, il suffit
de l'entretenir et de le généraliser. »
Goncots, où se tiennent ces fêtes agricoles, est
un bourg sur la route de Gahors, dans une
clairière au milieu de grandes truffières, à une
croisée de chemins; au centre, une vieille tour a
été transformée en beffroi. C'est un lieu de ren-
dez-vous pour les habitants des hameaux et des
métairies épars entre les bois. Ses marchés sont
peut-être plus considérables encore que ceux
de Limogne, les truffes y abondent ; les fabri-
cants de conserves s'y alimentent en gibier et en
volailles. Les bergeries y envoient ces exquis
fromages de brebis dont le causse est fier. Enfin
ses gisements de phosphate alimentent la gare
de Saint-Martin-Labouval, par laquelle se fait la
plus grande part du trafic du causse de Limogne.
Celui-ci est particulièrement sévère entre
Concots et Lalbenque, où les villages gris sont
entourés de bois et de champs sans fraîcheur,
car l'eau vive manque sur cette table de pierre
et les imperceptibles mares baptisées lacs n'ont
même pas l'étendue des pauvres « lavognes »
des causses de Sauv.eterre et du Larzac ^
I. Sur le causse de Sauveterre, voyez la 34*^ série du Voyage
en France; sur le Larzac la 35^ série.
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 3o5
Pourtant cela est riche et riant, comparé aux
solitudes des autres causses ! Les centres d'ha-
bitation, si clairsemés, ont eu quelque impor-
tance ; ainsi Escamps, encore dominé par la tour
d'un château féodal.
On ne se borne pas à récolter les truffes dans
les chênaies naturelles, partout on plante de
nouveaux bois^, très vigoureux, bien alignés,
contrastant avec les arbres élagués semblables
à des mâts contre lesquels on aurait planté du
feuillage. En dehors de ces reboisements, le
causse est d'une belle aridité; il est certaines
pentes où, sauf une nappe de graminée rougeâ-
tre, rien ne croît ; quand on la voit horizonta-
ement, cette plante légère donne l'illusion d'une
mousse rose et moirée. Les talus des chemins,
ceux plus accentués du chemin de fer, montrent
le sous-sol de roche blanche à peine recouvert
d'une pellicule de terre. Mais les creux sont
mieux partagés, il y a une couche assez épaisse
pour permettre des plantations. Le revenu assuré
du chêne devrait être un aiguillon pour les pro-
priétaires. Etant donnés les bénéfices amenés
par la truffe, les parties restées découvertes
I. J'ai longuement parlé de la trufficulture dans la So^ série du
Voyage en France, chapitre XVIII, je me borne donc à signaler
ici les particularités propres aux causses du Lot.
VOYAGE E>- FRANCE. XXXI. 20
3o6 VOYAGE EN FRANCE.
sur le causse semblent le produit d'une aber-
ration.
A Gieurac se creuse un vallon sec très pro-
fond, descendant au Lot vers Arcambal; près du
hameau de Cayran, aux maisons de pierre grise,
un autre ravin descend à Cahors. De là, par
l'ouverture du val d'Arcambal, on découvre la
grande vallée profonde et le plateau qui con-
tinue le causse de Gramat.
La route et la voie ferrée vont droit à Cahors,
grand rendez-vous de la contrée. Au pli où elles
descendent aboutissent de nombreux ravins
sans eau, prenant très souvent naissance dans
un cirque régulier. La roche semble plus stérile
que jamais; pourtant, grâce au voisinage de la
ville, on a tiré parti de tous les coins où il y a
un peu de terre ; la vigne qui avait disparu se
montre de nouveau ; mais il y a bien de ces an-
ciens vignobles envahis par la nappe odorante
de la lavande et que Ton reconnaît seulement
par les murs écroulés des clôtures et des ter-
rasses. Les fonds de ravins ont parfois la pau-
vre verdure des chênes étêtés.
Ce paysage est surtout caractéristique à l'en-
droit où aboutissent les chemins de l'Hospitalet
et de Labastide-Marnhac. L'aridité y est extrême
et le nom de Sept-Ponts donné à une halte de
LE CAUSSE DE LIMOGNE. SO']
la voie ferrée semblerait une ironie si Ton ne
voyait les ravines nombreuses franchies par la
route. De hautes croupes calcaires réverbèrent
implacablement les rayons du soleil ; à peine
quelques chênes rabougris se dressant au-dessus
des touffes de lavande. Le fond du val montre
comme lit de torrent une dalle blanche, polie
par les eaux d'averses. Cette partie du plateau
de Limogne porte dans le langage du pays le
nom de causse de Gahors.
A mesure que l'on approche de la ville, la
végétation se montre ; le fond du vallon a été
enrichi par les terres qu'amenèrent les pluies
d'orages, un beau plan de culture s'étend de
chaque côté du thalweg. Des pans de vigne
jeune et vigoureuse font présager une prochaine
reconquête par les cépages de Cahors. Ces plan-
tations sont égayées par les petites maisonnettes
semblables aux mazets de Nîmes, où les bour-
geois cadurciens viennent passer leur dimanche.
Soudain la ville apparaît, très pittoresque par
la masse de ses toits rouges d'où surgit sa lourde
cathédrale au dôme d'ardoise ; les tours, les
ruines, puis le pont de Valentré d'un si saisis-
sant effet, constituent un superbe décor.
XX
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY
Le Lot de Cahors à Capdenac. — Arcambal. — Le vallon du Vers
et l'oppidum de MOTsens. — La font Polémie. — • Saint-Géry. —
Saint-Cirq-Lapopie. — Les phosphates de Larnagol. — Cajarc.
— Gouffres de l'Oule et de Lantouy. — Rouergue et Ouercy.
— En vue de Capdenac.
Capdenac. Juillet.
Les chemins de fer sont une belle chose, infi-
niment précieuse, mais ils ont tué ce qui eut
été un des charmes du pays de France : la navi-
(jation à vapeur sur les grandes rivières. On
n'éprouve nulle part autant de regret que dans
ces longues et belles vallées du bassin girondin :
Dordogne, Lot, Tarn, où la visite du pays sur
une embarcation un peu rapide serait la plus
merveilleuse des excursions. Mais il faut être
millionnaire, c'est-à-dire avoir un yacht à soi, pour
se donner ce plaisir, à moins de faire comme
ces deux Anglais, mes voisins de chambre au
buffet de Capdenac, qui remontent le Lot sur un
bateau de toile démontable, et se proposent de
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. SOQ
visiter ainsi tous ceux de nos cours d'eau capa-
bles de recevoir leur frêle esquif.
De telles joies me sont interdites. Tout au plus
puis-je flâner un peu, quittant parfois le train
pour faire à pied une partie du chemin, et mon-
ter de nouveau en wagon quand la fatigue se
fait éprouver. Quant à faire le trajet sur un des
chalands qui naviguent sur le Lot, ce serait
folie. Ils sont peu nombreux et mettent bien des
jours à se haler de bief en bief !
La belle rivière est plus abandonnée encore,
depuis que les rails sont continus des abords du
bassin houiller de Decazeville à l'embouchure
du Lot dans la Garonne, sur 262 des 297 kilo-
mètres classés comme navigables. Pourtant le
mouvement n'a pas complètement cessé, même
on constate avec quelque surprise une augmen-
tation de tonnage. En 1900 il avait circulé
I 638 bateaux sur l'ensemble de la rivière, avec
un chargement de 4^ 5o6 tonnes; en 1901 il n'y
en eut que i 5o5, mais portant 54 679 tonnes.
Cet accroissement de i3 p. 100 est dû au trans-
port des houilles dans le cours supérieur, entre
Bouquiès et Larroque-Bouilhac, et à celui des
bois. Ces marchandises, les minerais de fer et
les denrées agricoles sont les principaux élé-
ments de trafic.
3 10 VOYAGE EN FRANCE.
Mais entre Cahors et Capdenac, pendant
quinze lieues, je n'ai pas rencontré un bateau et
n'en ai pas vu un seul amarré aux quais de
Cahors.
Le Lot, cependant, semblait réservé à plus
d'avenir, c'est une des rivières dont la direction
et l'abondance relative faisaient une des artères
vitales du réseau. Aussi des plans extraordi-
naires furent-ils élaborés pour réunir le Lot à la
Dordogne. On devait remonter l'Alzou, « établir
le point de partage à l'hôpital Beaulieu près de
Rocamadour, traverser le Celé sur un pont de
100 mètres de hauteur et de i ooo mètres de
longueur, et ensuite, par une galerie souterraine
d'environ 5o ooo mètres (sic), atteindre le Lot à
Capdenac ». 11 faut sans doute lire 5 ooo mètres
pour ce tunnel ; même réduit à ces proportions,
le projet ainsi décrit par Abel Hugo n'en est pas
moins extravagant. Où aurait-on pris l'eau pour
alimenter le canal sur ce causse de Gramat cri-
blé comme une gigantesque écumoire par les
cloups, gouffres sans nombre !
Si je signale cette conception étrange c'est
pour montrer combien on connaissait peu cette
région il y a soixante ans. Le nom même de
causse n'est pas encore signalé, on se bornait à
dire « de vastes plateaux calcaires » .
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 3ll
Après avoir franchi le Lot, la ligne de Cap-
denac commence à suivre la rivière dont elle
épousera fidèlement les contours. Voici le pitto-
resque tableau de Gahors étage au bord de la
rivière, avec ses ponts et ses ruines, ensuite le
curieux paysage de couloirs entre les causses,
où la végétation est d'autant plus opulente que
les tables supérieures sont plus arides ; au pied
d'une de ces falaises est le château de Larroque,
encore féodal d'aspect, et le village assis à l'en-
trée d'un vallon, en face de roches couronnées
par des ruines et une chapelle. Plus loin, dans
un bassin dont la fraîcheur fait mieux ressortir
la teinte grise des roches, La Madeleine égrène
ses maisons couvertes de toits d'un rouge très
sombre. A l'écart de ce village de teinte fanée,
un hameau tout blanc entoure l'église, toute
blanche.
Le Lot, grâce aux barrages accolés d'écluses
dont les portes s'ouvrent rarement, montre un
flot très ample. Les eaux d'un vert profond que
les pluies transformeront en coulée d'ocre, étin-
cellent entre des cultures luxuriantes où le blé
et le tabac tiennent la plus grande place.
A l'issue du vallon sec descendu de Cieurac,
au débouché de la route de Limogne, le village
d'Arcambal possède un château, curieux assem-
3 12 VOYAGE EN FRANCE.
blage de grandes bâtisses et de tours, portées
sur une terrasse tapissée de lierre. Au-dessus,
le causse offre quelques-uns de ces igues ou
abîmes, au fond desquels on a trouvé des grottes
et de petits lacs. Sur l'autre rive du Lot, à Sa-
vanac, une grande construction grise conservant
des traces d'ogive fut une église.
La vallée se resserre, souvent les parois de
rochers viennent plonger dans l'eau verte ; ces
roches se dressent de plus en plus hautes, leurs
escarpements sont superbes de forme et de cou-
leur. Les chênes verts les enveloppent parfois
de leur ramure arrondie. Au Cazoul, ces falaises
hautes et blanches constituent un décor tou-
jours changeant, qui devient grandiose près de
Biars, dont la jolie chapelle romane a été trop
restaurée. Un rocher qui oblige le Lot à dé-
crire un cingle est surmonté d'une immense
croix.
Dans un vallon profond, sous des roches trans-
formées jadis en habitation par des murs mon-
tant jusqu'au toit de l'encorbellement, est le vil-
lage de Vers; calciné par le soleil, ses toits roux
enveloppés de végétation^ il se blottit autour de
son église de briques et de pierre blanche coif-
fée d'une flèche d'ardoise.
Le roc offre des traces du travail humain, des
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. 3l3
tranchées le sillonnent, là passaient les eaux de
la font Polémie que les Romains amenèrent à
Gahors pour alimenter la cité. Cette puissante
source se déverse aujourd'hui en entier dans la
petite rivière du Vers qui se creuse un sillon ré-
gulier et profond au sein du causse de Gramat.
Les falaises sont très belles dans cette gorge
et furent de bonne heure mises à profit comme
fortification naturelle, la route qui remonte la
petite rivière offre sans cesse de beaux tableaux
dont le plus célèbre est formé par la citadelle
naturelle de Mursens (ou Murcens) que les Gau-
lois renforcèrent à l'aide d'une muraille de plus
de six kilomètres de développement. Les traces
de cette enceinte sont très apparentes encore,
aux yeux des archéologues du moins, car le sim-
ple touriste ne les devine guère. Malgré toutes
les recherches on n'a pu identifier cet oppidum ;
en désespoir de cause, quelques savants ont
voulu y voir Uxellodunum. Le plateau est sup-
porté par de vertigineux à~pic dont l'un montre
à mi-hauteur une cavité appelée le roc de Gorp
ou d'Aucor. Les légendes les plus singulières
circulaient sur cette fente inaccessible dans la-
quelle on voit cependant une traverse de bois
qui servit d'appui à un toit. Les habitants y si-
gnalaient une statue de guerrier gardant un
3l4 VOYAGE EN FRANCE.
antre où était un veau d'or. M. Martel y est par-
venu à l'aide d'échelles de corde et a reconnu
que cet ancien abri n'avait rien de terrible ou
de mystérieux; il se termine par une sorte de
cheminée qui pourrait bien aboutir à quelque
igue aujourd'hui fermée du plateau de Mursens.
En amont de ce site antique, le Vers coule,
plus profondément encaissé encore, au sein du
plateau ondulé, très découpé, qui constitue le
canton de Lauzès et où de belles cultures, no-
tamment du tabac, se montrent entre des rochers
souvent admirables de forme. Même dans les par-
ties les plus arides en apparence on peut arriver
à créer des terres d'un bon rapport. L'énergie
du travailleur produit des merveilles. En 1894
le jury du concours régional signalait un pro-
priétaire, M. Paillet, qui avait transformé en
beau domaine de cultures et de vignes un pan
de causse de 20 hectares. Ces landes rocheuses
étaient auparavant incapables de faire vivre une
famille ; mais tous dans la ferme se sont mis à
l'œuvre, les cinq filles de M. Paillet travaillent
comme des hommes, « exécutant avec habileté
tous les travaux agricoles sans exception ». La
commission faisait rappel d'un prix accordé à
M. Paillet dix années auparavant et accordait
une médaille de bronze et cinquante francs à
LE LOT ENTRE ROLIERGUE ET QUERCY. 3l5
chacune de ses cinq filles « pour s'être si in-
telligemment livrées à ce travail des champs,
source première de la fortune et de la moralité
publique ». Le rapport disait à ce sujet : « Le
cultivateur est toujours riche, qui a beaucoup
d'enfants le dispensant de l'emploi des bras
mercenaires. »
Malgré ses roches, le causse est peuplé autour
de Lauzès ; il y a de nombreuses maisons dans
cette partie accidentée de l'immense table de
pierre. Pour le retrouver dans toute sa solitude
il faut aller de Lauzès à Saint-Géry, par les
pistes rocailleuses qui mènent au bord du grand
escarpement percé de grottes aux ouvertures
circulaires, sous lequel se blottit un petit bourg
doté d'une gracieuse église romane moderne.
Saint-Géry est le chef-lieu d'un canton partagé
entre les causses de Gramat et de Limogne. Sur
ce dernier, autour d'Esclauzels, il possède de
beaux bois de chênes truffiers confinant à ceux
de Concots.
Le site a non seulement de la grandeur, mais
de la grâce. En face de Saint-Géry, le hameau
de Pasturac étage ses maisons au pied de fa-
laises blanches ; son église dépasse la cime des
grands peupliers d'Italie formant rideau au bord
de la rivière. Les grandes parois, rouges du côté
3l6 VOYAGE EN FRANGE.
Opposé au soleil, blanches sur Tautre rive, l'in-
tense verdure du fond, les eaux écumant sur
un barrage, les hameaux blottis autour de leur
église constituent un tableau d'une réelle splen-
deur. Et le décor se continue, toujours chan-
geant ; les immenses rochers blancs suivent
harmonieusement les courbes du Lot dans lequel
ils baignent le pied. Parfois ils font place à des
pentes revêtues de taillis ou, comme aux Mas-
suries, à de petits bassins cultivés ou tapissés
de vignes. Plus loin les parois du causse se rap-
prochent, la route a dû les trouer en tunnel
dans un site égayé par un manteau de chênes
verts.
Dans un pli du Lot, Bouziès possède de hauts
pigeonniers carrés qui lui donnent l'aspect d'une
vieille cité forte chargée de garder cette gorge
où route, chemin de fer, chemin de halage ont
dû être frayés par des encorbellements ou des
tunnels. Là aboutit le Celé, délimitant avec le
Lot une péninsule étroite et longue que défen-
dait jadis le château fort de Gonduché, bâtisse
d'aspect sinistre, percée de fenêtres à meneaux.
Le Gelé, moins large que le Lot, est abondant
et clair. Son flot serait plus considérable encore
si une partie n'avait été bue plus haut par des
fissures de son lit qui se prolongent jusqu'au
•^.T^
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. Ô I ^
Lot, OÙ les eaux perdues reparaissent en sour
ces de fond.
De chaque côté, le causse est revêtu de tail-
lis de chênes qui fournissent en quantité des
écorces pour la tannerie, chênes verts et chênes
à feuillage caduc sont également utilisés.
3l8 VOYAGE EN FRANCE.
Un détour amène au plus grandiose des
paysages de la vallée, le rocher qui porte le
bourg de Saint-Girq-Lapopie. Ici l'homme a
complété l'œuvre de la nature. Au sommet des
rochers puissamment colorés, Tample vaisseau
de l'église, dont le clocher carré est flanqué
d'une tourelle, semble flotter dans les airs; tout
autour, de vieilles maisons bordent l'abîme, des
ruines de forteresse complètent la splendeur du
site. Par sa beauté altière, l'antique ville forte
garde encore son prestige, mais elle renferme
à peine la population d'un village ; la culture de
la vigne et les travaux de boissellerie sont les
pacifiques occupations des habitants.
Au pied de Saint-Girq, le Lot borde une pe-
tite plaine très verte. Plus loin, à l'entrée d'un
vallon, Crégols mire dans la rivière une jolie
église et un vieux château.
Le rythme est régulier de ces étroits et de ces
bassins d'une luxuriante végétation. Dans l'un
d'eux est Saint-Martin-Labouval dont la gare est
le lien entre Concots et Limogne et le reste du
pays. Là viennent s'embarquer les phosphates
des (( causses du Quercy », comme l'annonce au
passant la grande inscription peinte sur un en-
trepôt. D'autres dépôts de ces engrais naturels
sont à Cénevières, encore un beau site. Le rocher
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. SlQ
projeté en encorbellement est couvert par un
grand château dont les parties anciennes remon-
tent, dit-on, à Waïfre, duc d'Aquitaine; encore
habité aujourd'hui, il conserve de belles tapisse-
ries. Un ruisseau né d'une grande fontaine dans
la paroi du causse y fait mouvoir les roues d'un
moulin à phosphate.
C'est ici la région la plus riche à ce point de
vue, la seule du Lot où l'on continue l'extraction.
Larnagol, à la courbure d'un cingle, possède les
gisements les plus considérables de phospho-
rite; une des carrières en contenait, dit-on, plus
de 3o 000 mètres cubes ^
Larnagol, à la racine du cingle, et Calvignac
ont des rochers rouges à pic, couronnés de
maisons d'un grand effet; vu de loin, ce passage
dans lequel le Lot déplie harmonieusement ses
méandres est d'un effet fantastique. Ces parois
abruptes s'entr'ouvrent en vallons très riches
qui alimentent en fruits, en truffes, en primeurs
une partie du marché de Paris.
Pour échapper à cette prison de roches, le
chemin de fer franchit le Lot, troue les pénin-
I. En 1 901, on a extrait du phosphate au lieu dit Druilles, près
de Larnagol, et aux Prajous, près de Gajarc. La production des
carrières a été de 7000 tonnes. En 1886, le Lot avait produit
26 000 tonnes, valant 847 800 fr.
320 VOYAGE EN FRANCE.
suies par des tunnels, coupe la base des col-
lines en mettant à jour des cavernes jusqu'alors
ignorées. La route a préféré se tenir sur le flanc
de ce soutènement du causse, elle domine de
haut la rivière et souvent n'a pu s'asseoir qu'à
l'aide de murs cyclopéens.
Ce passage est une belle entrée pour la petite
ville de Cajarc, assise au bord du Lot, dans un
grand hémicycle de verdure et de roches, en face
du village de Salvagnac, première commune de
l'Aveyron sur la rive gauche de la rivière. Cajarc
est singulièrement disposée. Elle a pour noyau
une vieille église au clocher d'ardoises percé de
mansardes, entourée d'une rangée circulaire de
maisons entre lesquelles s'insinuent d'étroites et
sombres ruelles ; mais les fossés et les remparts
sont tombés, un large boulevard bien ombragé
les a remplacés, des constructions plus amples
bordent le côté extérieur à la ville primitive.
Cajarc est un petit centre commerçant possé-
dant des entrepôts de phosphates. Il est connu
des géologues par quelques curiosités naturel-
les. Sur son territoire, au pied de cette partie
du- causse d'entre Lot et Celé à laquelle elle
donna son nom, jaillit une abondante fontaine
tombant en cascade et dont les eaux sont tel-
lement chargées de calcaire qu'un énorme amas
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERGY. 321
de tuf s'est formé sous la chute. Plus curieux
-^^Uiat I t/i
encore, plus célèbres aussi sont les gouffres de
rOule et de Lantouy.
VOYAGE EN FRA>-CE. XXXI.
21
32 2 VOYAGE EN FRANCE.
Ce dernier dorme toute Tannée naissance à
une source, tandis que l'abîme circulaire de
TOule ne déverse de l'eau qu'après les longues
pluies; alors le ruisseau va rejoindre l'autre
bassin. Le Lantouy est un entonnoir plein d'une
eau d'un bleu laiteux, ouvert dans un ravin pro-
fond du causse de Limogne formant limite entre
les départements de l'Aveyron et du Lot; son
courant rejoint la grande rivière à un kilomètre
plus loin. Longtemps ce gouffre passa pour in-
sondable, les habitants prétendant que l'on
n'avait jamais pu trouver le fond. Gomme tou-
jours, il a fallu renoncer à la légende : M. Martel
et ses ardents collaborateurs, bravant la menace
d'être entraînés par un tourbillon, se lancèrent
à l'aide d'un canot Berthon sur ce lac lilliputien,
large de lo mètres et long de i5. On reconnut
alors une profondeur maxima de 8 mètres et l'on
distingua nettement un fond de sable, vase, gra-
vier et herbes aquatiques !
Au-dessus du gouffre sont les ruines d'un an-
cien monastère, renversé, dit la légende, pour
punir les nonnes de .s'être livrées à un accès
d'anthropophagie sur un jeune enfant. Depuis
lors, chaque année, le jour de la Saint-Jean, on
entend les cloches du couvent maudit retentir
au fond de l'abîme. Un prêtre du diocèse.
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 32.3
M. l'abbé Gary, a raconté Taventure dans une
poésie patoise :
Per Sen Jan, qiion méjonet sono,
Dempei, d'un aire triste et lont,
D'elcouben l'on aou lo compono,
Per Sen Jan, quon méjonet sono,
01 foun ploiira coumo un efon.
A la Saint-Jean quand minuit sonne, — Depuis d'un
air triste et lent, — On entend la cloche du couvent, —
A la Saint-Jean, quand minuit sonne, — Au fond pleurer
comme un enfant.
Cajarc est à la marge du Rouergue ; si son
causse est une dépendance de celui de Grainat,
les rochers en face font partie du causse de Li-
mogne, sous le nom de causse de Villefranche.
Désormais, jusqu'à Capdenac le Lot sépare les
deux départements comme il séparait les deux
provinces ; le ruisseau de Lantouy forme une
autre limite. Salvagnac est le premier promon-
toire de ce causse; son château à mâchicoulis et
son église semblent surveiller l'ancienne fron-
tière.
Des deux côtés, surtout vers Gadrieu, les ro-
chers sont immenses. A Saujac ils obligent la ri-
vière à un grand détour, à Montbrun ils Jui font
décrire un cingle élégant maîtrisé par les belles
ruines d'un donjon et de remparts sous lesquelles
324 VOYAGE EN FRANCE.
les maisons du village semblent collées à la
paroi calcaire. On se demande comment les ha-
bitants peuvent rejoindre leurs demeures bâties
à pic sur des strates successives disposées en
encorbellement. L'église paraît juchée au som-
met d'un escalier dont les marches seraient
alternativement des maisons et des rochers cou-
verts de figuiers. La route ne parvient à traver-
ser le défilé qu'en se frayant passage par des
tunnels, comme Ta fait le chemin de fer.
En Rouergue, sur un rocher verdoyant se
dresse la belle masse du château de Campoulan,
entourée d'une galerie à mâchicoulis. Un autre
château de moins fier aspect précède Ambeyrac,
gracieusement assis à l'entrée d'un val dominé
au fond par l'église de Montsalès. Ce rivage
offre beaucoup de grandeur : un petit plateau, le
causse de Laroque, se termine sur le Lot par de
hautes et vertes parois sous lesquelles se blottit
l'église de Laroque, semblable à une forteresse.
Les édifices et les ruines se suivent. En Ouercy
<c'est le château délabré de Saint-Pierre ; en
Rouergue, les ruines de Balaguier et des maisons
de teinte fauve couronnent un rocher tapissé de
verdure.
Au delà, si le paysage est toujours saisissant
par les formes et la couleur, il n'a plus autant
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 325
de hardiesse. Les pentes sont plus douces et plus
vertes, la roche rouge est enveloppée de cultures
et de bois. Les villages eux-mêmes n'ofïrent pas
l'aspect grisâtre qu'ils avaient plus bas ; ils se
juchent à mi-côte, sur des ressauts. Au fond du
val sont de beaux massifs de noyers et de châtai-
gniers; près des crêtes les vignobles se touchent.
Une grande route venant de Figeac franchit
le Lot au hameau de la Madeleine et, par de
grandes sinuosités, va s'élever sur le causse de
Villefranche. Elle dut être animée jadis, mais
aujourd'hui le chemin de fer a bien restreint son
utilité, car il y a ici un des principaux nœuds de
voies ferrées du Midi, au pied du formidable ro-
cher de Capdenac portant une vieille cité à demi
ruinée, sous laquelle est née la jeune et vivante
bourgade de Gapdenac-Gare \
I. Sur Capdenac et la région du Quercy, entre le Lot et la
Dordofjne, voyez la 32« série du Voyage en France.
INDEX ALPHABÉTIQUE
DBS KOÏS DE LIEUI ET DES PRINCIPALES CULTBRES ET INDUSTRIES
Pour f.ciliter les recherches, les noms des départements sont dési-
gnés pair des lettres majuscules, les chapitres concernant un dépar-
tement sont indiqués par des chiffres romains.
Les noms de provinces, petits pays de l'ancienne France, régions
naturelles et colonies sont en caractères gras.
Les chiffres gras indiquent les parties du volume plus spécialement
consacrées à la description des sites ou des centres d'habitation.
Les industries et les cultures sont désignées par des lettres italiques.
Toutes les autres indications, noms de lieux, de montagnes, de pays
étrangers, sont en caractères ordinaires.
Pour les départements, se référer au nom de chacun, à sa place
al]»hahélique.
Adour (fleuve), 36, loi.
Agenais (chap. I, II, IX à
XII), 84, S6, 207, 208, 260,
280.
Agen (Lot-et-Garonne), 2, 85,
107, i32, 178, 180 à 187,
192, 194, 219, 287.
Agout (rivière), 282, 235.
Aignan (Gers), 102, iio.
Aiguillon (Lot-et-Garonne), 10,
i29, 189, 190.
Alaric (canal d'}, 101.
Albefeuillc (Tarn-et-Garonne),
214.
Alliertas (Tarn - et - Garonne),
275.
Albi (Tarn), 227.
Albias (Tarn-et-Garonne), 347.
Albigeois, 170, 226, 265,269-
Albret (pays d'), 5, 37 à 83.
Algérie, 68, 71, 72, 74, 81,
269.
Allemagne (empire d'), 72, i55,
202, 206.
AlJemance (rivière), 170, 171,
172, 178, 174.
AUemans (Lot-et-Garonne), 28.
Allons (Lot-et-Garonne), 46.
Alzau (rivière), 3 10.
Amandier (^culture de /'), 149.
Ambeyrac (Aveyron), 824.
Amérique, 72, i54.
Amérique centrale, 255.
Andiran (Lot-et-Garonne), 77.
Anglars (Lot), 284, 285.
Angleterre (royaume), 72, 202.
328
INDEX ALPHABETIQUE.
Angoulème (Charente), 98.
Arcambal (Lot), 3oi, 3o6, 3ii.
Argenton (ruisseau), 36.
Arles (Bouches - du - Rhône),
201.
Armagnac, S.-?, 54, 84 à 86,
89, 93, 102, io4, 112, ii3,
116.
Armagnac (Bas-), 107, 109.
Armagnac (Haut-), 107, 110.
Arrats (rivière), 99, 21 5.
Armagnac (voir Eaux-de-vie).
Arros (rivière), loi.
Asperges {culture d'), i48.
AstafTort (Lot-et-Garonne),
88.
Auch (Gers), 48, 85, 88, 92,
100, io3, 107, m.
AUDE (département de 1'), 228.
Audubert (Tarn- et- Garonne),
275.
Auloue (rivière), 128.
Auradou (Lot - et - Garonne),
178.
Auroue (rivière), 95.
Aurrenque (Gers), g5.
Autriche-Hongrie, i55.
Auvignon (rivière), 86.
Auvillar (Tarn -et- Garonne),
198, 2l5.
Auzoue ou Lauzoue (rivière),
76, m, ii5, 117.
Ayancé (rivière), 9, 35 à t[X.
AYEYRON (département de 1'),
322 à 325,
Aveyron (rivière), 207, 208,
219, 226, 281, 282, 284, 287,
246,247,248,259,261,264
à 278.
j Avignon (Vaucluse), 186.
Ayroux (ruisseau d*), 21 5.
Azine (ruisseau), 210.
Bach (Lot), 3oo, 3oi.
Baise (rivière), 5i, 52, 61,64,
67, 76, 84, 85, 99, ii3, 118
à 126.
Balaguier (Aveyron), 325.
Balais de sorgho, 4, i85, 223
à 225.
Banque de France, 186, 288,
284, 296.
Barbaste (Lot-et-Garonne), 54,
55, 57 à 59, 78.
Bargelonne (rivière), 197, 198,
206.
Bas-Armagnac (vogez Arma-
gnac [Bas-]).
Bas-Quercy, 197 à 206, 260.
Banville ( Lot - et - Garonne ),
179-
Bavière (royaume de), 257.
Bay (rivière), 265.
Bazas (Gironde), 5.
Beaucaire (Gers), 128.
Beaumont-de-Lomagne (Tarn-
et- Garonne), 85, 216 à
219.
Beaupuy (Lot-et-Garonne), 8.
Beauregard (Lot), 3oi.
Bedfordshire (comté d'Angk-
terre), 256.
Belgique, i54, 25i, a52, 257.
Bergerac (Dordogne), 27.
Berri, 226.
Besançon (Doubs), 290.
INDEX ALPHABETIQUE.
329
Biars(Lot), Si-î.
Bièvre (rivière de Paris), 88.
Bigorre, 101.
Biron (Dordogne), i5g, 1O4,
167, 168.
Blanquefort (Lot-et-Garonne),
171.
Boites de fer-blanc, i5i.
Bonagiiil (ruines de) [Lot-et-
Garonne], 175.
Bon - Encontre ( Lot - et - Ga -
rpnne), 199.
Bonnette (rivière), aôj, 270,
271, 273.
Bordeaux (Gironde), 1,84,119,
128, i34, 145, i54, i57, 186,
190.
Bosnie(province autrichienne),
i54.
Bouchons {fdbr. de), 55, 67
à 83.
Boudouyssou (rivière), 177.
Bougies, 37.
Bouquiès (Aveyron), 309.
Bourg -de -Visa (Tarn -et -Ga-
ronne), 195.
Bourriat-Bergonce (gare de)
[Landes], 48.
Bouziès (Lot), 3oi, 3i6.
Bressols (Tarn -et -Garonne),
237.
Bretagne-d'Armagnac (Gers),
ii4, ii5.
Brugnac ( Lot - et - Garonne ),
i3i.
Brulhois (pays de ), 8G à
88.
Bruniquel (Tarn-et-Garonne),
277.
Cabrerets (Lot), 3oi.
Cadours (Haute-Garonne), 85.
Cadrieu (Lot), 323.
Cahors (Lot), 174, âo4, 2o5,
206, 290 à 296, 3oG, 3io,
3i I, 3i3.
Caisses d'euiballage, i5i.
Cajar (Lot), 294, 3o2, 3 18, 320,
325.
Californie, i54.
Calvignac (Lot), 319.
Camcson (riyère), 21 5.
Gampoulan (Aveyron), 324.
Canal latéral à la Garonne, 54,
193, 194, 198,219,231,235,
245.
Cancon (Lot-et-Garonne), 139,
161, 162, i65.
Capdenac - Gare ( Aveyron ),
174, 325.
Capdenac (Lot), 280, 3io, 323,
325.
Gapelle - Biron ( Lot - et -Ga-
ronne), 143, 167, 168, 171.
Capelle - Livron (la) [Tarn-et-
Garonne], 273.
Carmaux (Tarn), 265.
Cartonnages, 239.
Castel-Amouroux (Lot-et-Ga-
ronne), 36.
Castelculier (Lot-et-Garonne),
192.
Castelfranc (Lot), 285.
Casteljaloux (Lot-et-Garonne),
36 à 40.
Castelmayran (Tarn - et - Ga -
ronne), 200, 216.
33o
INDEX ALPHABETIQUE.
Gaslelmoron-sur-Drot ou d'Al-
bret (Gironde), 5, 31, 32.
Castelmoron-siir-Lot (Lot-et-
Garonne), i3o, i3i, 189.
Castelnau-d'Arbieu (Gers), 95.
Caslelnaii-d'Auzan (Gers), 107,
116.
-Castelnaud - de - Grattecanibe
(Lot-el-Garonne), 109, 160.
Gastelnau-de-Montratier (Lot),
299, 3oo.
Caslel - Sagrat (Tarn -et -Ga-
ronne), 195.
Gastels (cbâteau de) [Tarn-et-
Garonne], 197.
Castelsarrazin (Tarn -et -Ga-
ronne), 200, 208, 210 à
214, 220.
Castéra-Verduzan (Gers), 85,
128.
Castex-Lectourois (Gers), 89.
C^astillonnës (Lot-et-Garonne),
189, iGG.
Caumont (Tarn- et -Garonne),
200.
Crfiussale (Tarn-et-Garonne),
288, 2/18, 249, 251 à 258,
297, 298.
Causse de Gabors, 208, 206,
287, 295, 807.
Gausse de Gramat, 3oG, 3io,
3i5, 828.
Causse de Laroque, 824.
Causse de Limogne, 208, 206,
258, 265, 274, 297, 299, 807,
8i5, 823.
Causse Méjean, 299.
Causse de Saint-Antonin ou de
Caylus, 258, 269, 274, 297.
Ciusse de Sauveterre, 299, 3o4.
Causse de Villefranche, 828,
825.
Causse du Larzac, 804.
Cayhis (Tarn-et-Garonne), 262,
270, 272 à 274, 297.
Cayrac ( Tarn-et-Garonne), 248.
Cayran (Lot), 3o6.
Gazais (Tarn-et-Garonne), 276.
Cazaubon (Gers), 85, io4, 109.
Cazeneuve (Gers), ii4-
(-azes-Mondenard (Tarn-et-Ga-
ronne), 204.
Cazoul (le) [Lot], 812.
Celé (rivière), 810, 820.
Cénevières (Lot), 3 18.
Céran (Gers), 100.
Cérou (rivière), 265,
Cévennes, 233.
Chanvre (culture du), 182,
190.
Chapeaux de feutre, 129.
Chapeaux de paille, 129, 288,
249 à 262.
Charentes (région des), 108,
1 10.
Charrin (.-bateau de) [Lot-et-
Garonne], 125.
Chasselas (raisin), 190.
Cbasseneuil (Charente), i34,
Cbasseneuil (Lot-el-Garonne),
i34.
Cbassenon (Cbarente), i34.
Cbaumont-en-Vexin (Oise), 60.
Chaussu/'es, 98, ii3.
Chène-li^ge, 4A» 4?» 5o, O7 à
83.
Cheval {élevage du), 218.
Chine (empire de la), 25i, 252.
INDEX ALPHABETIQUE.
33 I
Cieurac (Lot), 3o6, 3ii.
Cieulat ( faubourg d'Eauze ) ,
loG.
Cingle (moulin du) [Lot], 280.
Ciron (rivière), A5.
Clairac(Lot-et-Garonne), 128,
129.
Clermont-Dcssous (Lot-et-Ga-
ronne), 188.
Clermonl-Dessus (Lot-et-Ga-
ronne), 197.
Cognac (Gers), 107.
Colayrac ( Lot - et - Garonne ),
188.
Colles, 180.
Cologne (Gers), 85, 99.
Concots (Lot), 3oi, 3o3, 3oA,
■ 3i5, 3i8.
Condezaygues (Lot-et-Garon-
ne), 170.
Condom (Gers), 85, 107, iio,
III, 118 à 123.
Condomois (pays de), 54,
67, 79, 117 à 126.
Conduché (Lotj, 3 16.
Corbarieu (Tarn-et-Garonne),
237.
Corderie, i85.
Cordes (Tarn), 260.
Cornichons {culture des), 248.
Cos (Tarn-et-Garonne), 247.
COTE-D'OR (département de
la), i3.
Coutellerie, 224.
Coutures (Gironde), 33.
Crégols (Lot), 3oi, 3i8.
Cuivre {laminage du), 212.
Cuzorn (Lot-et-Garonne), 171,
172.
Damazan (Lot-et-Garonne),
190, 191.
Danube (fleuve), i55.
Dardenne (Tarn-et-Garonne),
260.
Dauphiné, 249, 25o.
Decazeville (Aveyron), 174,
309.
Détroit (États-Unis), 212.
Dieulivol (Gironde), 3o.
Dieupentale (Tarn-et-Garonne),
222, 232.
Digne (Basses- Alpes), 29G.
Divonne (source de) [Lot],
295.
DORDOGNE (département
de la), i3, 25 à 27, i3G,
287.
Dordogne (rivière), 5, 226, 280,
3o8, 3io.
Doueile (Lot), 288.
Dourdène (rivière), 25.
Dourdèze (rivière), 29.
Dousset (ruisseau dej, 3o.
Douze ou Doulouze (rivière),
48, 49, io4, io5.
Drot (rivière), 5, 22, 25 à 33,
i3i, i35, 161, 166.
Durance ( Lot - et - Garonne ) ,
44.
Duras (Lot-et-Garonne), 28,
29, 30, 3i, 139.
Duravel (Lot), 282, 294.
Durfort ( Tarn - et - Garonne ),
204.
Dresde (Saxe royale), 207.
Druilles (Les) [Lot], 3 18.
332
INDEX ALPHABETIQUE.
Eaux-de-vie, 8, Ss, 69, 66, q3,
102, 107 à 110, 112.
Eaux minérales, m, i23, i3o,
266.
Eauzan (pays d'), 54, 105
à 116.
Eauze (Gers), 48, 105 à 111,
^ 114.
École d'agriculture de Saint-
Pau (Lot-et-Garonne), 74, 83.
Engrais chimiques, i85.
Entre-Deux-Mers, 28, 3i.
Escamps (Lot), 3oi, 3o5.
Escatalens (Tarn-et-Garonne),
221.
Esclauzels (Lot), 3oi, 3i5.
Espadrilles (voir Sandales).
Espagne (royaume d'), 68, 71,
81.
Espalais (Tarn-et-Garonne),
198.
Espanel (Tarn-et-Garonne),
298.
Essence de térébenthine, 46.
Estampon (rivière), 49-
Estang (Gers), 85.
Esterel, 70.
Estussan (Lot-et-Garonne), Sg.
États-Unis, i55.
Eymet (Dordogne), 25 à 27,
3o, iSg, i4i-
Eysses (Lot-et-Garonne), i58.
Falgueyrat (Dordogne), 28.
Fas (Lot-et-Garonne), 87.
Fauillet (Lot-et-Garonne).
Feneyrols-les-Bains (Tarn-et-
Garonne), 266.
Fère (La) [Aisne], 67.
Feugarolles (Lot-et-Garonne),
5i, 55.
Fezensac (pays de), 54, 110
à 113.
Fezenzaguet (pays de), 99.
Figue (culture de la), 128.
Figuëres (Espagne), 221.
Finhan (Tarn-et-Garonne), 22 1 .
Fleurance ( Gers ), 92 , gS à
100.
Foire aux chiens, 212, 234-
Foix (Ariège), 296.
Fonfrède (source de), i3o.
Fongrave (Lot-et-Garonne),
i3i.
Fontanas (château de) [Tarn-
et-Garonne], 243.
Fontélie (fontaine de) [Gers],
93.
Font-Polémie (source) [Lot],
3i3.
Formes pour chaussures, 11 3.
Fromage, 3o4.
Fronton (Haute-Garonne), 239,
241, 242, 244-
Fumel (Lot-et-Garonne), 171
à 175, 280.
Fustérouan (Gers), 102.
Gabardan (pays de), 79.
Gabarret (Landes), 48, 109.
Gandalou (Tarn-et-Garonne),
214.
INDEX ALPHABETIQUE.
333
Gardclle (la) [Lotj, 284.
Garonne (fleuve), i à 20, 35,
39, 5o, 54, 85, 86, 87, 100,
129, 177, 180 à 199, 2o5,
207, 2i4, 219, 221, 222, 2»7,
•>3i, 234, 242, 246, 309.
Gascogne (chap. III à VI).
Gaure (pays de), 96 à 100.
Gavacherie (pays de la), 5,
28, 3i.
Gavarnie (Hautes- Pyrénées),
122.
Gavaudun (Lot-et-Garonne),
167, 168, 171.
Gazelle (la) [Lot-et-Garonne],
22.
Gélise (rivière), 52, 54, 58,
59> 73, 76, 77. 79. io5, m,
114.
GERS (département du), 88 à
126, 2l5,
Gers (rivière), 84 à 100.
Gimoës (pays de), 99.
Gimone (rivière), 99, 21 5, 216,
219.
Gimont (Gers), 85, 214.
GIRONDE (département de
la), i3, 3o à 34, 47, i36,
219.
Gondrin (Gers), ii5, 117.
Goudourville (Tarn-et-Garon-
ne), 198.
Goutz (Gers), 100.
Gramat (Lot), 3o3.
Grandfonds (Lot-et-Garonne),
193.
Grand-Nérac (quartier de Né-
rac), 63.
Gréalous (Lot), 3oi.
Grenade-sur-Garonne (Haute-
Garonne), 242.
Grenoble (Isère), 257.
Grésivaudan, 187.
Grisolles (Tarn- et- Garonne),
222, 223, 224, 225, 242,
245.
Guilleragues (château de) [Gi-
ronde], 33.
Guyenne (chap. I, II, VII
à XX), 86.
Haricots verts {récolte des),
i48, 149. '
Haut-Armagnac {voyez -\i'ma-
gnac [Haut-]).
Hautefage (Lot-et-Garonne),
178, 179.
HAUTE-GARONNE (départe-
ment de la), 219, 224, 238
à 243.
Honor-de-Cos (1') [Tarn-et-Ga-
ronne], 247.
Hôpital Beaulieu (Lot), 3io.
Hordosse (château de) [Lot-et-
Garonne], 76.
Hospitalet (L') [Lot], 3o6.
Houeillès (Lot-et-Garonne), 43,
44, 48, 73.
Houil (ruisseau de), 48.
îssigeac (Dordogne), 27, 139.
Issolud (puy d'), 286.
Italie (royaume d'j, 72, 25 1.
Izaute (rivière), m, ii4-
334
INDEX ALPHABETIQUE.
Japon (empire du), 25i, 262.
Jasmin (le poète), 182 à 184,
192, 193.
Java (île de), 255.
Jegim (Gers), iio, ii3.
Joanny (Tarn-et-Garonne), 271 .
Jiisix (Lot-et-Garonne), 2.
Labastide- d'Armagnac (Lan-
des), 60.
Labastide-du-Temple (Tarn-el-
Garonne), 2iA-
Labastide-Marnhac (Lot), 3o6.
Labastide -Saint -Pierre (Tsrn-
et-Garonne), 237,
Lacapelle Biron Çuoir Capelle-
Biron).
Lacaussade (Lot-et-Garonne),
168.
Lafox (Lot-et-Garonne), 197.
Lafrançaise (Tarn-et-Garonne),
234, 235.
Lagarde-Finarçon (Gers), 89.
Lait stérilisé, i3i.
Laiton, 212.
Lalbenque(Lot), 262, 3oo, 3oi,
3o4.
Lamothe-Capdeville (Tarn-et-
Garonne), 247.
Lamothe-Gondrin (château de)
[Gers], iio.
Landes, 37 à 49, 67, 117,
i5x.
LANDES (département des),
47 à 49, 68, 70, 71.
Languedoc, 207 à 214,
249.
Lannemezan (plateau de),
87, 196, 203, 2l5.
Lannepax (Gers), m. ,
Lantouy (gouffre de) [Lot], 32 1,
322, 323.
Laon (Aisne), 169.
Laparade ( Lot-et-Garorme ),
129, i3o.
Laplume (Lot-et-Garonne), 86,
88.
Larnagol (Lot), 3oi, 3o2, 3o3,
3o4, 319.
Laroque - Bouilhac ( Ave\Ton ),
309.
Laroque-Timbaut (Lot-et-Ga-
ronne), 179.
Laroque-Toirac (Lot), 324-
Larroque (château de) [Lot],
3ii.
Larzac (causse du), 3o4.
Lauze (rivière), 93.
Lauzerte (Tarn-et-Garonne),
204, 205.
Lauzès (Lot), 3i4, 3i5.
Lauzoue (rivière) [voir Au-
zoue].
Lauzun ( Lot - et - Garonne ) ,
25.
Lavardac (Lot-et-Garonne), 47,
52 à 56, 60, 67.
Lavardens (ruines de) [Gers],
ii3.
Lavaur (Tarn), 232.
Lavilledieu (Tai'n-el-Garonne),
208, 214.
Lavi t-de-Lomagne ( Tarn-et-Gr.-
ronne), 85, 216.
INDEX ALPHABETIQUE.
335
Layrac (Lot-et-Garonne), 86,
87,
Lectoure (Gers), 89 à 94,
96, 97, io3, 216.
Lède (rivière), 161, 162, 167,
171.
I^embon (rivière), 210.
I.eniboul (rivière), 298.
Lembous (ruisseau), 298.
I^cmboulas (rivière), 298.
Lencou (rivière), 2o5.
IJ?re (rivière), 248, 258, 262.
Leriet (château de) [Tarn-et-
Garonne], 214.
Lexos (Tarn-et-Garonne), 264,
2G5.
Libos (Lot-et-Garonne), 171.
Liboume (Gironde), i4i.
Liège (Belgique), 202.
Liège {exploitation et prépa-
ration du), 02, 55 à 59,
66 à 83.
Lille (Nord), 227.
Lirnogne (Lot), 3oi, 3 18.
Limousin, 226.
Lindenberg (Bavière), 207.
Linoléum, 56.
Lisse (Lot-et-Garonne), 73,
76.
Li\Ton (Tarn-et-Garonne), 272,
273.
Lomagne, 84 à 96, 196,
197, 198, 200, 207, 215 à
219, 234.
J-.ombez (Gers), 85.
Losse (rivière), 118.
LOT (département du) [chap.
XVIII à XX], 12, i3, 10, 19,
Lot (rivière), 22, 127 à 159,.
i6g à 178, 180, 189, 2o3, 226,
278 à 296, 308 à 325.
LOT-ET-GARONNE (départe-
ment du) [chap. I à XIII],
iio, 124 à 191, 219, 224,
252, 287.
Louisiane (Etats-Unis), 212.
Loule (gouffre) [uoir Ouïe].
Lugagnac (Lot), 3oi.
Lugaut (Landes), 49-
Lllg-lies (pays des), 44.
Lusignan (Lot-et-Garonne),.
188.
Luton (Angleterre), 252.
Lutte (ruisseau), 299.
Luzech (Lot), 285, 286.
Lyon (Rhône), 241, 249.
M
Madeleine (la) [Lot], 3ii.
Madeleine (la), commune de
Faycelles (Lot), 325.
Mfiëstricht (Hollande), 252.
Magistère (la) [Tarn-et-Garon-
ne], 197.
Magnanac ( Haute - Garonne ),
239.
Maillechort, 212.
Malines (Belgique), i54.
Malterre (château de) [Tarn-
et-Garonne], 271.
Manciet (Gers), io5.
Maransin, 70.
Marcellus (Lot-et-Garonne), 4-
Marche duRouergue, 265.
Marciac (Gers), 85.
Marcilhac-sur-Célé (Lot), 3oi.
33Ô
INDEX ALPHABETIQUE.
Marrnande (Lot-el-Garonne), 5
à 8, 21, 35, 187.
Marmont- Pachas (Lot-et-Ga-
ronne), 87, 88.
Maroc (empire du), 68.
Marseille (Bouches-du-Rhône),
262.
Martel (Lot), 3oi.
Martinet (Le) [Tarn-et-Garon-
ne], 271.
Maryland (États-Unis), 12.
Mas-d'Agenais (Lot-et-Garon-
ne), 9, 36.
Massuries (Les) [Lot], 3i6.
Maures (pays des), 70, 71.
Mauvezin (Gers), 85, 99.
Mazainet (Tarn), 234.
Méditerranée, 170.
Meilhan (Lot-et-Garonne), 2.
Mercuès (Lot), 288.
Mesures en bois, 239.
Métallurgie, 38, 173, 174,
277.
Meylan (Lot-et-Garonne), 83.
Mézin (Lot-et-Garonne), 47 >
55, 56, 67, 77 à 82.
Midou ou Midour (rivière), 102,
104.
Miélan (Gers), 118.
Mines de fer, 172, 174, 282.
Min-jterie, 54, 232.
Mirabel(Tarn-et-Garonnc), 260,
261.
Miradoux (Gers), 88.
Miramont (Gers), 100.
Miramont (Lot-et-Garonne),
24, 25, i3i, 139.
Miramont (Tarn -et -Garonne),
205.
Mirande (Gers), 85.
Mirandol (Lot), 285.
Mirepoix (Gers), 100.
Moissac ( Tarn - et - Garonne ),
143, 194, 200 à 203, 204,
210, 232.
Molières (Tarn- et- Garonne),
298, 299.
Monbahus (Lot-et-Garonne),
i3i.
Monbarla (Tarn- et- Garonne),
205.
Monbazillac (Dordogne), 27,
128.
Monclar-d'Agenais (Lot-et-Ga-
ronne), 4o, i3i, i32.
Moacrabeau (Gers), 124 à
126.
Monfort-du-Gers (Gers), 99.
Monge (château de) [Tarn-et-
Garonne], 271.
Monségur (Gironde), 30, 31,
32, 33.
Monségur (Lot-et-Garonne),
169.
Monsempron (Lot-et-Garonne),
170, 171.
Monsempron-Libos (gare de),
170, 171, 173.
Montagnac (Lot-et-Garonne),
167.
Montagudet (Tarn-et-Garonne),
2o5.
Montaigu-de-Quercy (Tarn-et-
Garonne), 204-
Montalzat (Tarn-et-Garonne),
260, 261, 298.
Montastruc (Lot-et-Garonne),
l32.
INDEX ALPHABETIQUE.
337
Montauban (Tarn-et-Garonne),
186,208, 210, 215,223,228
à 234, 247, 249, 25i, 264,
^Montbrun (Lot), 323.
Montcabrier (Lot), 280.
Montcuq ( Lot ) , 206 , 297 ,
3oo.
Mont-de-Marsan (Landes), ?.34.
Montech (Tarn-et-Garonne),
220, 232.
3*Ionteils (Tarn-et-Garonne),
209.
Montesquiou (Gers), iio, m.
Monteton (Lot-et-Garonne),
29.
Montflanquin (Lot-et-Garon-
ne), 149, 161, 162 à 166.
Montgaillard (Lot-et-Garonne),
5i, 59.
^lontjoy (Tarn-et-Garonne),
195.
^lontluçon (Allier), 186.
Montpezat (Tarn-et-Garonne),
260, 298.
Monfréal-du-Gers (Gers), 107,
110, 115, 116, 117.
3Ionlricoux (Tarn-et-Garonne),
278.
Montsalès (Aveyron), 324.
Mouchan (Gers), m.
Moura (Gers), m.
Moustier ( Lot - et - Garonne ) ,
28.
Mouton (^élevage du), 3o3.
Miircens ou Mursens (Lot), 3i3,
3i4.
Mûrier (^culture du), 193,
232.
N
Nancy (Meurthe- et -Moselle),
206, 267.
Narbonne (Aude), 234.
Navigation Jluviale, 3o, 02 à
54, 119, 120, i34, 107, 187,
309.
Nazareth (château de) [Lot-ot-
Garonne], 65, 126.
Négrepelisse (Tarn-et-Garon-
ne), 278.
Nérac (Lot-et-Garonne), 56, 61
à 65, 76, 107, ii4, 126.
Neuffons (Lot-et-Garonne), 38,
40.
Nicole (Lot-et-Garonne), 129,
187, 189, 190.
Nîmes (Gard), 807.
Nogaro (Gers), 85, io3, io4,
109, III.
Nohic (Tarn-et-Garonne), 287.
NORD (département du), i3, 16.
Notre-Dame-de-Livron (Tarn-
et-Garonne), 273.
Noulens (Gers), m.
Ognon {culture de /'), 192.
Oiseleurs, 218.
Oit (nom ancien du Lot), 287.
Orbe (niisseau), 99.
Orgueil (ruines d') [Lot], 281-
Orgueil (Tarn-et-Garonne), 287.
Orléanais, 126.
Ormes tortillards, i3i.
Ouïe (gouffre de 1') [Lot], 821,
822, 828.
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI.
338
INDEX ALPHABÉTIQUE.
Papeterie, 220, 289.
Papier d'étain, 212.
Pardaillan (Lot-et-Garonne),
29.
Parnac (Lot), 287, 288.
PAS-DE-CALAIS (département
du), 16.
Passage - d'Agen (Le) [Lot-et-
Garonne], i85, 186.
Pastiirac (Lot), 3i5.
Pâtes alimentaires, 287, 288.
Pécher (culture du), 149, 247.
Peignes de corne, i48, 144?
233.
Pelbusoc (Landes et Lot-et-Ga-
ronne), 46.
Pellegrue (Gironde), 3i.
Penne -d'Agenais, i58, 177,
178.
Penne-d'Albigeois (Tarn), 269,
276, 277.
Pérignon (château de) [Tarn-
et-Garonne], 221.
Périgord, 19, 25 à 27, 161,
164, 169.
Périgueux (Dordogne), 186.
Pescadoire (Lot), 284.
Petit-Nérac (quartier de Nérac),
63.
Petite-Barguelonne ( Tarn -et -
Garonne), 2o5, 800.
Petite-Léonne (rivière), 179,
195.
PejTcstortes (P^Ténées- Orien-
tales), 221.
Phosphate de chaux, 269, 270,
275, 801, 8o4, 3i8, 820.
Picc[uecos (Tarn-et-Garonne),
247.
Pis (Gers), 100.
Pise (Italie), 100.
Plaisance (Gers), 85.
Plaisance (Landes), 47-
Plateau de Lannemezan (voyez
Lannemezan).
Plumes d'oie, 197.
Pois (petits) [culture des], 128,
i4i, 145 à 154.
Poitiers (Vienne), 186.
Polémie (fontaine) [Lot], 8i3.
Pommevic (Tarn-ct-Garonne)y
198.
Pompignan (Tarn-et-Garonne),
243 à 245.
Pompogne (Lot -en -Garonne),
48.
Pont-de-Bordes (Lot-et-Garon-
ne), 54, 56, 78.
Pont-Moyne (ferme de) [Lot-
et-Garonne], 45.
Port-de-Penne (Lot-et-Garon-
ne), 177, 178.
Port-Sainte-lNIarie (Lot-et-Ga-
ronne), 10, 5o, 84, 188.
Portugal (royaume de), 68. 71,
Poudenas (Lot-et-Garonne), 78,
82.
Pradines (Lot), 288.
Prajous (Les) [Lot], 3i8.
Prayssac (Lot), 284.
Primeurs, 246, 247.
Privas (Ardèche), 296.
Provence, 68, 70, 71.
Prunes et pruneaux, 27, 134
à 140, 182, 208.
INDEX ALPHABETIQUE.
Pruniers (culture des), 21, 22,
29, 134 à 140.
Pnjols (Lot-et-Garonne), 157.
Puycasquier (Gers), 100.
Puvguilhem (Dordogne), 2g.
Puvjourdes (Lot), 3oi.
Puylaroque (Tarn-et-Garonne),
261, 262, 298.
Puy (Le) [Haute-Loire], 284,
255.
Piiy-1'Évêque (Lot), 288.
Puymirol (Lot-et-Garonne),
195.
Puységur (Gers), 100.
Pyrénées (chaîne des), 92,
118, 117, 122,196,218,226,
284.
PYRÉNÉES - ORIENTALES
(département des), 70.
Quercy (chap. XIII à XX),
17, 18, ig, i6g, 177.
Quercy-Blanc, ig5, 204,
258, 260, 2g7.
Raisin {culture du), igo.
Ramier (pays du), 287.
Ramouzens (Gers), m.
Réalville (Tarn-et-Garonne),
248, 25l.
Réaup (Lot-et-Garonne), 78.
Regnics (Tarn-et-Gai'onne),
287.
Rcole (La) [Gironde], i, 84.
Retjons (Landes), 4g-
339
Retjons-Lugaul (gare de) [Lan-
des], 48.
Ribérette (ruisseau), 102.
Rivière -Montalbanaise,
228 à 245.
Riviére-Verdun (pays de),
219 à 223.
Rocamadour (Lot), 3 10.
Roc-Dansaire (Tarn-et-Garon-
ne), 266.
Roc-de-Gorp ou d'Aucor (Lot),
3i8.
Rochers-d'Anglars (Tarn-et-Ga-
ronne), 266.
Roquebrune (château de) [Gi-
ronde], 33.
Roquefort (Gers), 100.
Roquefort (Landes), 4g-
Roubaix (Nord), 227.
Rouergue, 288, 24g, 27g,
322 à 325.
Roussillon, 08.
Ruisseau-Profond, 21 5.
Russie (empire de), i55.
Saillac (Lot), 801.
Saint-Antonin (Tarn-et-Garou-
ne), 261, 266 à 270, 275.
Saint-Barthélémy (Lot-et-Ga-
ronne), 24.
Sainte-Bazeille (Lot-et-Garon-
ne), 4) 5.
Sainte - Christie - d'Armagnac
(Gers), 104.
Saint-Girq-Lapopie (Lot), 3oi,
3i8.
Saint-CIar (Gers), 98.
34o
INDEX ALPHABETIQUE.
Sainl-Front (Lot-et-Ciai-onne),
171.
Sainl-Gény (chapelle) [Gers],
Saint - Georges - d'Espéranche
(Isère), 2.56, 257.
Sainl-Géry (Lot), 3i5.
Saint-Hilaire (Gironde), 33.
Sainl-Hilaire (Lot-et-Garonne),
188.
Saint-Jean-de-Laur (Lot), 3oi.
Saint- Jcan-de-Thurac (Lot-et-
Garonne), 196.
Saint-Jean-Poutge (Gers), 11 3,
119, 120.
Sainl-Juéry (Tarn), 282.
Sainte - Livrade (Lot-et-Ga-
ronne), i32, 139, i/|0, 1/19,
182. .
Saint-Martin- Labouval (Lot),
201, 3o4, 3i8.
Saint - Nicolas - de - la- Balerme
(Lot-et-Garonne), 196.
Saint - Nicolas - de - la - Grave
(Tarn-et-Garonne), 199, 200.
Saint-Pastour (Lot-et-Garon-
ne), 160.
Saint-Pau ( Lot-et-Garonne ),73,
ih, 76, 83.
Saint-Pierre (château de) [Lot],
32/i.
Saint-Projet (Tarn-et-Garon-
ne), 273.
Saint-Puy (Gers), 98.
Sainte-Radegonde (Gers), 98.
Sainte-Radegonde (Lot-et-Ga-
ronne), iDg.
Saint-Rome (signal de) [Tarn-
et-Garonne], 271.
Saint-Sixte (Lot-et-Garonne),
196.
Saint-Sulpice (ruisseau de), 33.
Saint - SA'mphorien - sur- Coise
(Rhône), 256, 267.
Saint-Vincent-Rive-d'Olt, 287.
Salles (Lot-et-Garonne), 167,
171.
Salvagnac (AvejTOn), 320, 323.
Salvetat (près Montpezat)
[Tarn-et-Garonne], 298.
Sandales ou espadrilles, 12.
Sangles, 276.
Saramon (Gers), 85.
Saujac (Aveyron), 323.
Saut-du-Tarn (Tarn), 282.
Sauternes (Gironde), 128.
Sa uvelat (La) [Lot-et-Garonne],
25, 28.
Sauvetat-de - Savères ( Lot-et-
Garonne), 195.
Sauvetat-du-Drot (La) [Gers],
98.
Sauvetat-sur-Lëde (La) [Lot-et-
Garonne], 161.
Sauveterre (Lot-et-Garonne),
196.
Sauveterre-la-Lémance ( Lot-et-
Garonne), 173.
Savanac (Lot), 3 12.
Savon, 37.
SEINE-ET-OISE (département
de), i48.
Séoune (rivière), 193, igS,
206.
Septlbnds (Tarn -et- Garonne),
249, 250, 25i, 253, 254,
258 à 262, 269, 270, 274.
Sept-Ponts (Lot), 307.
INDEX ALPHABETIQUE.
34 I
Serbie ( royaume de ) , i54 ,
i55.
SL're (ruisseau), 216, 251.
Serempuy (Gers), 85.
Sériciculture, 194, 282, 233.
Sen-anac (Tarn -et - Garonne),
25l.
Seyches (Lot-et-Garonne), 24.
Seye (rivière), 265.
Sicile (île de), 170.
Soie {industrie de la), 532,
233.
Sorgho {culture du), 4, 222 à
225, 245.
Sos (Lot-et-Garonne), 72, 82,
83, iio.
Solurac (Lot), 281.
Soufflerie de poils, 239.
Suisse, 201, 256.
Sumac, 170, 233.
Tabac (culture du), 10, 12 à
20, 287.
Tabletterie, 82.
Tailhade (La) [Lot-et-Garon-
ne], 4i'
Tamis à bluter, 2Z2.
TARN (département du), 264,
3o8.
Tarn (rivière), 199, 200, 207,
208, 2i5, 219, 228 à 241,
246, 259.
TARN-ET-GARONNE (dépar-
tement de) [chap. XIII à
XIX], 85, i36, 194.
Tarsac (Gers), loi.
Tartres, ii3.
Temple (Le) [Lot-et-Garonne],
i3i.
Ténaréze (voie romaine et
pays de), 54, 59, 82, 107,
108, 109.
Térébenthine (voir Essence de).
Terraube (Gers), 92.
Terrines de Nèrac, 67.
Tescûu (rivière), 237.
Tessonne (rivière), 21 5.
Teussac (Tarn -et -Garonne),
266.
Thermes - d'Armagnac (Gers),
85, 101, 102.
Thèze (nvière)y 280,
Thouars (Lot-et-Garonne), 55.
Toile à voile, i85.
Tolzat (ruisseau), 9.
Tomates {culture de), i48.
Touneins ( Lot - et - Garonne ),
10 à 12, 127, i32, i85,
187.
Tortillards (voyez Ormes).
Toscane (province d'Italie), 255,
256.
Toulouse (Haute-Garonne), 84,
18G, 223, 226, 233, 234, 241,
242.
Tour aine, 33, 126.
Tournecoupe (Gers), 85, 99.
Tour-N^uve (Lot-et-Garonne),
45.
Tournon-d'Agenais (Lot-et-Ga-
ronne), 177.
Touzac (Lot), 281.
Trec (rivière), 7, 8, 21, 22.
Trenqueléon (château de), 5i.
Truffes, 3oi, 3o4, 3o5.
Tunisie, 68, 72, 269
342
INDEX ALPHABETIQUE.
Urdens (Gers), go.
Uxellodimum (cité gauloise),
286, 3i3.
Vacquiers (Haute- Garonne),
240.
Valence-d'Agen (Tarn -et -Ga-
ronne), 197, 198, 2o3, 2o5.
Valence-sur-Baise (Gers), 85
. 98, iio, 122.
Valenlré (pont de) à Gahors,
295, 807.
Valette (château de la) [Tarn-
et-Garonne], 270.
Valette (La) [île de Malte], 270.
VAR (département du), 70.
Varaire (Lot), Soi, 802.
Varen (Tarn-et-Garonne), 2G4
Vaylats (Lot), 801.
Verdégas (Lot-et-Garonne),
i3i.
Verdun-sur-Garonne (Tarn-et-
Garonne), 222, 228.
Vère (rivière), 277-
Vers (Lot), 812.
Vers (rivière), 818.
Versailles (Seine-et-Oise), 186,
Vert (rivière), 284, 280.
Vesoul (Haute-Saône), 296.
Vianne (Lot-et-Garonne), 5i,
54, 55.
Vic-Fezensac (Gers), 107, 109,
iio, 111 à 115, 118, 119,
122.
Villaudric ( Haute - Garonne ),-
289, 240, 241.
Ville - Bourbon ( faubourg de
Montauban), 228.
Villebrumier (Tarn-et-Garon-
ne), 233, 237, 238.
Villemur (Haute-Garonne), "idS,
287, 238, 239.
Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Ga-
ronne), i35, 189, 140 à
158, 177, 182, 186, 192,
233.
Ville - Nouvelle ( faubourg de
Montauban), 280.
Villeréal (Lot-et-Garonne), 189,
165, 166.
Vins noirs, 291.
Virazeil (Lot-et-Garonne), 8,
21.
Virginie (États-Unis), 12.
Viticulture, 107 à 110, 128,
239 à 243, 274, 291,294,
807.
W
Wohlen (Suisse), 256.
Xaintrailles (Lot-et-Garonne),
01, 00, 09.
TABLE DES CARTES
Carte d'ensemble (en face du
titre).
Vallée de la Garonne entre
Marmande et Tonneins, 3.
Entre la Garonne et le Drot, 28.
Environs de Gasteljaloux, 87.
La Baise de VianneàNérac, 53.
Le chêne-liège en Lot-et-Ga-
ronne, 69.
Environs de Mézin, 77,
Lectoure, 90.
Fleurance, 98.
Vic-Fezensac, 112.
Condom, 120.
Le coude du Lot entre Sainte-
LivTade et Villeneuve -sur-
Lot, i33.
L'Agenais (feuille double), 162
et i53.
Agen, 181.
Moissac, 201.
Confluents de la Garonne et
du Tarn, du Tarn et de l'Avey-
ron (Bas-Ouercy), 209.
La Lomagne de Tarn-et-Ga-
ronne, 218.
Montauban, 227.
Caussade et Septfonds, 25g.
Le Cingle de Cahors, 289.
Confluent du Lot et du Celé,
319.
Le Lot à Cajarc, gouff'res de
rOule et de Lantouy, 821.
TABLE DES MATIERES
I. — La plaine de la Garonne.
Pages,
En amont de La Réole. — La plaine de Garonne. — xMeilhan. —
Le sorgho à balai. — Les gavaches de Sainte-Bazeille. — Mar-
mande. — Une affiche électorale. — Le Mas-d'Agenais. — Ton-
neins et la culture du tabac. — Comment on prépare le sol. —
Formalités administratives. — La récolte et le manocage. . . i
II. — La vallée du Drot.
Le vallon du Trec. — Les pruniers et les chenilles fileuses. —
Autour de Seyches. — Lauzun et son duché. — La Sauvetat.
— Eymet. — En Périgord. — Au long du Drot. — Duras. —
Monségur. — En Gavacherie. — Castelmoron-d'.Ubret. — De
Monségur à La Réole 21
III. — Les landes de Lot-et-Garonne.
La vallée de l'Avance. — Casteljaloux et ses usines. — Les pertes
et les sources de l'Avance. — Dans les pinèdes. — Les Lugues.
— Houeillès. — La foire de Pelbusoc. — La Grande Lande. —
Le val de l'Estampon 35
IV. — La capitale du « Béarnais ».
La vallée de la Baïse. — La bastide de Vianne. — Lavardac. —
Navigation de la Baïse. — Ateliers de bouchonniers. — Le Pont-
de-Bordes. — Le moulin de Barbaste. — Barbaste. — Nérac.
— La promenade de la Garenne 5o
346 TABLE DES MATIERES.
V. — Les bouchonniers de Mézin.
Pages.
L'industrie de Nérac. — Les bouchonniers. — Les forêts de chê-
nes-lièges ou siiriers. — La culture des suriers. — Le com-
merce du liège. — Le pas de Gascogne. — Au bord de la Gé-
lise. — La forêt. — Mézin et les ateliers de liégeurs. — Sos. —
L'école d'agriculture et de viticulture de Saint-Pau 66
VI. — Lomagne du Gers, Gaure et Fezenzaguet.
Entre Agen et Lectoure. — Le pays de Brulhois. — Layrac. —
Astaffort. — En Lomagne. — Lectoure. — La maison du maré-
chal Lannes. — Fleurance et le pays de Gaure. — En Fezen-
zaguet : Mauzevin et Montfort Sfj
VII. — Le Fezensac et l'Eauzan.
L'Adour et l'Arros. — Thermes-d' Armagnac. — Aignan. — No-
garo et le Bas-Armagnac. — La Douze et le Midour. — Eauze.
— La bourse aux eaux-de-vie. — Les distillateurs d'Arma-
gnac. — Lannepax. — En Fezensac. — Vic-Fezensac loi
VIII. — Le Condomois.
Gondrin. — Laressingle. — La vallée de la Losse. — Condom.
— Le commerce des eaux-de-vie. — La navigation de la Baïse.
— Valence et Beaucaire. — En descendant la Baïse. —
Moncrabeau, pays des hâbleurs 117
IX. — Le pays des prunes.
Clairac et ses marchés. — Au long du Loi. — La Parade. — Cas-
telmoron. — L'orme tortillai'd. — Monclar et Sainte- Livrade.
— La culture du prunier. — Robe de sergent et prune d'ente.
— Le commerce des pruneaux. — Le cueillette et la cuisson.
— Villeneuve-sur-Lot : la ville 127
X. — Les petits pois de Villeneuve.
A travers Villeneuve-sur-Lot.— Les peigniers en corne. — L'em-
ballage des petits pois. — Au marché. — Les fabriques de con-
serves. — La culture des pois. — Machines à écosser. — Les
pruneaux. — Autour de Villeneuve i i44
TABLE DES MATIERES. 347
XI. — Le Haut Agenais.
Pages.
Au bord de la Lède. — La culture des fèves. — Monflanquin. —
Villeréal. — Les campagnes du haut Agenais. — Monsempron
et Libos. — Fumeletses forges. — Les carrières de l'Allemance. i6o
XII. — Agen et ses campagnes.
Les vieilles forteresses. — Tournon-d'Agenais et Penne-d'Age-
nais. — Le vallon de la Marse. — Agen. — Le poète Jasmin.
— Le commerce d'Agen. — Richesses agricoles. — Au long de
la Garonne. — Pont-Saint-Marie. — Aiguillon. — Nicole et ses
abricotiers 176
XIII. — Le Bas-Quercy.
L'Aveugle de CastelcuUer. — Le canal latéral. — La Séoune. —
Puymirol. — En Tarn-et-Garonne. — Valence-d'Agenais. —
Auvillars. — Saint-Nicolas-de-la-Grave. — Moissac. — Du Bas-
Quercy en Quercy-Blinc 192
XIV. — LoMAGNE ET Rivière- Verdun.
Le vignoble de Tara-et-Garonne. — Castelsarrazin. — Noms de
rues. — En Lomagne. — Lavit-de-Lomagne. — Beaumont-de-
Lomagne. — L'élevage des chevaux. — Montech. — Le maré-
chal Pérignon. — Verdun. — La Rivière-Verdun. — Grisolles.
— Culture du sorgho. — La fabrication des balais 207
XV. — La Rivière Montalbanaise.
Le pays de la brique. — Montauban. — Lidustrie de la soie. —
Lafrançaise. — La Rivière du Tarn. — Villebrumier. — Entrée
en Haute-Garonne. — Villemur et ses usines. — Le vignoble
de Villaudi'ic et de Fronton. — Pompignan et son château. . 226
XVI. — Les chapeaux de paille du Quercy.
Au bord de l'Aveyron. — Les pêches de l'Honor-de-Cos. — Une
ville gauloise disparue. — Réalville et le vallon de la Lère. —
La fabrication des chapeaux de paille, son origine, ses déve-
loppements. — Les usines de Gaussade. — Quelques mots sur
la production des tresses. — La ville de Gaussade. — Sur le
causse, — Septfonds 24G
348 TABLE DES MATIERES.
XVII. — Les gorges de l'Aveyron.
Pages.
La gare de Lexos. — Au long de l'Aveyron. — Les rochers du
causse. — Saint-Antonin. — Le plus vieil hôtel de ville de
France. — La vallée de la Bonnette. — Les phosphates de
Tarn-et-Garonne. — Gouffre de la Goule. — Caylus. — Sur le
causse. — En descendant l'Aveyron. — Penne et Bruniquel.
— Montricoux et Négrepelisse 263
XVIII. — Les cingles du Lot.
De Fumel à Cahors. — Les cingles. — Ruines d'Orgueil. — Du-
ravel et ses mines. — Puy-l'Évêque. — La patrie du maréchal
Bessières. — Caslelfranc. — Luzech. — Le tabac dans le Lot.
— Mercuès et son château. — Cahors. — La vieille ville. —
Les monuments 279
XIX. — Le causse de Limogne.
En Quercy-Blanc. — Montpezat, Molières, Gastelnau-Montratier
etMonteux. — Sur le causse de Limogne. — Les phosphates et
les truffes. — Lalbenque. — Bach. — Limogne. — Les mar-
chés de Concots. — Aspects du causse. — Descente à Cahors. 297
XX. — Le Lot entre Rouergue et Quergy.
Le Lot de Cahors à Capdenac. — Arcambal. — Le vallon du
Vers et l'oppidum de Mursens. — La font Polémie. — Saint-
Géry. — Saint-Cirq-Lapopie. — Les phosphates de Larnagol.
— Cajarc. — Gouffres de l'Oule et de Lantouy — Rouergue
et (Juercy. — En vue de Capdenac 3o8
Nancy, impr. Berger-Levraull et G'e.
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VOYAGES CIRCULAIRES A PRIX RÉDUITS
AUX PYRÉNÉES ET M PEOYEÎ^CE
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Durée : 20 jours pour les sept premiers parcours et 25 jours pour le huitième.
Faculté de prolongation moyennant supplément de 10 p. 100.
En outre, il est délivré des billets spéciaux d'aller et l'etour à prix réduits en
Tue de permettre aux voyageurs porteurs de billets de voyages circulaires de
visiter des points situés en dehors du voyage circulaire, notamment les Eaux-
Bonnes et les Eaux-Chaudes, stations thermales desservies par la gare de Laruns-
Eaux-Bonnes.
BILLETS D'ALLER ET RETOUR DE FAMILLE POUR LES VACANCES
Durée de validité : 33 jours, non compris celui du départ.
a) Pendant les périodes ci-après indiquées de chaque année, il est délivré au
départ de toute gare ou halte des quatre premières catégories du réseau du Midi,
aux Familles d'au moins trois personnes payant place entière et voyageant en-
semble, des billets d'aller et retour de famille de l^e, 2« et 3" classe, pour toute
gare ou halte des quatre premières catégories distantes d'au moins 125 kilo-
mètres de la gare de départ.
lo Pour les vacances de Pâques, du samedi, veille de la fête des Rameaux, au
lundi de Pâques (inclus). La durée ne peut être prolongée.
2° Pour les grandes vacances, du 15 juillet (inclus) au 1er octobre (inclus). La
durée des billets délivrés pendant cette période peut être prolongée moyennant
paiemeut d'un supplément de 10 p. 100 du prix total du billet.
Le prix s'obtient en ajoutant au prix de quatre billets simples ordinaires le
prix d'un de ces billets pour chaque membre de la famille en plus de deux.
b) Il peut être délivré au chef de famille titulaire d'un billet de famille, et en
même temps que ce billet, une carte d'identité sur la présentation de laquelle il
sera admis à voyager isolément à moitié prix du tarif général, pendant la durée
de la villégiature de la famille, entre le lieu de départ et le lieu de destination
mentionnés sur le billet.
{Pour plus amples renseignements consulter le tarif G. Y,, no 2 [chap. S].)
Avis. — Un livret indiquant en détail les conditions dans lesquelles peuvent
être effectués les divers voyages d'excursions, de famille, etc., sera envoyé gra-
tuitement à toute personne qui fera parvenir au Service commercial de la Com-
pagnie, 54, boulevard Haussmann, à Paris (IXe arrondissement), le montant de
TafFranchissement dudit livret, soit fr. 25 c.
CHEMIN DE FER D'ORLÉANS
EXCURSIONS EN AUVERGNE
ET DANS LE LIMOUSIN
AVEC ARRÊT FACULTATIF A TOUTES LES GARES DU PARCOURS
Tarif G. V. no 5 (Orléans).
La Compagnie d'Orléans délivre, du /tr Juin au 30 Septembre, des billets d'Excursions
en Auvergne et dans le Limousin, valables perdant 'M jours, au départ des gares dé-
nommées ci-dessous, ainsi qu'aux gares et stations intermédiaires, à prix réduits et com-
portanl les itinéraires Â, B et C déterminés comme suit :
Itinéraire A.
L'itinéraire A comprend :
1" Le parcours circulaire ci-après défini ;
Vierzon, Bourges, Montluçon, Chamblet-Néris (Bains de Néris), Évaux-les-Bains
(Bains d'Évaux), Eygurande, La Bourboule (Baius de la Bourboule), Le Mont-Dore
(Bains du Mont-Dorei, Boyat (Bains de Bovai), Clermont-Ferrand, Largnac, Dssel,
Limoges (par Tulle, Brive et Saint-Yrieis, ou par Eymouliers), Vierzon;
2o Le parcours aller et retour, entre le point de départ et le point de contact avec le
circuit ci-(lessns.
Le point de contact avec le circuit est Vierzon pour les points de départ Paris,
Orléans, Blois, Tours, Le Mans, Angers et Nantes; Saint-Sulpice-Laurière, pour
le point de départ Poitiers; Limoges-Bénédictins, pour le point de départ Angou-
lème; Brive, pour les pomts de départ Périgueux, Bordeaux, Agen, Montauban,
Toulouse.
Itinéraire B.
L'itinéraire B compremi :
Ir Le parcours aller et retour du point de départ (Paris, Orléans, Blois, TourS,
Le Mans, Angers ou Nantes) à Vierzon;
2'3 Le parcours circulaire ci-apres défini :
Vierzon, Bourges, Montluçon, Chamblet-Néris (Bains de Xéris), Évaux-les-Baius
(Bains d'Évaux , Eygurande, La Bourboule (Bains de la Bourboule), Le Mont-Dore
(Bains du Mont-Dore), Boyat (Bains de Boyat , Clermont-Ferrand, Largnac, Vic-
sur-Cère, Arvant, Figeac, Bodez, Decazeville, Bocamadour (Padirac et Miers),
Brive, Limoges par Saint- Yrieix ou par Uzerciie), Vierzon.
Itinéraire C.
L'itinéraire C comprend :
lo Le parcours circulaire ci-après défini :
Limoges-Bénédictins, Meymac, Eygurande, La Bourboule (Bains de La Bour-
boule), Le Mont-Dore (Bains du Mont-Doie), Boyat (Baius de Royat), Clermont-Fer-
rand, Largnac, Vic-sur-Cère, Arvant, Figeac, Rodez, Decazeville, Bocamadour
(Padirac et Miers), Brive, Limoges (par Saint-Yrieix ou par Uzerche);
2° Le parcours aller et retour, entre le point de départ et le point de contact avec le
circuit ci-dessus.
Le point de contact avec le circuit ci-dessus est Limoges-BénédiCtins, pour les points
de dépari Poitiers et Angoulême; Brive, pour les points de départ Bordeaux et Péri-
gueux ; Capdenac, pour les points d« départ Agen, Montauban et Toulouse.
La durée de validité de ces billets (30 jours) peut être prolongée d'ime, deux ou trois
périodes successives de 10 jours, moyennant le paiement d'un supplément égal à 10 p. 100
du prix du billet.
CHEMIN DE FER D'ORLÉANS
VOYAGES DANS LES PYRENEES
Tarif G.V. n" 105 (Orléansj
La (Compagnie d'Orléans délivre toute l'auaée des Billets d'excursions comporiant les
trois itinéraires ci-après, permettant de visiter le Centre de la France et les stations bal-
néaires des Pyrénées et du golfe de Gascogne.
Itr Itinéraire.
Paris, Bordeaux, Arcachon, Mont-de-Marsan, Tarbes, Bagnères-de-Bigorre,
Montréjeau, Bagnéres-de-Luchon, Pierrefitte-Nestalas, Pau, Bayonne, Bordeaux,
Paris.
2,'= Itinéraire.
Paris, Bordeaux, Arcachon, Mont-de-Marsan, Tarbes, Pierrefitte-Nestalas,
Bagnéres-de-Bigorre, Bagnères-de-Luchon, Toulouse, Paris {via Montauban-Cahors-
Limoges ou vid Figeac- Limoges).
3e Itinéraire.
Paris, Bordeaux, Arcachon, Dax, Bayonne, Pau, Pierrefitte-Nestalas, Bagnè-
res-de-Bigorre, Bagnères-de-Luchon, Toulouse, Paris {via Moniauban-Cahors-Li-
moges ou via Figeac-Linioges).
Durée de ijalidité : 30 jours (non compris le jour du départ).
Prix des billets : Iro classe : 163 fr. 50 c. ; — 2e classe : 122 fr. 50 c.
La durée de validité de ce» billets peut être prolongée d'une, deux ou trois périodes
successives de 10 jours, moyennant le paiement, pour chaque période, d'un supplément égal
à 10 p. 100 despiix ci-dessus.
BILLETS POUR PARCOURS SUPPLÉMENTAIRES
non compris dans les itinéraires des billets des voyages circulaires ci-deaans.
Il est délivré de toute station des réseaux de l'Orléans et du Midi, pour unn autre station
de ces réseaux située sur l'itinéraire des billets d'excursion, ou inversement, des billets
d'aller et retour de ire et de 2^; classe, avec réduction de 25 p. 100 en Irc classe et de
20 p. 100 en 2<; classe sur le double du prix ordinaire des places.
PUBLICATIONS
ÉDITÉES PAR LES SOINS DE LA COMPAGNIE d'ORLÉANS
Et mises en vente dans ses gares.
Le Liivret-Guide illustré de la Compagnie d'Orléans {Notices, Vues, Tarifs, Horaires)
est mis eu vente au prix de 30 centimes.
lo a Paris : dans les bureaux de quartier et dans les gares d'Austerlitz, Pont-Saint-
Michel, Quai d'Orsay, Luxembourg, Port-Royal et Denferl;
2o en Province : dans les gares et principales stations.
Les publications ci-apres, éditées par les soins de la Compagnie d'Orléans, sont mises en
vente dans toutes les bibliothèques des gares de son réseau au prix de 25 centimes :
Le Cantal. — Le Berry (au pays de George Sand). — De la Loire aux Pyrénées
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Pour recevoir franco ces publications, ajouter à la lettre de demande fr. 60 pour le
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La Compagnie d'Orléans a organisé dans le grand hall de la gare de Paris-Quai d'Orsay
une Exposition permanente d'environ 1 600 vues artistiques (peintures, eaux-fortes, litho-
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par son réseau.
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mée du Centre pendant la campagne de 1792. Publié d'après le ma-
nuscrit original, par G. Vallkk et a. i^ariset. 1898. Un volume in-12 de
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Un Général de l'Armée d'Italie. Sérurier (1742-1819), d'après les
Archives de France et d'Italie, par Louis Tuetey. 1899. Un volume in-8 de
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chant sa vie et son temps, par le mai'quis de cIolbert-Ghabanais. 3^ édition.
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Le Général Curély. Itinéraire d'un cavalier léger de la Grande-Armée
(1193-1815). Publié d'après un manuscrit authentique, par le général
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(1803-1814), par le commandant Parquin. Avec une introduction par
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notes biographiques par A. Robinet de Cléry. 1892. Beau volume in-8, avec
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Chaque volume, broché, 3fr. 50 — Élégamment relié, ^fr.
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6\}^ série. Gascogne.
^*" série. Agenaîs, Lomagne et Bas-Q uercv.
32' série. Haut-Quercy et Haute-Auvergn e.
33^ série. Basse-Auvergne.
Ces quatre nouveaux volumes succédant si rapidement à trois autres
dont nous annoncions il y a peu de temps la publiration, montrent
avec quelle ardeur et quelle persévérance M. Ardouii.-Du.uazet poursuit
1 œuvre considérable qu'il a entreprise, œuvre sans précèdent et sans
équivalent dans aucune littérature.
Cet immense travail touche à sa fin; cinq autres Yolumes, en effet,
sont livrés à l'imprimerie, et l'auteur achève en ce moment les deux
séries consacrées aux Pyrénées. Quarante volumes seront donc publiés
à la fin de 1903 ; il ne restera plus à terminer que les volumes con-
sacrés à Paris et à l'Ile-de-France. Notre pays possédera alors l'étude
la plus complète, la plus documentée et la plus vivante qui lui ait en-
core été consacrée.
Ce qui donne au Voyage en France d'Ardouin-Dumazet son in-
térêt le plus vif, c'est qu'il est l'œuvre personnelle d'un unique écri-
vain qui a bien réellement vu les paysages, les villes, les industries
qu'il décrit. D'autres ouvrages portant un titre semblable ont été pu-
bliés ; ils étaient ou des compilations ou l'œuvre d'auteurs divers
manquant forcément de l'unité de vues et de points de comparaisons.
M. Ardouin-Dumazet, au contraire, est allé à travers toute la France,
consacrant quinze années à cette exploration. Il a pu dresser un ta-
bleau très précis de notre patrie, en même temps que très animé, en
dire toutes les beautés, toutes les sources d'activité. Aucun livre n'est
plus propre à faire aimer davantage la terre française.
Les quatre volumes que nous présentons aujourd'hui ont trait à des
contrées bien diverses. Entre les Landes de Gascogne et les monts
d'Auvergne aucun point de comparaison ne semble pouvoir s'établir ;
et pourtant, quand on aura lu ces livres, on verra quelles affinités
mystérieuses unissent les branches de la grande famille française. La
conquête de la lande par la forêt, la création en Auvergne d'une race
de bétail moulée pour ainsi dire sur le sol lui-même, sont des œuvres
tout à l'honneur de notre peuple et que nous exalterions sans doute
si elles étaient étrangères.
La Gascogne, telle qu'elle est envisagée dans la 30' série du
Voyage en France, ne comprend pas la partie pyrénéenne de la
province, et l'étendue du volume a nécessité le retrait des chapitres
consacrés au nord du département du Gers et au sud du Lot-et-Garonne ;
on les retrouvera dans la 31* série. Mais le livre n'en a pas moins une
unité parfaite; la plus grande partie est consacrée à la région des
Landes, à ce désert des vieux géographes qui est devenu en moins
de cinquante ans un des pays les plus riches et les plus florissants
de France. Même après Edmond About qui a raconté cette conquête
sous la trame du roman dans Maître Pierre, M. Ardouin-Dumazet a
su rendre vivante l'œuvre merveilleuse du reboisement d'une contrée
misérable.
Cette histoire de la forêt landaise, celle des Dunes, sont des pages
qu'il faut lire si l'on veut bien comprendre ia vaillance propre à cette
race française, calomniée surtout par elle-même, par ceux de ses
enfants qu'hypnotise si étrangement ce qu'ont fait les autres.
C'est la vie de la lande régénérée, l'existence de ses résiniers, ses
paysages sylvestres, ses lacs solitaires, ses rivières claires que M. Ar-
douin-Dumazet nous décrit avec un charme pénétrant. De là il nous
conduit à travers les forêts de chêne-liège du Marensin et de la Ma-
rennes, dans la Chalosse couverte de maïs et de vignes, en vue des
Pyrénées neigeuses; puis, au moment de pénétrer dans l'étonnant
éventail de rivières descendues du plateau de Lannemezan, il nous
conduit sur ces hautes terres, raconte comment ces cours d'eau se
sont formés, comment le génie humain a complété l'œuvre de la na-
ture en allant chercher dans le gave de Neste les eaux des neiges
pyrénéennes pour alimenter quinze de ces rivières trop pauvrement
dotées. Alors au long de l'Adour, de la Baise, du Gers et des autres
vallées, c'est la visite des petits pays qui se partagèrent la province
gasconne, Marsan, Gabardan, Tursan. Pardiac, Astarac, Armagnac et
tant d'autres encore î
La 31° série est consacrée à l'Agenais, à la Lomagne et au Bas-
Quercy, région heureuse où la Garonne reçoit ses grands affluents
venus des Cévennes : Lot et Tarn ; où elle hume les rivières descen-
dues de Lannemezan avec l'aumône que leur fait la Neste, pays rural,
même par ses industries. M. Ardouin-Dumazet dit la splendeur rustique
de la plaine garonnaise, la culture du tabac, l'exploitation du chêne-
liège autour de la charmante cité de Nérac, le travail des bouchonniers
à Mézin et sur les rives de la Gélise. De là il nous fait visiter les pays
de Lomagne et de Gaure, l'Eauzan, le Fezensac et le Condomois, mi-
nuscules provinces ayant conservé leur individualité malgré l'excessive
centralisation moderne.
Voici maintenant le pays des prunes avec ses vieilles et historiques
« bastides », les vergers somptueux, le fiévreux commerce des petits
pois à Villeneuve-sur-Lot, les grands paysages de l'Agenais, leurs
fières ruines féodales. Ensuite Agen et les souvenirs de Jasmin, les
bords de la Garonne vers la Lomagne et le pays de Rivière, l'élégante
Montaiiban et sa plaine d'une richesse merveilleuse.
Et de nouveau les grands paysages, avec les gorges de TAveyron,
les causses de Caylus et de Limogne, les actives cités de Gaussade et
de Septfonds où tout le monde travaille à la confection des chapeaux
de paille. Le volume se termine par la description de la vallée moyenne
du Lot, remontée de Fumel à Capdenac, région de sites superbes, eaux
pures, grandes falaises- de roches, vives fontaines, antiques et fières
petites cités dont Cahors est la reine.
A la partie la plus âpre, mais la plus curieuse aussi de ce Quercy
est consacrée la 32® série: Haut- Quercy — H au te- Auvergne.
C'est la région des avens, des gouffres, des pertes de rivières, des
sources mystérieuses et puissantes. La vallée du Celé et les abimes
de la Braunhie, les plateaux de Gourdon couverts de noyers, l'admi-
rable vallée de la Dordogne parcourue des confins du Périgord jusqu'à
ceux de l'Auvergne et du Limousin. Martel et son causse, Souillac et
le charmant bassin de Saint-Céré où naquit Canrobert, le Puy d'Issolu
où se déroula un des grands drames de la conquête des Gaules par
César. Plus haut Gra mat et son causse creusé de gouffres, le site inou-
bliable de RocamaJour, et Padirac avec ses galeries de stalactites et sa
rivière souterraine, une des merveilles de la France.
Soudain le décor change, aux calcaires Assurés, excavés, découpés,
dressés en falaises, succèdent les granits de formes moins nettes, mais
entassés en montagnes autrement élevées. Nous y pénétrons par le
pauvre Ségala entouré par le Gelé arrosant la riante vallée de Maurs
et la gorge splendide où la Gère bondit entre les roches. C'est la
Haute-Auvergne autour des formidables débris de son volcan. M. Ar-
douin-Dumazet s'y attarde volontiers, 11 nous intéresse à Aurillac, le
grand centre de la contrée, nous fait pénétrer dans les paysages
de la Cliàtaigneraie, dont il dit la mélancolie. Puis voici encore le Lot
vers Entraigues où il reçoit la Truyère, les sévères plateaux de la
Viadène, et cette solitude étonnante et sublime des gorges du Lot
entre Entraigues, Estaing et Espalion.
Nous abordons la haute montagne : l'Aubrac aux pelouses sans fin,
peuplées d'un bétail innombrable; ses lacs, le triste plateau de la
Margeride étendu à ses pieds. Vers le nord la haute vallée de la Gère
si riante et fraîche, le massif du Cantal, la belhqueuse Saint-Flour sur
sa montagne, le viaduc de Garabit, la maussade Planèze et la curieuse
Ghaudesaigues dont les habitants se chautïent avec les euux thermales
qui abondent et sonî même utilisées à la cuisine.
Achevant le tour da massif cantalien, M, Ardouin-Dnmazet visite le
Gézallier et ses hauts pâturages avant de descendre vers les petites
villes d'Allanche, de Marcenat et de Gondat, peuplées de colporteurs
dont il nous dit les curieuses mœurs commerciales. C'est de là qu'il
atteint Mauriac pour faire l'ascension du Puy-Mary, montagne autour
de laquelle rayonnent tant de vallées, et visiter la pittoresque Salers,
cœur de l'Auvergne pastorale.
La 33« série acl'.ève la description de cette belle province par la
Basse-Auvergne, c'est-à-dire la partie du pays de Gombrailles dé-
volue à la Creuse, tout le déparlement du Puy-de-Dôme et le nord de
celui de la Haute-Loire. Peu de pays ont été plus décrits que ceux-là,
surtout les massifs des monts Dôme et des monts Dore. L'auteur du
Voyage en France a su pourtant découvrir des choses nouvelles.
Après George Sand il sait nous dépeindre cette Gombrailles dont
Ghambon est le joyau. La Limagne, que tant d'écrivains ont chantée
depuis Sidoine Apollinaire, est révélée dans toute sa richesse agreste.
A Riom la cité parlementaire, l'active Clermont, la ville momiflée de
Montferrand, M. Ardouin-Dumazet commence la visite des monts phlé-
gréens. Il nous conduit au sommet du Puy-de-Dôme, en suivant la
chaîne de volcans jadis hideux mais transformés par les jeunes forêts,
dans les champs de lave de Yolvic ; au bord de la Dordogne naissante
où la foule se presse à la Bourboule et au mont Dore. De là, suivant
la Dordogne encore ton*ent, nous allons visiter les landes de Bourg-
Lastic devenues camp d'instruction, la vallée sauvage du Chavanon,
les orgues de Bort d'où les horizons sont si grandioses, et les nappes
de basalte que domine Latour-d'Auvergne.
Alors c'est l'ascension du Sancy, la visite aux lacs qui entourent ce
géant de l'Auvergne, du lac Pavin à Besse-en-Chandesse ; la visite de
tout ce massif superbe du mont Dore et la descente au long des
couzes qui conduisent à Issoire par les ruines gigantesques de Murols.
Ici nous trouvons l'Allier. L'infatigable voyageur en parcourt les
rives, depuis Monistrol jusqu'aux contins du Bourbonnais, les quittant
parfois pour monter sur la Margeride sauvage ou sur les petits monts
du Devès. Le patriote qui nous avait fait visiter jadis Alésia et le sile
— G —
d'Uxollodunum nous fait accomplir le pèlerinage de Gergovie et re-
trouvei' les traces de Vercingétorix.
A la fin du voluaie nous avons quitté l'Allier pour la Dore, après
avoir visité Pont-du-Château et ses mines d'asphaite, la vénérable
Billom, Lezoux et ses riches campagnes. Et nous voici dans le Livra-
dois, vers OUiergues enfoncé dans son cirque, et l'industrieuse Ambert.
Là sont nos plus vieilles papeteries de France dans les vallons soli-
taires ouverts au pied des monts du Forez. Plus loin, voici les pre-
mières dentellières, sur le plateau glacé de la Chaise-Dieu où se dresse
nne des plus merveilleuses églises abbatiales. Par cette haute et morne
plaine, en traversant Craponne, nous gagnons la vallée de la Loire
pour prendre pied sur la rive droite du fleuve, dans ce pays vellave
auquel sera consacrée la plus grande partie de la 34' série.
Ceci n'est qu'une sèche ènumération des principaux chapitres de
ces volumes, qui n'auront pas moins de succès que leurs prédéces-
seurs. Comme eux ils se recommandent par la vivacité des descrip-
tions, le pittoresque obtenu sans être cherché et les qualités littéraires
qui rendent attrayants cet ouvrage énorme cependant.
Aussi les récompenses n'ont pas manqué au Voyage en France.
L'Académie française par deux fois, la Société des gens de lettres
jugeant un de ses pairs, la Société de géographie et la Société de
géographie commerciale de Paris ont couronné l'œuvre. Celte dernière
lui a décerné la médaille de France dès le vingtième volume, et son
rapporteur disait :
Il y a donc encore des coins insuffisamment connus en France ?
Posez cette question devant M. Ardouin-Dumazet ! Il vous répo?i-
dra en vous montrant les volumes déjà parus de son u Voyage en
France », Œuvre encore inachevée, sans doute; mais fallait-il
atte/idre encore, après vingt volumes, pour récompenser l'œuvre ?
Aucun de nous ne l'a pensé.
L'auteur nous entraine de ptrovince en jirovince, de ville en ville,
d'usine en usine. C'est ua tour de France, effectué avec le compagnon
le plus aimable, le plus instruit, le plus débrouillard, le plus insa-
tiablement curieux qui se puisse imaginer. M. Ardouin-Dumazet en-
tend étudier de près, voir, toucher, comprendre ce qu'il décrit, ce
qui fait qu'une fois en jmssession de son sujet, il l'expose avec une
aisance extrême, avec le talent de se faire lire jusqu'au bout.
Lu plume est alerte, sans prétention ; pas de ptl^CL^éoloyie ; des
monceaux de faits et de chiffres, dressés jwur l'édification du lecteur
par les voies les plus courtes. Pays, mœurs, production industrielle,
agriculture, conditions du travail, dans chaque localité, tout est passé
en revue avec intelligence et sincérité. Uauteur nous appartient sur-
tout par le côté économique et commercial. On sent que l'on a en lui
sur ce terrain un guide à qui l'on peut se fier.
L'un de nous a dit que l'œuvre de M. Ardouin-Dumazet était ce qui
avait été publié de plus agréable et de plus complet en ce genre
sur la France depuis le célèbre voyage d'Arthur ïoung à la fin du
xvin° siècle. Les préoccupations de l'auteur moderne sont inoins ex-
clusivement ag?'icoles que celles de son prédécesseur, et Arthur Young
parcourait lentement nos campagnes sur une jument grise, tandis que
M. Ardouin-Dumazet use de tous les moyens de locomotion.
Notre auteur a été soldat avant d'être écrivain. Franc-tireur en
i870, il combattit à Dijon, à Nuits, à Yesoul ; il s'engagea en 1872
dans un régiment de ligne, passa de là aux tirailleurs algériens,
forma une Société de géographie à Tlemcen, fut élu membre de la
Société de géographie de Bordeaux et membre correspondant de notre
Société. Il était alors caporal. Le suivre dans les nombreuses péri-
péties de sa carrière m'entraînerait trop loin. Il s'est fait lui-même,
il a été un écrivain d'une fécondité extraordinaire, il a enfin composé
une belle œuvre sur notre pays : nous lui avons donné la médaille
de France.
Ce que la Société de géographie commerciale a pensé du Voyage
en France, la Société de géographie de Paris l'avait dit en lui attri-
huant le prix Félix Fournier.
M. Ardouin-Dumazet s'effoi'ça donc de faire une étude sérieuse très
documentée et très au courant, en s'appuyant non pas seulement sur
ce qui avait été écrit avant lui, mais en allant sur place, en consul-
tant les industriels, les commerçants, les propriétaires, tous ceux,
en un mot, qui étaient en état de lui fournir des renseignements
vécus. On sent tout ce qu'il faut d'esprit critique et d'indépendance
pour 7ie pas se laisser influencer, pour négliger les querelles locales,
les amours -propres froissés et ne retenir de ces informations, souvent
oiseuses et interminables, que le trait décisif et l'argument qui porte.
Ce n'est plus ici le sec et fastidieux résumé d'un auteur qui abrège
des documents officiels, c'est l'impartial exposé d'efforts personnels
encore tout vibrants de la lutte, et cela donne au style, avec une
trame solide, une intensité de vie, une propriété d'expression qui sont
la caractéristique même de cet ouvrage.
Pour tous, le nom d'Àrdouin-Dumazet et le Voyage en France
sout désormais iQ^éparables. Nous avons cité déjà le mot de ce pro-
fesseur d'une de nos grandes Universités, disant qu'il voyait là pour
la première fois « une géographie nationale vraiment digne de ce
nom, autant sous le rapport des recherches nouvelles et inattendues,
que de la méthode d'exposition, et qui laisse bien loin derrière elle
tout ce qui a été tenté dans ce genre ; — en un mot, une œuvre mo-
derne dans la meilleure acception du terme ».
Le succès du Voyage en France est d'autant plus frappant,
que l'auteur, tout à son œuvre et à ses travaux spéciaux d'écrivain
militaire, n'a pas recherché le bruit autour de sa remarquable crëik-
tion. Les distinctions et les encouragements dont elle a été l'objet lui
sont venus sans qu'il les ait sollicités. Cet ensemble de livres consa-
crés à un même sujet, qu'à bon droit on peut appeler une bibliothèque
nationale et qui constitue un des plus considérables labeurs de ce
temps, s'est imposé par sa seule valeur.
Nous ne saurions trop insister sur ce point. Ce n'est pas une
géographie duns le sens étroit de ce mot. C'est encore une œuvre
littéraire et historique, d'une portée considérable. L'Académie fran-
çaise, appelée pour la seconde fois à couronner le Voyage en
France, a tenu à bien marquer son sentiment à cet égard, en lui
attribuant le prix Narcisse xMichaut, qu'elle décorne tous les deux ans
à l'auteur du meilleur ouvrage de littérature française.
Volumes parus :
l'o Série: LE MORVAN, LE VAL DE LOIRE, LE PERCHE. — Le flottage
en Morvan — les bûcherons du Nivernais — au pays des nourrices —
le Nivernais industriel — le Nivernais pastoral — une usine nationale
(Guérigny) — Gien et la Puisaye — la Sologne — paysages solognots
— les colons de Sologne — la Sologne berrichonne — le safran en
Gâtinais — Orléans — les roses d'Olivet — les troglodytes du Vendô-
mois — les vignes du val de Loire — la capitale des tanneurs • — la
Champagne tourangelle — Rabelais, guide en Touraine — la réglisse
— la Touraine industrielle — Mettray — le Perche — le percheron en
Amérique — le Grand-Perche — les forêts du Perche — la vallée delà
Sarthe — ce que deviennent les hêtres — la Flèche et le payslléchois.
— 370 pages avec 19 cartes ou croquis.
2« Série: DES ALPES MANCELLES A LA LOIRE MARITIME. — Les Alpes
lîiancelles — le pavé de Paris — la Ghanipag-ae mancelle — Sablé et
ses marbres — Laval et Port-du-Salut — chez les Chouans — dans la
Mayenne — l'agriculture dans le Bas-Maine — aiguilles et épingles —
le point d'Alençon — le Camembert — Fiers — la Suisse normande —
Angers et les ardoisières — ardoises et primeurs — le guignolet et le
vin d'Anjou — Saumur — la bijouterie religieuse — le Bocage vendéen
— sur la Loire, d'Angers à Nantes — Grand-Jouan — Clisson et les
lacs de l'Erdre — le lac de Grand-Lieu — la Loire, de Nantes à Paim-
bœuf. — 356 pages avec 24 cartes,
(Ces deux volumes ont été couronnés par l'Académie française dès
leur apparition; les 23 suivants ont obtenu une nouvelle et haute
récompense.)
3» SÉRIE : LES ILES DE L'ATLANTIQUE. — 1. D'Arcachon à Belle-Isle.
— L'île aux Oiseaux — la Seudre et les îles de Marennes — l'île d'Ole-
ron — île d'Aix — île Madame et Brouage — île de Ré — île d'Yen
— île de Noirmoutier — de l'île de Bouin à Saint-Nazaire — archipel
de la Grande-Brière — île Dumet et la presqu'île du Croisic — Belle-
Isle-en-Mer. — 318 pages avec 19 cartes.
4« Série: LES ILES DE L'ATLANTIQUE. —II. D^Hoerfic à Owma/i^. — Ile
d'Houat -- La Charte des îles bretonnes — île d'Hoëdic— le Morbihan
et la presqu'île de Rhuys — île aux Moines — petites îles du Morbihan
— îles d'Ars et d'Ilur — île de Groix — île Chevalier et île Tudy —
archipel des Glénans — la ville close de Concarneau — île de Sein
— île de Molène et îlots de l'archipel d'Ouessant — l'île d'Ouessant —
îles de la rade de Brest. — 322 pages avec 25 cartes.
5« SÉRIE : ILES FRANÇAISES DE LA MANCHE ET BRETAGNE PÉNINSULAIRE.
— Les îles de l'Aber-Vrac'h — île de Siec — île de Batz — Morlaix et
son archipel — les Sept-lles — île Grande (Énès Meur) et son archipel
— archipel de Saint-Gildas — les îles d'Er — archipel de Bréhat —
le Goëllo et le Penthièvre — au berceau de la Tour-d'Auvergne — en
Cornouailles — au pays de Brizeux — Bretagne celtique, Bretagne
française — Mi-Voie et Brocéliande — de Vitré au mont Saint-Michel —
la Hollande de Normandie — Saint-Malo, la Rance et Dinan — Gran-
ville, les Chausey et les Minquiers. — 407 pages avec 29 cartes.
6« Série: COTENTIN, BASSE-NORMANDIE, PAYS D'AUGE, HAUTE-NORMAN-
OIE, PAYS DE CAUX. — Une ville de chaudronniers — les Vaux-de-Vire
— la Déroute et les lignes de Carentan — le duché de Coigny — la
Hougue — Cherbourg et la Hague — Bayeux et le Bessin — la campa-
gne de Caen — la foire de Guibray — du Bocage à la mer — le lit-
toral du Calvados — la vallée d'Auge — en Lieuvin — Trouville et la
Côte-de-Gràce — Je marais Yernier et la Rislo — Évreux et le Saint-
André — tringlots et enfants de troupe — les draps d'Elbe uf — de
0^
v^
^o\;age en j^rance
VOLUMES PARUS
Morvan, Val de Loire et Perche.
Des Alpes mancelles à. la Loire maritime.
Les Iles de l'Atlantique : I. lïÂreachon à Selle-hU.
— II. D'Ho'édlc à Ouessant.
Iles de la Manche et Bretagne.
Normandie.
La Région lyonnaise.
Le Rhône, du Léman à la mer.
Bas-Dauphiné.
Les Alpes, du Léman à la Durance.
Forez, Vivarais, Tricasliu, Comtat-Venalssln.
Alpes de Provence et Alpes maritimes.
Région marseillaise et Côte d'Azur.
I>a Corse.
Charentes et Plaine Poitevine.
De Vendée en Beauce.
Vexin, Picardie et pays de Caux.
Nord : I- tlandre et Littoral.
IVord: n. Artois, Cambréiia «t Hainaut.
Haute-Picardie, Champagne rémoise et Ardenncs^
Haute-Champagne; Basse-Lorraine.
Plateau lorrain et Vosges.
Plaine Comtoise et Jura.
Haute-Bourgogne.
Basse-Bourgogne et Senonais.
Berry et Poitou oriental.
Bourbonnais et Haute-Marche.
Basse-Marche et Limousin.
Bordelais et Pérlgord.
Gascogne.
Agenals, Lomagne et Bas-Quercy.
Ilaut-Quercy, Haute-Auvergne.
Basse-Auvergne.
SOUS PRESSE :
34. Velay, Vivarais méridional, Gévaudan.
35. Rouergue et Albigeois.
36. Cévennes méridionales. -,
87. Golfe du Lion. ^
38. Haut-Languedoc .
> EN PRÉPARATION : \
39. Pyrénées (Partie orientale). — (Départements des Pyrénées-Orlent.iles, Aude, Arlége
A''. Pyrénées (Partie occidentale). — (Départements des Hautes et Uasses-Pyréné<;s )
4i-j;i. Paris et l'Ile-de-France.
— 12 —
l'Avre à Ja Risle — de la Risle à l'Aiidelle — Rouen. — le royaume
d'Yvetot — !e Mascaret — le Havre. — 455 pages avec 30 cartes.
7« Série: LA RÉGION LYONNAISE: LYON, MONTS DU LYONNAIS ET DU
FOREZ. — Lyon — rôle social de Lyon — a travers Lyon — la Groix-
Kousse et Vaise — du Gourguillon au mont d'Or — la plaine du Dau-
phiné — Vienne et le pays des cerises — le mont Pilât — les monts
du Lyonnais — de Vichy a Thiers — de TLiiers à Pierre-sur-Haute —
Montbrison, la plaine du Forez et Saint-Galmier — les monts de Tarare
— le col des Sauvages et Thizy — Cours et Roanne — le berceau de
Félix Faure — la diligence des Écharmeaux — le Beaujolais et la foire
de Montmerle — Teinturiers et tireurs d'or. — 34-i pages, 19 cartes.
8° Série: LE RHONE DU LÉMAN A LA MER : DOMBES, VALROMEY ET
BUGEY, BAS-DAUPHINE, SAVOIE RHODANIENNE, LA CAMARGUE. —Eu Dombes
— la Bresse et le Bugey — la corne et le celluloïd — Saint-Claude
et ses pipes — la Valserine et la perte du Rhône — le Vairomey et
Belley — les lacs du Bas-Bugey — les Balmes viennoises — l'île de
Grémieu — la Hollande du Dauphinô — du lac d'Âiguebeleite au lac
du Bourget — le lac d'Annecy — Albertville et l'Arly — les horlogers
de Cluses — le Rhône de Bellegarde à Seyssel — les défilés de
Pierre-Chàtel — Yillebois et le Sault du Rhône — le Rhône, de Lyon
à Valence — le Rhône, de Valence à la mer — en Camargue — les
Saintes-Maries-de-la-Mer — les vignobles et les troupeaux. — 325 pages
avec 22 cartes.
9« Série: BAS-DAUPHINÉ : VIENNOIS, GRAISIVAUDAN, OISANS, DIOIS ET
VALENT INOIS. — Le lac de Paladru et la Fure — du Rhône à la Morge
— la noix de Grenoble — Voiron et la Chartreuse — Grenoble — de
Grenoble à la Mure — la Mateysine et Yizille — Uriage, le Pont-de-
CJaix — rOisans — en Graisivaudan — le pays du gratin — Tournon,
Tain et l'Ermitage — le Valentinois — Grest et la Drôme — le chemin
de fer du col de Cabres — les premiers oliviers — Dieulefit et la forêt
de Saou — le Vercors — le Royannais — les Ouatre-Montagnes —
357 pages avec 23 cartes.
10« Série: LES ALPES DU LÉMAN A LA OURANCE. — Les chasseurs
alpins — en Tarentaise — en Maurienne — dans les Bauges — le
Genevois — le Léman français — du Faucigny en Ghablais — des
Dranses au mont Blanc — les alpages de Roselend — le poste des
Ghapieux — la redoute ruinée du petit Saint-Bernard — au mont Iseran
— au pied du mont Genis — une caravane militaire — le Briançonnais
— du mont Genèwe au val de Névache — en Yallouise — le Queyras
— les Barcelonnettes au Mexique — les défenses de l'Ubaye — Embrun
et Gap — du Ghampsaur en Valgodemard — en Dévoluy — du Trièves
en Valbonnais. — 374 pages avec 25 cartes.
— 13 —
ne Série: FOREZ, VIVARAIS, TRICASTIN ET COMTAT-VENAISSIN. — La
vallée du Gier — lacets et cuirasses — les armuriers de Saiiit-Élienne
— rubaniers et cyclopes — le pays des serruriers — la vallée de
rOndaiue — Annonay et ]a Déôme — le Meygal — la Genève du Viva-
rais — du Rhôae aux Boutières — sous les mûriers de l'rivas — de
Viviers à Vais — le Pradel et le Teil — en Tricastin — l'enclave de
Valréas et les Barounies — les dentelles de Gigondas — le Pont-Saint-
Esprit — la principauté d'Orange — Carpentras — au mont Ventoux
— en Avignon — la fontaine de Vaucluse — les melons de Cavaillon.
— 362 pages avec 25 cartes.
12« SÉRIE : ALPES DE PROVENCE ET ALPES MARITIMES. — Au pays de
Tartarin — la foire de Beaucaire — Uzès et le pont du Gard — les
huiles de Salon — iN'oël chez Mistral — le félibrige et Saint-Uemy-de-
Provence — des Âlpilles en Arles — d'Arles en Cruu — au pied du
Luberon — les pénitents des Mées — la vallée du Buech — de Gap
à Digne — les brignoles de Barrême — les amandiers de Valensole
— les faïences de Moustiers — le Plateau du Var — Aix-en-Provence
— les champs de Pourrières — du Carami à l'Argens — de Draguignan
à Grasse — les parfums de Grasse — de Menton aux Mille-! ourdies
— la Vésubie — la Tinée — les gorges du Var — du Var à l'Ubaye.
— 382 pages, 30 cartes, dont celle des Alpes hors texte.
13« SÉRIE : LA PROVENCE MARITIME. — La petite mer de Berre — les
Bourdigues de Garonte — de Roquefavour au Pilon-du-Roi — les mines
de Fuveau — les cài)riers de Roquevaire — à travers Marseille — les
ports de Marseille — du vieux Marseille aux cabanons — de la Ciotat
aux calanques — Toulon — la rade de Toulon — la batterie des Hommes
sans peur — l'archipel des Embiez, les gorges d'Ollioules — les
cerisaies de SoUiès-Pont — Hyères et les Maurettes — les Lies d'Or :
Giens et Porquerolles, Bagaud, Port-Gros et le Levant — des Maures à
Saint-Tropez — traversée nocturne des Maures — au pied de l'Estérel
— Cannes et Antibes — les îles de Lérins — Nice — Nice-Cosmopolis
— Nice, camp retranché — de Nice à Monaco — Menton et la frontière.
— 405 pages avec 28 cartes.
U« SÉRIE : LA CORSE. — La Balagne — Calvi et la Balagne déserte
— la Tartagine et Gortè — de Tavignano à Pentica — la Gravone et
Ajaccio — autour d'Ajaccio — la Cinarca — une colonie grecque — les
cédratiers des calanches — une vallée travailleuse (Porto) — dans la
forêt corse — le Niolo — les gorges du Golo — Mariana et la Casinca
— la Castagniccia — autour de Bastia — le cap Corse — de Marseille
à Sartène — les bouches de Bonifacio — une vendetta (Porto-Vecchio)
— le Fiumorbo — un essai de grande culture — l'immigration luc-
quoise — la vallée du Tavignano — l'avenir de la Corse. — 320 pages
avec 27 cartes ou croquis, 7 vues et une planche hors texte.
15« SÉRIE : LES CHARENTES ET LA PLAINE POITEVINE.— Le pays d'Àn-
goumois — les papiers d'Angoulêrae — au pays des colporteurs — les
— 14 —
merveilles de la Braconne — les sources de la Touvre — une usine
nationale : Ruelle — de la Charente au Né — la Champagne de
Cognac — le vignoble de Cognac — la fabrication du cognac — les Pays-
Bas de Jarnac —dans les Fins-Bois — le Confolentais — de la Tardoire
à la Dronne — la double Saintongeaise — Ja Charente maritime (de
Saintes à Rochefort) — La Rochelle — les vignes et les laiteries de
l'Àunis — les bouchots à moules — Niort et la plaine ])oitevine —
l'école militaire de Saint-Maixent — les protestants da Poitou — les
mulets de Melle. — 385 pages avec 26 cartes.
16« SÉRIE : DE VENDÉE EN BEAUCE. — La vallée de la Yonne à Sanxay
— de Lusignan à Poitiers — les armes blanches de Châtellerault —
en Mirebalais — Oiron et Thouars — la Vendée historique — les Alpes
vendéennes — le Bocage vendéen — la forêt de Vouvant — les marais
de la Sèvre Niortaise — le Marais vendéen — Luçon et son marais —
l'estuare du Lay — la Vendée moderne — le pays d'Olonne ^ — de la
Loire à la Vie — de Bressuire en Gâtine — le Thouet el l'École de
Saumur — au pays de Rabelais — de Tours au pays de Ronsard —
la Beauce dunoise et Blois — les champs de bataille de la Beauce —
la Beauce chartraine — Perche-Gouët, Thimerais et Drouais. — 388 pages
avec 30 cartes.
17« SÉRIE : LITTORAL DU PAYS DE CAUX, VEXIN, BASSE-PICARDIE. — Les
falaises de Caux — Dieppe et la vallée de la Scie — de valleuse en
valleuse — l'Aliermont — le pays de Bray — en Vexin — les table-
tiers de Méru — les éventaillistes au village — le pays de Thelle —
Beauvais — les opticiens du Thérain — la vallée dorée — de la Brèche
à la Noyé — l«s tourbières de Picardie — Amiens — dans les hortil-
lonnages — les bonnetiers du Santerre — pendant les manœuvres —
l'Amiénois et la vallée de la Bresle — les dernières falaises — les ser-
ruriers de Vimeu — d'Escarbotin à la baie de Somme. — 398 pages
avec 24 cartes.
18« SÉRIE : FLANDRE ET LITTORAL DU NORD. — Roubaix — la forte-
resse du collectivisme — Tourcoing et le Ferrain — le Val de Lys —
le vieux Lille — le nouveau Lille — mœurs lilloises — la Flandre
guerrière — l'agriculture dans le Nord — les villes industrielles de la
Lys — la Flandre flamingante — les monts de Flandres — les Moëres
— Dunkerque et son port — la pèche à Islande — Fort-Mardyck et
Gravelines — dans les Wateringues — en Morinie — Langle, Bredenarde
et Pays reconquis — la fabrication des tulles — en Boulonnais — Bou-
logne et ses plumes métalliques — la côte boulonnaise — de la Canche
à l'Authie — le Marquenterre et le Ponthieu — le cheval boulonnais.
— 456 pages avec 30 cartes.
19« SÉRIE : ARTOIS, CAMBRÈSIS ET HAINAUT. — Les sources de la
Somme — le champ de bataille de Saint-Quentin — la vallée de l'Omi-
gnon — de la Somme à l'Ancre — le pays des phosphates — la Nièvre
picarde — le pays d'Arras — Âzincourt, Enguinegatte et Thérouanne
— le pays noir de Béthune — l'armée au pays noir — Alleu, Weppes
et Escrebieux — Bapaume et la source de l'Escaut — En Gambrésis
— Caudry et le canton de Glary — Cambrai — la plus grande sucrerie
du monde — en Ostrevent — de la Scarpe à l'Escaut — le pays noir
d'Anzin — Valenciennes et le Hainaut — la vallée de la Sambre —
la vallée de la Solre — Fourmies — la trouée de l'Oise. — 398 pages
avec 28 cartes.
20" SÉRIE : HAUTE-PICARDIE, CHAMPAGNE RÉMOISE ET ARDENNES. — En
Noyonnais — en Soissonnais — en Laonnais — les vanniers de la Thié-
rache — le familistère de Guise — la vallée de l'Oise et Saint-Gobain
— Coucy et le Tardenois — Reims — Épernay et le vignoble d'Ay —
la montagne de Reims et ses vins — le camp de Ghàlons — les
Champs catalauniques — le Rethelois et le Porcien — entrée dans
l'Ardenne — le royaume de la quincaillerie — la principauté de Ghâ-
teau-Regnault — les Dames de Meuse — les Givets — Rocroi et le
cheval ardennais — le champ de bataille de Sedan — Sedan industriel
et ses annexes — De l'Argonne en Champagne pouilleuse — la héron-
nière du Grand-Écury — Vertus et le mont Aimé. — 40 1 pages, 22 cartes.
21« SÉRIE : HAUTE-CHAMPAGNE, BASSE-LORRAINE. — La Brie champe-
noise — la Champagne pouilleuse — le Perthois et le Der — le val
de l'Aube — le pays de Morvois — les Bonnetiers de Troyes — le
pays d'Othe — de Troyes à Glairvaux — en Bassigny — les couteliers
de Nogent-le-Roi — la montagne d'Auberive — le plateau de Langres
— du Bassigny en Ornois — le Vallage — la métallurgie en Cham-
pagne — en Barrois — le Blois, la Voide et le Pays des Vaux — les
opticiens de Ligny — Vaimy et le Dormois — les défilés de l'Argonne
— Varennes, le Clermontois et les Islettes — le Verdunois — Dom-
remy et Vaucouleurs — les côtes de Meuse. — 419 pages avec 27 cartes.
22« SÉRIE : PLATEAU LORRAIN ET VOSGES. — Le Luxembourg fran-
çais — le pays du fer — le Jarnisy et Briey — la Woëvre — le pays
de Haye — l'Ecole forestière de Nancy — Nancy — le Vermois et le
Saulnois — le Xaintois — Luthiers et Dentellières — dans les Fau-
cilles — la Vôge — un pèlerinage à Roville — Épinal et l'industrie
des Vosges — les images d'Épinal — de la Mortas:ne à la Vezouse —
la Vologue — les lacs Vosgiens — la principauté de Salm-Salm et
Saint-Dié — le Val-d'Ajol et Plombières — la Haute-Moselle — les
Vosges militaires — la Moselotte — le Ballon de Servance — au Ballon
d'Alsace. — 427 pages avec 27 cartes.
23" SÉRIE : PLAINE COMTOISE ET JURA. — Les vanniers de Fayl-Billot
— le bailliage d'Âmont — la Saône franc-comtoise — la vallée de
rOgnon — les Vosges comtoises — Besançon et ses horlogers — le
couloir du Doubs — le pays de Mnntbéliard — Belfort et le Sundgau —
Beaucourt et ses satellites — le Lomont — les fruitières jurassiennes
— les sources de la Loue — le lac de Chaillexon — le Saugeais et le
Baroichage — le lac de Saint-Point — de Champaguole au Val de Mièges
— IG —
— l'Ecosse du Jura — Morez — la vallée des Dappes et la Faucille —
le pays de Gcx — les Lapidaires de Septmoncel et de Saint-Claude —
GJairvanx et le Graudvaux — la Moyenne Montagne. — 423 pages
avec 25 cartes.
24« SÉRIE : HAUTE-BOURGOGNE. — Dijon — dans les hnublonnières
— les Pays bas de Bourgogne — le vignoble de la Gôte-d'Or — la
côte dijonnaise — la côte de iNuits et Giteaux — Beaune et sa côte — le
finage et Dôle — la forêt de Ghaux et le Yal d'Amour — le Boa Pays —
Chalon-sur-Saône et la Bresse chalonnaise — Bresse bressane et Rever-
mont — la Bresse louhanaise — la côte mâconnaise — au long de la
Saône — de royaume en empire — au pays de Lamartine — la côte
chalonnaise et Cluny — des Grosnes au Sornin — en Brionnais —
Charollais et Combrailles — la Loire bourguignonne. — 399 pages
avec 30 cartes.
2b« SÉRIE : BASSE-BOURGOGNE ET SÉNONAIS. — Le seuil de Longpendu
— la vallée de la céramique — le Creusot — Bibracte et Autun — le
pays de l'huile — le Morvan bourguignon — en Auxois — autour
d'Alésia — le vignoble des Riceys et l'Ource — Châtillonnais et Dues-
mois — aux sources de la Seine — l'Avallonnais — la Cure et l'Yonne
— en Auxerrois — le Tonnerrois — en Sénonais — la Puisaye — le
Gàtinais français — le Gàtinais Orléanais — entre Sologne et Gâtinais.
— 373 pages avec 24 cartes.
26« SÉRIE : BERRY ET POITOU ORIENTAL. — Le Sancerrois et la Forêt
— les Forêtins — les arsenaux de Bourges — le camp d'Avord et la
Septaine — le canal du Berry — du Cher à l'Arnon — une colonie
d'aliéués — porcelainiers et forgerons du Berry — Issoudun et Chà-
teauroux — la Champagne berrichonne — la vallée du iNahon — les
moutons du Berry — la basse vallée de l'Indre — en Brenne — de la
Glaise à la Creuse — de Touraine en Acadie — les carrières du Poi-
tou — la Beauce montmurillonnaise — entrée en Boischaut — les
1 ingères d'Argenton — le pays de George Sand — la Creuse et la Gar-
gilesse. — 365 pages avec 25 cartes.
27« Série : BOURBONNAIS ET HAUTE-MARCHE. — Nevers et le bec
d'Allier — Moulins et Souvigny — Sologne bourbonnaise — la vallée
de la Besbre — monts de la Madeleine — Limagne bourbonnaise —
le berceau des liourbons — des côtes Matras à la Sioule — de la
Sioule à la BouMe — houillères de Commentry — la forêt de Tronçais et
Montluçon — un tour en Berry — entrée dans la Marche — les maçons
de la Creuse — la tapisserie d'Aubusson — au long de la Creuse —
les Trois-Gornes et la Sedelle — aux sources de la Gartempe — du
Taurion à la Maulde — le plateau de Gentioux. — 3j2 pages avec
27 cartes.
28^ SÉRIE : LIMOUSIN. — La basse Marche — les montagnes de
Blond — les monts d'Ambazac — Limoges — émaux et porcelaines
— 17 —
— aalour de Limoges — Saint-Juaien et ses gantiers — aux conCms
du Périgord — la Chine du Limousin — la haute vallée de la Vienne
— Treignac et les Monédières — Meymac et Ussel — le plateau de
Millevaches — la Corrèze et Tulle — le cbàtjau d'Lîzerche — ardoises
et primeurs — Ségur et l'Àuvézùre — de Pompadour à la Vézère —
Brive-la-Gail larde — iXoailles et Turenne — la Dordogne limousine
— entre Argeniat et Tulle. — 350 pages avec 24 cartes.
29^ SÉRIE : BORDELAIS ET PÉRIGORD. — Le Libournais — les vins de
IJordeaux — bordeaux — l'activité bordelaise — navigation sur la Gi-
ronde — le Mcdoc des grands vins — les landes du Medoc — la
pointe de Grave — la Gironde saintongeais.e — Biayais et Bourgeais —
le Saint-Émilionnais — l'Entre Deux-mers — en Bazadais — la Dor-
dogne en Périgord — la Double — de la Dronne à la Nizoune — Péri-
gueux et ITsIe — le pays du père Bugeaud — le Nontronnais — chez
nos aïeux préhistoriques — les truiïes du Sarladais. — 411 pages
avec 31 cartes.
30*» SÉRIE : GASCOGNE. — Le Bazadais — la conquête des Landes —
les landes de Bordeaux — autour du bassin d'Arcachon — Arcachon
et les dunes — le Captalat de Buch — le pays d'Albret — le iMarsan
et le Gabardan — de la Midouze à la Leyre — le pays de Born — les
lièges de .Marantin — de Dax au Vieux-Boucau — Cap-Breton et la Ma-
remne — la Chalosse — la Rivière-Basse et le Tursan — le plateau
de Lanneme/an — le Pardiac et l'Astarac — l'Armagnac. — 340 pages
avec 26 cartes,
31« SÉRIE : AGENAIS, LOWIAGNE ET BAS-QUERCY. — La plaine de la Ga-
ronne — la va lec du Drot — les landes de Lot-et-Garonne — la capi-
tale du Béarnais — les bouchonniers de Mézin — Lomagne, Gaure et
Fezenzaguet — le Fezensac et l'Eauzan — le Condomois — le pays
des prunes — les petits pois de Villeneuve — le tiaut-Agenais — Agen
et ses campagnes — le Bas-Quercy — Lomagne et Rivière -Verdun
— la rivière m intilbanaise — les chapeaux de paille du Quercy —
les gorges de l'Aveyron — les cingles du Lot — le causse de Limôgne
— le Lot entre Rouergue et Quercy. — Avec 22 cartes.
32« série : HAUT-QUERCY ET HAUTE-AUVERGNE. — Le Côlé et la Brauuhie
— Gourdon et la Bouriane — le causse de Martel — de César à Gan-
robert — le causse de Gramat — de Gapdenac au Segala — les gorges
de la Gère et Auriilac — la Châtaigneraie — Gampnac et Viadéne —
dans l'Aubrac — en Carladès — Saint-Flour et la Planèze — Luguet
et Cézallier — le Féniers et l'Artense — du sommet du puy Mary —
les bœufs de Salers. — Avec 21 cartes.
33« série: BASSE-AUVERGNE. — Combrailles et Franc-Alleu — les
houillères de la Combrailles — la Limagne — le puy de la Poix —
Clermont-Ferrand — au puy de Dôme — le reboisement dans le Puy-
de-Dôme — le mont Dore — le camp de Bourg-Lastic — les orgues
— 18 —
de Bort — le puy de Sancy et les lacs d'Auvergne — du mont Dore
à l'Ailier — du Velay à la Margeride — de Brioude à Issoire — Ger-
govie — de l'Allier à la Dore — en Llvradois — du Livradois en Forez
— de la Loire aux Boutières. — Avec 23 cartes.
Sous presse:
34« série : VELAY, VIVARAIS MÉRIDIONAL, GÉVAUDAN. — Le Lignon-
Yellave — le pays d'Emblavés et le Puy — la dentelle du Puy — Po-
lignac et le volcan de Bar — le mont Mézenc — à la source de la
Loire — le lac d'Issarlés — le lac du Bouchet — entrée en pays cé-
vennol — de la Gère à l'Ardèche — au long de l'Ardèche — ascension
du mont Lozère — Mende et le Gévaudan — le plateau de la Marge-
ride — le palais du roi — le causse de Sauveterre — les gorges du
Tarn — autour du causse Méjean — entre causses et Gévennes —
Bramabiau et l'Aigoual.
35« série : ROUERGUE ET ALBIGEOIS. — La basse Marche du Rouergue
— le bassin de Decazeville — la montagne qui brûle — Rodez et le
causse du Gomtal — Espalion et le causse de Bozouls — le causse de
Séverac — Millau — les brebis du Larzac — à travers le Larzac —
les caves de Roquefort — le rougier de Gamarés — à travers le
Ségala — entrée en Albigeois — le pays de Gocagne — Garmaux et
ses mines — entre Tarn et Dadou — les vins de Gaillac — Castres et
son causse — une page d'histoire industrielle — Mazamet, la Mon-
tagne- JNoire et le Thorè.
36« série : CÉVENNES MÉRIDIONALES. — La Gardonnenque — le bassin
d'Alais — le Guidon dn Bouquet — entre Uzès et Anduze — la Salen-
drenque — le Gardon de Mialet — la Vallée française — Bramabiau
et l'Aigoual — la haute vallée de l'Hérault — la vallée de la Dourbie
— de l'Hérault au Vidourle — Sommiéres et le Salavès — les gorges
de Saint-Gui Ihem — la vallée de la Lergue — Villeneuvette et Béda-
rieux — l'Escandorgue et l'Espinouze — la Vernazobres et la Cesse
— en Minervois.
37" série : GOLFE DU LION. — Mmes — le JNemauzès — les mazets
des Garrigues — aux bords du petit Rhône — Aiguesmortes — le
vignoble des Sables — la Vannage et la Vidourlenque — Montpellier
— la cité morte de Maguelonne — Cette — Agde et l'étang de Thau
— le fleuve Hérault — Béziers et le Bitterrois — Narbonne — le lac
Rubrensis — La Nouvelle et Leucate — Rivesaltes et la Salanque —
les jardins de Perpignan — au pied des Albéres — Port-Vendres et
Banyuls.
38e série : LE HAUT-LANGUEDOC — Le Sidobre et Lacaune — les monts
de Lacaune et l'Espinouze — du Suumail en Cabardès — de Saint-
— 19 —
Paponl à Sorèze — les rigoles du canal du Midi — en Lauragais —
Garcassonne et le Carcasses — dans les Corbières — le Fenouillèdes
— les défllés de Pierre-Lis — le Razès — le Kercorbis — le Mirepoix
— de l'Ariège à la Garonne — Toulouse — le pays toulousain — en
Bas- Gomminges et Néboazan.
En préparation :
39» série : PYRÉNÉES (PARTIE ORIENTALE). — Le Vallespir — le Gon-
flent — la Gerdagne — le Capcir — au col de Perthus — au pied du
Canigou — la vallée de la Têt — le pays de Sault — autour de Foix
— le Donézan — la haute Ariège — la mine aux mineurs de Raucié
— le pays de Sérou — la grotte du Mas-d'Azil — le Gouserans — les
ours d'Ustou — la vallée de Luchon — le val d'Âran — le haut Gom-
minges.
40° série : PYRÉNÉES (PARTIE OCCIDENTALE). — La barre de l'Àdour —
le pays de Labourd — en pays basque — de l'Adour au Gave — la
basse Navarre — la Soûle — entrée en Béarn — vallée d'Aspe — de
la vallée d'Aspe à la vallée d'Ossau — la vallée d'Ossau — Oloron ù
Sauveterre — le gave^ d'Orthez à Pau — autour de Pau — entrée en
Bigorre — le Lavedan — Gavarnie et Cauterets — la plaine de Tarbes
— le haut Adour — le pic du Midi.
41" et 42» séries : PARIS ET L'ILE DE FRANCE.
Nous ferons connaître dans une prochaine notice le plan de ces vo-
lumes par lesquels se terminera le Voyage en France.
Juillet 1903. Les Éditeurs,
BERGER-LEVRAULT & C**.
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ci-après du Voyage en France, au prix de 3 fr. 50 c. bro
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20e SÉRIE
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22^ SÉRIE ,
23e SÉRIE
24e SÉRIE
2')C SÉRIE ,
aGe SÉRIE ,
27^ SÉRIE
28e SÉRIE ,
TOTAL des volumes
NOMBRE
d'eiem-
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3oe SÉRIE .
3ia SÉRIE ,
32e SÉRIE .
33e SÉRIE .
34e SÉRIE .
3V SÉRIE .
36e SÉRIE .
37e SÉRIE 1
38e SÉRIE .
39s SÉRIE ,
4oe SÉRIE .
4ie SÉRIE .
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La Hongrie économique, par Guillaume Vautier. 1898. Volume in-8 de
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Le Commerce français en Orient. La Serbie économique et commer-
ciale, par René Millet, ancien ministre de France en Serbie. Avec le con-
cours du M" H. DE ToRCY. 1889. Un volume in-8, avec 2 cartes, broché. 5 fr.
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Les Iles de l'Atlantique : l. ff Arcaohon à ««««-Mfl
— II. D'Hoëdic à Oue$$ant.
Iles de la Manche et Bretagii<î.
Normandie.
La Région lyonnaise.
Le Rhône, du Léman k la mer.
lias-Dauphiné.
Les Alpes, du Léman à la Durance.
Forez, Vivarais, Tricastin, Comtat-Venaisaln.
Alpes de Provence et Alpes maritimes.
Région marseillaise et Côte d'Azur.
La Corse.
Charentcs et Plaine Poitevine.
De Vendée en Beauce.
Voxin, Picardie et pays de Caux.
Nord : I. t^aiulre et Littoral.
Nord : II. Artoiê. CambritU tt Hainaut.
Haute-Picardie, Cliampagne rémoise et Ardenncs<
Haute-Champagne; Basse-Lorrain©.
Plateau lorrain et Vosges.
PJainc Comtoise et Jura-
Haule-liourgogne.
Basse-Bourgogne et Senonal^.
B«>rry et Poitou oriental.
Bourbonnais et Haute-lMarcbe.
Basse-.M:iri'he et Limousin.
BordelJiis et Périgord.
Gascogne.
Agenais, Lomagne et lias-Quercy.
Haut-Quercy, Haute-Auvergne.
Basse-Auvergne.
SOUS PRESSE :
Velay, Vivarais méridional, Gévaudan.
Rouergue et Albigeois
••fiASS
Cévennes méridionale
Golfe du Lion.
Haut-Languedoc.
EN PRÉPARATION :
Pyrénées (Partie orientale). — (Départemente des Pyrénées-Orientales^Aude, Ariôgc
Pyréni'es (l'.arîie occidentale).
Ji. PiU'is (^; 1 : ^ ■■ ; .■ ■ .-.
(Uéparlements des Hautes et Basses-Pyrénées )
^î'iwXh, r? 'r-fi^i^i^ !-^£-^ ;/- 'c-^^Tii